L’arrimage entre l’évaluation environnementale stratégique et celle des projets : État de la situation et application au Québec Document de travail Réalisé par Valérie Saint-Amant Dans le cadre d’un stage à la Maîtrise en sciences de l’environnement de l’Université du Québec à Montréal Sous la supervision de Michel Crowley, Ph.D. MINISTÈRE DE L’ENVIRONNEMENT DU QUÉBEC DIRECTION DES ÉVALUATIONS ENVIRONNEMENTALES Février 2002 TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION ......................................................................................................................... 1 CHAPITRE 1 : L’ÉES - QUELQUES NOTIONS DE BASE ................................................... 3 1.1 DÉFINITION DE L’ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE STRATÉGIQUE (ÉES) ...................... 3 1.2 QUELLE EST LA PORTÉE DE L’ÉES? ....................................................................................... 4 1.3 L’APPROCHE DE L’ÉES DANS LE CONTEXTE ACTUEL AU QUÉBEC, AU GOUVERNEMENT CANADIEN ET AU PLAN INTERNATIONAL ................................................. 5 CHAPITRE 2 : LES MÉCANISMES D’ARRIMAGE ENTRE L’ÉES ET L’ÉIE ................ 7 2.1 L’ÉES ABORDE DES SOLUTIONS DE RECHANGE QUI NE PEUVENT ÊTRE ÉTUDIÉES AU NIVEAU DE L’ÉIE-PROJET ............................................................................... 8 2.2 L’ÉES PEUT ÊTRE UTILISÉE POUR RÉDUIRE LE CADRAGE DES NIVEAUX INFÉRIEURS D’ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE ............................................................. 9 2.2.1 L’EFFET D’ENTONNOIR ....................................................................................................... 10 2.2.2 L’EXISTENCE D’UN CADRE DE PLANIFICATION ENVIRONNEMENTALE ............................ 10 2.2.3 LE TRANSFERT D’INFORMATION ........................................................................................ 11 2.3 L’ÉES TIENT COMPTE D’AUTRES TYPES D’IMPACTS QUE CEUX EXAMINÉS AU NIVEAU DE L’ÉIE-PROJET .............................................................................................. 11 2.3.1 IMPACTS CUMULATIFS ........................................................................................................ 11 2.3.2 IMPACTS À GRANDE ÉCHELLE ............................................................................................ 12 CHAPITRE 3 : DISCUSSION ................................................................................................... 15 3.1 AVIS DE PROJET – DIRECTIVE ............................................................................................... 17 3.2 RÉALISATION DE L’ÉTUDE D’IMPACT – QUESTIONS ET COMMENTAIRES DU MENV ....... 18 3.3 PARTICIPATION DU PUBLIC ................................................................................................... 21 3.4 ANALYSE ENVIRONNEMENTALE............................................................................................ 21 3.5 ANALYSE ET RECOMMANDATION DU MINISTRE – DÉCISION DU GOUVERNEMENT – AUTORISATION MINISTÉRIELLE .......................................................................................... 21 3.6 SURVEILLANCE, SUIVI ET CONTRÔLE .................................................................................. 22 CONCLUSION ............................................................................................................................ 23 RÉFÉRENCES ............................................................................................................................ 25 ANNEXE 1 RÉSUMÉ DE NOOTEBOOM............................................................................. 27 FIGURES ET TABLEAUX FIGURE 1 REPRÉSENTATION SIMPLIFIÉE DE LA RELATION ENTRE LES POLITIQUES, PLANS, PROGRAMMES ET PROJETS . .....................................................5 FIGURE 2 PROCÉDURE D’ÉVALUATION ET D’EXAMEN DES IMPACTS SUR L’ENVIRONNEMENT AU QUÉBEC .............................................................................16 TABLEAU 1 - ILLUSTRATION DE CERTAINES DIFFÉRENCES DANS LA PORTÉE DE ENVIRONNEMENTALE SELON LE NIVEAU DE PLANIFICATION L’ÉVALUATION EN CAUSE. ............................................................................................................19 INTRODUCTION En janvier 2000, le groupe de travail du Comité interministériel sur le développement durable (CIDD) a proposé un processus d’évaluation environnementale stratégique (ÉES) adapté