98 Bernard Rey
VALUTAZIONE E COMPETENZE
Dans les deux cas, l’exigence d’évaluation prend place dans une dynami-
que éducative qui veut faire accéder le jeune à des normes de pensée et de
comportement. L’école que nous connaissons et qui a lentement émergé en
Europe au 19ème siècle n’est pas étrangère aux idées de Kant (1980) pour
qui l’éducation consiste à faire accéder le jeune à la capacité de penser par
lui-même et de se donner à lui-même ses propres règles. Dans cette visée
éducative, l’évaluation des élèves s’inscrit dans une perspective éthique.
Mais à cette pratique ancienne, vient s’ajouter aujourd’hui de nouvelles
pratiques d’évaluation qui sont assez di érentes. Elles consistent toujours
à évaluer les performances des élèves, mais non plus au service de leurs
apprentissages, ni en vue de leur certi cation. A travers la mesure de leurs
performances, il s’agit d’évaluer un aspect ou un segment du système sco-
laire: l’e cacité des maîtres, la pertinence de telle pratique pédagogique ou
didactique, les e ets de telle organisation curriculaire, le fonctionnement
d’un établissement ou d’un groupe d’écoles, les politiques publiques en ma-
tière éducative, la répartition de l’échec et de la réussite en fonction de
variables telles que le genre, l’origine sociale, l’appartenance à une minorité,
etc. C’est typiquement ce qui se fait dans les enquêtes internationales telles
que PISA, initiée par l’OCDE. Mais elles se pratiquent aussi à l’échelle
nationale ou subnationale: ainsi en va-t-il des évaluations pratiquées en
deuxième année du primaire (CE2) et en première année du secondaire
(6ème) en France, ainsi que des évaluations externes non certi catives qui
ont été mises en place en Belgique francophone. L’évaluation est alors un
instrument de pilotage d’un système éducatif ou d’une partie de celui-ci.
Dans cette perspective, l’évaluation ne se borne plus au repérage des per-
formances des élèves. D’autres types de mesures entrent en jeu: on évalue
le fonctionnement administratif scolaire en fonction d’objectifs à attein-
dre, on évalue les enseignants (de multiples manières), on évalue les outils
pédagogiques, on évalue la qualité et la sécurité des bâtiments scolaires,
on évalue les dispositifs de soutien aux élèves en di culté ou d’aide aux
étudiants du supérieur, on prend en compte de plus en plus l’évaluation des
enseignants du supérieur par leurs étudiants, on évalue les chercheurs uni-
versitaires, etc. La tendance semble être qu’à chaque action ou dimension
du fonctionnement du système correspondent des dispositifs d’évaluation
par des experts.
Ce mouvement actuel qui tend à la mise en place d’évaluations systéma-
tiques ne se limite pas au système scolaire. On le voit à l’œuvre dans tous les
secteurs de la vie sociale (évaluation des services publics, des fonctionnaires,