Œil et Physiologie de la Vision - VII-2. 1ère partie
VII-2 : ELECTROPHYSIOLOGIE PEDIATRIQUE :
EXEMPLES
Première partie
Florence Rigaudière
Eliane Delouvrier
Jean-François Le Gargasson
Pour citer ce document
Florence Rigaudière, Eliane Delouvrier et Jean-François Le Gargasson, «VII-2 :
ELECTROPHYSIOLOGIE PEDIATRIQUE : EXEMPLES», Oeil et physiologie de la vision [En
ligne], VII-Electrophysiologie pédiatrique, mis à jour le 04/04/2014, URL :
http://lodel.irevues.inist.fr/oeiletphysiologiedelavision/index.php?id=162,
doi:10.4267/oeiletphysiologiedelavision.162
Plan
Première partie
Absence d’éveil visuel ou comportement visuel anormal chez le nourrisson
Eléments cliniques à rechercher
Anomalies visibles des globes oculaires
Microphtalmie
Cornée, iris, cristallin
Colobome papillaire
Anomalies associées
Absence d’anomalies visibles des globes oculaires
Apraxie oculo-motrice
Retard de maturation sans nystagmus
Retard de maturation avec nystagmus
Déficience visuelle d’origine cérébrale
Syndrome de West
Atteintes rétiniennes de présentation précoce
Achromatopsie : absence de fonctionnement de tous les cônes
Monochromatisme à cônes S : fonctionnement des seuls cônes S
Rod-cone dystrophies congénitales progressives
Héméralopie : signe d’un dysfonctionnement du système scotopique
Trois types de CSNB à fond d’œil normal : autosomiques dominantes, incomplètes (type II) & complètes
(type I)
Diagnostic d’une CSNB chez un tout petit
Peut-on confondre une CSNB avec une rod-cone dystrophy ?
Deux CSNB à fond d’œil anormal : fundus albipunctatus & maladie d’Oguchi
Baisse d’acuité visuelle chez l’enfant ou l’adolescent
Pathologies héréditaires de manifestation juvénile
Dystrophie maculaire juvénile de Best : dysfonctionnement de l'épithélium pigmentaire
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Œil et Physiologie de la Vision - VII-2. 1ère partie
Maladie de Stargardt : dysfonctionnement de l'épithélium pigmentaire et des photorécepteurs
Rod-cone dystrophy ou cone-rod dystrophy : dysfonctionnement évolutif des deux types de
photorécepteurs
Dystrophie des cônes : dysfonctionnement de tous les cônes
Rétinoschisis : dysfonctionnement des couches internes
Neuropathies optiques héréditaires
Pathologies traumatiques
Exemple : syndrome de Terson
Pathologies anorganiques
Baisse d’acuité visuelle inexpliquée et électrophysiologie anormale
Baisse d’acuité visuelle inexpliquée et bilan normal : rechercher d’autres causes de gènes visuelles
Acuité visuelle basse inexpliquée et électrophysiologie normale
Texte intégral
Collaborations : Anne Jacob & David Lebrun : prise en charge des enfants et
enregistrements des bilans ; Dr Pierre Bitoun, Hôpital Jean Verdier, Bondy, AP-HP :
analyses génétiques ; Dr Monique Elmaleh-Bergès, Hôpital Robert Debré, Paris, AP-HP :
imagerie pédiatrique.
Les circonstances de mise en œuvre d’un bilan électrophysiologique sont différentes selon
les signes d’appel : déficit visuel ou pathologie systémique au premier plan. Elles sont
également différentes selon les âges, nourrisson ou grand enfant. Elles ont cependant un
point commun, la recherche, l’évaluation, le diagnostic ou le pronostic d’une déficience
visuelle.
Le but de ce chapitre n’est pas de reprendre de façon exhaustive toute la pathologie
ophtalmo-pédiatrique, mais de présenter quelques exemples illustrant l’intérêt du bilan
électrophysiologique chez l’enfant.
Absence d’éveil visuel ou comportement visuel anormal chez le
nourrisson
En l’absence d’antécédents pathologiques néonataux ou périnataux, l’éveil visuel normal
du nourrisson est très précoce, avant l’âge de deux mois. Une absence de fixation, de
sourire ou d’intérêt, de poursuite, un strabisme constant, une photophobie intense, un
nystagmus (Lambert, Taylor & Kriss, 1989), une errance du regard, des signes digito-
oculaires ou des mouvements stéréotypés, déclenchent une consultation spécialisée en
ophtalmologie et/ou en neurologie.
Eléments cliniques à rechercher
L’examen clinique ophtalmologique doit être rigoureux.
Une anomalie des annexes ou des globes oculaires peut être évidente.
