La toux chronique : Principales étiologies et orientations

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La toux chronique :
Principales étiologies et orientations diagnostiques.
Grégoire Prévot, Service de Pneumologie et d’Allergologie, Hôpital Larrey, CHU Toulouse
La toux est un signe fonctionnel très fréquent et souvent perçu comme invalidant par les
patients. Elle constitue ainsi le 3ème motif de consultation en médecine générale et le premier
en pneumologie. Les étiologies sont nombreuses mais trois d’entre elles (l’asthme, le reflux
gastro-oesophagien, et les causes ORL) expliquent plus de 85% des cas. Pour parler de toux
chronique, il faut qu’un délai d’au minimum 3 à 6 semaines se soit écoulé depuis l’apparition
du symptôme.
Etiologies de la toux chronique
Toute tout chronique justifiant la réalisation d’une radiographie thoracique (RT), il est
habituel de classer les étiologies selon le résultat de cet examen.
Etiologies à RT anormale
La radiographie thoracique est le plus souvent anormale lors des cancers bronchiques
primitifs ou secondaires ; la toux est alors souvent associée à d’autres symptômes tels que
l’altération de l’état général, des hémoptysies, des douleurs thoraciques ou encore une
dyspnée mais elle est parfois isolée. Le diagnostic de cancer bronchique ne doit souffrir
d’aucun retard et il justifie pleinement la réalisation en première intention de la RT devant
toute toux chronique, même en l’absence de facteurs de risque.
La tuberculose pulmonaire peut se manifester par une toux chronique à RT anormale. Elle
concerne le plus souvent aujourd’hui des populations à risque mais elle doit toujours être
évoquée compte tenu des conséquence d’un tel diagnostic en terme de dépistage des sujets
contacts et des traitements prophylactiques à instaurer.
La RT peut parfois orienter le diagnostic vers une pneumopathie interstitielle chronique
dont les causes sont multiples : infectieuses, néoplasiques, iatrogène, environnementales ou
systémiques par exemple. L’insuffisance cardiaque peut également se présenter comme une
toux chronique avec atteinte infiltrative diffuse à la RT.
Les épanchements pleuraux liquidiens sont très souvent diagnostiqués à la RT devant un
tableau de toux sèche positionnelle avec dyspnée et douleur thoracique. Avant tout traitement,
une exploration par ponction avec analyse du liquide doit être réalisée.
Etiologies à RT normale
L’asthme est l’une des 3 principales causes de toux chronique. Il s’y associe souvent d’autres
manifestations telles que des sibilances, une oppression thoracique ou une dyspnée. Un terrain
atopique doit être recherché. Les patients décrivent souvent une hyper réactivité bronchique
avec une toux lors des efforts ou au rire. La confirmation diagnostique, toujours nécessaire,
est apportée par la spirométrie avec courbe débit-volume qui montre une obstruction
bronchique réversible sous bêta2-stimulants. En cas de normalité de cet examen, l’hyper
réactivité bronchique sera recherchée par test de provocation (à la métacholine ou au
carbachol). Le diagnostic posé, une surveillance régulière spécialisée doit être engagée en
respectant les recommandations régulièrement actualisées.
Lorsque la toux est la seule manifestation et que seule une hyper réactivité est authentifiée,
sans obstruction bronchique, on parle alors de « toux-équivalent d’asthme ».
Lorsque la preuve est faite d’une toux chronique avec inflammation bronchique authentifiée
par la mesure de marqueurs dans l’air exhalé, mais sans autres signes fonctionnels associés ni
obstruction bronchique ni hyper réactivité, il s’agit d’une bronchite à éosinophiles.
Les pathologies ORL chroniques sont très souvent responsables de toux chronique,
justifiant au minimum un examen rhinoscopique antérieur et du conduit auditif externe lors de
toute consultation motivée par ce symptôme. Les affections impliquées sont nombreuses :
rhinorrhée postérieure, polypose naso-sinusienne, rhinite allergique, laryngite chronique,
dysfonction des cordes vocales, tumeurs bénignes et malignes, affections du conduit auditif
externe.
