Beaucoup de nouvelles dépenses, peu d'économies. La lecture des programmes de candidats à
l'Élysée a de quoi faire craindre un nouveau dérapage du déficit public. Même chez ceux qui
s'engagent à respecter la règle des 3 % du PIB, la trajectoire risque de ne pas être respectée.
Certaines dépenses paraissent sous-évaluées quand les économies sont trop peu documentées,
alerte l'Institut Montaigne , dans un document publié ce vendredi en partenariat avec « Les
Échos ».
Premier écueil : les perspectives d'activité affichées semblent optimistes. Les deux candidats les
plus prudents, François Fillon et Emmanuel Macron, tablent sur une augmentation progressive de
la croissance du PIB tout au long du quinquennat, pour atteindre 1,8 %. C'est proche de ce que
prévoit le FMI, mais légèrement plus optimiste que les projections de la Commission européenne.
Les autres candidats, en particulier Marine Le Pen, s'appuient sur des taux de croissance
supérieurs à 2 %. « Ce rythme de croissance n'a pas été observé en France depuis le début des
années 2000 », observe l'Institut Montaigne. Seuls deux programmes présidentiels prévoient une
diminution du poids de la dépense publique dans le PIB. Mais le think tank libéral considère que
ces engagements ne sont pas assez documentés.
Pour François Fillon, il ne retient que 67 milliards d'euros d'économies alors que le candidat de la
droite a fait de ses 100 milliards de réductions de dépense publique un véritable marqueur
politique. A titre d'exemple, l'Institut Montaigne n'a pris en compte que 15 milliards d'économies
sur la sphère de l'Etat (et non 35 milliards), car il considère, notamment, que la suppression de
500.000 postes chez les fonctionnaires n'est pas soutenable. « Seule la moitié de ces diminutions
d'effectifs est prise en compte dans ce chiffrage », explique cette note.
De même, la baisse de dépenses dans les collectivités locales pourrait être bien inférieure à celles
promises dans le programme de l'ex-Premier ministre, car elle repose pour moitié sur un
mécanisme de bonus sur la dotation incitant les collectivités à réduire ces effectifs. Or, ce
mécanisme reste encore à préciser.
Quant aux économies promises par Emmanuel Macron, l'Institut Montaigne les chiffre à seulement
36 milliards d'euros, au lieu des 60 milliards inscrits dans le programme. La plus grande partie des
économies prévues sur l'assurance-chômage « correspond à une baisse du chômage à 7 % en 2022,
et celle-ci ne peut être considérée comme une économie budgétaire pérenne mais comme une
donnée tendancielle », critique le think tank. En revanche, son évaluation des dépenses nouvelles
est plutôt en ligne avec celle du candidat (16 milliards), alors que l'institut COE-Rexecode s'était
montré particulièrement critique sur ce point. En alertant sur une envolée des dépenses de
35 milliards d'euros.
Concernant les autres candidats, l'Institut Montaigne a chiffré le dérapage de la dépense publique à
plus de 100 milliards d'euros chez Benoît Hamon et Marine Le Pen, plus de 200 milliards pour
Jean-Luc Mélenchon ! Chez Benoît Hamon, le décalage est net avec l'estimation des dépenses par
le candidat lui-même (71 milliards), non pas tant en raison du revenu universel mais des autres
promesses de dépenses (dix-huit au total), souvent sous-évaluées. Le programme de Marine Le Pen
promet lui aussi une envolée du déficit : les économies sont évaluées à seulement 1,6 milliard,
quand la liste des dépenses est très longue : prime de pouvoir d'achat à 15 milliards, baisse de l'âge
de la retraite (27 milliards), hausse des moyens de la défense (35 milliards). Sans compter la
renationalisation d'EDF et des autoroutes... La palme des hausses de dépenses (208 milliards)
revient néanmoins à Jean-Luc Mélenchon, qui arrive aussi largement en tête du côté des hausses
d'impôts : +85 milliards.