Draveil Commission Bovine 24 et 25 octobre 2000 Quelle Politique Laitière pour l’Europe Zohra BOUAMRA-MECHEMACHE et Vincent REQUILLART1 INRA Unité ESR, Toulouse. Alors-que la plupart des organisations communes de marché des produits agricoles dans l’UE ont évolué au cours des 10 dernières années, la politique laitière européenne demeure inchangée dans ses grandes lignes depuis la mise en place des quotas laitiers en 1984. Compte tenu des pressions externes (OMC) mais aussi internes (bien-fondé d’un système de quotas, élargissement de l’UE, …), il est clair que la politique laitière européenne changera dans les années à venir. L’accord de Berlin signé en mars 1999 constitue une première rupture. Pour étudier l’impact de différents scénarios de politique laitière, l’INRA développe des modèles du secteur laitier européen. Les principaux résultats obtenus jusqu’alors sont présentés. On montre notamment qu’une politique qui consisterait à réduire le quota européen et à diminuer fortement les subventions aux exportations est préférable, y compris pour les producteurs, à la politique initiée à Berlin. Une version plus élaborée du modèle permettra d’analyser l’impact de scénarios de suppression des quotas. La nécessité de limiter les exportations subventionnées La politique laitière européenne est fondée sur un soutien de la production par les prix et sur une limitation de l’offre par des quotas (voir encadré 1). Les prix intérieurs étant nettement supérieurs aux prix mondiaux, la majeure partie des exportations sont réalisées grâce à des subventions aux exportations, les restitutions. L’UE, principal exportateur mondial de produits laitiers, exporte ainsi 10% de la matière grasse et 11% de la matière protéique qu’elle produit (voir tableau 1). Tableau 1 : Exportations européennes de produits laitiers. 1997. Beurre Poudre grasse Poudre écrémée Fromage Lait concentré Lait liquide Produits. Frais Restitutions1 (% prix intérieur) 50 40 40 25 Exportations (% production) 11,6 64,0 23,6 7,8 25,8 0,9 0,3 1 Ordre de grandeur des restitutions accordées en % du prix intérieur 1 Répartition des exportations Mat. Grasse Mat. protéique 36,3 0,3 28,7 37,7 0,5 25,4 27,8 28,5 5,2 5,6 1,3 2,0 0,3 0,5 100,0 100,0 D’après données ZMP Le travail présenté ici a bénéficié d’un soutien important du CNIEL. Cela étant, les positions défendues n’engagent que les auteurs de la présente note. 80 Draveil Commission Bovine Dans l’ensemble, les exportations européennes concernent des produits relativement peu élaborés (beurre, poudres de lait) pour lesquels le niveau des restitutions est élevé. Certains produits comme les poudres grasses sont essentiellement destinées à l’exportation alors que nous ne sommes pas, loin s’en faut, compétitifs. Continuer cette politique n’est plus possible dans la mesure où les accords du GATT viennent limiter les possibilités d’exporter avec subventions. Ainsi, dans le cadre de l’accord agricole de l’Uruguay Round (AAUR), l’UE s’est engagée à réduire graduellement le volume de ses exportations subventionnées. Le tableau 2 indique d’une part la 24 et 25 octobre 2000 moyenne des exportations de l’UE pour les années 1992-1994, années pour lesquelles les exportations n’étaient pas contraintes et d’autre part les engagements pris pour les campagnes 1995/1996 et 2000/2001. Au delà, en l’absence de nouvel accord, les engagements de la campagne 2000/2001 sont reconduits. Ainsi, compte tenu des engagements pris et du niveau réel d’exportations, les contraintes induites par l’AAUR concernent essentiellement les fromages et les « autres produits laitiers ». C’est pourquoi, depuis 1995, l’UE a diminué le niveau des restitutions accordées à nombre de produits tels que les fromages, le lait concentré ou les produits frais. Tableau 2: Engagement sur les exportations subventionnées (accords du GATT) et réalisations 19921994 dans l’Union Européenne. Moyenne Engagement Engagement exportations 1995/1996 2000/2001 1992-1994 Beurre Quantité 1000 t 202 487.8 399.3 Valeur M. Ecu 1392.1 947.8 Poudre Quantité 1000 t 273 335.0 272.5 écrémée Valeur M. Ecu 406.2 275.8 426.5 321.3 Fromages Quantité 1000 t 502a 594.1 341.7 Valeur M. Ecu 1185.4 958.1 Autres Quantité 1000 t 1213b 1024.7 697.7 produits Valeur M. Ecu