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« Et l’ethnomusicologie en témoigne à satiété ; partout ailleurs, le pouvoir créateur de
l’interprète est sauvegardé et choyé ; chez nous, dans nos musiques savantes, ou chez ceux
qui dépendent de nous et de ces musiques, la notation a brisé “l’unité de la création et de
l’exécution”. »1
En précisant cela, Daniel Charles indique que le métier de compositeur existe
essentiellement par le biais de la notation.2 On peut donc considérer qu’étant noté, le théâtre
musical se positionne dans le cadre de la musique savante occidentale.
Ce courant musical, qui date des années 1960, est né de l’envie des compositeurs de
trouver une nouvelle forme de réunion des arts. Mauricio Kagel est considéré comme l’un de
ses principaux représentants. Le théâtre musical connaît un grand développement en France
dans les années 1970, notamment grâce à Georges Aperghis. En 1976, celui-ci fonde l’Atelier
Théâtre Et Musique (A. T. E. M.) où seront produits beaucoup de spectacles, fruit d’un certain
travail collectif. Mais les compositions de Georges Aperghis ne se limitent pas au théâtre
musical. Il partage aussi son écriture entre la musique de chambre et l’opéra. Georges
Aperghis est un compositeur très proche de ses interprètes. Il écrit le plus souvent en fonction
d’eux et se constitue d’ailleurs ce qu’il appelle sa “galerie de portraits” : un certain nombre
d’œuvres dédiées à chacun d’eux, comme par exemple les Quatorze récitations (1978) pour
voix seule écrites pour Martine Viard qui ont obtenu un grand succès bien qu’elle n’aient pas
été composées en tant qu’œuvre de théâtre musical3.
Il nous a paru intéressant de travailler sur Georges Aperghis dans le cadre du
questionnement sur la notation dans le théâtre musical car il propose différentes solutions et
sa façon de travailler avec ses interprètes pose de manière évidente les problèmes de
transmission de l’œuvre à l’aide de la partition.
Pour réaliser cette étude, outre le travail de recherche en bibliothèque, il a fallu
consulter un maximum de partitions de théâtre musical à l’Institut de Recherche Coordination
Acoustique / Musique (I. R. C. A. M.), au Centre de Documentation de la Musique
Contemporaine (C. D. M. C.) ainsi qu’au bureau de Théâtre & Musique (T&M anciennement
A. T. E. M.). Mais surtout, nous avons été amenés à connaître de manière vivante le travail de
1 CHARLES Daniel, « La musique et l’écriture », in Musique en Jeu n°13, Paris, Seuil, Novembre 1973, p.3.
2 Pour un compositeur, la notation est surtout un support fixe et résistant à l’épreuve du temps qui donne son sens
à la composition. L’apparition de l’enregistrement au début du XXème siècle bouleverse complètement les
données du problème et remet en cause l’importance de la notation qui était jusqu’alors le seul moyen de fixer
une idée musicale.