Médecine d'Afrique Noire : 1993, 40 (4)
II - MATERIELS ET METHODES
Nous avons examiné entre Octobre 1990 et Octobre 1991, 56
malades hospitalisés avec un diagnostic de SIDA confirmé.
Chez ces malades nous avons effectué un test sérologique
ELISA et Westernblot avec les réactifs ELAVIA et NEW-
LAVBLOT de DIAGNOSTIC Pasteur pour le dépistage des
anticorps anti VIH. Nous avons ensuite effectué un prélève-
ment veineux sur anticoagulant (citrate de sodium) sur lequel
nous avons réalisé une dilution au 1/200 avec la solution de
Lazarus et un comptage des leucocytes dans la cellule de
Malassez. Nous avons également effectué un frottis sanguin
coloré au May Grundwald Giemsa pour réaliser la formule
leucocytaire (dénombrement de chaque type de leucocytes
sur un total de cent éléments).
Nous avons pris comme population témoin 67 donneurs de
sang en apparente bonne santé et ayant une sérologie VIH
négative.
III - RESULTATS
L’étude de l’immunité non spécifique chez nos malades
atteints de SIDA a été menée en comparant leurs paramè-
tres leucocytaires à ceux des donneurs en apparente bonne
santé ayant une sérologie VIH négative.
Le premier paramètre comparé a été le nombre moyen des
leucocytes par ml de sang périphérique. Les malades sem-
blent avoir un nombre moyen de leucocytes supérieur à
celui des donneurs de sang (Tableau I).
Tableau I : Comparaison des moyennes des
leucocytes/ml de sang périphérique chez les malades
atteints de SIDA et les donneurs de sang VIH négatifs
Paramètre Moyenne Ecart type Effectif
Type population leucocytes/ml
Malades 7212,5 3130,44 56
Donneurs 6732,83 1361,97 67
Total 6951,22 2340,70 123
EXPLORATION DE L’IMMUNITE NON SPECIFIQUE
CHEZ 56 MALADES ATTEINTS DE SIDA AU MALI
TOUNKARA A.*, COULIBALY K.**, DOUMBO 0.***
Médecin au Centre National de Transfusion Sanguine - B.P. 140 Bamako (MALI)
**Pharmacien en stage au Centre National de Transfusion Sanguine B.P.
140 Bamako (MALI)
*** Médecin-Chef du Département d’Epidémiologie des Affections Para-
sitaires de l’Ecole Nationale de Médecine et de Pharmacie B.P. 1805
Bamako (MALI)
I. INTRODUCTION
L’infection à VIH (virus de l’immunodéficience humaine) est
caractérisée par une destruction des lymphocytes CD4+ (1, 2,
4). Le lymphocyte CD4+ est la cible privilégiée du VIH
parce que la molécule CD4 a une bonne affinité pour la GP
120 de l’enveloppe du VIH (7, 9). Il semble que d’autres
cellules telles que les macrophages ou monocytes, les cel-
lules gliales etc… soient également des cibles du VIH (9).
Les acteurs principaux de l’immunité non spécifique sont
essentiellement les polynucléaires et les monocytes (macro-
phages) à la différence des lymphocytes T et B, acteurs de
l’immunité spécifique (10).
Nous avons essayé d’explorer le taux de ces cellules de
l’immunité non spécifique au cours de l’infection à VIH
chez 56 de nos malades ayant eu une hospitalisation dans le
Service de Gastro-Entérologie de l’Hôpital Gabriel
TOURE de Bamako avec un test sérologique positif à
l’ELISA et confirmé au Western-blot ; notre objectif est de
donner à nos cliniciens un profil de l’immunité non
spécifique chez nos malades atteints de SIDA.
RESUME
Nous avons examiné 56 patients atteints de SIDA (Syn-
d rome d’Immunodéficience Acquise) ; Leurs paramè-
t res leucocytaires ont été comparés à ceux de 67 don-
neurs de sang séro-négatifs. Nous avons constaté que
l’immunité non spécifique est stimulée au début du
SIDA et montre une défaillance à un stade tardif de la
maladie.
SUMMARY
We have examined 56 patients attacked by AIDS
( A c q u i r ed Immunodeficiency Syndrome). Their
leukocytic parameters have been compared to 67 sero -
negative blood donors. We have observed that the non
specific immunity is stimulated at the first stage of
AIDS and disphages failing at the last stage of disease.
Médecine d'Afrique Noire : 1993, 40 (4)
C o m m e n t a i res : Il existe une différence statisquement
significative entre les deux moyennes.
F = 12,15 ; P = 0,0007.
Le deuxième paramètre étudié a été la moyenne arithmé-
tique des neutrophiles/ml de sang périphérique. Nous
n’avons pu observer aucune différence statistiquement
significative entre malades et donneurs pour ce qui concer-
ne ce paramètre, comme nous l’indique le Tableau II.