au contexte québécois1. Ce processus s’appliquerait lors de l’élaboration et la révision des politiques, plans et programmes gouvernementaux et serait encadré par une politique gouvernementale responsabilisant les ministères et organismes concernés. Le groupe de travail, composé de représentants du MAPAQ, du MÉQ, du MENV (président), du MRN, du MSSS et du MTQ, a conçu sa proposition afin que l’ÉES soit intégrée au processus habituel de développement des politiques, plans et programmes dans les ministères et organismes et se traduise, entre autres, par une rubrique traitant des implications environnementales des PPP dans tout mémoire transmis au Conseil des ministres. Comme l’indique le rapport du groupe de travail, certains points de sa proposition méritent d’être précisés. L’objectif de ce rapport est de définir les mécanismes d’arrimage entre l’évaluation des impacts environnementaux de projet (ÉIE) et l’évaluation environnementale des politiques, plans et programmes. À cette fin, ce document fera tout d’abord, au chapitre 1, un bref rappel de quelques notions de base se rapportant à l’ÉES, à savoir sa définition et sa portée et un survol des pratiques en matière d’ÉES au Québec, au gouvernement canadien et au plan international. Par la suite, le chapitre 2 fera état des mécanismes d’arrimage identifiés dans le cadre d’une étude réalisée à partir d’exemples européens récents. Enfin, le chapitre 3 explique comment une ÉES peut entraîner des gains dans le traitement d’un projet assujetti à la procédure québécoise d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement prévue à la Loi sur la qualité de l’environnement : le cas du transport dans la région de Montréal sera utilisé pour illustrer cette réflexion. 1 Groupe de travail sur l’évaluation environnementale stratégique, 1999. L’évaluation environnementale stratégique : un outil pour le développement durable, document de travail, Comité interministériel sur le développement durable, Québec. CHAPITRE 1 : L’ÉES - QUELQUES NOTIONS DE BASE Ce premier chapitre présente les principes de base et la portée de l’évaluation environnementale stratégique ainsi que la place de l’ÉES dans le contexte québécois, canadien et international. 1.1 Définition de l’évaluation environnementale stratégique (ÉES) L’ÉES consiste à appliquer les principes de l’évaluation environnementale aux propositions de politiques, plans et programmes (PPP). Selon la définition de Thérivel et al. (1992 – traduction libre), l’ÉES consiste en : « … un processus systématique formel et exhaustif servant à évaluer les effets environnementaux de politiques, plans et programmes ainsi que leurs solutions de rechange; le processus donne lieu à un rapport écrit dont les conclusions sont utilisées dans la prise de décision par les autorités publiques imputables. » Le principe fondamental derrière tout processus d’ÉES et d’ÉIE est d’aider à la prise de décision par l’intégration d’informations pertinentes provenant des évaluations environnementales à la planification des PPP. Le bilan des consultations du public et des parties prenantes devrait aussi être pris en considération (Nooteboom, 1999). Pour parvenir à des résultats probants, la procédure d’ÉES doit s’astreindre à certaines conditions (CIDD, 1999; Commission des Communautés européennes, 1999) : • L’ÉES doit s’appliquer le plus en amont possible dans le processus de planification et de prise de décision; • L’initiateur du PPP doit faire un examen des solutions de rechange, cette évaluation permettant de déterminer la façon dont les modifications et les changements apportés au projet peuvent réduire les risques pour l’environnement; • L’initiateur doit, autant que possible, rechercher la collaboration d’autres autorités pour la production du rapport d’évaluation, et; • Le rapport d’évaluation devrait être vérifié par une autorité environnementale, le public ainsi que toute autre partie intéressée. L’application d’une procédure d’évaluation environnementale des politiques, plans et programmes (PPP) permet d’intégrer les considérations environnementales et les principes du développement durable à tous les niveaux de prise de décision. De nombreux avantages découlent d’une telle approche soit, la résolution des problèmes à la source, la prise en considération des effets environnementaux dans les décisions de toute nature, la responsabilisation des décideurs et la participation des citoyens ainsi que la réduction des coûts et des délais nécessaires à l’élaboration des évaluations environnementales des niveaux inférieurs (tiré de CIDD, 1999 - Sadler, 1996; Thérivel et Partidário, 1996). 