54 Th´eorie quantique du rayonnement III.1
III.1 Insuffisances et contradictions
de la th´eorie semi-classique
Un mod`ele fond´e`a la fois sur un traitement quantique de la charge d’´epreuve et sur
une description classique du champ ´electromagn´etique ne pr´esente, `a premi`ere vue,
aucune incoh´erence. Pourquoi la th´eorie quantique doit-elle alors remettre en jeu
les succ`es acquis par le mod`ele du quanton, et se risquer sur le territoire mouvant
des champs?
III.1.1 Le photon entre en sc`ene
La position du pic qui surgit au milieu de la figure II.3, ou la fonction de Dirac `a
laquelle il se r´eduit dans le taux d’excitation (II.64), nous proclament la pertinence
de la quantit´e¯hω, associ´ee au rayonnement monomode de pulsation ω. Attach´es
au principe de conservation de l’´energie2, nous attribuons le rˆole d’´energie `a ces pa-
quets ¯hω qui constituent les ´el´ements d’une d´ecomposition modale du rayonnement.
Notre mod`ele du quanton semblerait donc pr´edire l’existence des photons si l’on ou-
bliait que les quantons de la th´eorie semi-classique sont inertes, que ce ne sont pas
des sources de rayonnement mais de simples charges d’´epreuve. Le photon est ici
surajout´e au nom d’un principe de correspondance aussi vague que le rˆole de par-
ticule (qui s’av´erera en partie usurp´e) que se voit ainsi attribuer le paquet d’´energie
¯hω. Sept ans apr`es l’hypoth`ese granulaire du rayonnement par Einstein, et une
douzaine d’ann´ees avant l’av`enement de la th´eorie quantique, c’´etait pr´ecis´ement le
“truc” heuristique de Bohr:
— l’atome n’´emet de rayonnement que lorsqu’il transite entre des ´etats par
ailleurs stationnaires (il ne fallait pas avoir peur des contradictions logiques!);
—lafr´equence du rayonnement est donn´ee par la diff´erence des ´energies des ´etats
(et se voit donc attribuer un rˆole d’´energie).
Notre formule (II.64) pour le taux d’excitation semble suffire pour ´etudier la
photo-ionisation de l’atome et donc l’effet photo-´electrique, un des ph´enom`enes
`a l’origine de l’hypoth`ese d’Einstein. Elle ne fournit par contre aucune explica-
tion pour une exp´erience de r´esonance optique (fig. III.1). Non seulement notre
mod`ele semi-classique est incapable de pr´edire l’´emission spontan´ee, c’est `a dire
cette lumi`ere, de mˆeme fr´equence que le faisceau incident, ´emise dans toutes les di-
rections, mais il n’offre aucune explication pour l’absorption du faisceau. C’est en ce
sens que l’appellation d’absorption pour la formule (II.64) ´etait surfaite. Les quan-
tons ne sont encore ni sources ni puits, mais des bouchons agit´es au gr´e des ondes,
et la th´eorie semi-classique du rayonnement est un mod`ele pour le m´ecanisme de
transition des quantons charg´es, mais n’a rien `a dire sur l’´evolution du rayonnement.
2Relire `a ce propos la parabole des cubes et de la maman de Feynman, refs. [29, vol. I, §4-1]
ou [28, p. 80].