Le reflux gastro-oesophagien (RGO) est une cause fréquente et maintenant bien connue de
toux chronique. Le diagnostic est souvent aisé devant une symptomatologie évocatrice de
pyrosis ; le RGO peut cependant se manifester uniquement par la toux, justifiant la réalisation
d’examens complémentaires (endoscopie digestive, pH-métrie) ou d’un traitement d’épreuve
qui apportera le diagnostic de certitude.
La bronchite chronique se définit cliniquement par une toux avec expectoration au moins 3
mois par an pendant au moins 2 ans consécutifs, sans autre cause de toux chronique
individualisée. La toux est alors le moyen d’engager la discussion sur le sevrage tabagique
avant progression de la maladie vers la broncho-pneumopathie chronique obstructive
(BPCO), suspectée devant l’apparition d’une dyspnée et confirmée par la spirométrie avec
boucle débit-volume.
Une cause iatrogène doit toujours être évoquée. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion
entraînent une accumulation de bradykinines et de substance P qui stimulent les fibres
sensitives C du système NANC et favorisent ainsi l’arc réflexe de la toux. Les bêtabloquants
peuvent être responsables de toux chronique y compris par voie locale (collyres).
La toux post-infectieuse est une toux apparaissant dans un contexte d’infection des voies
aériennes supérieures et pouvant persister plusieurs mois après la guérison. Les germes les
plus souvent impliqués sont Bordetella pertussis, Mycoplasma pneumoniae et Chlamydiae
trachomatis. L’incidence de la coqueluche chez l’adulte est souvent sous-estimée mais le
diagnostic doit être évoquée devant la notion de contage et le caractère nocturne et quinteux
de la toux ; le profil sérologique de Bordetella peut permettre de retenir le diagnostic de
coqueluche récente.
Les obstruction endo-bronchiques à RT normale ne sont pas fréquentes mais justifient la
réalisation d’une fibroscopie bronchique en l’absence d’orientation étiologique au terme de la
démarche diagnostique.
Enfin la toux psychogène est un diagnostic d ‘élimination nécessitant une surveillance à 6
mois afin de s’assurer qu’une cause organique n’émerge pas.
Eléments cliniques d’orientation diagnostique
L’interrogatoire et l’examen clinique permettent d’émettre des orientations diagnostiques. Ils
ne dispensent pas de la réalisation des examens systématiques que sont la RT et les
explorations fonctionnelles respiratoires mais permettent de hiérarchiser d’autres examens
complémentaires éventuels.
Caractéristiques de la toux
Il est nécessaire de préciser de caractère productif ou sec de la toux, son ancienneté, son
horaire. Certaines toux réveillent le patient (asthme, incompétence cardiaque) tandis que
d’autres sont calmées la nuit (cas du RGO). Une toux saisonnière doit faire évoquer un
asthme ou une rhinite allergique. La toux d’effort ou au rire oriente vers une hyper réactivité
bronchique, la toux matinale vers la bronchite chronique, la toux post-prandiale vers le RGO
et la toux aux changements de position vers la pleurésie.
Signes d’accompagnement
L’expectoration doit être caractérisée ; muqueuse et perlée, elle évoque volontiers l’asthme
alors qu’elle est plutôt muqueuse saumonée dans l’insuffisance cardiaque et franchement
purulente et abondante au cours des dilatations de bronches.
Une altération de l’état général, des hémoptysies, une douleur thoracique, une dyspnée
sifflante seront aussi à noter.
Contexte
Le statut tabagique, l’environnement personnel et professionnel, la notion d’atopie familiale
ou personnelle, les antécédents et les traitement suivis sont des éléments d’orientation souvent
pertinents.
Examen clinique
Outre l’examen cardio-respiratoire, l’examen ORL avec la recherche de polypes en
rhinoscopie antérieure, la recherche d’un jetage postérieur et l’examen du conduit auditif
externe est une étape fondamentale de la démarche diagnostique.
Conclusion
La toux chronique présente des étiologies nombreuses et souvent intriquées justifiant une
certaine rigueur dans la démarche diagnostique. Celle-ci se base sur la connaissance des
étiologies les plus fréquentes (pathologies ORL, asthme et RGO), la connaissance des
étiologies ne souffrant aucun retard diagnostic (cancer bronchique et tuberculose), sur un
interrogatoire pertinent, une radiographie thoracique et des EFR systématiques.
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