4 1.2 Quelle est la portée de l’ÉES? Toute proposition de PPP ayant des impacts significatifs sur l’environnement de façon directe ou indirecte devrait être soumise à une évaluation environnementale stratégique2. Les secteurs d’activité généralement visés par l’ÉES sont l’énergie, le transport, la gestion des matières résiduelles, la gestion des ressources naturelles (eau, air, faune, forêt, flore), l’agriculture, l’aménagement du territoire, la planification urbaine et le développement industriel. Néanmoins, l’ÉES peut (et devrait) s’appliquer à des décisions de toute nature (juridique, administrative, fiscale, économique, etc.) au même titre que les évaluations économiques et sociales (tiré de CIDD, 1999 - Commission des Communautés européennes, 1990; Falque, 1995). Les sujets auxquels l’ÉES s’applique se situent en amont des projets concrets ponctuels habituellement visés par l’évaluation environnementale classique, à savoir : Les politiques, qui sont des actes d’orientation générale essentiellement issus des instances gouvernementales. Elles font souvent référence aux interventions qui véhiculent les idées, les concepts et les orientations qui établissent les intentions, les tendances et les dispositions privilégiées pour le développement. Il peut s’agir de livres blancs, de lois, de règlements, de déclarations gouvernementales et de politiques gouvernementales ou ministérielles. Les plans, qui prennent généralement la forme d’un schéma général ou d’un ensemble d’objectifs coordonnés et planifiés dans le temps visant à mettre en œuvre une politique dans un secteur d’activité ou un territoire particulier. Il s’agit notamment de cadres d’intervention tels les schémas d’aménagement, les plans d’urbanisme ainsi que les plans régionaux de transport. Les programmes, qui font référence aux interventions, ont pour objet de concrétiser les politiques ou les plans. Ils servent à définir le cadre d’action dans lequel s’inscriront ultérieurement les projets ou activités ponctuels. Il s’agit généralement de cadres d’intervention plus restreints, comme les mesures d’assistance financière au développement ou les activités gouvernementales, ministérielles ou municipales touchant un domaine d’activité spécifique (par exemple, la construction d’infrastructures de traitement des eaux usées). La distinction entre ces trois niveaux de planification, les « PPP » (politiques, plans, programmes) comme on les nomme souvent dans la littérature, n’est pas toujours évidente. De plus, leur signification peut varier d’une juridiction à l’autre. Toutefois, pour les besoins de cet exposé, on peut assumer que les PPP sont généralement en relation hiérarchique, entre eux ; un PPP donné est structuré par le ou les PPP de niveaux supérieurs (ou macro) et a un effet structurant sur le ou les PPP de niveaux inférieurs (ou davantage micro) (voir figure 1.1). Toutefois, comme l’indique Boothroyd (1995), cette représentation simplifiée ne tient pas compte, d’une part, des interactions latérales entre des secteurs d’activités (par exemple, l’effet des politiques budgétaires globales sur les politiques sectorielles (transport, agriculture, etc.)) et, d’autre part, des boucles de rétroaction existant entre les trois niveaux, voire entre les projets et les niveaux supérieurs. Bien entendu, pour un secteur d’activité donné, ces trois niveaux de planification ne sont pas tous nécessairement présents en amont des projets. 2 Pour une analyse des pratiques actuelles relatives à la détermination de la nécessité de soumettre une proposition de PPP, voir le document de Cloutier (2001), Tri préliminaire et cadrage en évaluation environnementale stratégique : état de la situation et proposition pour le Québec, qui a été déposé au CIDD en mai 2001. 5 FIGURE 1 Politiques macro Plans Programmes Projets micro . REPRÉSENTATION SIMPLIFIÉE DE LA RELATION ENTRE LES POLITIQUES, PLANS, PROGRAMMES ET PROJETS (INSPIRÉ DE THÉRIVEL ET PARTIDÁRIO, 1996). Ainsi, par exemple, une politique de transport nationale privilégiant l’usage de l’automobile personnelle en milieu urbain entraîne la préparation de plans régionaux de transport qui mettent l’emphase sur l’amélioration des infrastructures autoroutières. Les programmes de travaux ciblent alors des investissements dans des activités telle la construction de nouvelles autoroutes. Enfin, un projet concret d’autoroute, allant du point A au point B selon un tracé X, est financé dans le cadre du programme. Les impacts environnementaux découlant d’une telle politique (émissions atmosphériques, consommation d’énergie, bruit, etc.) sont différents d’une politique axée sur le transport en commun qui mène plutôt à des projets de construction de gares et de nouvelles voies pour des trains de banlieue, par exemple. 