Psychotraumatisme et réanimation

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PSYCHOTRAUMATISME ET RÉANIMATION
P. Louville
Service de psychiatrie universitaire, Hôpital Corentin Celton, 92133 Issy-les-Moulineaux, France
INTRODUCTION
Les syndromes psychotraumatiques sont définis comme les conséquences psychopathologiques de l’exposition à un ou plusieurs événements entraînant une menace
réelle ou perçue par un sujet pour sa propre vie ou son intégrité physique, ou pour celles
d’une personne proche, physiquement ou sentimentalement. La réaction aiguë de stress
face à un événement traumatogène est associée à une détresse particulièrement intense
(sentiments de peur, de perte de contrôle ou d’horreur). Des symptômes de dissociation
péri traumatique (déréalisation, désorientation, sentiment de détachement par rapport
à l’environnement, activité automatique) peuvent être rapportés par les patients dès
les premières minutes après la confrontation à l’événement et se poursuivre pendant la
période post-immédiate. De nombreux troubles psychiques peuvent succéder aux événements traumatiques [1]. Les plus fréquents sont probablement les états dépressifs et
les abus de substance (alcool, psychotropes, drogues). Les troubles de l’adaptation et les
pathologies anxieuses, notamment l’état de stress post-traumatique, mais aussi le trouble
panique, les phobies ou l’anxiété généralisée sont aussi des conséquences fréquentes de
la confrontation aux événements traumatiques. Des manifestations psychosomatiques,
des douleurs chroniques, des conduites suicidaires ou des troubles de la personnalité sont
aussi fréquemment rencontrés dans les suites de psychotraumatismes uniques ou répétés
(maltraitance, abus notamment pendant l’enfance).
1. L’ÉTAT DE STRESS POST-TRAUMATIQUE (ESPT)
1.1. CLINIQUE
L’état de stress post-traumatique (posttraumatic stress disorder - PTSD - dans la classification diagnostique nord-américaine - DSM-IV) est un trouble psychique complexe,
organisé et durable, qui peut entraîner un lourd handicap fonctionnel. L’ESPT est différent
des réactions immédiates (de stress) et post-immédiates succédant à l’événement traumatogène, et son expression clinique est variable et fluctuante au cours du temps [2].
L’ESPT se caractérise par le syndrome de répétition : il peut s’agir à l’état de veille
de reviviscences quasi-hallucinatoires de l’événement, de souvenirs imposés, de rumi-
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nations mentales, d’impressions que l’événement va se reproduire, accompagnés d’une
détresse émotionnelle intense, survenant spontanément ou lors de la confrontation à des
stimulus évoquant le psychotraumatisme, ou, pendant le sommeil, de rêves angoissants
reproduisant de façon très réaliste l’expérience traumatique. Il peut exister en même
temps une amnésie dissociative empêchant de se remémorer une partie, voire la totalité
de l’événement traumatogène. La confrontation à des stimulus associés au psychotraumatisme peut aussi déclencher de façon répétée une angoisse aiguë.
Au syndrome de répétition peuvent être associés, avec une intensité variable :
• Un évitement phobique des situations pouvant rappeler l’événement traumatogène,
pouvant aller jusqu’à des comportements de fuite.
• Une perte d’intérêt pour des activités auparavant motivantes et investies.
• Une incapacité à communiquer entraînant un désinvestissement des relations interpersonnelles.
• Un émoussement du ressenti et de l’expression des émotions.
• Une perte de l’anticipation positive de l’avenir.
• Des troubles de la concentration et de la mémoire perturbant la vie quotidienne.
• Une irritabilité pouvant conduire à des colères explosives.
• Un état d’alerte permanent avec perte du sentiment de sécurité, se traduisant notamment
par une réaction de sursaut exagérée.
• Une insomnie d’endormissement ou des éveils nocturnes répétés.
Après plusieurs années d’évolution, on peut voir apparaître une véritable réorganisation morbide de la personnalité, définie par la CIM-10 comme associant une attitude
hostile et méfiante, un retrait social, des sentiments dépressifs de vide ou de perte d’espoir,
une dépendance accrue à autrui, une sensation permanente d’être sous tension ou de se
sentir menacé, et une impression de ne plus être soi-même.