Tableau II : Comparaison des moyennes arithmétiques
des neutrophiles/ml chez les malades et les donneurs
Paramètre Moyenne Ecart type Effectif
Type neutrophiles/ml
population
Malades 3103,19 2047,85 56
Donneurs 2792,44 861,22 49
Total 2958,18 1607,6 105
Commentaires : Il n’y a pas de différence statistiquement
significative entre les deux moyennes.
F = 0,97 ; P = 0,32.
D’autres paramètres ont fait l’objet de comparaison entre
malades et donneurs : le nombre moyen des éosinophiles
par ml de sang périphérique.
Nous n’avons pas pu observer de différences statistique-
ment significatives entre malades et donneurs pour ce qui
concerne ces deux paramètres comme nous l’indiquent les
tableaux III et IV.
TABLEAU III : Comparaison du nombre moyen
des éosinophiles par ml chez les malades
et les donneurs de sang
Paramètre Moyenne Ecart type Effectif
Type éosinophile/ml
population
Malades 120,08 143,31 57
Donneurs 124,08 131,08 49
Total 122,06 138,21 105
COMMENTAIRES : F = 2, 43 ; P = 0,87
Il n’y a pas de différence statistiquement significative
entre ces deux moyennes.
TABLEAU IV : Comparaison du nombre moyen des
monocytes par ml de sang périphérique chez les
malades et les donneurs de sang
Paramètre Moyenne Ecart type Effectif
Type monocytes/ml
population
Malades 120,08 143,31 56
Donneurs 124,08 131,08 49
Total 122,06 138,21 105
COMMENTAIRES : Il n’y a aucune différence statistique-
ment significative entre ces deux moyennes
F = 0, 20 ; P = 0,64.
DISCUSSION ET CONCLUSION
Nous avons étudié le profil de l’immunité non spécifique
chez 56 malades Maliens atteints de SIDA par la compa-
raison de leurs paramètres leucocytaires avec ceux des
donneurs de sang en apparente bonne santé ayant une séro-
logie VIH négative.
Jusqu’ici une telle enquête n’avait jamais été menée au
Mali. Notre objectif est de donner à nos cliniciens un profil
de l’immunité non spécifique portée par les cellules poly-
nucléaires et les monocytes macrophages.
Nous avons observé une leucocytose plus élevée chez les
malades que chez les donneurs de façon statistiquement
significative (voir tableau I). Cette leucocytose se situe
autour de 7200/ml de sang périphérique. Nous remarquons
que notre population de malades étudiée semble monter
une grande variabilité comme le dénote l’écart type. Tous
les éléments de l’échantillon de malades n’avaient pas le
même stade évolutif de la maladie, ce qui pourrait expli-
quer une dispersion plus grande du paramètre, nombre de
leucocytes/ml. La grande majorité de nos malades avaient
une maladie qui évoluait déjà depuis plus de 6 mois ; très
peu d’entre eux avaient une durée de la maladie supérieure
à 13 mois. La plupart des auteurs signalent plutôt une
leucopénie 400/ml (8, 11, 12).
La précision de la technique de comptage à la cellule de
Malassez pourrait également influer légèrement sur nos
résultats par rapport à ceux des autres auteurs.
Nous pensons que l’immunité non spécifique portée par les
leucocytes reste longtemps non effrondrée chez nos malades
du fait de leur passé immunitaire caractérisé par des sti-
TOUNKARA A., COULIBALY K., DOUMBO 0.
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Médecine d'Afrique Noire : 1993, 40 (4)
mulations variées et répétées par leur environnement.
La comparaison des autres paramètres leucocytaires (nom-
bre de polynucléaires neutrophiles, éosinophiles et nombre
de monocytes), va dans le même sens. Ces cellules ne
semblent pas subir le même sort que la sous population des
lymphocytes CD4+ qui sont détruites par le VIH (3, 5, 6).
L’immunité non spécifique de l’échantillon de malades que
nous avons étudié semble plutôt stimulée et ne semble pas
montrer de défaillance jusqu’à un stade évolutif tardif de la
maladie. Cette observation ne va pas dans le même sens de
l’opinion en faveur du fait que les monocytes macrophages
soient également des cibles du VIH (9) ; puisque nous
n’avons pas observé d’effondrement de cette population de
cellules mononucléées.
En conclusion l’immunité non spécifique portée par les
cellules polynucléaires et les monocytes macrophages ne
montre aucun profil de défaillance jusqu’à un stade avancé
de la maladie chez nos 56 malades atteints de SIDA au
MALI.
EXPLORATION DE L'IMMUNITE NON SPECIFIQUE… 267
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