1.3 L’approche de l’ÉES dans le contexte actuel au Québec, au gouvernement canadien et au plan international Au Québec, aucune structure formelle d’ÉES n’est encore en place. Quelques grandes consultations publiques à caractère stratégique ont eu lieu au cours des dernières années telles que la Commission sur la gestion de l’eau, 2000 (L’eau ressource à protéger, à partager et à mettre en valeur, BAPE, 2000), la Commission d’enquête sur la gestion des matières résiduelles au Québec, 1997 (Déchets d’hier, Ressources de demain, BAPE,1997), la Commission sur la protection des forêts, 1991 (Des forêts en santé, BAPE, 1991) ainsi que la Commission d’enquête sur les déchets dangereux, 1990, (Les déchets dangereux au Québec : une question environnementale, BAPE, 1990). Quelques plans et programmes ont aussi été analysés dans une perspective d’évaluation environnementale stratégique tels que le Programme d’aide financière aux entreprises agroalimentaires 1996-1999 (MAPAQ, 1997), le Programme de dégagement de la régénération forestière, 19973 (BAPE, 1997), le Plan de gestion des déchets de la ville de Sherbrooke, 1996 (CIDD, 1999). La majorité de ces expériences s’est effectuée de façon volontaire. 3 Conformément à l’article 2 du Règlement sur l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement, les programmes de pulvérisation aérienne de pesticides à des fins non agricoles ainsi que les programmes de dragage, creusage, remplissage, redressement ou remblayage dans les cours d’eau ou les lacs (en fonction de certains seuils) sont automatiquement assujettis à la procédure d’évaluation et d’examen des impacts environnementaux. 6 En 1999, le gouvernement fédéral canadien a mis à jour la Directive de 1990 exigeant que toutes les propositions de politiques, plans ou programmes destinées à l’approbation du Cabinet et ayant des répercussions sur l’environnement soient soumises à une évaluation environnementale. Le renforcement de la Directive a permis de modifier le cadre institutionnel d’application de l’ÉES en précisant les obligations des ministères et organismes, rendant l’ÉES quasi-obligatoire (Agence canadienne d’évaluation environnementale, 2001). À ce titre, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international a fait paraître son Cadre pour l’évaluation environnementale des négociations commerciales en février 2001, tandis que le ministère des Transports a émis son énoncé de politique sur l’ÉES en mars 2001. À l’échelle internationale, plusieurs pays d’Europe (Allemagne, Belgique, Espagne, Finlande, France, Italie, Pays-Bas, Suède), les États-Unis, l’Australie Occidentale et la NouvelleZélande ont mis en place des procédures d’évaluation environnementale stratégique, encadrées par des lois ou des exigences obligatoires, appliquées à toutes les propositions gouvernementales ou à certaines activités particulières (Sadler, 1996, p. 184, cité dans Risse, 1998, p.11). À l’heure actuelle, les États-Unis et les Pays-Bas sont dotés des procédures d’ÉES les plus avancées (tiré de CIDD, 1999 - Dom, 1997). Il est à noter qu’à compter de 2004, tous les pays de l’Union Européenne devront avoir harmonisé leur procédure nationale à la nouvelle Directive relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, rendant l’ÉES obligatoire pour chacun des États membres4. D’autres pays ont choisi de faire appel à des ordonnances administratives (mesures pouvant être considérées comme quasi-obligatoires) ou encore à des politiques opérationnelles proposées à titre indicatif. 