Chaire Interuniversitaire et Interdisciplinaire en Economie Sociale et

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Contact : Amélie Lefebvre 03 20 12 54 39 ou [email protected]
Chaire Interuniversitaire et Interdisciplinaire en Economie
Sociale et Solidaire et soutenabilité du territoire
- Volet recherche -
La recherche entreprise en 2015-2016 vise à entrecroiser les notions de l’économie sociale et solidaire et des communs en
s’appuyant sur des terrains d’étude situés dans la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie.
L’économie sociale et solidaire se définit comme des actions collectives à la fois socio-économiques et socio-politiques et les
communs comme des systèmes auto-organisés et auto-gouvernés de ressources partagées entre des utilisateurs. L’hypothèse de
notre recherche est que le croisement entre ces deux notions peut être fécond pour définir un modèle d’économie qui, en plus d’être
au service de la société, ancré dans les territoires, respectueux de l’environnement et démocratique, soit plus coopératif et permette
davantage l’implication des habitants dans la maîtrise des activités économiques.
En nous appuyant sur de nombreux travaux sur l’économie sociale et solidaire et sur les communs, mais aussi sur l’analyse
d’expériences concrètes comme le chantier de la Transformation économique et sociale régionale (TESR) autour des biens communs
de la région Nord-Pas-de-Calais, nous avons montré que ces deux notions d’ESS et de communs pouvaient se féconder mutuellement.
Dans un sens, les communs peuvent apporter des dimensions nouvelles à l’ESS de mutualisation, de collaboration, de capacités
institutionnelles des acteurs à mettre en place des règles pour le bon fonctionnement de leur activité. En outre, les communs instillent
une nouvelle culture de la citoyenneté active qui consiste à prendre des initiatives, à s’engager, à s’approprier des activités
économiques, faisant naître ainsi de nouvelles façon de faire plus autonomes qui méritent la confiance. Dans l’autre sens, il est très
important de voir que l’ESS décloisonne les communs, qu’elle les ouvre sur le territoire et la société tout entière, sur des réseaux
d’acteurs et des partenariats avec les collectivités publiques.
Surtout, nous nous sommes appuyés sur les réflexions des acteurs de l’ESS et des communs à partir de plusieurs dizaines d’entretiens
(avec La Coroutine à Lille, Le Lieu Commun à Calais, Enercoop à Lille, l’Arpe à Cambrai, A Petits Pas à Avesnes-sur-Helpe). En les
écoutant, il nous est apparu que certaines dimensions de la théorie dominante des communs d’Ostrom1 devaient être critiquées, en
particulier les notions de « ressources » et de « communautés ». Partir de la ressource et en déduire la communauté est en effet
problématique, car c’est le collectif qui fait la ressource et non l’inverse ; il vaut mieux partir des collectifs sociaux d’un territoire afin
d’étudier et de voir comment on va pouvoir adapter des « ressources » à des « besoins ». En outre la notion de communauté est trop
fermée sur elle-même, elle fait comme si la communauté pouvait s’auto-satisfaire sur tous les plans au sein de son microcosme, alors
que l’ESS pousse à penser les communs à l’intérieur de la société et au sein des réseaux qui peuvent se former sur un territoire.
1 Elinor Ostrom (1933-2012), économiste et politiste américaine, « prix Nobel » d’économie en 2009.
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A partir de l’ensemble de ces analyses, nous sommes parvenus à deux notions clés pour construire un modèle plus coopératif et
implicatif d’économie : les
communs sociaux
et le
gouvernement public des communs
. L’idée des communs sociaux au sens de
systèmes d’acteurs reliés en réseau par la mise en partage réciproque de leur activité permet d’ancrer les communs dans la société et
le territoire ; celle de gouvernement public des communs, au sens d’un partenariat fondé sur la collaboration et la co-construction,
laissant l’initiative et l’autonomie aux citoyens dans l’organisation de l’activi et l’élaboration des règles sous garantie publique,
consiste à penser la relation des communs avec les institutions publiques dans le but de susciter une nouvelle culture de l’action
publique qui accorde plus de confiance aux citoyens en favorisant leur engagement pour l’intérêt général de la collectivité.
A partir de ces deux notions, nous avons formulé un ensemble de paramètres qui nous servent de grille interprétative des terrains que
nous étudions :
1. Toutes les parties prenantes de l’activité ont le droit de décider de finalités et des règles d’organisation.
2. Il existe au sein de l’organisation des dispositifs qui permettent l’expression collective des exigences et des instruments
de régulation des conflits.
3. L’organisation est imbriquée en réseau avec d’autres organisations d’un même territoire et chacune d’elle met en
partage réciproquement son activité.
4. Il existe des dispositifs de discussion et de délibération commune entre les organisations imbriquées pour la mise en
place de règles communes.
5. Il existe des partenariats avec des collectivités publiques pour mettre en place des activités dont les citoyens ont
l’initiative.
6. Les collectivités soutiennent les initiatives citoyennes tout en leur laissant l’autonomie dans la détermination des
finalités et des règles régissant le fonctionnement de l’activité.
7. Il existe des dispositifs collectifs impliquant toutes les parties prenantes pour discuter des modalités de la collaboration
entre les pouvoirs publics et les initiatives citoyennes.
Cet ensemble de paramètres nous permet ensuite à partir de l’analyse de nos terrains d’étude de dresser un premier état des lieux du
niveau d’intégration de l’ESS et des communs dans la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie.
Les perspectives prochaines de la recherche sont d’une part de développer l’étude de terrain sur la Picardie et d’autre part
d’approfondir ce modèle des initiatives sociales et solidaires en communs. Les enjeux pour la société et les collectivités en sont
importants : le niveau d’emploi, le lien social, le maillage du territoire, la citoyenneté économique et la qualité de la vie.
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