1.2. ÉTIOPATHOGÉNIE
L’exposition à un événement traumatogène est une condition nécessaire mais non
suffisante au développement d’un syndrome psychotraumatique. En dehors de la nature
et de l’intensité de l’événement, objectivables, il semble que ce soit le retentissement
personnel de cet événement sur un individu donné, plus ou moins vulnérable du fait de sa
personnalité préexistante ou d’autres circonstances péritraumatiques, qui va entraîner ou
non le développement d’un syndrome psychotraumatique. Les sentiments d’impuissance
ou de détresse ressentis au moment de l’événement, ainsi que le sentiment de culpabilité
(syndrome du survivant) que des personnes éprouvent après l’événement peuvent favoriser
l’apparition d’un syndrome psychotraumatique.
Il semble par ailleurs que les individus qui développent un ESPT aient une réponse de
stress perturbée, avec une insuffisance de production du cortisol dans les suites immédiates
d’un événement traumatogène. L’absence de production de cortisol serait en relation avec
une réponse exagérée des catécholamines et des neuropeptides, eux-mêmes à l’origine
des processus de mémorisation anormale de l’événement traumatogène (syndrome de
répétition du souvenir traumatique et/ou amnésie dissociative) et du maintien d’une
hypervigilance [3]. Par ailleurs, le risque de survenue d’un stress post-traumatique après
un événement est augmenté par l’existence de traumatismes antérieurs et la réponse de
stress apparaît aussi anormale en cas d’antécédents de traumatisme.
Enfin, les études neurobiologiques montrent que l’ESPT est associé à des altérations neurobiologiques caractéristiques (sensibilisation de différents neuromédiateurs),
différentes de celles retrouvées dans les études sur le stress chronique (habituation et
atténuation des réponses). Une hyperactivité neurovégétative ainsi que des anomalies
architecturales du sommeil ont également été retrouvées chez des patients souffrant
d’ESPT, suggérant des mécanismes pathogéniques comparables à ceux retrouvés dans
le trouble panique ou les dépressions majeures.
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1.3. ÉPIDÉMIOLOGIE
La prévalence sur la vie entière de l’ESPT est estimée autour de 6 % pour les
hommes et 12 % pour les femmes. Les femmes ont en effet deux fois plus de risques
que les hommes de développer un syndrome psychotraumatique, quel que soit le type
d’événement traumatogène.
En général, près d’un quart des sujets exposés vont développer un ESPT. Le risque
de développer un ESPT varie selon le type d’événement, le risque relatif le plus élevé
concernant les agressions individuelles, et notamment les viols, après lesquels on retrouve
de 50 à 70 % de syndromes psychotraumatiques. Parmi les autres événements risquant
fréquemment d’entraîner un ESPT, on retrouve le fait d’être victime d’un accident grave,
ou le fait d’être témoin d’un événement durant lequel des individus ont pu mourir ou
être gravement blessés. Avoir connaissance de façon brutale et inattendue du décès d’un
proche (deuil traumatique) ou se voir annoncer un diagnostic de maladie engageant le
pronostic vital (cancer, infection par le VIH) sont aussi considérés comme des événements traumatogènes.
Les études de comorbidité montrent que plus de la moitié des ESPT chroniques remplissent les critères d’un autre trouble mental, notamment d’un autre trouble anxieux ou
d’un état dépressif, sans que l’on puisse généralement déterminer si ces états comorbides
préexistaient au psychotraumatisme, dont ils auraient alors été des facteurs favorisants,
ou bien s’ils sont apparus parallèlement à l’ESPT.
2. EVALUATION DU PSYCHOTRAUMATISME
Il existe de nombreux instruments d’évaluation standardisée de l’ESPT [4]. Quelquesuns d’entre eux ont été traduits et validés en français. L’utilisation de ces instruments
permet de faire le diagnostic d’ESPT et des troubles associés, ainsi que d’en évaluer la
sévérité, permettant d’apprécier au cours du temps l’efficacité des thérapeutiques. Parmi
les entretiens structurés, dont la passation nécessite une formation particulière du cotateur,
on peut citer le PTSD-Interview et la Clinician Administered PTSD Scale (CAPS). Ces
deux hétéro-questionnaires ont été traduits et validés en français. Le Structured Clinical
Interview for DSM (SCID) est un questionnaire diagnostique dont l’un des modules
évalue l’ESPT, mais sans mesure de l’intensité.
