LA RÉVOLUTION INDUSTRIELLE .

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LA RÉVOLUTION INDUSTRIELLE
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* On se reportera au schéma explicatif du phénomène.
I. L’ORGANISATION DU TRAVAIL AUX SIÈCLES PRÉCÉDENTS.
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A. Du XIIIe siècle à la fin de l’Ancien Régime.
L’industrie se pratique sur le mode de l’artisanat et dans le cadre des corporations , avec un régime
protectionniste et essentiellement en milieu urbain .
1. Le maître (c’est-à-dire celui qui est passé maître dans l’art , autrement dit le métier, au terme de sa
formation et après agréation d’un chef-d’oeuvre par les jurés de sa corporation), seul habilité à vendre pour son
compte, travaille dans un petit atelier avec une main-d’oeuvre réduite : deux ou trois compagnons et un ou deux
apprentis ; généralement, le nombre des ouvriers varie de cinq à dix.
2. On dispose de très peu de machines ; presque tout le travail se fait à la main, à l’aide de quelques outils.
3. Même si le profit est souhaité, il s’agit toujours avant tout d’une économie de subsistance . En
conséquence, la production n’est jamais supérieure aux besoins ; en dehors des produits de première nécessité, on
travaille sur commande et au fur et à mesure de celle-ci.
4. La liberté d’entreprendre n’existe pas. Le seul travail légal se pratique au sein d’une corporation où
l’inscription est obligatoire et dont le régime est fondé sur le privilège obtenu des autorités urbaines ou du Prince.
Le privilège garantit une forme de monopole jalousement gardé et défendu avec acharnement (procès,
confiscations) contre toute forme de travail au noir ; il s’agira, en particulier, d’exclure du marché urbain des
produits finis rivaux venus de la campagne environnante où ils ont été fabriqués clandestinement et à meilleur
compte (ainsi dans nos régions pour les produits textiles). On pratique donc une politique économique
protectionniste .
5. Compte tenu des règlements corporatifs très stricts destinés à garantir la qualité du produit (notamment
l’interdiction du travail de nuit) et du fait que la concurrence ne joue pratiquement pas, les produits se vendent
fort cher .
B. Du XVIe au XVIIIe siècle.
1. Les grandes découvertes ayant provoqué un afflux massif de métaux précieux, le capitalisme connaît un
nouvel essor. Ce mouvement va donner naissance à un nouveau mode de production, à plus grande échelle et en
dehors du cadre traditionnel des corporations : ce sont les fabriques ou manufactures , qui produisent en grand,
utilisant une main-d’oeuvre plus nombreuse et moins protégée, l’entrepreneur ayant obtenu du Prince un privilège
qui vise à l’exempter des règlements corporatifs. Ceci va provoquer l’industrialisation des campagnes , où le
patron trouvera une main-d’oeuvre meilleur marché.
Ex. : brasserie, savonnerie, imprimerie, industrie de luxe (tapisserie, mobilier).
2. Parallèlement, la production industrielle va également, dès le XVIe siècle, s’effectuer dans un premier
temps à domicile (domestic system) par le paysan, sur base d’un contrat passé avec un négociant. Ce travail
destiné à l’industrie est effectué à la ferme par le paysan à la faveur de la morte saison (travail occasionnel, et non à
plein temps) pour lui procurer un revenu d’appoint. Par la suite, le négociant fournira la matière première et les
débouchés.
Ex. : industrie textile (draperie légère).
3. L’essor commercial résultant des grandes découvertes et de la création des premiers empires coloniaux
(Portugal et Espagne) va faire du commerce le nouveau moteur de l’économie, au détriment de l’agriculture. D’où
l’apparition d’un nouvelle doctrine économique, le mercantilisme , qui prône une balance commerciale favorable.
La nouvelle politique économique sera protectionniste afin de contrer la concurrence étrangère ; elle sera aussi
dirigiste , les Etats se faisant un devoir d’intervenir dans l’économie compte tenu de l’énormité des investissements
et des enjeux. L’enrichissement recherché par l’Etat sera servi par le pacte colonial , ensemble de règles destinées à
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assurer à la métropole le monopole de l’industrialisation et du commerce. Ainsi, la métropole se comporte un peu à
l’instar de la ville médiévale vis-à-vis du plat pays.
