L`équilibre chimique : des événements

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9eme Journées Multimédia et Informatique dans l’Enseignement de la Chimie - Bruxelles 1999
L’équilibre chimique : des événements microscopiques
à la constante d’équilibre
Jérôme Randon
Laboratoire des Sciences Analytiques, bât. 308, Université Claude Bernard-Lyon I, 43 du boulevard du 11
Novembre 1918, 69622 Villeurbanne Cedex. mail : [email protected]
L’équilibre chimique est le résultat de deux réactions opposées se produisant à vitesses
identiques. L’estérification est l’exemple le plus fréquemment utilisé pour présenter cette
notion, c’est donc celui-ci que nous commenterons.
o
sens 1
acide + alcool
ester + eau
sens 2
Lors du mélange d’un acide et d’un alcool, la réaction démarre dans le sens 1. A cet instant la
réaction dans le sens 2 ne peut pas se faire par manque de réactifs. Dès l’apparition d’ester et
d’eau dans le mélange réactionnel la réaction dans le sens 2 devient possible. La vitesse de la
réaction de le sens 1 diminue tandis que la vitesse dans le sens 2 augmente. Lorsque ces deux
vitesses s’égalent on atteint l’état d’équilibre.
Lors de l’étude des équilibres, deux grandes étapes apparaissent :
• Le déplacement d’un équilibre suite à la modification de l’une de ces variables (on ne
s’intéressera ici qu’à la concentration) est prévu par la « loi » de Le Chatelier.
• La « loi » d’action de masse définit la constante d’équilibre.
L’objet de cet article est de monter en reproduisant les événements microscopiques entre
molécules que ces deux « lois » peuvent être retrouvées sur la base de considérations
cinétiques. Pour cela, nous nous appuierons sur un logiciel de simulation de cinétique par
automates moléculaires.
http://nte-serveur.univ-lyon1.fr/nte/soft/jr/Automates/Simulation.html
La transformation chimique observée à l'échelle macroscopique n'est que le résultat d'une
succession de rencontres et de réactions élémentaires se produisant à l'échelle microscopique.
La simulation d’un grand nombre de ces événements permet de reconstruire la réaction
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chimique. Ainsi pour une réaction élémentaire, lorsque l'on écrit A + B ----> C + D, cela
signifie que lors d'une rencontre entre une molécule de type A et une molécule de type B, ces
deux molécules réagissent éventuellement ensemble et sont alors transformées en produits.
Cette transformation en produits de la réaction ne se fera que si les molécules sont
convenablement orientées et si elles possèdent suffisamment d'énergie. Ceci nous conduit à
définir la probabilité d'occurrence de la réaction lors de la rencontre des molécules, qui aura la
constante de vitesse pour équivalent dans la représentation macroscopique.
La réaction, pour se réaliser, doit donc satisfaire à deux conditions :
• les molécules doivent se rencontrer,
• les molécules doivent être convenablement orientées et avoir suffisamment d'énergie.
On définit alors un espace microscopique constitué de points, chacun de ces points pouvant
éventuellement contenir une molécule de type A, B, C, D… ou rien (ou le solvant). Lorsque
deux de ces points pris au hasard dans l’espace microscopique se rencontrent et contiennent
l’un une molécule de type A et l’autre une molécule de type B, on tire au hasard un nombre
dans l’intervalle 0-1. Si ce nombre est inférieur à la probabilité de réaction de A sur B, les
molécules A et B se transforment en produits de la réaction sinon rien ne se passe. Un
raisonnement identique s’applique si les deux points contiennent des molécules de type C et
D.
La technique de simulation consiste simplement à reproduire en très grand nombres les
rencontres entre deux points de l’espace microscopique et à observer simultanément les
grandeurs macroscopiques caractéristiques d’un tel système : les concentrations des
différentes molécules.
Dans ce contexte, le déroulement de la réaction d’estérification peut être décrit à partir des
événements microscopiques. Dans l’état initial contenant uniquement des molécules d’acide
et d’alcool, seules les rencontres entre ces molécules provoquent une réaction dans le sens 1
(c’est le seul événement possible car il n’a y pas de molécules d’ester et d’eau). Puisque le
nombre de molécules d’acide et d’alcool diminuent, lorsque l’on prend deux points au hasard
dans l’espace, l’occurrence du choix de deux points l’un contenant une molécule d’acide et
l’autre une molécule d’alcool diminue : la transformation dans le sens 1 à moins souvent lieu.