L’oculomotrici doit être soigneusement analysée. Tous les systèmes sont évalués en
fonction de l’âge de l’enfant, fixation, saccades, poursuite, mais aussi réflexes vestibulo-
oculaires et nystagmus opto-cinétique en monoculaire et binoculaire. On recherche un
strabisme, des mouvements anormaux : nystagmus, dyskinésie des saccades, déviation
du regard, crises oculogyres évocatrices d’une épilepsie.
On observe les pupilles : anisocorie, réflexes photomoteurs, recherche d’un déficit du
réflexe pupillaire afférent qui ferait craindre une neuropathie optique unilatérale.
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Œil et Physiologie de la Vision - VII-2. 1ère partie
Une réfraction sous cycloplégie est indispensable ; elle peut mettre en évidence une forte
amétropie, myopie ou hypermétropie dont la correction amènera rapidement la
résolution de la symptomatologie.
On examine à la lampe à fente les cornées (taille, transparence), les cristallins,
(cataracte partielle ou complète, uni ou bilatérale, ectopie), les iris (colobome, aniridie),
un iris transilluminable chez un bébé nystagmique permet d’affirmer l’albinisme avec son
hypoplasie maculaire.
On recherche des signes indirects d’hypertonie oculaire qui imposent une mesure de la
pression oculaire sous anesthésie générale.
L’examen du fond d’œil peut être normal ou mettre en évidence des anomalies du vitré,
des anomalies maculaires ou rétiniennes d’origines héréditaires (suspicion d’amaurose
congénitale de Leber…), infectieuses (toxoplasmose…), tumorales (rétinoblastome…),
traumatiques (maltraitance), malformatives, des séquelles d’embryo-foetopathies
(rubéole…) ou des anomalies de la papille (colobome, hypoplasie…).
L’association à des signes généraux est aussi soigneusement recherchée : retard
psychomoteur, surdité, polydactylie…
Au terme de cet examen, deux cas bien différents peuvent se présenter selon que l’on
retrouve ou non des anomalies des globes oculaires expliquant le déficit visuel.
Anomalies visibles des globes oculaires
Microphtalmie
Exemple
P., 4 mois présente une microphtalmie gauche avec micro-cornée et luxation partielle du
cristallin gauche.
L’exploration fonctionnelle visuelle est demandée pour apprécier la fonction visuelle de
l’œil droit qui est cliniquement normal et celle, potentielle, de l’œil gauche après que sont
connus les résultats de l’échographie et de l’IRM.
Echographie
Figure VII-2-1. P., 4 mois : échographie de l’œil droit et de l’œil gauche. L’œil droit est
normal avec un diamètre antéro-postérieur de 17,7 mm. L’œil gauche présente une
microphtalmie avec micro-cornée, un diamètre antéro-postérieur de 16 mm, une petite
chambre antérieure et un relativement volumineux cristallin d’aspect immature, subluxé,
avec persistance du vitré primitif et artère hyaloïde.
IRM
Figure VII-2-2. L’IRM cérébrale de cet enfant montre de plus une hypoplasie de la partie
gauche de son chiasma et des bandelettes optiques gauches (tractus optique gauche),
une hypoplasie du bulbe olfactif gauche, une dilatation ventriculaire et des petites zones
d’hétérotopie nodulaire en regard des carrefours avec un relatif hypersignal de la
substance blanche périventriculaire. Le corps calleux est complet, le lobe cérébelleux
gauche paraît un peu moins volumineux que le droit avec une méga grande citerne
asymétrique.
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Œil et Physiologie de la Vision - VII-2. 1ère partie
Analyse des résultats
Figure VII-2-3. ERG flash : à droite, il est discernable ; les réponses sont sensiblement
normales. A gauche, les réponses sont d’amplitudes diminuées. Ce résultat montre que la
rétine droite est correctement fonctionnelle mais que la rétine gauche présente un
dysfonctionnement important, probablement en relation avec la surface rétinienne
restreinte due à la microphtalmie. PEV flash : après stimulation binoculaire ou de l’œil
droit, il y a une réponse discernable en regard du lobe droit mais pas de réponse en
regard du lobe gauche ; après stimulation de l’œil gauche, il n’y a pas de réponse
discernable. Ces résultats suggèrent l’existence d’un trouble majeur de la conduction en
zone juxta et/ou rétrochiasmatique gauche.
Synthèse
On peut conclure 1- que la fonction visuelle de l’œil gauche se réduit au mieux à une
perception lumineuse et 2- que le chiasma et le tractus gauche trouvés hypoplasiques
aux examens neuroradiologiques, ne sont pas fonctionnels.
Cornée, iris, cristallin
L’opacification partielle ou totale de la cornée, la présence de malformations iriennes,
d’une cataracte congénitale, la persistance du vitré primitif peuvent être associées à des
anomalies rétiniennes qui sont recherchées par électrophysiologie.
