Cardiopathies congénitales à l`âge adulte: aspects importants pour l

8
ASA SVV Infoméd 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
Dr méd. Urs Arbenz
Ancien chef du service cardiologie infantile de
l’Hôpital Universitaire de Zurich
Cesdernièresanes,lenombred’adultes
atteints d’une malformation cardiaque
congénitale n’a cessé d’augmenter dans
les pays industrialisés (1), et ce pour
deux raisons: grâce aux progrès théra-
peutiques, plus de 90% des enfants at-
teints de malformations complexes at-
teignent l’âge adulte, alors qu’il y a 50
ans, 80% d’entre eux mouraient dans
l’enfance (2). D’autre part, l’échocar-
diographie permet de diagnostiquer
des malformations légères, telles que
valves aortiques bicuspides sans ano-
malie fonctionnelle, petits défauts du
septum ventriculaire ou défauts du sep-
tum auriculaire, que les examens d’au-
trefois ne détectaient pas (2). En Suisse,
10'000 adultes vivent (1) avec des
cardiopathies congénitales moyenne-
ment graves à graves et environ 50'000
autres avec des cardiopathies congéni-
tales légères (2, 6, 17).
Par conséquent, le nombre de per-
sonnes concernées par ce problème et
susceptibles de demander une couver-
ture d’assurance pour des raisons per-
sonnelles ou professionnelles (p. ex.
création d’une entreprise) est très élevé.
La perspective de pouvoir conclure une
assurance-vie en tant qu’adulte atteint
d’une malformation cardiaque congéni-
tale est meilleure qu’autrefois (3).
Néanmoins, et de manière compréhen-
sible, le taux de refus demeure plus
élevé pour ces personnes que pour les
demandeurs d’assurance exempts de
malformation cardiaque et ce, même
lorsqu’elles bénéficient d’une intégra-
tion tout aussi bonne dans le monde du
travail et appartiennent à la même
classe NYHA. Toutefois, Crossland (4) a
montré de façon très étonnante, dans
une étude parue récemment en Angle-
terre, que le refus d’une demande d’as-
surance ne dépendait pas du degré de
gravité de la malformation cardiaque.
On peut tirer la conclusion suivante de ce qui
précède: la population d’adultes présentant
une cardiopathie congénitale est très hétéro-
gène. Une simple classification par diagnostic
ne permet pas de recenser de manière suffi-
samment précise les différences d’espérance
de vie. Beaucoup d’éléments indiquent que
les connaissances des patients sur leur propre
maladie, et donc les données qu’ils fournis-
sent dans la demande d’assurance, sont insuf-
Cardiopathies congénitales à l’âge adulte:
aspects importants pour l’examen du risque par l’assureur privé
F_Medinfo_2_2008.qxp:Layout 1 27.11.2008 10:41 Uhr Seite 8
9
ASA SVV Infoméd 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
fisantes et qu’elles se caractérisent par une
évaluation optimiste (4).
Une autre difficulté à déterminer l’espé-
rance de vie de manière objective réside
dans le fait que pour beaucoup des pa-
ramètres à prendre en compte, il
n’existe que très peu d’études de
longue durée basées sur une popula-
tion définie. En outre, les patients qui
ont survécu plus de 40 ans à leur opéra-
tion ont – bien évidemment – tous été
opérés lors des débuts de la chirurgie
cardiaque. Toutefois, on sait de manière
bien documentée que non seulement la
mortalité précoce, mais aussi le pronos-
tic à terme, dépendent du moment où
l’opération a eu lieu. C’est ainsi que
Mattila a établi que les patients opérés
d’une sténose aortique (SA) congéni-
tale entre 1990 et 1999 présentaient
une mortalité de 10% plus basse, dans
l’évolution postopératoire tardive con-
sidérée sur plus de 10 ans, que ceux
ayant subi cette intervention au cours
des trois décennies précédentes (5).
Que peut-on en déduire pour l’évalua-
tion d’une demande d’assurance?