II. LA RÉVOLUTION DU SECTEUR PRIMAIRE.
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Une augmentation importante de la population , constante à partir du début du XVIIIe siècle, va
- comme ce fut déjà le cas aux XIe-XIIe siècles - commander de nouvelles méthodes de production, d’abord dans
l’agriculture et ensuite dans l’industrie.
Le grand propriétaire foncier anglais (landlord ) va s’appliquer à moderniser son exploitation pour la
rentabiliser. On verra se créer des fermes modèles où vont s’expérimenter les innovations. L’agriculture va se
renouveler par le recours au labour profond, au binage fréquent, au drainage, au mélange de terres ; la fumure sera
plus abondante ; une meilleure rotation des cultures, avec le développement des légumineuses, va permettre
l’abandon de la jachère (assolement quadriennal). D’autre part, l’élevage tant ovin que bovin va se pratiquer sur un
mode intensif ; il sera amélioré par le croisement de races sélectionnées, afin de permettre une production
industrielle. Ex. : le cuir des bovins sera traité dans les usines à chaussures.
N.B. L’esprit d’entreprise de l’aristocratie terrienne anglaise est sans équivalent sur le continent. Là, et
notamment en France, la noblesse - et à sa suite la haute bourgeoisie, qui souvent singe la noblesse en
consacrant sa fortune à l’achat de terres et à la construction de châteaux - n’est nullement soucieuse de
moderniser ses exploitations et continue à former une caste oisive. Indifférents au progrès, la plupart des
aristocrates continentaux se contentent d’encaisser les revenus de leurs domaines, sans le moindre souci de
rationalisation ou d’ouverture à l’extérieur. Les préjugés aristocratiques sont tenaces, assurant la persistance
d’une mentalité conservatrice, dédaigneuse des métiers manuels et s’interdisant les activités lucratives
(notion de dérogeance). Il est vrai que la société anglaise comporte une catégorie particulière, la gentry,
petite noblesse mêlée dès le XVIIe siècle à la classe marchande ; elle avait des intérêts communs avec
celle-ci et ne répugnait nullement aux activités lucratives.
Ces progrès requièrent de très gros capitaux, et seules les grandes exploitations vont pouvoir se les permettre.
Elles vont procéder à un remembrement des terres pour constituer de grands ensembles destinés à la culture
comme à l’élevage (parcs à moutons). Majoritaires au Parlement entre 1760 et 1801, les grands propriétaires vont y
faire passer des lois favorables à cette nouvelle agriculture : suppression du droit de parcours (open field) et des
communaux ou terres de vaine pâture (common fields), expropriations. Les terres rassemblées seront clôturées
(enclosures), pourvues de haies et de chemins d’accès. Tous ces aménagements supposent des dépenses
considérables, que le petit paysan est incapable d’engager. S’il n’a pas déjà été exproprié au nom de cette
modernisation, le petit propriétaire se trouvera tôt ou tard privé ses biens, ayant dû vendre ceux-ci après avoir tenté
vainement de soutenir la concurrence de son opulent voisin. Cette situation sera à l’origine de l’exode rural .
C’est ainsi que le secteur primaire, stimulé par les nécessités de l’approvisionnement des villes (blé, viande,
lait, beurre) et par l’essor de l’industrie textile (laine), va connaître une véritable révolution. Celle-ci bénéficiera à
son tour de l’industrialisation (mécanisation). Cependant, après 1846, l’agriculture sera sacrifiée au profit de
l’industrie, la Grande-Bretagne optant définitivement pour une politique de libre échange alors que le secteur
primaire réclamait le protectionnisme.
III. LES CONDITIONS DU DÉCOLLAGE (take off).
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Le décollage ou démarrage de la grande industrialisation a eu lieu à différents moments selon les pays :
Grande-Bretagne 1780, Belgique 1800, France 1825, Etats-Unis 1835, Allemagne 1865, Japon à partir de 1868,
Russie fin XIXe s., etc.
