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F. Tech.
&
Doc. Vulg. : 8-12 (2010)
METHODES RAPIDES DE DETECTION DE V/BRIO CHOLERAE
01 DANS L'ENVIRONNEMENT AQUATIQUE
Adingra' A.A., Kouassi' A.M,
Lowenhaupt'
E.
J
Centre de Recherches Océanologiques, 29 Rue des Pêcheurs, BP V 18 Abidjan, Côte d'Ivoire.
2Université de Havard Cambridge, MA USA.
1. INTRODUCTION
Vibrio cholerae existe sous deux formes, la forme pathogène (V.cholerae al) qui est responsable
du choléra et la forme non pathogène (V. cholerae non
01).
Vibrio cholerae a 1 produit une
entérotoxine qui est responsable de la maladie. Des études réalisées en lagune Ebrié n'ont isolé que
des souches non 01 (Adingra et al., 1998 a et b). Pourtant, les régions lagunaires de Côte d' Ivoire sont
considérées comme des zones endémiques du choléra. La transmission du choléra se fait par
consommation d'aliments et d'eaux contaminées.
Des études ont montré que les germes pathogènes, V. cholerae
01
en particulier, peuvent être
viables et potentiellement pathogènes mais à l'état de dormance pendant les périodes de conditions
défavorables de l'environnement aquatique (Dawson et al., 1981 ; Kichman et Mitchell, 1982). De ce
fait, les méthodes conventionnelles d'isolement des bactéries ne permettent pas de les détecter. A cause
de la recrudescence du choléra en Côte d'Ivoire au cours de ces dernières années, il paraît nécessaire
d'étudier la présence de Vibrio cholerae
01
dans le milieu lagunaire Ebrié (eaux, phyto et zooplancton
et particules en suspension) par l'essai de nouvelles méthodes telles que le choléra SMART test et
l'immunofluorescence afin qu'une surveillance appropriée et des mesures préventives effectives soient
prises par les autorités de la santé publique.
2. MATERIELS ET METHODES
2.1. Milieu d'étude
Des prélèvements mensuels d'eau de surface, de zooplancton, de phytoplancton et de particules
en suspension ont été réalisés de mai à juillet 1996 en zone urbaine de la lagune Ebrié dans les baies
de Koumassi, Yopougon et de l'Ile Boulay (Figure 1). Les baies de Koumassi et de Yopougon reçoivent
les eaux usées domestiques des quartiers densément peuplés de Koumassi et de Yopougon. L'Ile
Boulay est une station de référence, moins polluée, située à la périphérie de la zone urbaine et àforte
influence océanique (Figure 1).
2.2. Analyses bactériologiques
Les eaux de surface ont été prélevées à l'aide de bouteilles stériles abondamment rincées avec
l'échantillon d'eau à analyser. Les échantillons de zooplancton, du phytoplancton et des particules en
suspension ont été recueillis sur des filtres en soie de 60
utt:
et de 20
ftm
respectivement. Ces différents
échantillons ont été conservés
à
+4°C dans des bocaux stériles. Ils ont, ensuite, été transportés au
laboratoire et analysés dans moins de 2 heures. Les analyses bactériologiques ont été réalisées par le
comptage direct de Vibrio cholerae 01 par le test rapide de la membrane antigénique sensible
SMARTTM test (SMART, New Horizons Corporation, Columbia, Maryland, USA) et
l'immunofluorescence ou méthode directe de détection des anticorps fluorescents (DAF) (New
Horizons Diagnostics). L'immunofluorescence a été réalisée à l'Université de Maryland (USA)
plusieurs semaines après que les échantillons aient été prélevés. Toutes ces deux méthodes nécessitent
très peu de formation, d'équipements et de temps.
2.2.1. Principe du SMARTTMtest
Le SMARTTM test est un test immunologique et colorimétrique rapide pour la détection
présomptive de V.cholerae 01 dans les fèces humains ainsi que dans les échantillons d'eau et d'aliment
comme additif
à
la méthode conventionnelle de culture. Ce test est basé sur l'utilisation des anticorps
monovalents et polyvalents fixés sur des particules colloïdales. Le dispositif du SMARTTM test est
composé de deux compartiments. Le compartiment supérieur contient une membrane filtrante. Le
compartiment inférieur contient deux points recouverts d'immunoglobulines (un point test pour
l'échantillon, recouvert d'un anticorps polyclonal anti-V. cholerae 01 et un point contrôle négatif,
recouvert d'une immunoglobuline normale de rat).
