U. L.P.- Faculté de Médecine Strasbourg - DCEM1 2004/ 2005 - Module 12B - Appareil Loco-Moteur
P. SIMON 17/09/03
SURVEILLANCE D’UN MALADE SOUS PLATRE
POINTS IMPORTANTS
Le respect des règles de confection des appareils plâtrés assure la prévention d’un grand nombre
de complications.
La surveillance d’un patient plâtré engage la responsabilité du médecin : les plaintes du patient
ne doivent pas être sous-estimées.
Tout plâtre mal supporté ou à l’origine de douleurs doit être immédiatement fendu. Si le
soulagement n’est pas immédiat, l’ablation du plâtre est la règle d’or à respecter, parce qu’elle
permet l’examen clinique complet, l’établissement du diagnostic et le traitement de la
complication.
Une douleur sous plâtre doit faire suspecter une phlébite, une infection, un syndrome des loges,
un déplacement secondaire.
La réalisation d’une immobilisation plâtrée est un acte médical. La surveillance d’un malade sous
plâtre obéit à des règles strictes, dont le non-respect engage lourdement la responsabilité du praticien.
Principes généraux de l’immobilisation plâtrée
1. Le plâtre
1.1. Selon les règles classiques (Boehler) :
- pour immobiliser une articulation, il faut immobiliser les segments sus et sous-jacents
- pour immobiliser un segment de membre, il faut immobiliser les articulations sus et sous-
jacentes
1.2. Les matériaux utilisés: jersey posé sur une peau propre, coton ou mousse synthétique de
protection, papier crêpe pour absorber l’eau et faciliter le déplâtrage, bandes plâtrées de
largeur adaptée. Les gahues doivent être retirées et tout pansement circulaire enlevé.
1.3. Les bandes sont appliquées sans serrer en passant en biais devant les plis de flexion. Le plâtre
doit être moulé sur les reliefs anatomiques avec la paume de la main et non avec les doigts. Il
doit être fendu sur toute sa longueur. Confectionné dans les règles de l’art, l’appareil plâtré est
confortable et indolore.
U. L.P.- Faculté de Médecine Strasbourg - DCEM1 2004/ 2005 - Module 12B - Appareil Loco-Moteur
P. SIMON 17/09/03
2. Consignes à donner au malade
Sa coopération est indispensable. Un certain nombre de consignes à respecter doivent lui avoir été
clairement expliquées :
respecter le temps de séchage, soit 24 à 48 h selon l’épaisseur du plâtre, avant d’exercer toute
sollicitation mécanique.
ne pas vernir le plâtre, ce qui empêcherait l’évaporation naturelle et entrainerait une
macération.
ne pas mouiller ou immerger le plâtre, ce qui le fragiliserait.
ne pas introduire de corps étranger sous le plâtre (aiguilles à tricoter…)
surélever le membre immobilisé, les premiers jours, pour réduire l’œdème.
effectuer des contractions isométriques régulières et mobiliser les articulations laissées libres,
pour prévenir l’amyotrophie et les complications thromboemboliques.
préciser au patient s’il peut poser le pied au sol (pour une immobilisation au membre inférieur)
et qu’il doit consulter au moindre signe anormal.
Principes généraux de surveillance
Tout malade sous plâtre doit être contrôlé par le médecin qui a confectionné le plâtre dans les
24-48 h qui suivent sa pose.
Que le plâtre soit fendu ou non, le patient doit être informé, de préférence devant témoins, de
la nécessité de consulter en urgence au moindre signe anormal. Le recours à un document
écrit, clair et intelligible, remis au moment de la confection du plâtre, est utile sinon
indispensable.
Un prurit, une sensation d’irritation ou de brulure peuvent apparaître les premiers jours et sont
le plus souvent transitoires.
Les signes d’alarme sont la douleur (plâtre bien fait + absence de complications = pas de
douleur), l’œdème et la cyanose des extrémités, plus rarement la pâleur et l’insensibilité,
l’odeur évoquant macération ou infection.