Parmi les auto-questionnaires, l’Impact of Event Scale d’Horowitz (IES) est un des
instruments les plus anciennement utilisés dans les études sur le psychotraumatisme.
Elle permet d’évaluer l’intensité des symptômes de reviviscence et d’évitement. Sa
version révisée (IES-R) qui comporte 22 items, validée en français, mesure en plus les
symptômes d’activation neurovégétative. La Mississipi Scale for combat-related PTSD,
qui comporte 35 items, et le questionnaire de stress post-traumatique (QSPT), adaptation
française du PTSD-Interview sont deux autres exemples d’auto-questionnaires spécifiques
du stress post-traumatique.
Il est aussi intéressant de rechercher les symptômes de dissociation péritraumatique,
qui sont un bon prédicteur de la survenue d’un ESPT, en utilisant le questionnaire sur
les expériences de dissociation péritraumatique (QEDP).
Il est recommandé d’évaluer en même temps que l’ESPT les troubles anxieux et dépressifs qui lui sont fréquemment associés. Parmi les échelles habituellement utilisées,
on peut citer le General Health Questionnaire (GHQ), le State-Trait Anxiety Inventory
(STAI) et le Beck Depression Inventory (BDI).
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3. SYNDROMES PSYCHOTRAUMATIQUES ET RÉANIMATION
Le séjour en unité de réanimation est source de stress et parfois de psychotraumatisme
pour les patients. L’environnement en réanimation est perçu comme hostile, inquiétant,
déshumanisé [5]. Le bruit permanent, avec souvent des intensités sonores trop élevées,
et les modifications du rythme nycthéméral, notamment dans les unités sans fenêtres,
ont un retentissement sur la durée et la qualité du sommeil des patients. Les patients
ressentent parfois des douleurs importantes, notamment lors de certains prélèvements
ou lors de manœuvres telles qu’une aspiration bronchique. Ces douleurs sont vécues
dans un contexte d’impuissance et quelquefois d’incompréhension quand des thérapeutiques parfois agressives sont insuffisamment expliquées. Selon Novaes et al. [6], les
trois principaux stresseurs désignés par des personnes hospitalisées en soins intensifs,
ainsi que par leurs proches et par le personnel hospitalier, sont la douleur, le manque de
sommeil et l’intubation.
Le patient hospitalisé en réanimation éprouve souvent la peur de mourir dans cette
situation critique, notamment lorsqu’il doit subir des manœuvres de réanimation lourdes, ou bien il peut assister à la mort d’autres patients hospitalisés, souvent après des
manœuvres de réanimation qui vont apparaître alors d’autant plus effrayantes qu’elles
auront été inutiles.
Certains moments de l’hospitalisation sont ainsi vécus avec une peur intense, une
angoisse anticipatrice d’un pronostic vital menacé et un sentiment d’impuissance et
d’absence de contrôle sur sa situation. Il s’agit bien là des conditions pour que puisse
apparaître un syndrome psychotraumatique.
Les patients hospitalisés en réanimation peuvent subir un psychotraumatisme pendant
leur séjour en soins intensifs, mais aussi avant leur arrivée dans l’unité de réanimation.
Les personnes blessées, victimes d’agression ou d’accident grave (au cours duquel
un proche a pu mourir ou être gravement blessé), les personnes atteintes d’un trouble
cardio-vasculaire ou respiratoire aigu ont été confrontées à une menace vitale pouvant
entraîner la survenue d’un syndrome psychotraumatique, qui pourra se révéler pendant
l’hospitalisation en réanimation, favorisé par les nombreux stresseurs auxquels sont
confrontés les patients.
La prévalence de l’ESPT chez les patients hospitalisés en réanimation est variable
selon les études (de 14 % à plus de 50 %), mais elle reste le plus souvent élevée [7].
L’étude de Schelling et al. [8] a concerné 80 patients hospitalisés sur une période de
dix ans en soins intensifs pour un syndrome de détresse respiratoire aiguë. 27,5 % des
sujets présentaient un ESPT. La majorité d’entre eux ont rapporté plusieurs expériences
traumatisantes durant leur séjour en réanimation, et avaient une baisse de leur qualité de
vie liée à l’état de santé, notamment dans leur fonctionnement psychosocial.
