Avant-propos
« Le territoire est soumis à la demande permanente de nouvelles infrastructures
de transport : entre 1990 et 1998, près de 33 000 hectares, soit environ 10
hectares de terres par jour ont été pris dans l’Union européenne, pour la
construction routière… Nombreuses sont les zones du territoire européen qui sont
extrêmement fragmentées par les infrastructures de transport. La taille moyenne
des unités spatiales contiguës, non traversées par une grande infrastructure de
transport, varie entre environ 20 km2 en Belgique et près de 600 km2 en Finlande,
avec une moyenne dans l’Union européenne d’environ 130 km2. » (AEE, 2001).
L'un des changements les plus radicaux qui se soit produit dans le paysage
européen, au cours des derniers siècles, a été la création et l’élargissement des
réseaux d’infrastructure. Vers la fin du XXe siècle, le développement des principaux
réseaux ferroviaires et routiers s’est ralenti, mais n’a pas cessé. Parallèlement, un
réseau de plus en plus dense de routes secondaires (forestières, par exemple) et
de voies ferrées s’est étendu dans les régions les plus reculées d’Europe. Les
réseaux de canaux, de conduites, d’électricité et de téléphone se sont ajoutés au
morcellement croissant des zones naturelles, tandis que l’urbanisation a
rapidement étendu les zones artificielles. Les chercheurs, les associations de
protection de la nature et les autorités ont exprimé leurs préoccupations
concernant les effets de la fragmentation. Des études ont mis en évidence les
risques associés à la réduction de la taille des dernières parcelles d’habitats, et par
conséquence, à l’augmentation des effets de lisière et de barrière. Ce n’est qu’au
cours de la dernière décennie qu’une collaboration internationale continue a permis
d’évaluer les connaissances sur les effets généraux de la fragmentation dus aux
infrastructures de transport, et en particulier, sur les moyens de les éviter et de les
atténuer.
Le projet COST 341, lancé en 1998, constitue une de ces initiatives. Ce manuel est
le résultat direct des efforts concertés des 16 pays qui y ont participé. Il apporte
des recommandations générales pour une réduction des effets de fragmentation de
l’habitat dus aux infrastructures de transport et prend pleinement en compte les
différences importantes existantes en Europe, en matière d’habitat et
d’infrastructures de transport.
Lorsque la nécessité d’atténuer les effets de la fragmentation conduit à la
construction d’écoponts et autres passages à faune, les investissements requis
peuvent être considérables. Si des mesures s’imposent également sur une route
existante, l’exécution du projet peut s’avérer complexe et de nombreux organismes
éprouveront des difficultés à mobiliser les ressources appropriées. Ce constat
souligne combien il est important d’éviter avant tout la fragmentation, en laissant
les habitats intacts autant que possible ou en contribuant à leur restauration. Les
administrations et les organismes chargés des infrastructures doivent maintenir
des liens étroits entre eux et avec les autorités locales pour s’assurer que les
habitats à préserver restent intacts et que l’efficacité des passages à faune n’est
pas réduite par d’autres ouvrages ou aménagements. Les participants de COST 341
et les membres du groupe d’experts d’Infra-Eco Network Europe ont apporté une
contribution importante aux connaissances et aux bonnes pratiques. Je suis
convaincu que leur travail se poursuivra avec succès et qu’il permettra d’améliorer
sensiblement notre approche de l’intégrité de l’habitat, en évitant ou en atténuant
toute future fragmentation du territoire.
« Umstø unar skapa alt » (Les conditions de vie font tout) (Gaffin, 1996)
Anders HH Jansson
Président
Association mondiale de la route (AIPCR)
Comité du développement durable et du transport routier