Nouvelles-CATIE
Des bulletins de nouvelles concis en matière de VIH et d’hépatite C de CATIE.
L'élusif vaccin antisida
4 mars 2008
Au cours des 25 années écoulées depuis lacouverte du VIH, les chercheurs ont fait beaucoup de progrès dans la
lutte contre le sida. Une avancée notoire fut la mise au point des médicaments faisant partie des multithérapies
antirétrovirales. Ces traitements contribuent à prolonger la survie des personnes vivant avec le VIH qui y ont accès
et qui réussissent à resterles à leur traitement.
Même si la crise du sida est largement consirée comme un problème touchant les pays à faible et à moyen revenu,
particulièrement en Afrique subsaharienne, le VIH ne cesse pour autant de se propager dans les pays riches
d’Europe occidentale et d’Amérique du Nord. Comme c’est le cas de plusieurs maladies infectieuses, un vaccin
capable de prévenir la transmission du VIH serait ial. D’où les eortsplos par les chercheurs depuis le tout
but de l’épimie pour créer un vaccin.
Cependant, malgré de nombreux essais cliniques et la mise à l’épreuve d’une trentaine de vaccins anti-VIH
potentiels, tous ont échoué. Comme la conception, la fabrication et l’évaluation d’un vaccin exrimental exigent
plusieurs années d’eort et de travail, la multiplication des échecs est décourageante.
Mis au dépar la complexi
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles il est tellement dicile de créer un vaccin contre le VIH. En premier lieu, ce
virus est comme nul autre dans la mesure où il s’attaque à l’ensemble desfenses du corps contre les germes : le
sysme immunitaire. De plus, ce que nous appelons le sysme immunitaire est en réali un réseau complexe
d’organes, de tissus et de cellules répandus partout dans le corps. Personne ne comprend intégralement le
fonctionnement de ce réseau. Quand le VIH se met de la partie, on a tous les ingrédients d’un gros casse-te.
Les nombreux échecs qui jonchent le chemin menant à lacouverte d’un vaccin anti-VIH devraient quand même
servir de point depart aux immunologistes. Ces derniers pourraient examiner et repenser en profondeur les
stragies passées et actuelles en matière de vaccins. Il est peut-être temps qu’ils revoient des recherches qu’ils
pourraient avoir oubliées, néglies ou esquivées dans la course au vaccin antisida. Un tel exercice pourrait dégager
des indices d’une réponse immunitaire ecace contre le VIH, ce qui encouragerait des recherches nouvelles dans ce
domaine.
Nous résumons ci-dessous quelquess que les concepteurs de vaccins anti-VIH doivent relever, ainsi que des
pistes de recherche qui pourraient leur être utiles.
Avec les cellules T, le
timing
est tout
Dans les cas d’infection au VIH ou au VIS (virus d’immunocience simienne), les cellules T CD8+ principales
cellules anti-infectieuses du sysme immunitaire—sont capables d’attaquer les cellules produisant du virus et de
réduire la quanti de virus dans le sang. Toutefois, ces cellules sont incapables d’empêcher le VIH (ou le VIS) de
passer des muqueuses dans les ganglions et tissus lymphatiques qui tapissent l’intestin, lieu de résidence de la
plupart des cellules T.
Malgré cette limitation, les concepteurs de vaccins ont mis l’accent sur la stimulation des cellules CD8+ dans l’espoir
qu’elles répondent à l’invasion virale. Cependant, plusieurs équipes de recherche ont découvert que le système
immunitaire mettait trop de temps, soit deux à trois semaines, à mobiliser des cellules CD8+ assez nombreuses
pour maîtriser le VIH. De plus, les quelques cellules qui sont prêtes à combattre le VIH ont une capaci de lutte
limie. Ainsi, les vaccins quipendent des cellules CD8+ pour
prévenir
l’infection par le VIH pourraient être
inecaces, comme les exriences de laboratoire et sur les singes le laissent croire. D’autres équipes de recherche
ont tâché d’inciter les vaccins anti-VIH à stimuler les anticorps qui attaquent et neutralisent le VIH.
Les anticorps—trop peu, trop tard?