Il convient de ne jamais sous-estimer les plaintes du patient. Si celles-ci sont relatées par
téléphone, inviter le patient à consulter dans les plus brefs délais.
Tout plâtre mal supporté doit être fendu, écarté, bivalvé et, si cela ne suffit pas, enlevé.
Un contrôle radiologique doit être prescrit de façon systématique immédiatement après la
pose, et le plsu souvent à J2, J8, J21, J45.
U. L.P.- Faculté de Médecine Strasbourg - DCEM1 2004/ 2005 - Module 12B - Appareil Loco-Moteur
P. SIMON 17/09/03
Complications liées à un défaut de confection du plâtre
1. les compressions locales
1.1.les points de compression cutanée : la compression provoque une ischémie locale qui aboutit à
une nécrose, à un escarre sous plâtre si elle se prolonge.
Les reliefs anatomiques qui doivent être protégés sont nombreux : le menton et l’occiput
(minerve), les apophyses épineuses, les crêtes iliaques, le sacrum (corset, plâtre pelvi-
pédieux), les styloïdes radiale et cubitale (plâtre brachio-palmaire, antébrachio-palmaire), la
tubérosité tibiale antérieure, les malléoles (plâtre cruro-pédieux, botte plâtrée).
1.2. les plaies et irritations cutanées : elles sont dues au frottement sous un plâtre mal adapté. Elles
provoquent des douleurs localisées et peuvent s’infecter.
1.3. les compressions nerveuses : l’exemple le plus fréquent est celui du nerf fibulaire commun,
particulièrement vulnérable au col de la fibula. Le site doit être matelassé, protégé ; pour les
bottes plâtrées, le plâtre doit remonter au-dessus de la tête de la fibula et non la dégager, car le
nerf passe en dessous, au niveau du col et serait alors particulièrement exposé. La recherche de
signes de souffrance doit être systématique dans les heures qui suivent la pose du plâtre :
paresthésies, douleur localisée. Le nerf ulnaire est également menacé au niveau de la gouttière
épitrochléoolécranienne.
1.4. les compressions vasculaires : un plâtre trop serré provoque une pression circonférentielle
dangereuse. Elle peut être à l’origine de gêne au retour veineux, entraînant œdème et cyanose
des extrémités. On la prévient par la surélévation du membre immobilisé ; on la traite en
fendant le plâtre et en le surélevant. Au maximum la compression circulaire prolongée peut
être responsable de l’ischémie du membre avec douleur, pâleur, refroidissement, et abolition
des pouls distaux. Le creux de l’aisselle, la face antérieure du coude, le triangle de Scarpa, le
creux poplité ne doivent en aucun cas être comprimés. Il convient d’éviter tout pli du plâtre
dans ces zones de flexion articulaire, ce qui risquerait de compromettre la vascularisation
distale ou d’entraîner un œdème par compression veineuse.
2. troubles généraux
Un plâtre thoraco-brachial ou un appareil plâtré coude au corps peut provoquer une gêne
respiratoire. Ce type d’immobilisation est donc proscrite chez les insufffisants respiratoires, les
obèses, les patients porteurs de fractures de côtes.
U. L.P.- Faculté de Médecine Strasbourg - DCEM1 2004/ 2005 - Module 12B - Appareil Loco-Moteur
P. SIMON 17/09/03
Certains appareils plâtrés peuvent entrainer des signes d’intolérance gastrique, des nausées, des
vomissements. La confection des corsets ou des pelvi-pédieux doit comporter des aménagements
pour la dilatation épigastrique ou abdominale post-prandiale.
Complications locorégionales
Elles sont liées à l’affection causale, mais le plâtre les aggrave et les masque.
1. syndrome des loges
1.1. mécanisme : augmentation de la pression dans les loges musculaires inextensibles du fait de
l’œdème et de l’hématome post-traumatiques, entrainant une ischémie artériolaire ; ceci
conduit à l’ischémie nerveuse et à la nécrose musculaire suivie de rétraction tendineuse.
