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ENTRETIEN Jean-François Stéphan
Directeur de l'Institut national des sciences de l'univers du CNRS
L’INSU est très actif dans la mise en place des
services d’observation. Quelle est la raison ?
Parmi les principales missions nationales de l’INSU
figure le soutien aux services d’observation.
En effet, les sciences de la planète et de l’univers
s’appuient sur les observations des objets et
milieux naturels, soumis ou non à la pression
anthropique. Cela passe en général par des
mesures systématiques collectées sur de longues périodes de
temps, de plusieurs décennies. Et ceci concerne l’ensemble des
disciplines scientifiques de l’INSU. L’astronomie avec les
observations du système solaire et de l’univers plus lointain à toutes
les longueurs d’onde ; la Terre interne, avec la surveillance sismique
et volcanique et enfin l’environnement proche avec les observations
permanentes de l’océan, de l’atmosphère et des surfaces
continentales où se concentrent les activités humaines.
Dans le contexte du changement climatique, l’acquisition de ces
données sur de longues périodes permet aussi de valider les
simulations présentes et futures du climat de la planète. On n’aurait
jamais découvert le trou d’ozone stratosphérique sans les mesures
systématiques d’ozone. De même pour les concentrations des gaz à
effet de serre dans l’atmosphère.
Comment est décidée la mise en place d’un service d’observation ?
L’initiative vient de la communauté scientifique. Un dossier est
déposé auprès de l’INSU pour expliquer pourquoi il serait nécessaire
d’ouvrir un service d’observation, les moyens à mettre en œuvre et
quels seraient les bénéfices scientifiques attendus. Le dossier est
évalué par des commissions internes à l’INSU et si l’avis est positif
l’INSU peut alors apporter le label national. Le nombre de services
labellisés est limité. La labellisation permet au service d’obtenir des
moyens humains et financiers de l’INSU et de ses partenaires
concernés (universités, organismes de recherche).
Les Observatoires des sciences de l’univers (OSU) ont ensuite la
responsabilité de la pérennité de ces services, qui sont placés sous
la responsabilité scientifique d’un laboratoire. Une vingtaine d’OSU
existent à l’heure actuelle en France.
Dans le cas particulier de l’océan et de l’atmosphère, comment se
présente le dispositif ?
Les services d’observation de l’océan et de l’atmosphère se sont
développés il y a une trentaine d’années. Dans le cas de l’océan on
cherche à connaître les évolutions et les tendances à long terme de
paramètres biogéochimiques et physiques. Par exemple, le niveau
de la mer, la température et la salinité, les échanges de carbone à la
surface, etc... Dans le cas de l’atmosphère, ce sont ses constituants
et leurs évolutions spatiales et temporelles qui sont particulièrement
ciblés : aérosols, gaz à effet de serre, dépôts atmosphériques,
constituants intervenant dans la qualité de l’air,…
Une part significative de ces services d’observation constitue la
participation française à des réseaux internationaux.
Les données collectées sont-elles accessibles ?
Une des conditions pour obtenir la labellisation de l’INSU est la mise
à disposition de la communauté scientifique des données collectées.
Et aucune exception n’est prévue à cette règle.
Quelle est la complémentarité avec les services d’observation
opérationnels de Météo-France ?
La mise en place de services d’observation par l’INSU répond à deux
critères principaux.
Le premier est l’existence d’une justification scientifique forte pour la
mesure de certains paramètres sur la durée. La deuxième est de
s’assurer que ces paramètres ne sont pas mesurés par d’autres
organismes dont c’est la mission. C’est la raison pour laquelle l’INSU
n’a jamais mis en place des services d’observation sur des
paramètres atmosphériques qui sont mesurés systématiquement par
le réseau de Météo-France, comme la température, la pression
atmosphérique, le vent, la couverture nuageuse,… On pourrait dire
dans une première approche que Météo-France mesure les
paramètres thermodynamiques de l’atmosphère et l’INSU plutôt sa
composition.
A votre connaissance, les chercheurs utilisent-ils les données
collectées par Météo-France ?
Oui. Les données de Météo-France sont indispensables à la
recherche, soit pour des études de nature climatologique, soit
comme données assimilées par les modèles lors d’études de cas,
sans oublier les données de validation des simulations numériques.
Et, je suis très satisfait que les difficultés rencontrées il y a quelques
années par les chercheurs pour accéder aux données de Météo-
France ne soient plus qu’un mauvais souvenir, au sein d’une
communauté très attachée aux synergies et collaborations qui
transcendent les appartenances institutionnelles. Ce que démontre,
s’il en était besoin, le poids de la climatologie française au sein du
Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat
(GIEC).
Propos recueillis par Daniel GUEDALIA
OMP / Laboratoire d'aérologie. Membre du Comité Editorial
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(Météo-France), Pierre Durand (OMP, laboratoire d'aérologie), Daniel
Guédalia (OMP, laboratoire d'aérologie), Jean Pailleux (SMF-Météo et
Climat), Claude Pastre (SMF-Météo et Climat)
EN BREF DES CHUTES DE NEIGE ACCRUES
AMORTIRAIENT LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE EN ANTARCTIQUE
L’augmentation des chutes de neige en Antarctique pourrait
amortir le réchauffement climatique futur sur ce continent, d’après
les travaux d’une équipe française comprenant des chercheurs du
Laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement
(Grenoble) et de l’unité mixte internationale Takuvik (CNRS /
Université de Laval). À l’aide d’images satellitaires et de
modélisations numériques, les chercheurs ont montré que la
hausse des températures en Antarctique impliquera des
précipitations accrues et donc une neige plus "blanche" qui réduira
l’amplitude du changement climatique au centre du continent.
+ d'infos http://www.insu.cnrs.fr/environnement/cryosphere/des-chutes-
de-neige-accrues-amortiraient-le-rechauffement-climatique-en-ant