Cours de Luc BAIWIR – Conservatoire – Master 2
«…aujourd’huimardi30aoûtàsixheures,danslasalleSharf,MontagneNotre‐Dame,
auralieuundernierconcert,maiscettefoisirrévocablementledernier.Dansceconcert
paraîtrontlapetitefille,quiestdanssadouzièmeannée,etlepetitgarçonquiestdanssa
septième.Nonseulementtousdeuxjouerontdesconcertossurleclavecinoulepiano–et
lapetitefillejoueralesmorceauxlesplusdifficilesdeplusgrandsmaîtres‐maisenoutre
lepetitgarçonexécuteraunconcertosurleviolon;ilaccompagneraaupianoles
symphonies;oncouvrirad’undrapleclavierdupianoetpar‐dessuscedrapl’enfant
joueraaussiparfaitementques’ilavaitlestouchesdevantlesyeux.Ilreconnaîtraaussi
sanslamoindreerreur,àdistance,touslessonsquel’onproduira,seulsouenaccords,
surunpianoousurtoutautreinstrumentimaginable,ycomprislescloches,desverres,
desboîtesàmusique,etc.Enfin,ilimproviseralibrement(aussilongtempsqu’onvoudra
l’entendre,etdanstouslestonsqu’onluiproposera(etmêmeslesplusdifficiles),non
seulementsurlepiano,maisencoresurunorgue,afindemontrerqu’ilcomprendaussila
manièredejouerdel’orgue,quiesttoutàfaitdifférentedelamanièredejouerdupiano.
Leprixd’entréeserad’unpetitthalerparpersonne.Onpeutseprocurerdesbilletsàl’
«AubergeduLiond’Or»
Lecasn’estpasesseulé.LepèredeLiszt(1811‐1886)utiliseradesprocédés
similairespourannoncerlaparticipationdesonfilsde14ansdansdesconcerts.Surles
tracesduprécédent,àLiège,vers1840,Nicolas‐JosephFranckreproduiralemêmestyle
d’annoncepouressayerdedévelopperlacarrièredevirtuosedesonfilsCésar(1822‐
1890).Plusfortencore,JohannvanBeethoven,lepère,rajeunissaitsonjeunefils
Ludwigde2anssurlesprogrammesetsurleséditionsdesespremièrespartitionsafin
depopulariserlesconcertsetlesrecettes.Suiteàcesmanœuvres,Beethoven(1770‐
1827)nesutd’ailleursjamaisexactementsonâge.
Ilestclairquelagenèsedumarketingmusicalentredansl’histoire.Des
nouveauxstylesapparaissent,desnouveauxgenresetsurtoutl’esthétiquevaexploser
tousazimutspourlaisserplaceàl’avènementdel’interprète‐compositeur.
Lecompositeurvadevoirassumerdenouvellesfonctions,nonseulementcelle
d’interprète,maisaussicellede«manager».L’époqueclassiqueau18°sièclenous
montrecettepousséeémergentedecompositeurscommeMozart,Beethovenaccédant
austatutd’interprètes.Leursœuvresnesontplusexécutées,ilfautaussilesjouersoi‐
même,remplirdessallesdespectacles,dessalons,desopéras.
Acesfins,denouvellesméthodescommercialesvontdeveniringénieuseset
s’avérerrentables.Lesartistesvontparticiperàcequel’onappelleaujourd’huila
techniquedu«showcase»,unesortedevitrinedeprésentationd’artistes,detalentset
d’œuvres.Rassemblésdansdessalonsoupetitessalles,lesinterprètesvontsesuccéder
enuneseulesoirée,parfoisplusieursheures,etexécuterunextraitd’unesonate,unair
d’opéra,unmouvementdeconcertoparfoisréduitavecquatuor,commelesconcertos
deChopin.Lebut,promouvoirunconcert,unopéra,l’interprètelui‐mêmeetsurtout
vendredesplacesou«pré‐vendre»desbillets.Cestylede«présentation‐concerts»va
sedévelopperaudébutdu19èmesiècle.Chopind’ailleurs,grâceaupianiste
Kalkbrenner,vapleinementprofiterdeces«showcases»lorsdesonarrivéeàParis.
Sonpremierconcertavecd’autresartistesbénéficieradebeaucoupdepromotionspar
invitationsdestinéesàdenombreusespersonnalités.Parmielles,sontprésentsFranz
LisztetFélixMendelssohn…Leconcertseradéficitairefinancièrementmaislesavis,les
critiques,lapressesaluerontlegéniedeChopinetlesportesduParismusical
s’ouvrirontàlui.Chopinvadédiersonpremierconcertopourpianoopus11à