4 Directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil relatif à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, art. 4, par. 2 : Les exigences de la présente directive sont soit intégrées dans les procédures existantes des États membres régissant l’adoption de plans et programmes, soit incorporées dans procédures instituées pour assurer la conformité avec la présente directive. CHAPITRE 2 : LES MÉCANISMES D’ARRIMAGE ENTRE L’ÉES ET L’ÉIE Un certain nombre de questions subsistent quant à la pertinence, l’efficacité et les réels avantages de l’évaluation environnementale stratégique (ÉES). Elles portent, entre autres, sur les mécanismes d’arrimage de l’ÉES à l’évaluation des impacts environnementaux de projets (ÉIE). Les principaux intéressés cherchent surtout à déterminer quels sont les gains à tirer de la pratique conjointe de l’ÉES et de l’ÉIE et par conséquent, à identifier les mécanismes générant ces bénéfices. La nouvelle Directive européenne relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement a d’ailleurs introduit, à même ses obligations générales, une disposition concernant les mécanismes d’arrimage afin d’éviter la répétition des évaluations5. Par mécanisme d’arrimage, nous entendons : Moyen permettant aux différents niveaux d’évaluation environnementale de se compléter et de parvenir à une synergie de leur valeur individuelle. Ces mécanismes font en sorte que chacune des évaluations soit consacrée spécifiquement aux éléments (solutions de rechange, impacts, mesures d’atténuation) propres au niveau de prise de décision associé, sans empiéter sur les éléments des autres niveaux d’évaluation, tout en ayant une influence directe et/ou rétroactive sur les différents niveaux d’évaluation environnementale et de prise de décision. Ces mécanismes d’arrimage devraient permettre : • de gérer efficacement les différentes évaluations et la participation des publics, • de s’assurer que les décisions prises aux niveaux supérieurs ne seront pas remises en question aux niveaux subséquents et, • à moyen terme, de réduire efficacement les délais et les coûts relatifs aux évaluations environnementales des différents niveaux de planification. Sous la direction du DHV Environment and Infrastructure des Pays-Bas, Sibout Nooteboom (1999) a cherché à identifier les différentes interactions que l’on peut observer entre les deux approches d’évaluation environnementale (voir résumé en annexe 1). À partir de cette étude, les mécanismes d’arrimage suivants ont été identifiés : • 5 L’ÉES aborde des solutions de rechange qui ne peuvent être étudiées au niveau de l’ÉIEprojet; Directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil relatif à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, art. 4, par. 3 : Lorsque les plans et programmes font partie d’un ensemble hiérarchisé, les États membres, en vue d’éviter une répétition de l’évaluation , tiennent compte du fait qu’elle sera effectuée, conformément à la présente directive, à différents niveaux de l’ensemble hiérarchisé. Afin, entre autres, d’éviter une répétition de l’évaluation, les États membres appliquent l’article 5, paragraphes 2 et 3. 8 • L’ÉES peut être utilisée pour réduire le cadrage des niveaux inférieurs d’évaluation environnementale − par l’effet d’entonnoir, − avec l’aide d’un cadre de planification environnementale, − par le transfert d’information entre les niveaux de prise de décision; • L’ÉES tient compte d’autres types d’impacts que ceux examinés au niveau de l’ÉIE-projet tels que: − les impacts cumulatifs − les impacts à grande échelle Chacun de ces mécanismes, tirés principalement du rapport d’analyse de Nooteboom (1999), Environmental assesments of strategic decisions and project decisions : interactions and benefits, sont discutés dans les sections suivantes. Par ailleurs, il est important de mentionner que ce rapport comporte certaines limites. En effet, comme la pratique de l’ÉES est encore jeune, l’ensemble des cas théoriquement possibles ne peut être entièrement exposé dû au nombre restreint d’exemples disponibles. Pour répondre à cette lacune, Nooteboom (1999) a complété les conclusions de ses études de cas par des avis d’experts. De plus, la seule façon de valider objectivement les constatations procédant de l’analyse des cas pratiques consiste à comparer ces résultats à ceux du même processus de planification en l’absence d’évaluation environnementale stratégique, ce qui s’avère impossible. 