F801 • Imagerie cérébrale : plonger dans les méandres du cerveau • www.frm.org 3
d’étudier le cerveau se trouvent (comme un
satellite) très loin de ce fameux organe, même si
les capteurs des caméras sont proches. Le
cerveau est un organe qui n’est pas fixe : il se
déroule comme de petites vagues à la surface
du cortex cérébral. Les cellules grises, les
millions et milliards de neurones que l’on voit
lorsque l’on visualise ainsi la surface du cerveau
sont l’objet d’un embrasement progressif et
mobile ; les vagues partent d’un certain point
pour aller à un autre ; et cet embrasement
s’effectue en quelques fractions de seconde et
correspond à nos processus de pensée,
d’émotion et de langage.
Des activités telles que la lecture ont besoin
d’embraser beaucoup de cellules.
L’embrasement part d’en arrière du cerveau pour
aller vers l’avant et correspond au fait que,
progressivement, des populations neuronales
tout entières, activées les unes derrière les
autres, permettent de passer de la perception du
mot écrit sur la page à l’articulation du mot
lorsque la tâche est de lire à haute voix par
exemple.
Ces expériences sont très importantes parce
qu’elles permettent de localiser des fonctions
élémentaires, puis de plus en plus sophistiquées
dans le cerveau, fonctions qui risquent de
devenir déficitaires dans des maladies comme la
maladie d’Alzheimer. Cette maladie touche au
moins 5 % des plus de 65 ans. Cette maladie est
extrêmement fréquente, elle atteint environ en
France 4 à 500 000 personnes. C’est une
prévalence* considérable et, malheureusement,
nous craignons qu’elle augmente beaucoup.
C’est une maladie dont l’incidence* est liée au
vieillissement et, comme toutes les autres
sociétés occidentales, notre société vieillit. Cette
maladie est donc en augmentation constante et
représente un très grave problème de santé
publique, parce qu’elle induit une perte
d’autonomie de vie sociale et professionnelle,
parce qu’elle atteint en particulier ses capacités
de mémoire, c’est-à-dire sa faculté de se
souvenir des événements de la vie quotidienne.
Elle atteint en effet des secteurs du cerveau qui
sont spécialisés dans certaines fonctions de
mémoire. On commence à pouvoir prédire cette
maladie à l’avance, de manière à prendre toutes
les dispositions possibles pour mieux la traiter, la
soigner, la prévenir dans toutes ses dimensions.
Si des mesures précises en IRM indiquent que
certaines régions précises dans le lobe temporal
sont un peu atrophiques, on peut prédire que
trois ans plus tard, l’atrophie aura augmenté et
que les tests de mémoire et les performances en
général dans les tests de fonctions intellectuelles
auront diminué. Cette prédiction est également
possible avec une autre technique d’imagerie :
on place dans un tomographe à émission de
positons ou dans une IRM des gens susceptibles
de développer une maladie d’Alzheimer parce
qu’ils se plaignent de troubles de la mémoire et
parce qu’ils ont des particularités génétiques. On
leur fait faire alors des tests de mémoire en leur
demandant de se souvenir de paires de mots
(par exemple chou-plume, obéir-avancer). En
fait, les personnes à risque, qui ont développé
quelques années plus tard la maladie, ont de
bonnes performances dans le test de mémoire,
mais elles dépensent une énergie trop
importante lorsqu’elles effectuent ce travail.
En cas de pathologie, on commence aussi à
pouvoir, grâce à l’imagerie, apprécier l’efficacité
d’un traitement. Prenons l’exemple d’une
pathologie vasculaire. Une personne a fait un
accident vasculaire cérébral, un infarctus du
cerveau qui la rend aphasique, incapable de
parler et, dans une moindre mesure, incapable
de comprendre. On a pu rééduquer cette
personne, lui permettre d’améliorer ses
performances d’élocution et de retrouver des
mots qu’elle ne trouvait plus avant cette
rééducation intensive. Les vues d’IRM montrent
que, sous l’influence de cette rééducation, il se
produit une réactivation d’un territoire du cortex
qui n’était plus actif à cause de la lésion.
La dyslexie développementale, maladie peu
connue, touche pourtant au moins un million de
personnes en France. Il s’agit d’une difficulté à
apprendre à lire et à écrire convenablement et à
devenir un lecteur expert. Les dyslexiques ne
seront jamais des lecteurs experts, même quand
ils auront pu compenser leur trouble et parvenir à
un niveau scolaire tout à fait honorable. Quand
on compare des étudiants dyslexiques lisant à
haute voix par exemple le mot « tableau », par
rapport à des étudiants non-dyslexiques lisant
plus vite ce même mot, il apparaît qu’une zone
du cerveau ne s’active pas chez les
dyslexiques : la dyslexie empêche cette région
du cerveau de fonctionner correctement. Si on
soumet les dyslexiques volontaires à un
programme d’entraînement pour faire en sorte
qu’ils lisent mieux et plus vite, il apparaît que
cette région-là se ré-éclaire.
Les perspectives offertes par l’imagerie médicale
sont multiples. La première, c’est de mieux
comprendre l’impact des thérapeutiques. On sait