En effet, la baisse actuelle du prix du pétrole sous les 30 dollars le baril
(contre 115 dollars 18 mois plus tôt !) sous la pression de l’Arabie
Saoudite, ne permet en effet plus à la plupart des sociétés pétrolières
d’honorer leurs engagements de crédit. Et ces sociétés se sont
fortement endettées : elles représentent près de 40% des crédits à
risque accordés aux entreprises (ce que l’on appelle les crédit High
Yield). Aussi, avec des prix de vente de pétrole si bas, nous allons
fatalement assister a des défauts sur ces dettes. Et, comme en 2008,
ces défauts vont ensuite nécessairement mettre en difficultés les
sociétés financières et les fonds d’investissements qui les portent - ce
phénomène a déjà commencé, avec certaines sociétés de gestion
spécialisées sur le secteur du high yield qui ferment et cessent leurs
activités aux USA. Enfin, comme en 2008, ces dettes sont assurées par
des produits dérivés (les Crédit Default Swaps - les fameux CDS) émis
par les banques. Ainsi, même si les banques mondiales ne portent que
très peu la dette des sociétés pétrolières, elles pourraient être affectées
par le règlement des CDS, et mises en difficultés, voire en faillite.
Comme en 2008.
Pourtant, à notre avis, cette analogie avec la grande crise de 2008 est
erronée - plusieurs différences notables l’invalident. Si assurément les
défauts vont se multiplier sur les dettes des sociétés liées au marché
pétrolier, ces pertes ne devraient pas avoir d’effet systémique, comme
en 2008. Voici pourquoi :
1- Contrairement aux prêts supprimes américains de 2008, qui étaient
tout sauf transparents, les prêts au secteurs de l’énergie sont clairement
identifiés. Et nous ne pensons pas que le prix du pétrole baisse
beaucoup plus loin que ce que l’on a connu en janvier 2016 : le juge «
de paix » (si l’on peut dire...) du prix du pétrole est l’Arabie Saoudite. Or
elle a construit son budget 2016 avec une hypothèse du prix du baril à
26 dollars US. Ce prix a été quasiment atteint en janvier et le pétrole ne
peut donc aller durablement en deçà de ce prix. Il n’y aura donc pas,
comme cela a été le cas après 2008, de révision permanente à la
hausse, des montants des défauts sur ces prêts. Les montants sont
assez clairement identifiés.
2- De plus, le risque a été réparti dans tout le marché, y compris vers
des investisseurs finaux via des obligations. On ne décompte que peu de
produits structurés sur le secteur pétrolier. Le risque liés aux produits
dérivés portés par les banques est donc relativement limité et
mesurable. Il ne sera pas systémique.
3- En outre, les montants de défauts attendus sont 20 fois inférieurs aux
2000 milliards d’USD des supprimes américains (même dans une
hypothèse pessimiste d’un baril de pétrole à 25 dollars durablement).
4- Enfin, du travail a été réalisé depuis 2008, en particulier sur les
banques américaines : elles sont aujourd’hui 2 fois plus capitalisées
qu’en 2008, deux fois plus solides.
Ainsi, la crise des sociétés pétrolières, si elle est réelle et importante,
n’aura pas d’effet systémique sur le système financier mondial comme
en 2008 : les montants en jeu sont sans commune mesures avec les
subprimes, et clairement identifiés.
Au contraire du scénario dominant, nous pensons qu’il n’y a avec la crise
financière de 2008 qu’un faux air de ressemblance avec les corrections
de marchés actuelles.