a) dont 75 000 t non subventionnées. Source : Commission Européenne b) total des exportations de poudre de lait non écrémée, lait concentré et produits frais. Il est difficile de juger de l’impact d’une mesure de politique agricole ou d’un accord en comparant les statistiques de marché sur des années avant et après mise en œuvre de la dite politique ou de l’accord. En effet de nombreux autres facteurs interviennent qui interfèrent avec les relations que l’on souhaite mettre en évidence. L’ensemble des analyses qui suit a été développé sur modèle, ce qui permet de faire des comparaisons « toutes choses égales par ailleurs » et donc de mesurer le rôle des politiques considérées. Pour une présentation simplifiée du modèle et des mécanismes sous-jacents, le lecteur se reportera aux encadrés 2 et 3. L’impact des accords de Marrakech Par rapport à une situation où les exportations ne seraient pas limitées, les engagements pris à Marrakech impliquent des réajustements sur l’ensemble des marchés des produits laitiers (scénario GATT 2000). La principale contrainte induite par l’AAUR porte sur les exportations de fromage qui, par rapport à une situation d’exportations non contraintes, doivent être réduites d’environ 200 000 tonnes. Cela correspond à une diminution de la demande totale de matière grasse et de matière protéique de 1,3% et 1,5% respectivement. Ces quantités doivent alors être écoulées sur d’autres marchés puisque la production globale de lait reste constante en raison de l’existence du système de quotas. Si la matière grasse disponible peut être vendue sur les marchés mondiaux à l’aide de subventions, il n’en est pas de même des matières protéiques. En effet, les exportations subventionnées de poudre de lait ne peuvent pratiquement pas augmenter en raison des accords sur la limitation des exportations subventionnées (par rapport à la situation de référence, elles ne peuvent augmenter que de 1,1%, cf. tableau 3). Il en résulte la nécessité de vendre l’excédent de matière protéique sur les marchés intérieurs. L’ajustement sur les marchés intérieurs conduit alors à une baisse du prix (et donc du niveau de soutien accordé) des matières protéiques beaucoup plus importante que celle des matières grasses (-6,8% et –0,8% respectivement). Cela remet en cause l’évolution récente de la politique de soutien qui a consisté à augmenter le soutien à la matière protéique au détriment du soutien à la matière grasse. 81 Draveil Commission Bovine En terme de surplus ou de revenus, l’engagement de limitation des exportations subventionnées a des effets redistributifs importants au détriment des producteurs agricoles et industriels (-1,5 Mds Euros) au profit des consommateurs (1,2 Mds Euros) et des contribuables (0,5 Mds Euros). Au total, les gains l’emportent sur les coûts, ce qui montre l’intérêt pour l’UE dans son ensemble de réduire les exportations subventionnées. Deux effets majeurs expliquent ces gains : la réduction des exportations européennes qui, 24 et 25 octobre 2000 toutes choses égales par ailleurs, a un effet positif sur les prix mondiaux (effet dit « grand pays ») et la réduction des ventes sur les marchés mondiaux de produits transformés à des prix inférieurs à leur coût de production. En effet, compte tenu des coûts de production du lait dans l’UE et des prix mondiaux peu élevés, les coûts de production dans l’UE de produits non différenciés , tel le beurre ou la poudre de lait écrémé, sont supérieurs aux prix mondiaux. Tableau 3 : Impacts sur quelques marchés de scénarios de réforme de la politique laitière. GATT 2000 Berlin 2000 Production Lait 0.0 +2,4 Beurre +0.8 +3.7 Poudre Ecrémée +1.0 +3.7 Poudre grasse +9.9 +16.5 Fromage dur ½ dur -1.6 +3.1 CONSOMMATION Beurre +0.3 +1.4 Poudre Ecrémée +1.2 +4.4 Poudre grasse +0.7 +2.5 Fromage dur ½ dur +1.8 +7.0 EXPORTATIONS Beurre +4.2 +19.4 Poudre Ecrémée +1.1* +1.1* Poudre grasse +16.4 +26.2* Fromage dur ½ dur -39.7* -39.7* PRIX Beurre -0.7 -3.4 Poudre Ecrémée -5.9 -22.1 Poudre grasse -3.3 -12.7 Fromage dur ½ dur -3.1 -11.6 Produits intermédiaires Crème -0.8 -3.8 Lait écrémé -6.8 -25.4 Matière première Lait à la ferme -4.0 -15.2 signifie que la contrainte d’exportations en volume est saturée. Les effets sont mesurés par rapport à une