L’étude de Scragg et al [9] a montré que, sur 80 patients interrogés par questionnaires
après leur sortie de réanimation, 38 % avaient des symptômes psychotraumatiques et
15 % avaient un ESPT complet, confirmé par un score élevé à l’Impact of Event Scale
(IES).
Cuthbertson et al. [10] ont évalué 78 patients trois mois après leur sortie de réanimation. 22 % d’entre eux ont obtenu un score à la Davidson Trauma Scale (DTS) compatible
avec un syndrome psychotraumatique et 14 % remplissaient la totalité des critères
diagnostiques d’un ESPT. Le score de psychotraumatisme était directement corrélé à la
durée de la ventilation assistée pendant le séjour en réanimation.
L’étude de Kapfhammer et al. [11] a inclus 46 patients hospitalisés en soins intensifs
pour un syndrome de détresse respiratoire aiguë et suivis en moyenne pendant huit ans.
A leur sortie de réanimation, 52 % des sujets présentaient des symptômes psychotrau-
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matiques, dont 43,5 % réunissaient les critères diagnostiques d’un ESPT. Au cours du
suivi 32,5 % des patients ont conservé des troubles psychotraumatiques. La qualité de
vie liée à l’état de santé était altérée chez les patients ayant un ESPT, qui étaient ceux
dont le séjour en réanimation avait été le plus long.
O’Reilly et al. [12] ont comparé neuf mois après leur sortie deux groupes de patients,
les uns ayant survécu à un arrêt cardiaque pendant leur hospitalisation, les autres ayant
présenté un infarctus du myocarde sans arrêt cardiaque. Utilisant le Structured Clinical
Interview for DSM (SCID), ils ont retrouvé 19 % d’ESPT chez les patients victimes d’un
arrêt cardiaque et 7 % chez les autres, cette différence n’étant pas significative.
L’étude de Gamper et al [13], portant sur 143 patients ayant eu un arrêt cardiaque et
évalués 45 mois en moyenne après leur réanimation, a retrouvé 27 % de sujets ayant un
score élevé à la Davidson Trauma Scale (DTS) et les critères diagnostiques d’un ESPT. Ces
patients présentant un ESPT avaient une qualité de vie significativement diminuée.
L’étude de Stoll et al. [14] a recherché la relation entre la qualité de vie et l’existence d’un ESPT chez 80 patients hospitalisés en soins intensifs après une intervention
de chirurgie cardiaque. 19 % des sujets présentaient un ESPT, avec un retentissement
significatif sur leur fonctionnement psychosocial et leur qualité de vie.
Schelling et al. [15] ont étudié la relation entre la qualité de vie et l’existence d’un
syndrome psychotraumatique chez 148 patients hospitalisés en réanimation après une
intervention de chirurgie cardiaque. Six mois après l’intervention, 18 % des sujets
présentaient un ESPT (avec des souvenirs traumatiques de leur séjour en réanimation)
et une baisse de leur qualité de vie liée à l’état de santé mentale.
Utilisant la Clinician Administered PTSD Scale (CAPS), Schnyder et al. [16] ont
évalué sur un an l’incidence de l’ESPT chez 106 patients hospitalisés en réanimation
chirurgicale traumatologique après des accidents graves. Moins de deux semaines après
leur accident, un quart des sujets présentaient un syndrome psychotraumatique, dont 4,7 %
avaient tous les critères symptomatiques de l’ESPT. Un an plus tard, 2 % des patients
avaient un ESPT et 12,3% présentaient un ESPT subsyndromique.
Les principaux facteurs prédictifs d’un syndrome psychotraumatique retrouvés dans
ces études sont un jeune âge, une souffrance psychique préexistant à l’événement traumatique, et l’apparition précoce d’un syndrome de répétition.