Il a été rendu possible par l’action simultanée de six facteurs essentiels :
A. Une nouvelle doctrine économique : le libéralisme .
Référence : SMITH (Adam), The Wealth of Nations[Essai sur la Richesse des Nations ], 1776.
Le libéralisme, comme dans le domaine politique, prône un maximum de liberté individuelle et un
minimum d’intervention étatique. L’économie est censée obéir à des lois naturelles qu’il est dangereux de
contrecarrer. D’où le mot d’ordre : « Laisser faire, laisser passer », traduisant la liberté d’entreprendre et la
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libre circulation des marchandises dans le cadre de la libre concurrence. Celle-ci opère une sorte de
sélection naturelle qui permettra aux plus forts de subsister et obligera les autres à s’adapter au prix d’un
travail acharné.
L’Angleterre du XVIIIe siècle connaît la libre circulation des denrées, des produits industriels, des capitaux
et de la main-d’oeuvre, alors qu’ailleurs le protectionnisme reste en vigueur, avec des barrières douanières
intérieures (France et Etats allemands).
B. Des inventions décisives.
Les découvertes permettant de faciliter et d’accélérer la production seront d’origines variées : non pas de
grands laboratoires de recherche (ceux-ci n’existent pas encore comme tels), mais bien des individus isolés
- petits entrepreneurs, artisans, membres de professions libérales ou même ecclésiastiques. Parfois, il
s’agira d’une équipe universitaire (Oxford, Cambridge, Glasgow).1 Mais très souvent - surtout dans
l’industrie textile - les trouvailles seront des perfectionnements mis au point par de simples praticiens
autodidactes, des ouvriers illettrés même2.
C. Des capitaux considérables.
Les nouvelles inventions ne peuvent trouver d’application à l’échelle industrielle sans l’appoint d’énormes
sommes d’argent. Celles-ci serviront d’abord à la construction d’installations appropriées et à l’acquisition
de machines, mais aussi à se procurer la matière première en très grandes quantités, pour que l’entreprise
soit rentable.
Les capitaux seront d’origines diverses :
1. profits du grand commerce international, en particulier colonial (y compris celui du bois d’ébène,
c’est-à-dire la traite des Noirs) ;
2. réinvestissement (ou auto-investissement) : les bénéfices sont investis dans l’entreprise elle-même afin
de favoriser sa croissance (pratique réalisée à raison de 15 à 30 % en Angleterre à la fin du XVIIIe
siècle) - mais cela ne peut suffire ;
3. bénéfices réalisés par de gros négociants en blé ou de véritables hommes d’affaires, les merchantbankers (activités doubles) ;
4. les apports précédents restant inférieurs aux besoins, il faudra développer un marché de l’argent (à partir
de 1810) : ce seront les banques d’affaires . Ex. : la Banque d’Angleterre ; en France (vers 1850), le
Crédit lyonnais , après la Société Générale de Crédit industriel et commercial .
D. L’esprit d’entreprise .
L’appoint d’énormes capitaux ne peut suffire. Encore faut-il que le capitaliste fasse preuve d’un véritable
esprit d’entreprise.
C’est l’aptitude à gérer une entreprise de grande envergure, impliquant la capacité de développer des
projets à court, moyen et long terme, de prendre des risques calculés, de gérer avec soin d’importants
capitaux, un parc industriel et d’énormes quantités de marchandises, d’adapter sa politique aux fluctuations
du marché et de diriger un personnel nombreux.
Le chef d’entreprise doit, en particulier, faire confiance à ces esprits inventifs à l’origine de progrès
technologiques considérables, en finançant la fabrication de nouvelles machines ou en leur prêtant leurs
ateliers pour renouveler des expériences. Il aura aussi à assurer une coordination optimale avec les
promoteurs des moyens de transport, tant pour l’apport des matières premières que pour l’acheminement du
produit fini vers des marchés de plus en plus lointains.
Remarques.
1/ Calvinisme et esprit d’entreprise.
