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SAGA • ll a fait entrer la France dans l'ère de la communication moderne, Dans un
marché publicitaire aujourd'hui en crise, la réussite de Publicis reste exemplaire
Marcel Bieustein-Blanchet, un siècle de publicité
Paît d'un simple deux-pièces
cuisine dans le faubourg
Montmartre, MBB finira sa
carrière en haut des Champs-
Dossier réalisé par Stéphanie Aglietti
et Jean Bouclier
Entrepreneur éternel, ce
fils de marchand a côtoyé
les plus grands et créé le
premier groupe de
communication français,
Publicis. Un destin
exceptionnel, fruit d'un
travail passionné et d'un
esprit ouvert sur le monde.
«Tu vas vendre des courants
d'air. » Ce conseil paternel, donné à
l'aube de ses 20 ans, aurait dû inciter
le
jeune Marcelàabandonner.Asuivre
une autre route, davantage tracée.
Maîs ce conseil, Marcel Bieustein-
Blanchet ne l'a pas écouté. Il voulait
devenir publicitaire et l'est devenu, ré-
volutionnant en 70 ans de carrière une
professionjusqu'alors mal aimée
Né en 1906 à Enghien-les-Bains,
le jeune Marcel montre très vite son
envie de prendre son envol. Cet
adepte de l'oreiller, qui « n'aimait pas
se lever le matin », fonde à seulement
20 ans Publicis, son agence en com-
munication Un simple deux-pièces
cuisine du faubourg Montmartre lm
sert de premier bureau.
Très vite, séduits par sa créativité,
les patrons de presse lui confient des
espaces publicitaires. Mais celui que
l'on appelle familièrement « MBB »
ne s'arrête pas en si bon chemin.
Grâce à sa Régie Presse, il rachète la
radio LL, qui bat de l'aile, et la rebap-
tise Radio Cité Se faisant fort de
« vouloir ouvrir le monde aux Fran-
çais», il propose les premières émis-
sions de radio publiques, et crée les
radioreportages.
Inspiration américaine
Maîs l'ascension de l'entrepre-
neur va connaître des turbulences
La Seconde Guerre mondiale éclate,
assombrissant ses perspectives.
Sous l'Occupation, les origines
juives de Marcel desservent le navire
en marche : Publicis est sabordé et
Radio Cité réquisitionnée. L'appel
du devoir et sa passion pour l'avia-
tion le poussent alors à s'engager
comme pilote de bombardier. En
1943, après une brève maîs doulou-
reuse capture en Espagne, il rejoint
Londres et s'engage dans la Résis-
tance, héritant au passage du pseu-
donyme de Blanche!
1944, la France est libérée, maîs
Marcel, lui, a tout perdu. Les clients,
pourtant, vontrapidementrevenir, car
l'empire a reculé pour mieux sauter.
L'ère de la consommation de masse ar-
rive et Publicis prend part au défilé.
Illustration de cette réussite, en 1949,
le groupe établit ses quartiers sur les
Champs-Elysées II remplace l'hôtel
Astona qui, clin d'œildel'histoire, avait
servi de quartier général auxforces al-
lemandes
MBB, le Phénix
MBB grimpe, grimpe, et ne
semble plus s'arrêter Son groupe
étoffe son service aux entreprises et
Marcel fait déjà partie des grands pa-
trons de l'Hexagone La France lui
sourit. Maîs c'est de l'autre côté de
l'Atlantique que Marcel Bleustem va
puiser son inspiration. Le sous-sol du
bâtiment Publicis de Paris pèche par
son inutilité ' MBB y installe, pour la
première fois en France, un drugstore
made in USA. Et l'importation conti-
nue Prenant exemple sur l'américain
Gallup, le « Lion » des Champs réalise
pour le président du Conseil, Pierre
Mendès France, le premier sondage
d'opinion, en véritable précurseur du
marketing politique.
Lempire Publicis va cependant
connaître une nouvelle secousse. Le
27 septembre 1972, un incendie ra-
vage l'immeuble delà maison mère à
Pans. La puissance du groupe, elle, ne
part pas pour autant en fumée, et le
Phénix Bleustem renaît encore de ses
cendres Les dossiers peuvent brûler,
« les clients, eux, sont ininflam-