4. PRISE EN CHARGE PSYCHIATRIQUE DU PATIENT EN RÉANIMATION
4.1. INTERVENTIONS PRÉVENTIVES
Le patient venant d’être admis en réanimation doit d’abord être médicalement stabilisé,
ce qui nécessite des manœuvres quelquefois agressives mais indispensables. Dans un
second temps, il convient d’accorder de l’attention à la gestion des problèmes psychologiques du patient. La prise en charge de la douleur est de la plus grande importance,
car le patient qui souffre - et qui a peur - n’est pas réceptif aux tentatives d’intervention
psychologique. Le patient réceptif doit être informé de son état car il peut surévaluer
la gravité de sa situation et être envahi par la peur de mourir rapidement. Le personnel
doit expliquer le but des gestes de réanimation et des examens pratiqués. La prise en
charge doit permettre de ménager des plages de sommeil suffisamment longues. Enfin,
le soutien social, facteur protecteur de la survenue d’un syndrome psychotraumatique,
doit être constant, que ce soit par l’équipe de la réanimation ou par les proches du patient
dont la présence auprès de lui sera facilitée [17].
On préconise, dans les jours qui suivent l’exposition à un événement traumatogène,
de tenter de prévenir l’apparition d’un syndrome psychotraumatique par le debriefing
psychologique. Le debriefing est une intervention qui vise, dans un environnement sécu-
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risant, à permettre aux sujets de verbaliser leur vécu de l’événement, non seulement en ce
qui concerne les faits, mais surtout en mettant en mots les pensées et les émotions extrêmes qu’ils ont éprouvées au moment critique et immédiatement après celui-ci. Appliqué
par des thérapeutes expérimentés, le debriefing apporte le plus souvent une diminution
importante des symptômes anxio-dépressifs post-immédiats. Il a aussi comme objectif
de prévenir ou de limiter l’intensité des troubles psychotraumatiques ultérieurs.
4.2. PSYCHOTHÉRAPIES
La prise en charge psychothérapique sera adaptée à chaque patient et à chacune
des situations traumatiques en cause. Dans de nombreux cas, des techniques utilisant
l’évocation émotionnelle du psychotraumatisme auront pour but de faire revivre par le
sujet l’expérience douloureuse, accompagnée de la charge émotionnelle initiale, afin
qu’il puisse la maîtriser par une mise en mots et restaurer ses défenses débordées par le
psychotraumatisme. Plus tardivement dans l’évolution du trouble, les psychothérapies
d’inspiration analytique peuvent être proposées. Il est important d’impliquer les proches,
informés des conséquences relationnelles que peut avoir un trouble psychotraumatique,
dans un soutien compréhensif des patients.
Plusieurs méthodes cognitivo-comportementales sont utilisées et ont été validées
dans le traitement de l’ESPT. Elles s’appuient sur des théories du conditionnement et
sur des modèles cognitifs de sélection préférentielle des signaux de danger. Elles sont
particulièrement indiquées dans les syndromes psychotraumatiques avec anxiété ou
manifestations phobiques prédominantes. La désensibilisation systématique est basée
sur l’exposition directe ou en imagination aux stimuli anxiogènes, de même que la
désensibilisation-reprogrammation par les mouvements oculaires (EMDR). Les autres
techniques utilisées sont l’inoculation du stress, la gestion des stress et la relaxation. La
thérapie cognitive vise à intervenir sur les postulats dysfonctionnels qui surviennent à la
suite de l’événement traumatogène, tels que la culpabilité, l’illusion d’un monde juste,
stable et toujours sécurisant, ou la nécessité de la vengeance. La thérapie cognitive a
comme objectif de favoriser l’acceptation de la signification de l’expérience traumatique
afin de redonner au sujet une lecture du monde lui permettant de retrouver un sentiment
raisonnable de sécurité et de sérénité.
4.3. CHIMIOTHÉRAPIE
Les médicaments qui ont fait la preuve d’un effet sur les ESPT sont essentiellement
les antidépresseurs, à savoir les imipraminiques, les IMAO, et les inhibiteurs sélectifs
de la recapture de la sérotonine. Actuellement, il semble préférable, face à un ESPT,
d’utiliser en première intention un inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine. La
sertraline et la paroxétine ont récemment obtenu une indication dans les ESPT auprès
des autorités sanitaires des USA.
Les benzodiazépines n’ont pas fait la preuve de leur utilité dans les ESPT chroniques.
Leur utilisation devrait être réservée, avec prudence, à la période qui suit immédiatement
le psychotraumatisme, notamment pour leur effet hypnotique permettant d’améliorer la
qualité du sommeil pendant la période post-immédiate.
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