Dans le même temps, l’occurrence du choix de deux points l’un contenant une molécule d’eau
et l’autre une molécule d’ester augmente : la transformation dans le sens 2 a lieu de plus en
plus souvent. Mais part le fait même de son existence, la réaction dans le sens 2 va minimiser
l’effet lié à la disparition de l’acide et de l’alcool. On s’approchera ainsi progressivement d’un
état d’équilibre dans lequel les deux réactions ont lieu à la même vitesse sans changement
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notable des quantités de chacun des composés. La double représentation monde
microscopique – monde macroscopique
permet de montrer cet état d’équilibre
dynamique.
On peut mener le même raisonnement en
partant cette fois d’un mélange ester +
eau qui va évoluer vers le même état
d’équilibre. La réaction se fait d’abord
vers le sens 2, puis l’apparition d’acide et
d’alcool rend possible la réaction de ces
deux réactifs.
Le déplacement d’équilibre par modification de concentration
Une fois l’état d’équilibre atteint, le retrait d’un des produits ou l’ajout d’un réactif modifie
l’état du système.
• Si on retire un des produits formés (l’eau, D dans le schéma ci-contre), il devient impossible
lorsque l’on choisit au hasard deux points
de l’espace microscopique qu’un de ces
points contienne une molécule d’eau : la
transformation dans le sens 2 ne peut pas
avoir lieu. Sa vitesse est donc nulle,
tandis que la vitesse de la réaction dans
le sens 1 n’est pas modifiée (on a
toujours autant de chance de tirer au
hasard une molécule d’acide et une
molécule d’alcool). L’équilibre va donc
se « déplacer » vers la droite.
• Si par contre on rajoute un des réactifs (dans le diagramme ci-contre on rajoute 0,3 de B par
rapport à l’état d’équilibre précédemment
obtenu), lorsque l’on prend deux points
au hasard dans l’espace, l’occurrence du
choix de deux points l’un contenant une
molécule d’acide et l’autre une molécule
d’alcool augmente : la transformation
dans le sens 1 a donc plus souvent lieu.
L’équilibre va donc se « déplacer » vers
la droite.
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Le déplacement d’équilibre par effet de dilution
L’effet de dilution sur le déplacement d’équilibre se rencontre lors de la dissociation des
acides faibles. Cette réaction est du type RH(aq)
R-(aq) + H+(aq) est peut être simulé avec le
logiciel d’automates moléculaires à partir de l’équilibre A + B
C, le produit C étant le
o
o
produit de départ : l’acide sous sa forme moléculaire.
Si la concentration initiale de l’acide est plus faible, celui-ci se trouve proportionnellement
plus dissocié que lorsque sa concentration est élevée.
Pour que la réaction se fasse dans le sens de l’association il faut que l’on choisisse
simultanément un point contenant une molécule de type A et un point contenant une molécule
de type B (ensuite intervient la probabilité que la réaction se produise). Dans le sens de la
dissociation par contre il suffit que l’un des deux points choisis contienne une molécule de
type C (ensuite intervient la probabilité que la réaction se produise). En solution diluée,
l’occurrence du choix simultané de deux points l’un contenant une molécule A et l’autre une
molécule B est beaucoup moins grand, la réaction d’association se fait proportionnellement
beaucoup moins souvent que la réaction de dissociation. Le réactif C est donc plus dissocié.
Après avoir présenté l’équilibre comme la résultante de deux réaction opposées, on pourra
introduire la constante d’équilibre qui est le relation macroscopique résultant des événements
microscopiques. Pour les réactions élémentaires, la constante de l’équilibre est égal au rapport
des constantes de vitesse (des probabilités de réaction dans le modèle des automates
moléculaires). Pour l’équilibre A + B
C + D, on a :
[C ]eq [D]eq PAB →CD
=
K=
[A]eq [B ]eq PCD→ AB
o
Cette relation permet au chimiste d’obtenir des données quantitatives sur des phénomènes qui
ont ici été présentés de façon qualitative. Les relations quantitatives sont néanmoins
correctement observées avec le modèle des automates moléculaires, sous cet aspect le logiciel
peut donc être utilisé comme outil de simulation.
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