![](//s1.studylibfr.com/store/data-gzf/c3263899dc47b009cdd3631b11ebf087/1/002509155.htmlex.zip/bg4.jpg)
L’Encéphale, 2006 ;
32 :
106-12, cahier 1 Les phobies sociales en psychiatrie : caractéristiques cliniques et modalités de prise en charge
109
40,4 % ont été licenciés, 34,8 % ont démissionné, 6,4 %
sont en invalidité, et 13,5 % sont retraités. La durée
moyenne de cette absence d’activité professionnelle est
de 5,6 ans.
Caractéristiques cliniques
L’âge moyen d’apparition de la phobie sociale est de
23,3 ± 10,7 ans. Au moment de la consultation, la durée
d’évolution de la maladie est en moyenne de
12,5 ±10,2 ans, avec un premier diagnostic de phobie
sociale porté en moyenne à 28,2 ± 9,6 ans. Le nombre de
médecins consultés pour des symptômes imputables à la
phobie sociale est en moyenne de 1,86.
L’échelle d’anxiété sociale de Liebowitz indique les sco-
res moyens suivants :
– score de peur : 40,3 ± 12,6 (situations de perfor-
mance 22,1 ± 6,5 et situations d’interaction 18,2 ± 6,5) ;
– score d’évitement : 38,3 ± 13,6 (situations de perfor-
mance 20,5 ± 7,6 et situations d’interaction 17,7 ± 6,9).
Ces résultats reflètent un niveau d’intensité symptoma-
tique élevé, puisque le total des deux scores peur et évi-
tement atteint 78,6 en moyenne (un seuil de 50 pour définir
une phobie sociale est généralement admis), qui concerne
aussi bien l’anxiété que les conduites d’évitement, et cela
dans les deux types de situations évaluées : performan-
ces et interactions sociales.
En se basant sur le questionnaire sur les contextes
sociaux anxiogènes d’André et Légeron, on constate que
67,8 % des patients présentent une phobie généralisée,
c’est-à-dire que leur anxiété dans au moins trois des qua-
tre types de situations est forte ou extrême. On observe
une anxiété forte dans les situations de performance telle
que la prise de parole dans un groupe ou face à un public
(score moyen = 2,41 ± 0,7), dans les situations d’affirma-
tion telles que faire valoir son point de vue (score moyen
= 1,90 ± 0,8) et dans les situations d’observation telles
qu’être le point de mire des regards (score moyen = 2,04
± 0,8). En revanche, l’anxiété provoquée par les situations
d’intimité telles qu’avoir des discussions approfondies
avec des proches est évaluée par les patients à un niveau
moindre, c’est-à-dire intermédiaire entre léger et fort
(score moyen = 1,5 ± 0,8).
Les scores moyens de l’échelle HAD sont de 13,9 ± 3,8
pour l’anxiété, et de 9,1 ±4,5 pour la dépression, ce qui
reflète des niveaux élevés de symptomatologie anxieuse
et moyens de symptomatologie dépressive.
Troubles psychiatriques associés
Le
tableau II
résume les fréquences des troubles psy-
chiatriques selon les critères du DSM IV évalués à l’aide
du MINI (diagnostics actuels).
Près de la moitié des patients présentaient un épisode
dépressif majeur associé à la phobie sociale. Une agora-
phobie est diagnostiquée dans la moitié des cas et un trou-
ble panique dans un tiers des cas ; on peut penser que
cette comorbidité est en partie surestimée du fait que le
MINI ne prévoit pas de critères de diagnostic différentiel
très précis entre phobie sociale et agoraphobie. Seule-
ment 184 patients (19,3 %) présentent une phobie sociale
isolée sans autre trouble psychiatrique associé.
Risque suicidaire
Le risque suicidaire a été évalué à l’aide d’une section
spécifique du MINI qui prend en compte les idées suicidai-
res et les passages à l’acte au cours du mois écoulé et les
antécédents de tentative de suicide. Sur l’ensemble de
l’échantillon, 374 patients (39,3 %) présentent un risque
suicidaire. Ce risque est léger pour près de la moitié de
ces patients (49,7 %), et élevé pour 27 % d’entre eux. Un
antécédent de passage à l’acte suicidaire a été retrouvé
chez 146 patients, soit 15,3 % de l’échantillon total.
Évaluation du retentissement
Les patients présentent des scores moyens reflétant
une perturbation majeure de la qualité de vie à 7 sous-
échelles (sur 9) de la SF-36 : perte d’énergie/fatigue
(32,8 ± 17,1), sentiment d’être en mauvaise santé
(48,0 ± 20,8), retentissement sur la vie relationnelle
(34,8 ± 19,4), retentissement de la santé physique
(48,5 ± 40,9) et psychique (34,9 ± 16,3) sur la vie quoti-
dienne, retentissement sur l’état émotionnel (34,9 ± 6,3),
évolution défavorable de l’état de santé (43,9 ± 23,6). Le
retentissement est plus modéré sur la qualité de vie liée
à l’intensité des douleurs physiques (67,9 ± 26,7). En
revanche, les patients ne se sentent pas ou peu limités
(83,9 ± 19,7) dans les activités physiques.
Les patients évaluent, par l’échelle de handicap de
Sheehan, leur vie professionnelle et leur vie familiale
comme moyennement perturbées (score moyen
= 6,1 ± 2,6 et 5,0 ± 2,7, pour le travail et la vie familiale,
respectivement) et considèrent leur vie sociale comme
moyennement à sévèrement perturbée (score moyen
= 6,6 ± 2,3).
Pour la majeure partie des patients, l’échelle VISA
signale également un retentissement important de la pho-
bie sociale sur la vie familiale, sociale, et professionnelle
(tableau III)
. Le seul domaine qui semble moins touché est
la capacité à acquérir une autonomie financière. Le score
total moyen de l’échelle VISA est de 16,6 ± 5,6 (2 à 32).
TABLEAU II. —
Comorbidité psychiatrique évaluée à l’aide
du MINI selon les critères du DSM IV (n = 952).
Diagnostics Fréquence
Épisode dépressif majeur 47,7 %
Agoraphobie 49,2 %
Trouble panique 31,1 %
Dépendance alcoolique 10,6 %
Abus de substances 12,7 %