Siestes et Pauses dans la Centre de Référence Hypersomnies Rares Narcolepsie Siestes et pauses dans la narcolepsie La narcolepsie est un trouble de l’éveil sévère, caractérisé essentiellement par des accès brutaux et invincibles de sommeil qui surviennent plusieurs fois au cours de la journée. C’est une maladie rare qui touche en France 0,05% de la population, soit environ 27 500 à 55 000 narcoleptiques. Elle persiste tout au long de la vie et va retentir sur tous les aspects de la vie personnelle, professionnelle, sociale et familiale du patient. Pour aider les patients à mieux gérer leur somnolence, voici présentés dans cette brochure des conseils sur la sieste accompagnés de témoignages de patients narcoleptiques. Quelques rappels Les principaux signes cliniques sont l’hypersomnie, les “attaques de sommeil” et les cataplexies. L’hypersomnie ou la somnolence diurne excessive, récurrente et les accès de sommeil irrépressibles, habituellement restaurateurs d’un bon niveau d’éveil, sont les premiers signes de la maladie. Ces accès de sommeil peuvent survenir brutalement dans la journée, y compris au cours d’activités comme manger, conduire, travailler, souvent aux mêmes heures pour un même patient. Les cataplexies sont de brusques pertes du tonus musculaire, allant d’un simple affaissement de la mâchoire, du cou et de la tête, ou des épaules à la chute de tout le corps. Elles se produisent électivement lors des émotions inattendues, et notamment lorsque le patient rit et éprouve des émotions agréables. Elles sont brèves, d’une seconde à quelques minutes, et ne s’accompagnent jamais de perte de conscience. Ce signe est présent dans 75% des formes de narcolepsie. Il existe donc deux formes de narcolepsie : la narcolepsie avec cataplexie qui repose sur un diagnostic clinique (mais l’enregistrement de sommeil et les tests d’endormissement dans la journée sont fortement recommandés) et une forme de narcolepsie sans cataplexie dont le diagnostic nécessite les examens de laboratoire. A ces deux symptômes principaux peuvent s’associer des hallucinations (auditives, visuelles, sensitives) désagréables voire terrifiantes lors de l’endormissement ou du réveil, et des paralysies à l’endormissement et plus souvent au réveil, le sujet étant conscient mais incapable de bouger pendant quelques instants, seuls les muscles oculaires et respiratoires sont fonctionnels. Enfin, le sommeil de nuit est souvent de mauvaise qualité, fragmenté par de fréquents éveils et cauchemars. Les patients n’ont pas toujours conscience de leur mauvais sommeil. 1 Les traitements éveillants et la bonne gestion des siestes au cours de la journée permettent de réduire considérablement la somnolence diurne. Les accès de cataplexie sont généralement traités par les antidépresseurs, ou, plus récemment par le gamma OH. Actuellement, il existe dans chaque région de France des centres du sommeil spécialisés dans la prise en charge de la narcolepsie. Quels sont les bienfaits d’une sieste ? Le sommeil assure de nombreuses fonctions essentielles : réparer la fatigue musculaire, maintenir la température corporelle, participer à la défense contre les infections, permettre la croissance, réparer le stress, favoriser la mémoire… Mais le sommeil n’est pas utile uniquement la nuit, il peut également se manifester en journée. En effet, plus on avance dans la journée, plus on est éveillé depuis longtemps, et plus il est difficile de maintenir une vigilance optimale. En cas de “coup de pompe”, une sieste peut donc venir compléter une nuit difficile ou un peu courte. Ce moment de récupération vous aidera à augmenter votre attention, votre concentration et ainsi à prévenir les accidents de la route, du travail ou domestiques. Il est très important que les patients narcoleptiques utilisent les techniques de sieste lorsque les conditions matérielles le leur permettent, ce qui est loin d’être évident en milieu professionnel. Il faut déterminer par expérience le type de sieste, leur nombre et leurs horaires pour en tirer un bénéfice maximum pour le maintien d’une vigilance la plus efficace possible dans le cadre de la lutte contre la somnolence et les accès de sommeil diurnes. L’utilisation optimale de ces siestes adaptées est un complément indispensable des traitements pharmacologiques. Plusieurs études scientifiques ont désormais bien démontré que la sieste est un excellent remède pour combattre la somnolence et la dette de sommeil. Quelle que soit la durée de votre sieste, les consignes sont les mêmes. Il est essentiel de s’installer