Dans un premier temps, l’assureur privé
tient compte du diagnostic de malfor-
mation cardiaque pour procéder à une
première évaluation du risque et à un
calcul initial des primes. Lors d’une
deuxième étape, il analyse les facteurs
qui influencent favorablement ou défa-
vorablement le pronostic à l’intérieur
d’un groupe de diagnostic. En cas de
risque de mortalité élevé, la durée de la
protection d’assurance demandée, et
donc l’âge du demandeur, jouent un
rôle pour la conclusion du contrat d’as-
surance. Paradoxalement, il peut en
résulter qu’une personne âgée de plus
de quarante ans pourra conclure une
assurance-vie avec une prime très peu
majorée, au contraire d’une personne
de vingt ans présentant le même diag-
nostic, même si celle-ci a été opérée
dans une décennie offrant un meilleur
pronostic postopératoire.
Dans la littérature spécialisée, on dis-
tingue entre malformations cardiaques
ayant un bon pronostic, un pronostic in-
termédiaire et un pronostic incertain.
Von der Muhll (6) classe les patients
présentant un défaut du septum ventri-
culaire ou auriculaire opéré, un ductus
Botalli fermé et une sténose pulmo-
naire et de l’isthme aortique traitée
dans le groupe des malformations car-
F_Medinfo_2_2008.qxp:Layout 1 27.11.2008 10:41 Uhr Seite 9
10
ASA SVV Infoméd 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
diaques offrant une bonne espérance
de vie. Il classe par contre les per-
sonnes atteintes d’une sténose aor-
tique, d’une tétralogie de Fallot et d’une
transposition dans le groupe des pa-
tients ayant un pronostic intermédiaire
et enfin celles qui ont un cœur univen-
triculaire et une anomalie d’Ebstein
dans le groupe des patients dont le pro-
nostic est incertain ou mauvais. On relè-
vera toutefois qu'il n’existe pas de
consensus absolu, ni parmi les cardio-
logues ni parmi les assureurs, concer-
nant par exemple l’évaluation d’une
sténose de l’isthme aortique ou d’une
valve aortique bicuspide «fonctionnant
normalement».
Dans les lignes qui suivent, je vais me
limiter au groupe des malformations
cardiaques présentant un bon pronos-
tic et pour lesquelles les directives des
assureurs prévoient en général la possi-
bilité de conclure un contrat. En outre,
je partirai de la situation d’un deman-
deur d’assurance adulte. Comme le
risque d’un individu pris isolément peut
s’écarter de la moyenne dans tous les
groupes de diagnostic, je vais mainte-
nant définir les conditions qui devraient
être remplies pour que l’on puisse esti-
mer comme «bonne» l’espérance de vie
moyenne d’un groupe de diagnostic
considéré dans son ensemble.
Défaut du septum ventriculaire
(ventricular septal defect ou SVD)
Un SVD petit, isolé et insignifiant au ni-
veau hémodynamique ne péjore pas
l’espérance de vie sur le plan statis-
tique, mais il est assorti d’un risque
plus élevé d’endocardite avec 1,5 à 2,5
cas pour 1'000 années-patients (8, 9,
10). Le pronostic à long terme des pa-
tients ayant un SVD opéré avec succès
est bon, pour autant que la fermeture
ait eu lieu tôt, avant que ne s’installe un
dommage irrémédiable du ventricule
gauche (VG) ou une hypertension pul-
monaire fixée (6, 8,10). Le patient ne
devrait pas non plus présenter un bloc
atrio-ventriculaire dû à une opération
ou un défaut valvulaire associé. S’il
existe un SVD résiduel, le pronostic
dépend de l’étendue du shunt restant.
F_Medinfo_2_2008.qxp:Layout 1 27.11.2008 10:41 Uhr Seite 10
11
ASA SVV Infoméd 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
Le risque est évalué en fonction des as-
pects suivants: le demandeur d’assu-
rance ne devrait pas présenter de symp-
tômes cardiaques et faire preuve d’une
résistance physique normale.
L’échocardiographie est indispensable.
Elle sert à documenter la fermeture
totale du SVD ainsi que la taille normale
de la valvule gauche et son fonctionne-
ment, à exclure une pression artérielle
pulmonaire accrue ou une dysfonction
valvulaire importante (insuffisance aor-
tique) et à évaluer l’importance hémo-
dynamique d’un éventuel SVD résiduel.