1.2. signes cliniques : douleur exagérée, inhabituelle, avec sensation de tension ; douleur à la
contraction volontaire mais surtout à la mise en tension passive des groupes musculaires
concernés ; paresthésies, anesthésie ou paralysie des extrémités.
1.3. le plâtre doit être enlevé, ce qui met en évidence la tension des loges musculaires augmentées
de volume. Si la régression des symptomes n’est pas rapidement obtenue le diagnostic est très
vraisemblable
1.4. la mesure des pressions à l’intérieur de la loge confirme le diagnostic mais ne doit pas retarder
le traitement.
1.5. l’aponévrotomie est le geste salvateur de décompression, seul capable d’éviter les séquelles.
La peau est laissée ouverte et sera refermée après quelques jours et la fonte de l’œdème.
1.6. si le tra itement est tardif, la nécrose musculaire est irréversible, à l’origine de rétractions
tendineuses et de déformations : griffe des orteils ( par rétraction des fléchisseurs à la jambe ),
ou flexion du poignet, hyperextension des métacarpo-phalangiennes et flexion des phalanges
réalisant le syndrome de Volkmann ( par rétraction des fléchisseurs des doigts à l’avant bras ).
2. complications thromboemboliques
2.1. le traitement préventif par héparine de bas poids moléculaire est systématique en cas
d’immobilisation plâtrée au membre inférieur, surtout si l’appui est interdit.
2.2. la phlébite sera suspectée sur la douleur, l’œdème, la cyanose des extrémités, l’état subfébrile,
la dissociation de la température et du pouls.
2.3. le plâtre doit être bivalvé, voire enlevé, pour permettre la réalisation de l’échodoppler
veineux.
2.4. le traitement curatif s’impose pour prévenir les complications emboliques. Une anxiété, un
point douloureux thoracique, une détresse respiratoire doivent conduire à l’angioscanner ou à
la scintigraphie pulmonaire à la recherche de l’embolie pulmonaire.
U. L.P.- Faculté de Médecine Strasbourg - DCEM1 2004/ 2005 - Module 12B - Appareil Loco-Moteur
P. SIMON 17/09/03
3. complications infectieuses
Une fracture ouverte ou une fracture ostéosynthésée peut se compliquer d’une infection de la plaie
cutanée, voire d’une ostéite aigue sur matériel d’ostéosynthèse. La souillure du plâtre, la douleur,
la fièvre sont des signes d’appel qui conduisent à l’ablation du plâtre et à l’examen de la cicatrice,
puis à des prélèvements bactériologiques , à la mise à plat de la plaie et à l’antibiothérapie si
nécessaire.
Situations particulières
Les plâtres immobilisant les fractures
Ils sont souvent réalisés sur deux couches de jersey, sans coton ni mousse, de façon à assurer un
moulage précis de la réduction. Les radiographies régulières permettent de surveiller l’absence de
déplacement secondaire et l’évolution de la consolidation.
Les appareillages fonctionnels selon Sarmiento
Ils permettent de laisser libres les articulations sus et sous-jacentes au segment fracturé et autorisent
une reprise de la fonction précoce (marche avec appui pour les fractures de jambe par exemple); leur
réalisation repose sur des règles précises, le moulage soigneux des loges musculaires et l’utilisation de
bandes plâtrées élastiques.
Les résines synthétiques
Elles sont de plus en plus utilisées du fait de leurs avantages par rapport au plâtre : faible poids,
résistance, mouillabilité. Leurs inconvénients doivent être connus : grande rigidité, faible
conformabilité, bords tranchants.
Initialement à base de fibre de verre, elles sont actuellement à base de polypropylène (parfaite
transparence à la radiographie, absence de problèmes respiratoires par libérations de particules à
l’ablation).
Leurs indications sont les immobilisations post-opératoires, ou le relais d’une premier plâtre dans les
traitements orthopédiques. Elles sont déconseillées comme première immobilisation.
1 / 5 100%