2.1 L’ÉES aborde des solutions de rechange qui ne peuvent être étudiées au niveau de l’ÉIE-projet En principe, l’évaluation environnementale, quelqu’en soit le niveau, s’appuie sur la comparaison de plusieurs solutions de rechange permettant d’obtenir un résultat donné : par exemple, la production d’un niveau X d’énergie, le transport d’un certain nombre de personnes ou d’un tonnage de marchandises. Les solutions de rechange proposées aux niveaux stratégiques se rapportent directement au niveau de prise de décision et à la précision relative des questions traitées. Plus l’évaluation environnementale stratégique réfère à une prise de décision de haut niveau, plus les questions traitées sont à large spectre et à long terme. Les solutions de rechange proposées aux niveaux supérieurs de prise de décision couvrent généralement des horizons d’actions larges et diversifiés, allant de la remise en question de la pertinence d’agir (alternative « Ne rien faire ») jusqu’à la localisation approximative du développement. L’évaluation d’impacts environnementaux de projets aborde des situations précises et relativement ponctuelles dans le temps et dans l’espace. Les solutions de rechange évaluées au niveau des projets tiennent plutôt de l’évaluation des variantes et des conditions opérationnelles de mise en œuvre du projet. 9 Ainsi, les questions de type « pourquoi », « de quel type » et « dans quelle région » le ou les projets seront mis en œuvre sont généralement posées au niveau stratégique tandis que la question « comment » qualifie le niveau des projets. Selon le niveau de prise de décision, les solutions retenues peuvent déterminer les orientations de développement à long terme, les voies privilégiées pour y parvenir et les projets spécifiques permettant d’atteindre les objectifs fixés. EXEMPLE : Une politique énergétique à long terme pourrait, par exemple, 1. Préconiser l’efficacité énergétique et limiter le choix des filières énergétiques aux technologies propres afin de répondre aux engagements du protocole de Kyoto et du développement durable ou, 2. Opter pour des filières énergétiques plus concurrentielles sur le plan économique misant ainsi davantage sur la fructification du capital par l’exportation d’énergie. Si l’approche 1 est retenue, l’évaluation environnementale de la proposition d’un parc d’éoliennes, par exemple, devra analyser des options techniques telles que la localisation du parc, la disposition, le nombre et le type d’éoliennes qui offrent le plus grand potentiel de développement. Si l’approche 2 est retenue et que l’on propose une ou plusieurs centrales thermiques par exemple, ce sont des éléments tels que l’emplacement le plus optimal, les possibilités de raccordement aux lignes de distribution vers le marché américain, la possibilité de construire et mettre la centrale en opération rapidement et surtout, le choix d’un combustible dont les coûts sont rentables à la lumière des conditions du marché qui devront être analysés dans l’évaluation environnementale. 2.2 L’ÉES peut être utilisée pour réduire le cadrage des niveaux inférieurs d’évaluation environnementale L’étape du cadrage consiste à déterminer les éléments à aborder dans l’étude d’impact, notamment en ce qui concerne les principaux enjeux environnementaux, les solutions de rechange et les impacts. Ainsi, la procédure québécoise d’évaluation et d’examen des impacts environnementaux de projets met à la disposition des initiateurs de projet une série de directives ayant comme objectif de préciser le cadrage en fonction des types de projet. Cette étape peut être grandement réduite ou du moins raffinée par l’application d’une procédure d’ÉES planifiée. En effet, l’ÉES définit des balises pour la prise de décision aux niveaux inférieurs permettant ainsi de mieux concentrer les efforts des évaluateurs. Certaines composantes de l’étude d’impact, comme la justification du projet et l’analyse des solutions de rechange, peuvent être allégées suite à la réalisation d’une ÉES. 10 Trois mécanismes permettent de réduire le cadrage aux niveaux inférieurs d’évaluation environnementale : 2.2.1 L’effet d’entonnoir Ce mécanisme est parmi les plus efficaces et consiste simplement à n’évaluer que les impacts des options sélectionnées aux niveaux stratégiques sans revenir sur les décisions prises en amont, toute solution de rechange rejetée au niveau de l’ÉES ne faisant plus l’objet d’une analyse au niveau subséquent. L’attention peut alors se porter essentiellement sur les enjeux les plus importants pour chaque niveau d’évaluation environnementale, évitant la collecte et la présentation d’information non nécessaire (Commission des Communautés Européennes, 1999). EXEMPLE : Les objectifs et les moyens adoptés dans le plan de gestion des matières résiduelles des municipalités régionales de comté doivent se conformer aux orientations et objectifs gouvernementaux. Si, par exemple, la gestion par incinération est éliminée au niveau du plan d’action provincial, ce type de projet ne sera même pas envisagé au niveau municipal. En revanche, une proposition de lieu d’enfouissement sanitaire ne pourrait être approuvée au niveau provincial si le plan d’action municipal n’endosse pas ce moyen de gestion. 