situation de référence commune mais fictive qui simule les conditions d’offre et de demande intérieure anticipée pour l’année 2000. GATT 2000: exportations subventionnées limitées par les engagements signés au GATT. Berlin 2000: : scenario GATT 2000 + augmentation du quota de 2,4%+ transfert du contribuable vers le producteur de 2,9 Mds Euro. Berlin 2007 Marché domestique +2,4 +0.7 -8.6 +16.2 +5.4 -2,4 -2.3 -6.1 -31.1 +0.6 -2.1 -10.8 +1.4 +9.4 +5.3 +5.4 +1.7 +4.2 +20.7 +1.1* +26.2* -39.7* -57.6 -29.1 -54.0 -39.7* -3.7 -10.8 -7.0 -6.2 -13.3 -7.0 -8.5 -7.1 -4.2 -13.5 -14.6 -8.0 -8.5 -11.1 Berlin 2007: Berlin 2000 + variation de la demande intérieure + transfert du contribuable vers le producteur de 2,9 Mds Euro. Marché domestique : GATT 2000 + diminution du quota européen de 2,4% et diminution des restitutions aux exportations de 50% + transfert du contribuable vers le producteur de 2,9 Mds Euro. 82 Draveil Commission Bovine 24 et 25 octobre 2000 Tableau 4: Variation des surplus et du bien-être de quelques scénarios de réforme (Mds Euro) GATT 2000 Berlin 2000 Marché domestique Variation des surplus Revenus des producteurs -1,5 -2,8* -1,5* Surplus des consommateurs +1,2 +4,5 +3,0 Dépenses des contribuables +0,5 -1,6* -1,1* +0,2 + 0,1 +0,5 Variation du bien-être Compte tenu d’un transfert direct du contribuable vers le producteur de 2,9 Mds Euro. Les implications de l’accord de Berlin En mars 1999, l’UE a décidé d’une évolution de la politique laitière européenne (voir encadré 1). Si l’on suppose que cette réforme est mise en œuvre dès à présent et en une seule étape (scénario intitulé Berlin 2000), l’effet sur les marchés laitiers est important. Ce n’est pas tant la baisse des prix d’intervention qui a un rôle moteur mais plutôt l’augmentation de la production (on suppose ici que l’augmentation de la production est identique à l’augmentation des quotas) qui entraîne une baisse importante des prix des produits. En effet, les exportations subventionnées, en raison des engagements pris au GATT, ne pouvant guère augmenter (sauf celles de beurre), l’augmentation de la production doit être écoulée sur le marché intérieur. La demande intérieure de produits laitiers étant peu élastique, une variation de la production se traduit alors par des effets prix importants. On montre qu’une variation de 1% du quota entraîne une variation dans le sens opposé du prix du lait au producteur d’environ 4,5%. Les contraintes portant sur les exportations subventionnées entraînent comme précédemment une baisse très déséquilibrée du prix des matières protéique (-25,4%) et grasse (-3,8%). Les effets redistributifs d’une telle politique sont importants et traduisent des transferts entre agents non négligeables au bénéfice notamment des consommateurs. Par contre, le gain collectif est très limité à cause de la faible élasticité de la demande intérieure et de l’inélasticité de l’offre en raison de la présence des quotas. Dans ces conditions, les variations de prix correspondent essentiellement à des transferts d’un groupe d’agents vers un autre sans que cela ne modifie de façon importante le bien-être global (i.e. la taille du gâteau à se partager). L’augmentation du quota en elle-même a un effet négatif sur le bien-être car elle incite à une augmentation des exportations pour lesquelles les coûts marginaux de production excédent le prix de vente sur le marché mondial. La mise en œuvre de l’accord de Berlin ne sera totalement réalisée qu’en 2007. D’ici cette date, la demande intérieure dans l’UE aura évolué (scénario intitulé Berlin 2007). On observe en effet une tendance à la diminution de la consommation de certains produits (beurre notamment) et inversement une tendance à l’augmentation de la consommation de fromages ou de produits frais. La prise en compte de ces évolutions conduit à nuancer les résultats précédents. Ainsi, de façon agrégée la demande de produits laitiers dans l’UE augmentera. Il en résulte une baisse moins forte du prix sur les différents marchés. Ainsi, le prix du lait au producteur baisse de 8,5% au lieu de 15,2%. De plus, la baisse est plus « équilibrée » entre matière grasse et matière protéique. En effet, les produits dont les exportations sont fortement contraintes voient leur consommation