confortablement dans la pénombre et dans le calme. Pour arriver à vous relaxer : respirez calmement, détendez vos muscles, ne pensez plus à rien. Et même si vous n’arrivez pas à vous endormir réellement pendant cette sieste, vous vous serez quand même reposé, ce qui est déjà bénéfique. Essayez de repérer les moments les plus propices à la détente et à l’endormissement au cours de la journée. Ces moments où la pression de sommeil est importante et où l’on s’assoupit plus facilement, qu’on appelle encore “portes du sommeil”, reviennent de façon cyclique toutes les 2 heures environ, et ce tout au long de la journée. Elles sont surtout perceptibles en début d’après-midi (entre 13h et 15h), le soir et la nuit entre 3 et 4 heures du matin. 2 Plusieurs signaux vont vous aider à repérer ces portes du sommeil : bâillement, paupières lourdes, yeux qui clignotent ou qui piquent, vue floue, raideur dans la nuque, problèmes de concentration et de compréhension (par exemple, je relis 2 fois la même chose)… Pour vous aider à repérer ces rythmes, vous pouvez également remplir un agenda de sommeil à télécharger sur le site www.je-dors-trop.fr où vous noterez vos horaires de sommeil ainsi qu’un agenda de siestes à compléter ci-dessus. Complétez cet agenda de sieste pendant 2 semaines en hachurant vos temps de pause (cf exemple 2 premières lignes). AGENDA DE SIESTES “ Une patiente (Laurence) Depuis la naissance de mon bébé, je travaille plus et j’ai pris l’habitude de faire des siestes après le déjeuner pendant qu’il dort. Cela me fait un bien fou et me permet d’être en bien meilleure forme pour le reste de l’après-midi. ” 3 Une sieste, est-ce vraiment efficace pour maintenir une bonne vigilance ? L’expérience des navigateurs est un très bon exemple de l’utilité et de l’efficacité des siestes . Pour eux, la compétition dans la voile peut durer des jours et des nuits, et cela dans un environnement hostile qui nécessite une vigilance adaptée. Le principe chez les navigateurs est donc de fractionner le sommeil sur les 24 heures d’une journée de course. Ce sommeil devient alors polyphasique (en plusieurs fois), avec des périodes de sommeil allant en moyenne de quelques minutes à 1h30 sur les 24 heures. Le principe est de ne dormir que le temps nécessaire au maintien d’une bonne vigilance. Pour y parvenir, il faut notamment repérer dans la journée les “portes d’entrée du sommeil” pendant lesquelles le navigateur s’endort plus aisément et a un sommeil récupérateur. Même sans être navigateur, on peut restaurer une bonne vigilance grâce à une sieste. On distingue 2 types de courtes siestes. La première est la “sieste flash”. Cette micro-sieste dure moins de 5 minutes. Vu sa très courte durée, elle ne comprend ni sommeil profond ni sommeil paradoxal mais seulement du sommeil léger qui, sans être du sommeil réel, est une sorte de micro-sommeil. Cette sieste flash permettra de dissoudre le stress et de mieux s’adapter à un environnement contraignant. D’autre part, une période de sommeil, même très courte, est suffisante pour améliorer la mémoire. Pour y parvenir, les techniques de respiration ou de relaxation (sophrologie…) peuvent être très utiles. Ce type de pause peut se pratiquer dans les transports en commun, dans une situation de sécurité ou au bureau (lors des pauses). Au-delà de quelques minutes de sommeil, il ne s’agit plus d’une microsieste mais typiquement de ce qu’on appelle la “power nap”. Celle-ci dure entre 10 et 20 minutes. C’est le type de pause que recommande la sécurité routière, toutes les 2 heures de conduite. C’est pour cela qu’on l’appelle également la “sieste parking”. Comme la micro-sieste, elle ne comprend habituellement que du sommeil léger. Cependant, chez les sujets narcoleptiques, on peut observer au cours de cette sieste du sommeil paradoxal, ce qui est un des signes caractéristiques de cette pathologie. Il est recommandé de mettre un réveil pour que la sieste ne se prolonge pas au-delà des 20 minutes. En effet, si vous ne cessez pas le sommeil au bout de 20 minutes, vous risquez de dormir trop longtemps, surtout si la fatigue est importante, et d’avoir beaucoup de mal à “émerger” du sommeil. Idéalement, elle est à faire en début d’après-midi plutôt que trop tard en fin de journée. Une sieste trop tardive et/ou trop longue risque alors d’entraîner des difficultés à s’endormir le soir. 4 Cette sieste a un véritable effet ressourçant et permet de recharger les batteries. Elle améliore la performance et la vigilance, et diminue le risque d’accident. Ses bienfaits sont multiples : augmenter la productivité, améliorer le temps de réaction et la mémoire, limiter les risques d’endormissement le soir (devant la télévision, au théâtre…), prévenir la fatigue et l’épuisement… “ Une patiente (Charlotte) J’ai la chance de pouvoir m’endormir n’importe où et je profite des moments de pause (en particulier la pause-déjeuner) pour faire une “power nap” juste après mon café. Je me réveille ainsi rafraîchie et en forme pour me remettre au travail. ” Témoignage de Jean-Pierre Dick, navigateur Quel intérêt a la sieste dans la gestion de ta performance en course ? La sieste, c’est pour moi, un repos de jour qui va de 10 à 30 minutes. Elle me permet d’éliminer “une sorte de rigidité mentale” que l’on éprouve après une longue période d’effort physique ou intellectuel. La réussite d’une sieste, c’est la sensation de redémarrer avec un esprit frais et plus disponible. Elle permet de passer une journée en maintenant un niveau d’attention satisfaisant et permanent. Je peux enchaîner plusieurs siestes dans une journée et j’essaie de m’endormir ou simplement de me reposer. Fermer les yeux sans dormir peut parfois être suffisant. Donc en gros, rester longtemps dans un état d’éveil percutant. J’essaie de faire mes exercices intellectuels (navigation et stratégie) de l’après-midi après la sieste parce que je réfléchis mieux. As-tu appris à faire la sieste ou avais-tu des tendances naturelles à la faire ? J’ai appris à faire la sieste durant ma carrière sportive qui, de façon assez surprenante, a démarré après ma vie professionnelle en entreprise ! J’ai compris la puissance de cette pratique car elle permet d’être plus efficace dans l’absolu. Le temps “investi” dans cette période inactive est rentabilisé postérieurement par une concentration et une aptitude mentale supérieures. Aujourd’hui cette pratique correspond bien à mon activité professionnelle car elle me permet de rester “dans un sommeil plus fractionné” qui devient notre norme lorsque je suis au large. Quelle est pour toi la durée idéale d’une sieste ? Le temps idéal de la sieste est de 15 minutes. Cela permet une belle clairvoyance mentale et évite un assoupissement qui rend “groggy”. 5 Comment te prépares-tu à la sieste ? Une constante pour la réalisation de la sieste : utiliser un repas pour mieux dormir. Se coucher en période post-prandiale (après le repas) est essentiel, pas trop longtemps après la prise du repas, 5 minutes après le dessert. Par ailleurs, ce dernier est important car sucré, il favorise l’endormissement. En mer, un autre facteur de réussite très personnel : enlever les chaussettes et me glisser dans un sac de couchage. La bonne gestion de la température est importante, un masque sur les yeux peut bien améliorer les choses également. Comment fais-tu pour te réactiver après une sieste ? Je remue la tête et je salive. Je parle et surtout je me lève pour passer dans un autre état. Si vraiment cela ne percute pas, alors je m’asperge un peu d’eau douce avec un vaporisateur. En général, cela finit par redémarrer. Quelle sieste me permettra de bien gérer ma dette de sommeil ? Si la dette de sommeil accumulée pendant la semaine est trop importante, une courte sieste ne sera pas suffisante pour retrouver une vigilance correcte pendant plusieurs heures. Un moyen de diminuer efficacement cette dette de sommeil est de prévoir une sieste plus longue de type “somme”. C’est typiquement la sieste du dimanche en début d’après-midi après le déjeuner. Cette longue sieste comprend du sommeil léger mais également du sommeil profond et du sommeil paradoxal. C’est pour cette raison qu’elle est très récupératrice. Elle dure au moins un cycle de sommeil, c’est-à-dire entre 1h15 à 1h45 environ. Si on fait un cycle de sommeil entier, il n’est pas forcément nécessaire de mettre un réveil. Votre réveil sera naturel et spontané à la fin du cycle. Lorsque le réveil vient, il faut cependant se stimuler pour éviter de repartir pour un nouveau “somme”. Attention à ne pas programmer cette longue sieste trop tard dans l’après-midi, car vous risquez alors d’avoir du mal à vous endormir le soir. “ Un patient (Mathieu) Si je n’ai pas d’activité prévue le week-end, j’en profite pour faire une vraie sieste. Cela me permet de récupérer une partie de ma dette de sommeil car toute la semaine je me lève à 6h pour aller travailler. Mais parfois cela m’arrive de m’endormir devant la télé après le dîner et alors j’ai vraiment du mal à trouver le sommeil le soir. 6 ” Je dispose de 20 minutes, comment m’organiser une pause idéale ? 