2.2.2 L’existence d’un cadre de planification environnementale L’existence d’un cadre de planification environnementale (sous la forme d’un plan d’action, d’un guide ou d’une politique environnementale) permet d’insérer une structure d’identification, de contrôle et d’évaluation des impacts des prises de décision tout au long du processus de planification/ÉES jusqu’à l’évaluation environnementale du projet. EXEMPLE : Un cadre de planification environnementale peut être plus ou moins restrictif et définir spécifiquement les différents éléments devant être inclus ou exclus de chacune des étapes de la planification. Le plan d’action québécois de gestion des matières résiduelles 1998-2008 est un exemple de cadre précis qui dicte les responsabilités des municipalités et des entreprises, encourage certaines actions (mécanismes de consultations publiques, programme d’information et d’éducation, etc.) et en oblige d’autres (récupération et mise en valeur des emballages et imprimés mis en marché ou contribution financière à la collecte sélective des entreprises concernées, récupération et mise en valeur des feuilles et des herbes qui ne peuvent être laissées sur place par les municipalités, etc.). Les schémas d’aménagement produit par les MRC doivent d’ailleurs suivre les prescriptions du plan d’action gouvernemental et par conséquent, les projets qui s’insèrent dans chacun des schémas doivent aussi le respecter. Un autre type de cadre, très spécifique dans ses recommandations mais s’appliquant à des PPP de plusieurs ministères et organismes, pourrait, par exemple, découler du plan d’action québécois sur les changements climatiques. Tous les PPP ayant des répercussions sur l’émission de GES, que ce soit dans le secteur des transports, de l’industrie, de la foresterie ou de l’énergie, devraient répondre à des normes ou s’engager à respecter des quotas d’émissions maximales. 11 2.2.3 Le transfert d’information Ce mécanisme est le plus commun. Il peut être très efficace lorsque les arrangements institutionnels et les pratiques administratives favorisent : 1. La coordination des niveaux d’évaluation, 2. La communication, 3. Le travail d’équipes multidisciplinaires et 4. La récupération des enseignements des évaluations précédentes. Sans réduire le cadrage comme tel, le transfert et la réutilisation d’information permettent surtout d’en raffiner le contenu, et à moyen et long terme, d’améliorer la pratique de l’ÉES. Le transfert d’information fait aussi référence à la transparence dans la planification et dans les méthodes employées ainsi qu’à l’intégration des préoccupations du public et des parties prenantes. La consultation et la participation des différents intervenants politiques, environnementaux et du public est un des principes de base de l’ÉES. Cette pratique a généralement comme effet d’augmenter la crédibilité et l’acceptation des propositions et par conséquent, de réduire les risques d’opposition au projet en fin de procédure causant des délais et des coûts supplémentaires (Commission des Communautés Européennes, 1999). Un élément déterminant de l’efficacité du transfert d’information réfère à la durée de la validité des informations. Plus le temps de transfert d’information est long, plus les risques que l’information soit dépassée s’accroissent compte tenu de la vitesse d’évolution des connaissances et des technologies. Une détermination ad hoc de la validité des informations pourrait être établie en fonction des secteurs évalués, étant donné les différences dans l’évolution des connaissances d’un secteur à l’autre 2.3 L’ÉES tient compte d’autres types d’impacts que ceux examinés au niveau de l’ÉIEprojet Tout comme pour l’évaluation des solutions de rechange, certaines catégories d’impacts sont plus aisément identifiées et mieux prises en considération au niveau stratégique qu’au niveau du projet. Il s’agit particulièrement des impacts et des impacts à grande échelle. 