intérieure augmenter et inversement ceux pour lesquels les exportations sont peu contraintes (beurre) voient leur consommation diminuer. Par rapport au scénario précédent qui n’intégrait pas l’augmentation de la demande, le revenu des producteurs progresse de 2,5 Mds d’euros. Par rapport au scénario de référence, le revenu des producteurs baisserait peu (0,3 Mds d’euros environ), ce qui signifie que les transferts prévus dans l’accord de Berlin devraient couvrir la presque totalité de la baisse du revenu liée à la réforme. Un scénario axé sur le marché intérieur et la limitation des exportations subventionnées On a vu que la limitation des exportations subventionnées avait un impact positif sur l’économie dans son ensemble. L’idée est que collectivement on ne s’enrichit pas en vendant des 84 Draveil Commission Bovine produits à des prix inférieurs aux coûts de production. Plutôt que d’augmenter la production européenne et se conforter strictement aux accords du GATT, pourquoi ne pas se donner les moyens d’aller plus loin (ce qui nous sera certainement demandé au cours des négociations futures) en terme de diminution des exportations subventionnées. Cette idée est illustrée par le scénario « marché domestique » qui consiste à diminuer les restitutions unitaires de 50% et à diminuer le quota de 2,4%. Si l’on compare les résultats avec ceux du scénario « Berlin 2000 », on s’aperçoit alors que malgré la diminution forte des restitutions unitaires, la baisse du prix du lait est plus faible. C’est une conséquence directe de la baisse de la production qui compte tenu de la faible élasticité de la demande intérieure a un effet positif important sur les prix (on peut évaluer que la baisse de 2,4% du quota entraîne une augmentation du prix du lait d’environ 10%). Ce scénario engendre une forte diminution des exportations subventionnées qui sont alors inférieures aux engagements de l’AAUR. En termes de variation de surplus, ce scénario est préférable au scénario « Berlin 2000 » pour les producteurs, mais également pour le contribuable et l’UE dans son ensemble. Conclusions Les résultats présentés ci-dessus suggèrent qu’il est souhaitable que l’UE diminue ses exportations subventionnées au delà des engagements pris à l’OMC. Tant que le système de quotas existe, cela peut s’accompagner d’une diminution conjointe du niveau des quotas et du niveau des restitutions (et donc également des prix d’intervention). Les résultats suggèrent également qu’une politique de diminution forte des exportations subventionnées est possible économiquement sans dépasser les contraintes budgétaires définies dans le cadre de l’accord de Berlin. Au contraire, le besoin de compenser les pertes de revenu des producteurs seraient moindres que celui découlant de l’accord de Berlin. Une deuxième implication est que l’UE a intérêt à rechercher des marchés à l’exportation pour lesquels elle peut à terme devenir compétitive. Il ne s’agit sûrement pas de marchés de biens peu différenciés pour lesquels la compétitivité dépend essentiellement du coût du lait mais plutôt de produits plus élaborés pour lesquels nous avons du savoir-faire. A cet égard, il est frappant de constater que les exportations actuelles portent plus sur les produits peu dfférenciés que sur des produits élaborés. C’est un des effets pervers de long terme de la politique de soutien par les prix. S’engager sur cette voie de diminution puis 24 et 25 octobre 2000 d’abandon des restitutions à l’exportation pourrait d’ailleurs mettre l’UE en position de force dans les négociations à venir puisque c’est précisément sur ce domaine qu’elle est le plus souvent attaquée par ses partenaires commerciaux. Cela lui permettrait d’aborder les négociations de façon plus offensive et de se placer dans une meilleure position pour défendre un « modèle européen ». Les résultats ci-dessus illustrent également l’atout que représente pour l’UE l’importance de son marché intérieur. Ceci est d’autant plus vrai qu’une part importante des produits laitiers ne s’échange pas (ou marginalement) sur les marchés internationaux et que la demande pour ces produits est peu élastique aux prix. Il y a alors place pour des politiques de discrimination par les prix qui permettent, comme c’est le