Pour les SVD de grande taille avec pres-
sion pulmonaire accrue, le moment où
l’opération a eu lieu est crucial. De ce
fait, l’assureur tient en général à pren-
dre connaissance du dossier d’hospita-
lisation et d’opération. Une autre me-
sure consiste à exiger un ECG (troubles
de conduction, troubles de la repolari-
sation) et une ergométrie.
Défaut du septum auriculaire
(atrial septal defect ou ASD)
Un petit ASD ne péjore pas l’espérance
de vie. Les complications de malforma-
tions importantes non obturées sont les
troubles rythmiques auriculaires, l’in-
suffisance cardiaque et l’hypertension
pulmonaire. En cas d’ASD de type sinus
veineux, on observe souvent des veines
pulmonaires mal positionnées. Lorsque
l’ASD est important, la réversibilité de
l’hypertrophie excentrique droite dépend
du moment où a été effectuée l’opéra-
tion. Le pronostic de l’ASD de type os-
tium primum (défaut partiel du septum
atrio-ventriculaire) est principalement
déterminé par la modification concomi-
tante de la valve atrio-ventriculaire.
L’espérance de vie pour un ASD opéré
suffisamment tôt est normale (7, 11).
Les problèmes les plus fréquents dans
l’évolution à long terme suite à une fer-
meture effectuée après la 25eannée
sont des troubles rythmiques auricu-
laires (fibrillation auriculaire, flutter au-
riculaire, tachycardie/bradycardie), une
résistance physique amoindrie, une in-
suffisance cardiaque, une hypertension
pulmonaire et des embolies para-
doxales (11).
F_Medinfo_2_2008.qxp:Layout 1 27.11.2008 10:41 Uhr Seite 11
12
ASA SVV Infoméd 2008/2 Des risques de la maladie coronarienne
Les trois dernières complications citées
impliquent une espérance de vie ré-
duite.
Au niveau de l’anamnèse, l’évaluation
du risque prend en considération l’ab-
sence de symptômes (pas de troubles
du rythme symptomatiques et nécessi-
tant un traitement) et la résistance phy-
sique. L’examen clé est l’échocardio-
gramme permettant de déterminer la
taille du ventricule droit (VD) et son
fonctionnement et d’exclure un shunt
restant, une insuffisance tricuspide im-
portante et une hypertension pulmo-
naire. Si des veines pulmonaires par-
tiellement mal positionnées ont été
corrigées, il faut exclure une sténose de
celles-ci. L’examen doit être complété
par un ECG destiné à contrôler le rythme
cardiaque (fibrillations auriculaires) et
la conduction atrio-ventriculaire ainsi
que par une ergométrie.
Sténose pulmonaire (SP)
Chez les patients présentant une sté-
nose pulmonaire légère, le gradient de
pression n’augmente pas à long terme
au-delà de la prime enfance et l'on n’as-
siste pas au développement d'une in-
suffisance pulmonaire progressive.
C’est ce qui distingue essentiellement
la sténose pulmonaire de la sténose
aortique. Le risque d’endocardite n’aug-
mente que de façon minime (12). En cas
de sténose légère, l’espérance de vie est
normale (13). De ce fait, une interven-
tion thérapeutique n’est pas justifiée.
Après une intervention réussie (opéra-
tion chirurgicale ou dilatation par bal-
lonnet), les patients qui souffraient
d’une sténose pulmonaire moyenne ou
grave ne sont qu’exceptionnellement
affectés d’une resténose importante. La
complication la plus fréquente interve-
nant à long terme après ces deux inter-
ventions consiste en une insuffisance
pulmonaire importante menant à une
deuxième intervention (13, 14). Lors de
sténose pulmonaire, l’espérance de vie
est normale, pour autant que l’opéra-
tion ait été effectuée avant l’apparition
d’un dommage irrémédiable du ventri-
cule droit (12, 13, 14, 15) et qu’elle n’ait
pas comporté l’implantation d’une pro-
thèse valvulaire.
L’évaluation du risque prend en consi-
dération l’absence de symptômes et la
résistance physique, les traitements ef-
fectués précédemment et actuellement,
F_Medinfo_2_2008.qxp:Layout 1 27.11.2008 10:41 Uhr Seite 12
1 / 14 100%

Cardiopathies congénitales à l`âge adulte: aspects importants pour l

La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !