Mécanique Physique (S2) 3ème partie page 1
3ème partie
Les lois de la dynamique de Newton
Notes de cours
de Licence de A.
Colin de Verdière
L’expérience quotidienne nous indique que le mouvement d’un corps est le résultat de ses
interactions avec d’autres corps. La raquette de tennis interagit avec la balle et modifie son
mouvement, le mouvement de la balle est ensuite une interaction (gravitationnelle) avec la
terre et le frottement de l’air sur la balle est à la mise en mouvement de l’air dans le
voisinage de la balle. Ces interactions sont décrites par le concept de « force » et la
dynamique est la branche de la Physique qui analyse les relations entre le changement de
mouvement d’un corps et les forces qui s’y appliquent. Cette analyse repose sur trois lois qui
permettent de déterminer le mouvement des corps si les forces qui s’appliquent sur ces corps
sont connues. La plus célèbre est la force gravitationnelle d’attraction entre deux corps, une
loi en 1/(distance)2, qui permit à Newton de montrer que la physique de la chute des pommes
et la physique du mouvement de la lune autour de la terre sont identiques (on se demande
alors pourquoi la lune ne tombe pas sur la terre un point intéressant que l’on verra dans la
partie 7).
Le problème du mouvement d’une planète autour du soleil (le problème à deux corps) une
fois résolu, Laplace (le siècle des Lumières) armé des lois de Newton a émis à l’époque des
objectifs comme le « calcul du système du monde ». Si on connaissait la position et la vitesse
de tous les objets du monde, on pourrait prédire le futur. Cependant, comme on l’a découvert
récemment dans les années 60 au travers du développement de la théorie du chaos, cette
ambition de « prédiction du monde » se heurte à de réels obstacles, autres que philosophiques.
Laplace lui même a beaucoup contribué au développement des probabilités pour essayer de
calculer les chances de gagner aux dés. Qu’est ce que le jet d’un si ce n’est une interaction
avec une table impliquant la gravité et le frottement? Alors on ne peut même pas prédire la
face qui va sortir ? Est-ce que les lois de la dynamique ne s’appliqueraient pas aux dés ? Le
problème ne vient pas des lois de la dynamique mais de la connaissance des conditions
initiales de vitesse et de position du dé. Le mouvement d’un est beaucoup plus compliqué
que celui d’une planète autour du soleil (2 degrés de liberté). Le lui possède 6 degrés de
liberté (3 translations et 3 rotations). De petites erreurs sur les conditions initiales du
peuvent s’amplifier au fil du temps et venir enlever toute valeur à une prédiction au bout d’un
certain temps. On appelle cela la sensibilité aux conditions initiales.
Cette partie est la plus importante du cours car tout le reste sera constitué d’outils pour
apprendre à utiliser les « trois lois » dans diverses applications. Ces trois lois ne s’appliquent
qu’aux objets de vitesse faible par rapport à la vitesse de la lumière et de dimension grande
par rapport à celle des distances inter atomiques.
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La première loi ou le principe d’inertie
C’est en fait l’œuvre de Galilée.
L’idée est tout d’abord de
conceptualiser une particule « libre ».
On va dire qu’une particule est libre si
elle n’est soumise à aucune
interaction de la part de ses voisines.
Les forces entre deux particules
décroissent toutes au moins comme
1/(distance)2, ce qui implique que si
ses voisines sont suffisamment
éloignées, une particule peut être
considérée comme libre.
Loi 1 :
« Une particule libre se déplace à vitesse1 constante (c'est-à-dire sans accélération). »
Ainsi d’après la partie 2, une particule libre se déplace sur une droite à vitesse constante ou
est au repos (si sa vitesse est nulle). Attention lorsque l’on parle de vitesse de la particule,
c’est toujours relativement à un autre corps (ou observateur) pris comme référence. On choisit
un référentiel qui est aussi une particule (ou système de particules) libre c'est-à-dire sans
interactions avec le reste du monde ; un tel référentiel est dit référentiel inertiel. Un
observateur fixe dans un référentiel inertiel est donc par définition sans accélération. Si on a
trouvé un férentiel inertiel, tous les corps en translation uniforme dans ce référentiel peuvent
être pris pour construire de nouveaux référentiels inertiels. Il suffit donc d’en avoir un mais
c’est très difficile en pratique ! D’après la première loi, les référentiels inertiels peuvent être
en mouvement les uns par rapport aux autres mais uniquement avec une vitesse relative
constante. Les observations entre deux référentiels inertiels peuvent donc être reliées par une
transformation galiléenne.
A ce moment là, on est amené à se poser la question si la vitesse absolue possède un sens
physique. On a déjà dit qu’il n’y a pas de corps de référence privilégié, et donc la position
absolue n’a pas de sens. Si on ne peut privilégier aucun référentiel inertiel, on voit bien que la
vitesse est une notion relative.
Ces réflexions sur la 1 ère loi ont conduit à énoncer l’hypothèse de l’invariance galiléenne :
« Les lois de la mécanique2 sont identiques dans les systèmes de référence qui se déplacent
les uns par rapport aux autres à vitesse uniforme (référentiel inertiel) ».
1 Lorsqu’on parle de vitesse ici, on parle du vecteur vitesse (l’anglais fait la différence entre « speed », le module
et « velocity » la vitesse vecteur).
2 Cette hypothèse sera élevée plus tard par Einstein comme un des deux postulats majeurs de la relativité en
l’étendant à toutes les lois de la Physique et non pas seulement à lacanique.
particule
libre
V
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Sous cette hypothèse un observateur enfermé dans une boîte ne saurait réaliser aucune
expérience lui permettant de dire s’il est au repos ou en mouvement à vitesse constante (par
rapport à une étoile fixe par exemple). C’est en regardant par un trou dans la boite qu’il saura
s’il existe un mouvement relatif entre lui et l’étoile en question. Notez qu’on peut relier entre
elles les observations d’une expérience faites dans deux référentiels d’inertie : dans le cas de
la mécanique classique, espace et temps se transformeront par la transformation galiléenne du
chapitre précédent. (Dans le cas de la relativité valable pour des vitesses non négligeables
devant celle de la lumière, on utilisera la transformation de Lorentz).
Ce principe de l’invariance galiléenne a été un des piliers majeurs de construction de la
Physique par son exigence d’universalité (il s’applique partout dans l’univers et à toutes les
époques).
On va avoir besoin de référentiel inertiel pour appliquer les lois de Newton. La terre en est
elle un ? Elle tourne et un référentiel inertiel peut-il être en rotation ? On a vu que dans une
rotation (même uniforme), il existe déjà une accélération car la vitesse change constamment
de direction. Donc un corps en rotation et en particulier la terre, n’est pas un référentiel
inertiel et c’est très ennuyeux pour nous terriens qui observons tout depuis la terre. Comme
toujours en Physique, ce qui est faux strictement, peut devenir approximativement supportable
lorsque l’on compare deux quantités entre elles et ici il faut comparer l’accélération du
référentiel avec l’accélération de la particule que l’on observe. Si cette dernière est si grande
par rapport à la première, on ne fera pas beaucoup d’erreurs à considérer le référentiel
terrestre comme inertiel.
Si l’on n’est pas satisfait de choisir la terre
comme référentiel inertiel, on pourrait choisir
le soleil mais celui-ci tourne aussi autour du
centre de notre galaxie ; voilà à peu près
comment la situation se présente :
Vous pouvez comparer les accélérations associées au mouvement de rotation de T, S ou C
avec l’accélération de l’objet qui vous intéresse dans le référentiel T, S ou C que vous avez
choisi. Si cette dernière est grande par rapport à celle du férentiel choisi, celui-ci sera
« assez inertiel » pour y appliquer les lois de la dynamique.
Rayon (m)
Période (s)
Accélération (ms-2)
Un point au repos à léquateur
6,37 106
8,6 104
3,4 10-2
Mouvement de la terre autour du soleil
1,5 1011
3,15 107
5,9 10-3
Mouvement du soleil autour de C
3,0 1020
6,3 1015
2,9 10-10
Trajectoire de notre galaxie par rapport aux autres
La deuxième loi
C’est l’œuvre de Newton (1642-1727) (le moment clé fut l’année 1665 lorsqu’il resta dans
une ferme du Lincolnshire pour fuir la grande Peste qui ravagea Londres cette année-mais
ces travaux réalisés à 23 ans ne furent publiés que bien plus tard en 1686 dans les Principia
S
T
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sous l’impulsion de l’astronome E. Halley. La continuité avec Galilée est établie puisque
Newton est né l’année de sa mort). Cette deuxième loi a un énoncé compact :
« La force nette » qui s’exerce sur un corps est égal au produit de la masse de ce corps par
son accélération ».
F = m a (1)
En fait un énoncé un peu plus général est introduit si on définit la quantité de mouvement du
corps p par :
p = m v
et l’énoncé de la 2ème loi est alors :
F = dp/dt (2)
L’énoncé (2) retombe sur (1) si la masse du corps est constante (en dérivant mv par rapport au
temps).
La loi (1) est une loi pour le changement de vitesse. Comme c’est une loi vectorielle elle
implique le changement de l’intensité de la vitesse mais aussi de sa direction et est
équivalente à 3 relations sur les composantes des vecteurs, les projections sur les 3 axes d’un
repère (ici cartésien) attaché au référentiel inertiel :
!
!
!
"
!
!
!
#
$
===
===
===
2
2
z
z
2
2
y
y
2
2
x
x
dt
zd
m
dt
vd
mamFz
dt
yd
m
dt
vd
mamFy
dt
xd
m
dt
vd
mamFx
(3)
Cette loi introduit une quantité que nous n’avons pas encore vue m la masse. Qu’est-ce que
cette masse? Ecoutons Newton :
Définition 1 of the Mathematical Principles of Natural Philosophy in « Principia »
“The quantity of matter is the measure of the same, arising from its density and bulk
conjointly. Thus air of a double density, in a double space is quadruple in quantity ; in a
triple space, sextuple in quantity…and the same is known by the weight of each body, for it is
proportional to the weight as I have found by experiments on pendulums, very accurately
made, which shall be shown hereafter.”
Mécanique Physique (S2) 3ème partie page 5
Voilà, la masse est la quantité de matière d’un corps et si je prends la masse volumique
(density) et le volume (bulk) du corps, la masse = masse volumique × volume. Le volume
c’est de la géométrie mais la masse volumique, comment on l’obtient ? Ensuite il dit que la
masse est proportionnelle au poids et que de cette façon on peut comparer des masses.
Effectivement une balance sert à cela (il parle de pendules mais on verra ça plus loin).
A l’équilibre, le fléau de la balance est horizontal.
Les moments de P et P’ par rapport à l’axe de
rotations sont donc égaux et opposés de sorte que en
module :
P OA = P’ OB
et si OA = OB (une balance vraie) :
P = P’
Si les deux masses sont plongées dans le même champ de gravité alors ce que nous dit
Newton est que P = mg et P’ = m’g de sorte que m = m’.
On a ainsi construit un système de comparaison des masses via les forces de gravitation.
Insistons que masse et poids sont de nature différentes : la masse est intrinsèque à l’objet, le
poids dépend de la masse mais aussi de la gravité.
Ce type d’expérience permet-il de dire que le
« m » mesuré par la balance est le même que
celui-ci qui apparaît dans (1) ? Pour s’en
convaincre il faut appliquer une « force autre
que la gravité » à nos deux masses m et m’ et
voir comment elles accélèrent. Des
expériences assez complexes ont été réalisées
par Eotvös mais on va faire passer l’idée avec
une très simple : prenons une table horizontale
( g) et sans frottement et on exerce une force
avec un ressort (comme dans les flippers).
A partir de mesures de la position x(t) de la masse, on peut en déduire
x
&
et
x
&&
et donc obtenir
m = F/
x
&&
. La conclusion de ce type d’expérience est que la masse mesurée est la même que la
masse déduite d’expériences statiques type balance utilisant la gravité. On reconnait alors que
la masse inertielle est identique3 à la masse gravitationnelle.
3 Ce problème est à la base de la théorie de la relativité dEinstein qui a finalement proposé l’équivalence de la
masse et de l’énergie .
P
P
m
m’
A
B
t=0
m
à t
v
1 / 19 100%
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