Albinisme oculaire
Exemple
(Russell-Eggitt, Kriss & Taylor, 1990). J., 5 mois présente un nystagmus. L’iris est bleu
transilluminable, la peau est claire, les cheveux et les phanères sont blonds. Les zones
maculaires semblent atypiques. Il s’agit vraisemblablement d’un albinisme oculaire.
Analyse des résultats
Figure VII-2-4. L’ERG flash est normal, reflet d’un fonctionnement rétinien global normal.
Les PEV flash sont bien discernables ; après stimulation de l’œil droit, la réponse
enregistrée en regard du lobe droit est moins ample que celle enregistrée en regard du
lobe gauche ; après stimulation de l’œil gauche, c’est l’inverse.
Synthèse
A cet âge, ce résultat peut être physiologique, (figures VII-1-36, VII-1-37, VII-1-38)
mais, dans le contexte clinique, il est plutôt la traduction de l’hyperdécussation des voies
croisées qui sous-tend l’albinisme oculaire. On note (flèche verte) que l’amplitude de la
réponse binoculaire est comparable à celles des réponses monoculaires, suggérant que la
maturation des mécanismes binoculaires n’est pas encore suffisante pour modifier
l’amplitude des PEV, ce qui est compatible avec l’âge.
Remarque
Dans ce cas, le diagnostic pouvait être affirmé cliniquement. Dans l’albinisme oculaire
cependant, albinisme « brun » ou tyrosinase-positive en particulier- la décoloration de
l’iris, de la peau et des phanères peut être modérée voire très modérée et l’iris
difficilement transilluminable (Apkarian & Bour, 2006), (Gronskov, Ek & Brondum-
Nielsen, 2007). Dans ces cas difficiles, si les résultats électrophysiologiques montrent une
asymétrie de réponses entre les lobes après stimulation de chaque œil, l’albinisme
oculaire est fortement probable.
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Œil et Physiologie de la Vision - VII-2. 1ère partie
Aniridie et cataracte
Exemple
S., 3 mois présente une aniridie bilatérale. A droite, il a une cataracte partielle qui laisse
voir une papille droite hypolasique et atrophique et, à gauche, une cataracte totale. La
question est de savoir s’il est légitime d’enlever le cristallin gauche, l’aniridie étant
souvent associée à une hypoplasie papillaire et maculaire (Ndoye Roth, de Medeiros
Quenum, Wane Khouma, Dieng, Ndiaye, Diane, Addaniaoui, Ba, Ndiaye & Wade, 2005)
dont le mécanisme est différent de celui de l’albinisme (Neveu, Holder, Sloper & Jeffery,
2005).
Analyse des résultats
Figure VII-2-5. L’ERG flash issu de l’œil droit ou gauche est normal, témoin d’un
fonctionnement rétinien global normal à droite et à gauche. Les PEV flash sont
discernables, asymétriques après stimulation de l’œil droit et de l’œil gauche. A droite, on
observe une réponse atypique avec persistance de l’onde N 300 en regard du lobe droit
et une réponse asymétrique enregistrée en regard du lobe gauche. A gauche, on observe
une réponse de morphologie normale avec ses deux ondes P2 et N3, enregistrée en
regard du lobe droit et une réponse asymétrique en regard du lobe gauche.
Synthèse
Ces résultats montrent que derrière la cataracte totale, la rétine gauche est normalement
fonctionnelle ; ils mettent aussi en évidence un trouble de la conduction plus important le
long du nerf optique droit que gauche à relier probablement à l’hypoplasie de la papille
droite. Les asymétries de réponses observées entre des deux lobes après stimulation de
chaque œil peuvent être le reflet d’une asymétrie interhémisphèrique comme observée
au cours des hypoplasies fovéales (Neveu, von dem Hagen, Morland & Jeffery, 2008) et
donc suggérer la présence d’hypoplasies fovéales bilatérales.
Ces éléments aideront le chirurgien à prendre sa décision opératoire.
Colobome papillaire
Signes cliniques
Le colobome papillaire est une anomalie de développement de la papille liée à un défaut
de fermeture de la fente embryonnaire à son extrémité postérieure. Il se présente
comme une excavation blanche, à bords bien limités, décentrée vers le bas. L’anomalie
peut s’étendre et englober la choroïde et la rétine inférieure adjacente ; le colobome
papillaire est alors souvent associé à un colobome de l’iris et/ou à une microphtalmie.
Le plus souvent, il n’y a pas de corrélation entre le déficit fonctionnel et l’aspect
anatomique, soulignant l’intérêt de l’examen électrophysiologique pour apprécier
précocement la fonction visuelle et, en cas de colobome unilatéral, pour évaluer les
chances de récupération d’une éventuelle amblyopie fonctionnelle surajoutée (Tormene &
Riva, 1998).
Exemple
J., 3 mois présente un nystagmus horizontal depuis sa naissance. Le segment antérieur
est normal ; on observe un petit colobome papillaire bilatéral.
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