s'inscrivent également la revendication d'une plus grande autonomie des instances syndicales
socialistes wallonnes (réalisée, vingt ans plus tard, en 1982) ainsi que la revendication d'un
fédéralisme économique et social.
La période prise en compte par les auteurs se caractérise par la présence, en Wallonie, d'une
grande industrie de production de biens d'équipement ou de produits semi-finis dans les secteurs
d'extraction (charbonnages) comme de transformation (acier, verre, chimie, papier, fabrications
métalliques et mécaniques, textile). Certes, les « conditions de travail et le travail lui-même
étaient difficiles mais fondaient l'identité fière de l'ouvrier ainsi qu'un esprit de corps propice à
l'action collective».
Les rapports sociaux débouchaient sur des compromis institutionnalisés entre les forces
syndicales et patronales tandis que l'État soutenait « la demande effective et assurait le
développement des services collectifs d'éducation, de santé et de services sociaux ».
Au fil du temps, l'on assiste à l'affrontement commercial entre les grandes nations industrielles,
à l'industrialisation croissante des pays « périphériques ». Cette internationalisation croissante
liée aux contraintes du développement du marché commun européen, va lézarder et faire
exploser cette architecture centralisée de l'économie wallonne. À partir des années '70, celle-ci
connaît une suite quasi ininterrompue de fermetures, de faillites, de fusions. Ce démantèlement
affecte les industries de base et fragilise tout un pan de la démocratie salariale :
- démantèlement des concentrations ouvrières, lieux historiques de luttes sociales;
- passage des grandes entreprises subsistantes dans le giron du management étranger réduisant
le contrôle syndical et citoyen.
Le syndicalisme est fortement secoué par l'ensemble de ces transformations. B. Francq et X.
Leloup tentent une analyse intéressante de l'évolution du syndicalisme des années 1960 à nos
jours. Leur analyse s'articule autour de deux modèles : le « renardisme » (du nom du leader
syndical André Renard) et celui du « syndicalisme de concertation ». S'interrogeant sur les
mutations internes du système des relations industrielles, les auteurs constatent, d'abord, face à
un ralentissement structurel de l'activité économique et à l'émergence d'un chômage de masse, la
fin de la négociation des fruits de la croissance par les partenaires sociaux. Ils soulignent, ensuite
l'intervention croissante du Gouvernement au travers d'une politique de modération salariale.
Et les auteurs se pro-noncent pour une nécessaire redéfinition du syndicalisme car le
« syndicalisme dans ses différences apparaît aujourd'hui comme une institution sans mouvement
ouvrier ».
En conclusion, B. Fusulier et Ch. Maroy soulignent que la « préoccupation majeure tient à la
difficulté de l'action collective aux multiples évolutions qui ont affaibli la capacité de
mobilisation offensive du syndicalisme déchiré entre une action de plus en plus institutionnelle et
défensive et une action de base menacée de dispersion et réduite de plus en plus à un travail
social de proximité ». C'est dire que « face aux transformations en cours, la construction de
nouveaux espaces d'action et de négociation est plus que jamais à l'ordre du jour ».