-9-
2.2.2. Principe de l'immunofluorescence directe
L'approche imrnunologique est basée sur la réaction antigène-anticorps. Quand une substance
étrangère appelée
«
antigène» est introduite dans un animal hôte, cet hôte produit une protéine
spécifique appelée
«
anticorps ». Ce processus est appelé une réponse immunitaire. Dans le corps, les
anticorps se fixent sur les antigènes pour lutter contre le corps étranger. Au laboratoire, le complexe
anticorps-antigène se présente sous forme de précipité. La réaction immunitaire est très spécifique,
faisant d'elle un important instrument de classification des micro-organismes. Un type particulier
d'antigène ne peut réagir qu'avec un type particulier d'anticorps et pas un autre.
La technique d'immunofluorescence est donc basée sur l'utilisation des anticorps monovalents
fluorescents pour détecter V.cholerae 01. L'anticorps spécifique est couplé
à
un colorant fluorescent
tel que l'isothiocyanate fluorescéine (lTCF). Ce colorant devient fluorescent lorsqu'il est exposé
à
la
lumière ultraviolette. Si l'antigène, qui est la bactérie V.cholerae 01, induit une réponse de l'anticorps,
le complexe résultant antigène-anticorps fluorescent est facilement détectable au microscope. Cette
technique nécessite un seul réactif et moins de 30 minutes pour la préparation des lames. Le réactif
d'immunofluorescence est fabriqué par New Horizons Diagnostics, Columbia.
2.23. Mode opératoire du Choléra SMARTTMtest
Les différents échantillons (eau, zooplancton, phytoplancton et particules en suspension) sont
filtrés. Les filtres sont placés dans de l'eau peptonée alcaline pH 8,6 (fourni par le kit) à 36°C pendant
6 heures.
Deux gouttes de tampon de reconstitution (fourni par le kit) sont placées dans le tube à réaction
qui contient un conjugué lyophilisé composé d'anticorps monovalent anti-A antigène fixé sur des
particules colloïdales d'or (fourni par le kit).
Ensuite, quatre gouttes de culture y sont ajoutées, le contenu est bien mélangé avec un écouvillon
stérile (fourni par le kit).
L'écouvillon est ensuite placé dans le compartiment supérieur du dispositif de SMART™ test.
Le dispositif est ensuite bien fermé de sorte que l'écouvillon soit enfoncé dans la partie centrale de ce
dispositif du SMART™ test.
Après 10 minutes, le résultat est lu en ouvrant le compartiment inférieur du dispositif. Si
l'antigène est présent, le complexe immun, déposé sur le point test, développe une coloration positi ve
(du rose au pourpre). Alors que le contrôle, qui est négatif, reste blanc. Lorsque l'antigène est absent
ou en dessous du niveau de sensibilité du kit, le point test ne développe aucune coloration. Le temps
nécessaire pour faire l'analyse est de 15 minutes.
2.2.4. Mode opératoire de l'Immunofluorescence Directe
10
pd
de l'échantillon sont préalablement fixés au formaldéhyde (4%) sur une lame porte-objet.
On le laisse sécher et on le fixe au méthanol. On ajoute ensuite 5 }Il du réactif d'immunofluorescence.
On porte le tout à incubation à 37°C pendant 5 minutes en chambre humide. On le lave deux fois avec
du tampon phosphate pH 7,4 et on le laisse sécher. On y ajoute du liquide d'immersion (DIFCO).
Enfin, on examine les lames àl'aide d'un microscope àfluorescence aux grossissements 100 et 400.
Les cellules viables de V cholerae 01 apparaissent comme des bacilles incurvés longs et fluorescents.
Les lames sont lues immédiatement pour obtenir de meilleurs résultats.
