COMMERCE INTERNATIONAL N°82 - FÉVRIER 2012
124
itulaire d’un MBA de Columbia,
South Carolina, John-Michel T.
Huss, 47 ans, a commencé sa car-
rière dans l’industrie pharmaceu-
tique en 1990. Après avoir tra-
vaillé pendant six ans chez Merck & Co, trois ans
chez Roche et onze ans chez Sanofi à Berlin,
Toronto, Montréal, Genève puis Paris, il est devenu
PDG de Theratechnologies le 1er décembre 2010.
Commerce International : Comment est née la
société Theratechnologies ?
John-Michel T. Huss : « Theratechnologies a été
fondée à Montréal il y a 18 ans pour développer ce qui
est aujourd’hui notre produit phare : la tésamoréline,
un peptide (une molécule, ndlr) de 44 acides aminés, analogue
synthétique de l’hormone naturelle. Notre produit se présente sous
la forme d’une injection sous-cutanée administrée quotidiennement
par le patient lui-même. La tésamoréline agit au niveau de la glande
pituitaire située au milieu du cerveau, responsable de la libération
des hormones de croissance. »
En quoi la tésamoréline est-elle utile ?
J. -M. T. H. : « Avec l’âge, la production endogène d’hormones
de croissance diminue. Mais les hormones de croissance ont deux
bénéfices très clairs : elles ont un effet lipolytique, c’est-à-dire qu’elles
aident à faire fondre les graisses viscérales, et un effet anabolique,
elles augmentent la masse musculaire. Pour les patients en surcharge
pondérale ou qui perdent de la masse musculaire, cette nouvelle classe
de médicaments constitue donc un réel espoir. »
Comment a-t-elle été découverte et comment la commerciali-
sez-vous ?
J. -M. T. H. : « L’histoire de cette molécule est fascinante ! C’est le pro-
fesseur Roger Guillemin qui a découvert les neuropeptides, travail
pour lequel il fût récompensé du prix Nobel en 1977. Un de ses
“élèves”, le professeur Paul Brazeau, a ensuite découvert le fameux
facteur de libération des hormones de croissance. Finalement, nous
avons, avec lui, synthétisé la tésamoréline. Theratech-
nologies l’a développée et elle a été approuvée aux
États-Unis par la Food and Drug Administration
(FDA) en novembre 2010. Dans ce pays, c’est
EMD Serono (filiale américaine du suisse Merck
Serono, elle-même une filiale du groupe allemand
Merck KGaA), qui est notre partenaire détenteur des
droits de commercialisation de la molécule. Nos autres
partenaires commerciaux sont Grupo Ferrer en Eu-
rope et Sanofi en Amérique latine, en Afrique et
au Moyen-Orient. »
Comment a été prouvée l’efficacité de la tésamo-
réline ?
J. -M. T. H. : « Nous avons d’ores et déjà apporté
la preuve de l’efficacité de l’hormone pour son effet
lipolytique sur des patients porteurs du virus HIV et utilisant des anti-
rétroviraux (bithérapies, trithérapies…). Ainsi, environ 30 % d’en-
tre eux développent, suite au traitement avec les antirétroviraux,
un excès de graisse viscérale autour de l’abdomen. Dans les études
cliniques faites avec la tésamoréline, nous avons démontré la réduc-
tion de graisse au niveau de l’abdomen et avons donc reçu l’autorisa-
tion de mise sur le marché de notre produit par la FDA. L’Egrifta
(nom commercial de la tésamoréline) a été lancé au mois de janvier
de l’année dernière. Depuis, nous avons soumis le dossier aux autori-
tés canadiennes, européennes (juin), israéliennes (juillet), brési-
liennes (août), argentines (septembre) et mexicaines (octobre). Nos
prochains marchés seront la Colombie et le Venezuela dès le premier
trimestre de cette année. »
Quels sont vos prochains projets de développement ?
J. -M. T. H. : « Nous avons synthétisé cette année 250 peptides de la
même classe afin de trouver un successeur à l’Egrifta. Nous souhai-
tons développer et commercialiser un jour ce produit sous forme non
injectable, plus propice au traitement chronique. Si nous y parvenons,
ceci nous permettra de faire des études cliniques dans un grand nombre
d’indications potentielles, tant du côté lipolytique qu’anabolique. » •
De plus amples informations sont disponibles sur le site Internet : www.teratech.com.
Après la commercialisation de la tésamoréline aux
États-Unis en janvier 2011, Theratechnologies espère
que la molécule Egrifta sera commercialisée en Europe
et en Amérique latine en 2012. Entretien avec John-
Michel T. Huss, PDG de Theratechnologies.
THERATECHNOLOGIES
Une molécule pour
les patients HIV +
T
Propos recueillis par Interviewed by Alexandre T. Analis
STRATÉGIES STRATEGIES
Chiffres clés
•Fondée en 1993
•Entreprise privée par
actions depuis 1997, cotée
au Nasdaq (THER) et à la
bourse de Toronto (TH)
•30 collaborateurs
•300 millions de dollars
canadiens (environ
219 millions d’euros)
investis depuis la création
•Investissement annuel
à partir de 2012 : environ
15 millions de dollars
canadiens
(10,9 millions d’euros)
Source : Theratechnologies –
décembre 2011