1. Tout d’abord, il faut trouver un endroit isolé du bruit et qui ne soit pas en pleine lumière. 2. Si la pause est avant 15h et que vous aimez le café, prenez-en un avant de commencer la sieste car le temps de la sieste permettra à votre organisme d’absorber la caféine. En effet, l’effet du café se fait sentir au bout de 15-20 minutes après sa consommation. A votre réveil, son action se cumulera donc aux bienfaits récupérateurs de la sieste pour une vigilance optimale. Attention cependant à ne pas dépasser 6 tasses par jour et à ne pas consommer de café trop tardivement car celui-ci risque de perturber votre sommeil de nuit. 3. Puis attaquez votre sieste de 10-15 minutes environ, dans un fauteuil confortable. N’oubliez pas de mettre une alarme pour que la sieste ne se prolonge pas. 4. A la fin de la pause et avant de repartir, étirez-vous, pratiquez quelques massages du visage, exposez-vous à la lumière du jour ou à une forte luminosité. Faites quelques gestes énergisants : étirez vous, frappez dans les mains… 5. En fonction de l’heure de la journée (pause vers 11h du matin ou 17h), vous pouvez compléter votre pause par une collation à base de fruits ou de produits protéinés (type yaourt, barres protéinées…) ce qui stimulera également votre vigilance. “ Une patiente (Laura) Vers midi, le bureau se vide. Je déjeune en vitesse pour remonter avant tout le monde et avoir le temps de faire ma petite sieste. Mon fauteuil est très confortable et je m’endors pour un petit quart d’heure, sans oublier de programmer la sonnerie de mon portable. Cela m’aide beaucoup à supporter le stress de l’après-midi. ” Existe-t-il des exercices de respiration simples pour se détendre ? Il existe plusieurs techniques de respiration que vous pouvez utiliser tout seul. Une technique assez simple est celle de la “respiration au carré”. C’est une respiration contrôlée qui est relaxante mais permet également de faire le vide dans sa tête lorsque notre cerveau est en ébullition ! Cet exercice est très utile face à un événement stressant mais aussi quand on a du mal à trouver le sommeil. 7 Tout d’abord, avant de commencer l’exercice, prenez une grande inspiration et videz complètement vos poumons en relâchant les tensions de votre corps. Le principe de l’exercice est de se concentrer sur sa respiration en comptant et en visualisant un carré, d’où l’appellation “respiration au carré”. La respiration s’effectue par le nez, bouche fermée et mâchoires relâchées. Elle comporte 4 étapes tout comme un carré a 4 côtés. Vous allez donc respirer sur 5 temps en traçant dans votre tête les lignes d’un carré (il suffit d’imaginer une boîte devant soi dont on suit mentalement les côtés) : 1. 2 - Rétention poumons pleins J’inspire lentement et profondément par le nez en comptant jusqu’à 5 et en visualisant le 2. Je retiens mon souffle et bloque l’air dans mes poumons en comptant jusqu’à 5 et en traçant la barre horizontale du haut de mon carré, 3. J’expire très lentement sur 5 temps en traçant 4 - Rétention poumons vides la barre verticale qui descend, 4. Respiration au carré 3 - Expiration 1 - Inspiration premier côté de mon carré en montant, Je reste, poumons vides, sur 5 temps en refermant mon carré en traçant la barre horizontale du bas de mon carré. Puis retour à une respiration normale, calme et lente, au rythme de chacun, après un cycle. Le chiffre de 5 temps pour chaque étape est indicatif, à vous de trouver le temps de respiration qui vous convient : 4 temps, 5 temps, 6 temps, 7 temps… Vous recommencez le plus longtemps possible, en essayant de trouver votre rythme pour atteindre l’apaisement en cas de stress ou l’endormissement si vous êtes dans votre lit. “ Un patient (Bernard) Comme beaucoup de narcoleptiques, j’ai un mauvais sommeil de nuit et je me réveille plusieurs fois par nuit. Pour me rendormir, j’ai pris l’habitude de faire la respiration au carré. C’est très efficace pour se “vider la tête”, chasser les mauvaises pensées, et je me rendors en quelques minutes comme un bébé ! ” 8 Dans la même collection : Pour commander ces brochures, merci de contacter le secrétariat du Centre du Sommeil et de la Vigilance de l’Hôtel-Dieu de Paris au 01 42 34 82 43 9 Pour toute information concernant la maladie, consultez : Le site “Orphanet” : www.orpha.net Rubrique “Narcolepsie et cataplexie” Rubrique “Urgence et maladie rare” Le site destiné aux patients et aux professionnels de santé : www.je-dors-trop.fr Le site de l’Association Narcolepsie-Cataplexie et de l’hypersomnie (ANC) : www.anc-narcolepsie.com Centre de Référence Hypersomnies Rares