3. RESULTATS ET DISCUSSION
La recherche de Vibrio cholerae 01 par les techniques d'immunofluorescence et du SMART test
s'est avérée fructueuse. Le SMART test, qui a un pouvoir de résolution de 10
6
cellules par ml, a permis
de détecter la présence de Vibrio cholerae 01 dans les échantillons de phytoplancton et des particules
prélevés dans la baie de Koumassi. L'immunofluorescence, qui a un pouvoir de résolution de 10
4
cellules par ml, a également permis de détecter Vibrio cholerae 01 les échantillons de phytoplancton
et des particules en suspension prélevés dans la baie de Yopougon. Tous les autres échantillons prélevés
à
ces stations se sont révélés négatifs pour Vibrio cholerae 01. Les deux techniques nous ont permis
de montrer que V cholera~ 01 est présent dans le milieu lagunaire pas àl'état libre mais fixé à des
particules en suspension. Ces résultats confirment la possibilité de la mise en évidence dans le milieu
naturel, d'une bactérie par le jeu d'anticorps comme cela a été démontré par Xu et
al.,
(1982). Hasan
et al., (1994) ont montré que la technique du SMART test est spécifique àV.cholerae 01.
Les difficultés d'isolement de V cholerae 01 des échantillons du milieu naturel seraient dues
à
une inaptitude des cellules bactériennes à se développer sur les milieux de culture spécifique utilisés
pour leur numération spécifique. Leur incapacité àcroître sur ces milieux résulterait de leur mise en
dormance consécutive à leur transit dans un milieu hostile. Ce germe pourrait présenter différents
stades dans son cycle de vie (Figure 2). Il peut être dans un état viable et non cultivable comme une
partie d'un mécanisme de survie pour se maintenir en vie dans le milieu naturel (Colwell et al.,
1990).
Lorsque les conditions du milieu naturel sont défavorables, ce germe survit dans les sédiments
mais également associé aux particules en suspension et aux organismes aquatiques (zoo-,
phytoplancton, poissons, huîtres, etc ....). De ce fait, les bactéries viables et non cultivables ne peuvent
pas être ignorées, puisque la virulence de ces bactéries ainsi que celle des bactéries stressées a été
démontrée chez les animaux (Col weil et al., 1985). Ces bactéries fixées au zooplancton et aux
particules en suspension peuvent, par ingestion, pénétrer dans l'intestin de l'homme où les conditions
pour leur croissance, leur réplication et leur mécanisme de pathogénicité existent.
3. CONCLUSION
La microscopie directe par immunofluorescence et le SMART test permettent une détection plus
spécifique et sensible pour les pathogènes de l'homme dans les échantillons naturels. Les bactéries
cultivables et non cultivables peuvent être observées et énumérées rapidement et facilement.
- 10-
1. Adingra A.A., Guiral D. et Arfi R., 1998. Variations temporelles de Vibrio cholerae non 01 et
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Journal
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3. Colwell R.R., Bray ton P.R., Grimes D.J., Roszak D.B., Huq S.A., and Palmer L.M., 1985.
Viable but nonculturable Vibrio cholerae and related pathogens in the environment: implications
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REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
20 Km
comoé
/
OCEAN
ATLANTIQUE
(GOLFE
"
ZONE ESTUARIE;NNE.
ce
LA
LAGUNE E6RIE
Figure
1:
Lagune Ebrié et stations d'échantillonnage
- 11-
Caractéristique s physiques et chimiques
de l'eau:
- Tempéra ture
- Luminosité
- Pluviométrie
pH
- Oxygène dissous
- Nutriments chimiques
- 12-
Contamination de l' eau
pu
•.
les fèces
t-----.,
Caracté ristiques biologiques:
- Bloom algal
- Bloom phytoplanctonique
Bloom zooplanc tonique
V. cholerae
entre en état de
dormance
V.
chderae
viable mais en état de
dormance dans la colonne d'eau et
fixé à des particules en suspension.
Relation commensale ou
symbiotique?
Transmission de
V.
chol erae
aux
humains par ingestion d'eau
contenant des copépodes et autres
vec teurs colonisés
Figure 2 : Cycle de vie de V.cholerae (Col weil et al., 1990)
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