L’esprit d’entreprise s’est rencontré particulièrement dans les milieux protestants.3 En effet, l’éthique
(morale) calviniste - et puritaine notamment - induit une nouvelle conception du travail axée sur
l’effort, le sens de l’épargne et la recherche du rendement. Le calviniste aura tendance à voir dans sa
1 Tel sera le cas pour la machine à vapeur, mise au point par James Watt (1769) et des universitaires de Glasgow (Ecosse) qui
avaient étudié systématiquement les défauts de la machine (pompe à feu) de Newcomen (1720).
2 Vers 1700, l’Angleterre compte seulement 60 % d’illettrés. Ce chiffre ne sera atteint en France que vers 1780, et, en Italie,
en Espagne ou en Russie, à la fin du XIXe siècle.
3 Théorie de l’économiste et sociologue allemand Max Weber (1864-1920).
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réussite professionnelle une forte présomption de figurer parmi les élus (théorie calviniste de la
prédestination). D’autre part, comme sa morale lui interdit la jouissance effrénée des biens terrestres et
le gaspillage, il sera amené à épargner son capital et à le réinvestir dans ses entreprises, ce qui rendra
ses affaires encore plus florissantes.
2/ L’esprit d’entreprise s’imposera plus tardivement en France où , on l’a vu, les préjugés nobiliaires (refus
des activités lucratives et dédain des métiers manuels) ont été tenaces.
E. L’afflux de main-d’oeuvre .
En attendant une mécanisation plus poussée, l’industrie a dans un premier temps besoin d’une maind’oeuvre nombreuse. L’afflux de main-d’oeuvre résultera d’une part de l’augmentation de la population ,
et d’autre part de l’exode rural déjà signalé (voir la révolution du secteur primaire) : attirés par les usines
nouvelles, de très nombreux paysans vont s’installer à la ville.
C’est ainsi que le secteur secondaire, en plein essor, va bénéficier de la main-d’oeuvre devenue excédentaire
dans le secteur primaire par suite des remembrements et de la mécanisation. C’est en Angleterre que ce
mouvement sera le plus précoce, et aussi le plus important.
N.B. Dans un certain nombre de pays ou de régions (Italie du sud, Europe centrale, Russie), ce phénomène
de transfert de main-d’oeuvre de l’agriculture vers l’industrie ne pourra pas se produire, faute de
développement urbain et industriel suffisant. Là, l’exode rural prendra souvent une autre forme :
l’émigration vers l’Amérique.
F. D’importants réseaux commerciaux (marchés ).
Le commerce devient le complément indispensable de l’industrie.
1. Le marché intérieur, qui profite de la liberté de circulation, est servi par de nouveaux canaux ainsi que
grâce à l’essor des chemins de fer (en Belgique à partir de 1835).
2. Les marchés extérieurs.
La maîtrise définitive des mers appartient à la Grande-Bretagne dès le milieu du XVIIIe siècle, ce qui
lui ouvre un marché quasi illimité, lui permettant d’écouler tous les produits qu’elle est capable de
manufacturer.
Le commerce extérieur, passé de 14 millions de livres en 1714 à 40 millions en 1790, sauvera la GrandeBretagne de l’embargo imposé par Napoléon (blocus continental ). La plaque tournante du grand
commerce maritime international est Liverpool. Le pays importe sucre, café, coton (Inde et Amérique) et
pratique la traite ; il exporte vers les colonies des produits manufacturés, et principalement des
cotonnades (exportations décuplées entre 1750 et 1770).
En Belgique, c’est le port d’Anvers qui, grâce à la réouverture de l’Escaut (1863), jouera un rôle
prépondérant.
Plus tard, le grand commerce international recevra une impulsion décisive avec l’ouverture des canaux
transocéaniques : Suez (1869), Panama (1914).
IV. LA TRANSFORMATION RADICALE DES MODES DE PRODUCTION.
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La révolution : une production considérablement augmentée, accélérée et moins coûteuse
.
La production se fait désormais à très grande échelle, sans doute encore pour satisfaire des besoins, mais
surtout pour faire un maximum de bénéfices dans le cadre du système capitaliste enfin affranchi des contraintes du
mercantilisme. Ce n’est pas seulement la production qui augmente, mais surtout la productivité*.
