
Session 11 - 22
qui contraint le sujet à diminuer les tensions éprouvées dans un contexte d'oppression
(pratiques jugées dissonantes par exemple). Dans le cas du système marchand, le discours
publicitaire peut constituer, selon les schèmes des consommateurs une activation de cet état
motivationnel. Ainsi, la perception d'une forte dissonance peut déclencher les manifestations
de résistance. Ce troisième construit regroupe les formes de réponses oppositionnelles
spécifiques à chaque contexte déclencheur. Enfin, le quatrième construit, intitulé résistance
cumulée, désigne l'ensemble des cognitions et des émotions négatives sédimentées par le sujet
au cours des situations antérieures et vécues comme des moments de résistance.
Plus précisément, pour qu'il y ait résistance trois conditions sont nécessaires simultanément :
une force doit être exercée sur un sujet, elle doit être perçue et le sujet cherche à annihiler son
impact. Les représentations du sujet jouent un rôle prépondérant dans l'émergence du
processus de résistance. En effet, quand un stimulus heurte ses représentations, l'antagonisme
ainsi créé produit un contexte favorable à l'émergence de la résistance. Ram et Sheth (1989)
soulignent que la stabilité des représentations d’une personne intensifie l'antagonisme. La
dimension affective d'une situation peut également contribuer à l'irruption d'un conflit de
représentations notamment quand ce sont des émotions négatives qui sont éprouvées par le
consommateur vis-à-vis des stimuli (Bagozzi et Lee, 1999). Pour Kates et Belk (2001), la
résistance du consommateur est une résistance à la consommation (et non par la
consommation). Cette perspective de la résistance est plutôt individuelle. Mais des formes de
résistance plus communautaires sont décrites (Peñaloza et Price, 1993) telles que les groupes
contestataires réunis par des formes de contournement du marché (Cottet, Ferrandi et Lichtlé,
2010) ou des agissements plus offensifs, à l'instar des boycotts (Hemetsberger, 2006, Cottet,
Ferrandi et Lichtlé, 2010).
Dans leurs analyses, les auteurs retiennent souvent la partie visible de la résistance, en
l'occurrence ses manifestations sans qu'un consensus ne soit établi. Fournier (1998) suggère
qu'un continuum de comportements allant du spectre de l'évitement discret de certaines
marques à des formes d'actions engagées telles que le boycott, avec des formes médianes
comme la simplicité volontaire consistant à réduire, sans nécessité économique, son volume
de consommation (Cherrier, 2009). Pour Roux (2007), cette approche est à nuancer car seule
la dimension d'intensité structure ce continuum et aucune certitude n'est apportée pour le
justifier et aucun n'élément explicatif de l'origine de ces manifestations n'est proposé.
Dans le registre de l'intensité des manifestations, Hirschman (1970) propose également un
continuum mais où la première phase consiste à exprimer sa résistance auprès de l'entreprise
(Voice). La prise en compte de cette plainte laisse penser que la résistance sera éphémère. A
l'opposé, la posture du consommateur sera durable en ne manifestant pas son opposition mais
en cessant de consommer un produit ou les produits de la firme (Exit). Des réactions plus
viscérales peuvent conduire à des volontés de vengeance (Huefner et Hunt, 2000) ou à des
modes parallèles de consommation réduisant au maximum la dépendance au système
marchand (Hermann, 1993, Ritson et Dobscha, 1999).
1.1. La résistance à la publicité : délimitation du concept
L'application de la résistance au domaine de la publicité impose de préciser ses frontières avec
d'autres concepts proches du champ publicitaire. En effet, les réactions négatives induites par
les pratiques publicitaires (tactiques de persuasion, intensité des messages, émotions générées,
etc..) ont très tôt préoccupé les mondes académique et managérial.
Parmi ces concepts pouvant être reliés, soit comme antécédents, soit comme conséquences
supposées à la résistance à la publicité, la résistance à la persuasion, l'irritation, l'intrusion,
l'évitement, l'attitude négative vis-à-vis la publicité constituent des éléments majeurs à
intégrer dans l'identification de possibles divergences et/ou convergences.