Les résultats d’exriences mees sur des singeslirément infeces par le SIV laissent croire que tout vaccin
fondé sur la stimulation des anticorps aurait besoin declencher une production massive d’anticorps par le
sysme immunitaire. Il faudrait que cette production d’anticorps ait lieu rapidement, soit dans les six heures suivant
l’exposition au SIV, pour être ecace. De plus, il faudrait que le vaccin soit capable de maintenir un taux éle
d’anticorps neutralisants pour que l’infection au VIS ou au VIH soit maîtrisée.
La production d’anticorps et de cellules CD8+ ayant la facul de s’attaquer à un germe scique, tel le VIH,
pend d’une partie du système immunitaire appelée immuni adaptative. Ce genre d’immuni met du temps à
atteindre un niveau suffisamment éle pour maîtriser une infection. Ainsi, il est peu probable que les vaccins anti-
VIH fondés sur la stimulation des anticorps soient capables d’étouffer rapidement le VIH.
Que faire donc?
Toute réponse immunitaire iale serait déclenchée dans l’espace de quelques secondes ou minutes après
l’exposition au VIH. Nous savons que le sysme immunitaire est capable de réagir rapidement; c’est ce qui
s’observe chez les gens qui ont uneaction allergique rapide à certains aliments ou au venin d’un insecte. Si un
vaccin anti-VIH était capable d’exploiter une telle réponse immunitaire, ça pourrait être utile. Toutefois, jusqu’à
présent, les concepteurs de vaccins ne se sont pas concentrés sur ce genre d’approche.
Un système de défense ancien
Une partie du système immunitaire s’est développée il y a plusieurs millions d’années. Il s’agit de l’immuni innée. Ce
sysme defense repose sur la reconnaissance de particularis structurelles dans les germes qui les font
paraître diérents des cellules du corps. Cela permet au sysme immunitaire de répondre rapidement aux germes
envahisseurs.
Analyser en profondeur les complexis de l’immuni innéepasse la pore du présent article. Cependant, on
peut dire que ce type d’immunipend partiellement des cellules tueuses naturelles, des macrophages et des
cellules dendritiques, entre autres. Jusqu’à présent, la plupart des recherches sur le VIH ont mis l’accent sur les
cellules T et les cellules B. Il est clair que les chercheurs devront rectier le tir s’ils esrent exploiter le pouvoir de
l’immuni innée.
Mystère des muqueuses
Habituellement, le premier contact du VIH avec le sysme immunitaire a lieu dans les tissus humides des
muqueuses, surtout celles de l’anus, du pénis et du vagin. L’immuni muqueuse s’est développée pour proger
ces sites. Cette dernière se comporte quelque peu diéremment des composantes du sysme immunitaire dans le
reste du corps. Des recherches visant à élucider l’interaction entre l’immuni muqueuse et le VIH sont donc
cruciales. Malheureusement, personne n’aime se faire prélever des échantillons de tissus muqueux auxns de la
recherche, donc la découverte des mysres que rele cette partie du corps progresse lentement.
Exposé mais séronégatif
Des chercheurs œuvrant dans des laboratoires de Winnipeg, Nairobi, Milan, Toronto et Stockholm ont trouvé qu’un
très faible nombre de personnes ayant subi une exposition sexuelle au VIH s’étaient débrouillées pour demeurer
séronégatives. Les chercheurs ont cependant décelé des traces de l’exposition au VIH dans le sysme immunitaire
de ces personnes, particulièrement au niveau des muqueuses. Des recherches sur lescanismes qui auraient
permis à ces personnes d’esquiver le VIH pourraient s’arer utiles à la conception d’un vaccin.
Approche critiquée
Les National Institutes of Health aricains (NIH - Bethesda, Maryland) se regroupent pour former le plus grand
centre denancement et de recherche biomédicale du monde. Les NIH dépensent environ 600 $ millions chaque
année pour la recherche d’un vaccin anti-VIH. Environ le tiers de cet argent contribue à la mise au point et à
l’évaluation de vaccins potentiels.