Au terme du processus d’industrialisation (à partir de 1851 pour la Grande-Bretagne), le travail est organisé
entièrement en usine (factory system). Ici, le processus complet de fabrication - beaucoup plus mécanisé
qu’auparavant, et requérant dès lors des machines trop grandes pour permettre leur installation à domicile - se
déroule en usine ; il est réalisé par des ouvriers salariés qui y travaillent des journées entières, répartis en équipes
affectées chacune à une tâche bien précise (division du travail). Ces ouvriers seront le plus souvent d’anciens
agriculteurs qui ont abandonné définitivement la campagne. Avec l’exode rural (qui a commencé depuis
longtemps), cette nouvelle organisation du travail va constituer un facteur décisif de concentration de la maind’oeuvre dans les pôles industriels et les villes auxquelles ceux-ci ont donné naissance ou croissance.
Plus tard, cette révolution va donner naissance, tôt ou tard selon les Etats (à commencer par les Etats-Unis,
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en 1920) à une économie de masse liée à une société de consommation , où le besoin d’acheter est stimulé sinon
créé à grand renfort de publicité, afin de générer une croissance économique à l’infini.
V. CONSÉQUENCES.
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A. Economie.
N.B. En Belgique, le mouvement a été entamé sous les régimes français et hollandais. Il faut mentionner
l’essor de l’industrie textile (Gand, Verviers) et, en Wallonie, celui des mines (charbon) et de la métallurgie ; le
développement des canaux (Bruxelles-Charleroi notamment, ouvert à la navigation en 1832), et du chemin de fer à
partir de 1835* (premier du continent : ligne Bruxelles-Malines) ; la résurrection du port d’Anvers à partir de
1863*. L’axe économique ABC (Anvers, Bruxelles, Charleroi) constitue l’épine dorsale du pays.
Au sein du nouvel Etat belge, la révolution industrielle sera à l'origine d'un développement très
contrasté : à l’opposé de la Wallonie qui connaît une ère de prospérité sans précédent grâce à ses charbonnages et à
la métallurgie s'opposera la région flamande restée avant tout agricole pour sa plus grande partie. Cette discordance
contribuera fortement à nourrir un mouvement flamand d'émancipation.
1. Avantages.
a) Progrès en chaîne.
Ex.: les nouvelles machines à filer obligent à apporter des améliorations aux métiers à tisser.
b) Tendance à la production de masse et à la standardisation, d’où une baisse des coûts et des prix.
c) Urbanisation de milieux ruraux : des villages se développent autour des industries pour devenir
des villes.
d) Modernisation des villes.
La ville est la première et la grande bénéficiaire de l'industrialisation et de l'essor commercial, qui
génèrent une richesse jamais vue. Au contraire du milieu rural, elle bénéficie d'un réseau de
communications et de transports performant, assurant un approvisionnement plus que suffisant, mais
en outre la richesse accumulée va permettre une modernisation décisive : voirie, égouts, moyens de
transport, éclairage public, soins de santé, gestion des immondices, etc. Il en résultera un niveau de
vie et un confort sans commune mesure avec la vie des campagnes.
N.B. Tout cela cependant a un coût, et cela explique en partie le maintien de taxes à l'entrée des
villes ; à Bruxelles, c'est l'octroi.4
e) Colonisation accrue, d’où l’enrichissement des métropoles.
Ex. Pour la Belgique, colonisation du Congo sous l’impulsion du roi Léopold II (1865-1909), qui en
est d’abord souverain absolu avant de le céder (1908) à la Belgique.
2. Inconvénients.
a) Petites entreprises en difficulté ; ruine de l’artisanat.
b) Problèmes urbains suite à l’afflux de population résultant de l’exode rural.
1/ transport
2/ logement
3/ hygiène
4/ sécurité.
c) Marginalisation des campagnes.
4 Depuis le Moyen Age, étant donné le régime protectionniste en vigueur, l'entrée de nombreuses marchandises en ville était
frappée d'une taxe, destinée pour une part à l'Etat (c'est-à-dire, chez nous, au duc de Brabant) et pour l'autre à la Ville ; la
taxe était acquittée par les transporteurs routiers à leur entrée par une des portes fortifiées de la ville. Elle avait une double
fonction : protéger la production urbaine contre la concurrence dite étrangère, mais aussi financer les services urbains, et
principalement l'entretien de la voirie. A Bruxelles, la destruction de l'enceinte murale médiévale, décidée dès la fin du
XVIIIe siècle et réalisée dans la première moitié du XIXe, n'a pas eu immédiatement pour conséquence la disparition de ces
douanes intérieures, même si celle-ci avait été proclamée par le régime français. A hauteur de chacune des anciennes
portes du rempart, on érigea des grilles et une paire de pavillons qui faisaient office de bureau de douane (ceux des portes
d'Anderlecht et de Ninove sont toujours en place ; ceux de la porte de Namur ont été transférés à l'entrée du bois de la
Cambre, à l'extrémité de l'avenue Louise). L'octroi, totalement opposé aux principes du libéralisme, ne sera supprimé qu'en
1860.
La Révolution industrielle.
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Même si le milieu rural profite lentement de l’enrichissement général, notamment quand il se trouve
désenclavé grâce à la pénétration des nouveaux moyens de transport5 (chemin de fer, plus tard trams
vicinaux), des régions entières restent à l’écart du mouvement.
d) Concurrence et interdépendance renforcées entre pays et régions suite à l’extension des marchés ;
d’où la nécessité d’une spécialisation de la production.
e) Aggravation du déséquilibre entre les colonies et les pays industrialisés.
L'accroissement très important de la demande de matières premières aura un impact important pour
les populations colonisées. En effet, les paysans locaux auront intérêt à produire en vue de
l'exportation et auront tendance à délaisser les cultures vivrières, qui jusque-là assuraient l'autarcie à
leur pays. On verra bientôt s'étendre là-bas des plantations sur des dizaines d'hectares, consacrées à
une culture d'exportation (monoculture). Cette pratique s'avérera doublement néfaste : d'une part et
surtout, elle va renforcer la dépendance économique des colonies, qui dépendront désormais des
importations pour leur alimentation ; d'autre part, elles provoqueront un appauvrissement des sols et
la déforestation.
B. Société.
1. Avantages.
a) Diversification sociale.
b) Essor de la bourgeoisie capitaliste.
2. Inconvénients.
a) Exode rural (ou émigration).
b) Situation déplorable du prolétariat (conditions de travail et d’existence).
Voir le chapitre sur la Question sociale.
N.B. Aux problèmes économiques et sociaux s’ajoute pour le petit peuple la marginalisation
politique (suffrage censitaire). En Belgique, cette situation se doublera, en région flamande,
d’une marginalisation linguistique et culturelle, puisque dans tout le pays le patronat est
francophone au XIXe siècle6. Il en résultera une puissante impulsion du flamingantisme* qui,
cantonné jusque-là aux sphères intellectuelles, va rejoindre le mouvement démocratique et
prendre une dimension sociale et politique ; le mouvement flamand va rejoindre la
revendication du suffrage universel ainsi que d'une législation sociale, mais aussi réclamer un
enseignement néerlandophone qui dépasse l'école primaire.
C. Politique.
1. Avantage.
Puissance accrue des Etats industrialisés et des métropoles.
2. Inconvénients.
a) Compétition pour la colonisation et conflits entre métropoles.
b) Tendance à une intervention accrue de l’Etat (à l’opposé du libéralisme) :
1/ pour la coordination économique dans l’intérêt national, y compris au niveau
colonial, compte tenu de l’énormité des investissements et des enjeux ;
2/ par souci de justice sociale (législation destinée à corriger les abus).
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5 C'est ainsi que le village d'Uccle commencera à s'industrialiser à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, avec
notamment la création des avenues Brugmann (celle-ci bientôt parcourue par un tramway) et De Fré, qui le mettront en
liaison permanente avec la ville de Bruxelles.
6 C'est le régime français (Directoire, Consulat et Empire) qui, le premier, a imposé en Belgique des mesures autoritaires en
matière linguistique, faisant du français la seule langue officielle.
La Révolution industrielle.
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