cas aux USA ou au Canada, de soutenir les prix aux producteurs. On peut remarquer que c’est d’ailleurs ce que font les producteurs agricoles lorsqu’ils empêchent que le prix de vente au détail du lait conditionné en brique ne descende en dessous d’une valeur seuil. Enfin, la question du devenir du système des quotas et du soutien par les prix qui l’accompagne est maintenant posée dans l’UE. En effet, sur le long terme, le maintien d’un soutien par les prix et de quotas a tendance à freiner les évolutions structurelles au niveau de l’offre et à limiter la demande (parfois de façon irréversible). C’est pourquoi nous développons actuellement des outils permettant d’analyser un certain nombre de conséquences de l’éventuel abandon de ce système. Références Bouamra-Mechemache Z. and V. Réquillart, 1999. Policy Reform in the European Dairy Sector. Effects on Markets and Welfare. Canadian Journal of Agricultural Economics, 47 :105-114. National and Trade Dairy Policies. Implications for the next WTO Negotiations. Policy Research Symposium, Octobre 1999, Kansas City. Voir Canadian Journal of Agricultural Economics, 47(4), 1999. Bouamra-Mechemache Z. and V. Réquillart, 2000. Analysis of EU Dairy Policy Reform. A paraître dans European Review of Agricultural Economics. Bouamra Z., H. Raynal and V. Réquillart, 1998 Impact économique de scénarios de réforme de la politique laitière européenne. INRA-ESR Toulouse, WP 98-01P. 85 Draveil Commission Bovine 24 et 25 octobre 2000 Encadré n°1 : description de la politique laitière européenne La politique laitière européenne Le soutien des prix du lait au producteur est indirect. Il résulte du soutien du prix des biens transformés. Prix d’intervention et stockage public : Un prix d’intervention est fixé pour le beurre et la poudre de lait écrémé (PLE) à partir d’un objectif de soutien du prix du lait (prix indicatif).. Taxes à l’importation : Pour maintenir les prix intérieurs des produits transformés à un niveau supérieur aux prix mondiaux, des droits de douane fixes sont appliqués aux frontières. Restitutions à l’exportation : L’UE étant exportatrice de produits laitiers, un système de restitutions à l’exportation est mis en place pour combler l’écart entre les prix intérieurs et les prix mondiaux. Aides à la consommation : Des aides sont accordées au beurre et à la PLE pour faciliter l’écoulement de ces produits sur le marché intérieur : utilisation de PLE pour l’alimentation du bétail, production de caséine, utilisation industrielle de beurre. Quotas de production : Compte tenu du niveau important du prix du lait dans l’UE et afin de limiter l’excédent de la production laitière, un système de quota a été introduit en 1984. Les accords de l’Uruguay Round du GATT Dans le cadre de l’accord de l’Uruguay Round du GATT (AAUR) conclu à Marrakech en 1994, l’UE s’est engagée à réduire ses exportations et à ouvrir des contingents d’importation. Le volet exportation : L’UE s’est engagée à réduire graduellement les exportations subventionnées de produits agricoles de 21% en volume et de 36% en valeur d’ici l’an 2000. Pour les produits laitiers, ces contraintes concernent les groupes de produits laitiers suivant : le beurre, la PLE, les fromages et « les autres produits laitiers ». Le volet importation : Les engagements pris lors des négociations du GATT impliquent l’ouverture de deux types de contingents d’importation sur le marché de l’UE dans des conditions préférentielles ; ces contingents s’appliquent à trois groupes de produits : le beurre, la PLE et les fromages : • • l’accès courant : contingent d’importation correspondant au volume d’importations réalisées dans des conditions préférentielles au cours de la période 1986-1988 ; l’accès minimum : contingents d’importations préférentiels complémentaires à droits réduits correspondant à 3% de la consommation intérieure en 1995 et qui devra atteindre 5% en 2000. La réforme de la politique laitière européenne En mars 1999, l’UE a décidé une réforme de la politique laitière européenne. Elle comprend : • une prolongation du régime des quotas jusqu’en 2007/2008. En outre, une augmentation graduelle des quotas laitiers est décidée. Au terme de la période (2007) l’augmentation des quotas sur l’ensemble de l’Union Européenne sera d’environ 2,4%. • une réduction des prix d’intervention du beurre et de la PLE de 15% en trois tranches égales à partir de la campagne 2005/2006. • un paiement direct aux producteurs laitiers pour compenser (au moins partiellement) la perte de revenu liée à la baisse des prix qui s’élèvera à 17,24 euros/ tonne éligible. Une enveloppe complémentaire de 0,9 Milliards euros sera allouée aux États Membres. Au total, les paiements directs représenteront environ 2,9 Milliards d’euros en 2007. 