Lors de la récente Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI), tenue du 3 au 6 février 2008
à Boston, les recherches sur les vaccins anti-VIH ont é examies à la loupe. Le Dr Ron Desrosiers, chef du New
England Primate Research Center, a souligné les problèmes liés à l’approche de recherche préconisée actuellement
par les NIH, affirmant qu’ « aucun [vaccin anti-VIH] en voie developpement à l’heure actuelle n’a une chance
raisonnable de réussir. »
Le Dr Desrosiers ne fut pas le seul chercheur chevronné à contester l’approche des NIH. Le Dr Neal Nathason,
expert en virologie et ancien chef du bureau de recherche sur le sida des NIH, a expri des préoccupations
semblables à la CROI. D’après les deux scientiques, au lieu de poursuivre des essais sur des vaccins qui sont
probablement voués à l’échec, on devrait réaliser plus d’études pour comprendre le sysme immunitaire et son
interaction avec le VIH. (Nos lecteurs devraient noter qu’aucune équipe de recherche n’atermi quelle réponse
immunitaire iale serait nécessaire pour proger le corps contre l’infection par le VIH.)
Réunion au mois de mars
En janvier 2008, le Dr Desrosiers et 13 autres chercheurs ont signé une lettre destie au Dr Anthony Fauci, chef
des National Institutes of Allergy and Infectious Diseases (NIAID, volet des NIH). La lettre articulait leurs
préoccupations concernant les prioris de recherche des NIH en ce qui a trait aux vaccins anti-VIH. En réponse à
cette lettre, les NIH tiendront une réunion d’une journée le 25 mars 2008, à Bethesda, pour examiner la pore et
l’équilibre des leurs activis de recherche en matière de vaccins anti-VIH. Les yeux de la plate seront donc ris
sur les NIAID pour voir si les recherches américaines dans ce domaine peuvent être sauvées.
Ne jamais baisser les bras
Il reste beaucoup de travail à faire pour comprendre le sysme immunitaire et découvrir des façons de le proger
contre le VIH. Étant donné la complexité de lache, de nombreuses années d’eort seront nécessaires pour y
parvenir. À moins d’une percée importante, il est probable qu’un vaccin antisida ecace se fera attendre pendant
unecennie encore, sinon plus longtemps. Le Dr Anthony Fauci le disait ainsi dans un rapport récent publié dans le
New England Journal of Medicine
:
« La cruelleri, c’est que nous devons accepter la possibili qu’il y n’ait jamais de vaccin contre le VIH. Les gens
ont peur de le dire parce que cela donnerait l’impression que nous baissons les bras. C’est faux. Nous allons
poursuivre cette lutte avec autant d’agressivi et d’énergie que depuis toujours. Mais il y a la possibilitéclaire et
nitive—que ce soit le cas.”
Au Canada
Le gouvernement canadien s’est joint à la Fondation Bill et Melinda Gates pour créer un partenariat visant à renforcer
la contribution du Canada à la recherche d’un vaccin antisida. Ce partenariat porte le nom d’Initiative canadienne de
vaccin contre le VIH (ICVH). Il regroupe des minisres et des agences importants—Agence de la santé publique du
Canada, Santé Canada, Agence canadienne developpement international et Industrie Canada—ainsi que l’agence
de recherche canadienne par excellence, les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Pour en savoir plus
sur l’ICVH, visitez son site Web à l’adresse :
http://www.chvi-icvv.gc.ca/index-fra.html
Entre-temps…
Puisqu’il est probable qu’aucun vaccin ne verra le jour dans un proche avenir, la pandémie du VIH continuera de
suivre son cours, d’où l’importance de renforcer les recherches sur la prévention. Dans les pays à revenu éle, il
faut explorer, aliorer et évaluer sur le terrain toute une panoplie d’activis tenant compte des facteurs suivants :
messages sur le sécurisexe;
prévention et traitement despendances;
sensibilisation du public aux problèmes de santé mentale;
facilitation de l’accès aux traitements contre les maladies mentales;
réduction desfaits;
extension des programmes depistage du VIH;
prophylaxie post-exposition;
prophylaxie pré-exposition;
mise au point et évaluation des microbicides;
éducation à la prévention des infections transmises sexuellement;
mobilisation communautaire et renforcement des capacis.
—Sean R. Hosein
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Press release
15 February 2008.
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