86 Draveil Commission Bovine 24 et 25 octobre 2000 Encadré 2 : le modèle Lait Lait écrémé PLE Beurre Biens composites fromage, poudres grasses etc.... Structure verticale de production Crème Offre de bien primaire Consommation intérieure + Exportations Offre de biens intermédiaires : coefficients techniques fixes bilan d’utilisation des matières production jointe Offre de biens finaux : coefficients techniques fixes Demande de biens finaux : dépend du prix intérieur et des restitutions à l’exportation Le modèle est un modèle d’équilibre partiel sectoriel de concurrence pure et parfaite. Pour prendre en compte le fait que l’intervention publique porte sur les produits finaux issus du lait et non pas seulement sur le lait, on introduit une structure verticale de production. On suppose que le lait peut être scindé en deux biens intermédiaires, la crème qui est essentiellement composée de matière grasse et le lait écrémé qui est essentiellement composé de matière protéique. Les deux biens intermédiaires sont alors recombinés pour produire l’ensemble des produits finaux. Une équation de bilan d’utilisation des biens intermédiaires permet de prendre en compte les contraintes technologiques. A l’équilibre, l’offre doit être égale à la demande pour chaque produit final. Ces derniers sont soit consommés sur le marché intérieur soit exportés sur le marché mondial. Des équations de prix relient le prix du lait et les prix des biens intermédiaires d’une part, les prix des biens finaux et les prix des biens intermédiaires d’autre part. PLE = Poudre de lait écrémé 87 Draveil Commission Bovine 24 et 25 octobre 2000 Encadré 3 : les mécanismes d’intervention La résolution analytique du modèle permet de déterminer l’impact des différents instruments utilisés pour réguler le secteur laitier européen. Nous présentons ici les effets a) d’une augmentation du niveau des quotas laitiers et b) d’une diminution du niveau des restitutions unitaires accordées aux fromages. Augmentation du niveau des quotas laitiers Quota laitier Production de lait Prix du lait Diminution des restitutions à l’exportation de fromage Subvention à l’exportation de fromage Offre de fromage Prix du fromage Production des biens intermédiaires Production des biens finaux Prix des biens intermédiaires Exportation de fromage Prix des biens intermédiaires Prix des biens finaux Consommation et exportations de biens finaux Une augmentation du quota laitier conduit à une augmentation de la production de lait et donc à une augmentation de l’offre de produits intermédiaires. Par conséquent, la production de produits finaux augmente et leur prix diminue. L’augmentation relative de la production diffère d’un bien à l’autre, compte tenu notamment des réponses différentes des demandes finales. Comme les prix des produits finaux diminuent, les prix des biens intermédiaires et donc le prix du lait diminuent. Enfin, la baisse des prix intérieurs entraîne une hausse de la consommation domestique et des exportations. Consommation de fromage Production de beurre et de PLE Prix du lait Prix du beurre et de la PLE Consommation et exportations de beurre et de PLE La réduction de la restitution unitaire de fromage a un effet négatif sur la demande agrégée de fromage qui conduit à une baisse du prix et de l’offre de fromage. Comme son prix diminue, la consommation domestique de fromage augmente et les exportations en volume diminuent. La baisse du prix du fromage se répercute sur le prix des biens intermédiaires et finalement sur le prix du lait. La réduction du prix des biens intermédiaires entraîne une augmentation de la production des autres biens et donc une baisse de leur prix. Finalement, leur consommation domestique et leurs exportations augmentent. 88