2.3.1 Impacts cumulatifs Ces impacts font référence aux effets environnementaux que peuvent engendrer une série de projets plus ou moins importants découlant d’un même PPP. Les impacts cumulatifs sont généralement définis comme des impacts environnementaux considérés non significatifs lorsque évalués uniquement en fonction d’un projet isolé, mais dont les effets peuvent se cumuler lorsqu’une série de projets semblables se trouve sur un même territoire. L’évaluation des impacts cumulatifs au niveau des projets fait en sorte d’alourdir le processus par un mandat d’étude plus étendu et un examen plus long et parfois indéfini (Leduc et Raymond, 2000). 12 Ce type d’impact est plus facile à prévoir et à atténuer au niveau stratégique qu’au niveau des projets. La possibilité d’évaluer à long terme les conséquences de projets induits par un PPP devrait permettre de prévoir les impacts cumulatifs et d’agir en conséquence. Le niveau stratégique de prise de décision a pour avantage, par rapport au niveau de prise de décision des projets, de pouvoir (et devoir) gérer l’ensemble des projets découlant de ce même PPP. Ces décisions stratégiques ne devraient pas considérer ces projets comme des cas individuels, mais plutôt comme un ensemble (exemple : un projet de production hydroélectrique implique au minimum la construction d’une centrale, d’une ligne de transport d’énergie et d’un poste de distribution). Si les impacts cumulatifs ne sont abordés qu’à l’étape de l’évaluation environnementale des projets, chacun des projets proposés individuellement pourra être approuvé en autant que le niveau total acceptable d’impact n’est pas atteint. Dans ce cas, seul le projet en bout de ligne, celui dont les impacts individuels s’ajoutent aux impacts des projets déjà en place, devra assumer les frais (mesures de compensation plus performantes ou même rejet du projet) pour l’ensemble des projets découlant de ce PPP. Tenir compte des impacts cumulatifs au niveau stratégique permettrait, par exemple, d’adopter des mesures d’atténuation obligatoires ou de mettre en place des mécanismes de répartition des coûts sur l’ensemble des projets proposés à la suite d’un PPP. Par ailleurs, si les impacts cumulatifs sont évalués et pris en charge au niveau stratégique, leur évaluation devient moins importante au niveau des projets. EXEMPLES : Le programme de petites centrales hydroélectriques du ministère des ressources naturelles illustre bien les possibilités d’application et les avantages de l’analyse des impacts cumulatifs au niveau stratégique de planification. Une réflexion sur le cumul des impacts de plusieurs centrales sur un même écosystème aquatique permettrait, au moment du choix des projets recevables, d’établir des recommandations ou même des directives sur les impacts environnementaux acceptables. Une analyse préalable des sites par le MRN pourrait aussi déterminer quelles rivières peuvent accueillir des projets et combien de projets sont acceptables pour chacune de ces rivières, considérant les impacts cumulatifs potentiels. Sous la procédure actuelle, il revient aux initiateurs de projets d’évaluer les impacts cumulatifs de leurs projets sur l’environnement et de tenter de les atténuer, le cas échéant. En pratique, ce type d’impact est plutôt difficile à évaluer sur une échelle réduite telle que les zones d’étude des projets, l’effet étant généralement plus étendu ou fragmenté. 2.3.2 Impacts à grande échelle La possibilité d’influer sur les impacts à grande échelle est généralement plus élevée au niveau stratégique d’évaluation des solutions de rechange qu’au niveau des projets. Ces impacts à grande échelle se définissent comme des conséquences environnementales directes ou indirectes affectant l’environnement bien au-delà des limites géographiques du projet. Deux catégories se distinguent parmi les impacts à grande échelle, soit : les impacts globaux affectant la terre entière (gaz à effet de serre, etc.) et les impacts régionaux ou transfrontaliers affectant de plus ou moins grandes superficies (émission de polluants atmosphériques, étalement urbain, réduction des ressources naturelles, etc.). 13 Les impacts à grande échelle sont mieux encadrés par l’examen de solutions de rechange de niveau stratégique puisque celles-ci permettent de planifier à long terme et à grande échelle tandis que l’ÉIE est davantage habilitée à traiter avec des domaines de références dont les aspects spatio-temporels sont restreints et bien délimités. L’évaluation des impacts à grande échelle peut tout de même s’effectuer au niveau des projets mais, tout comme pour les impacts cumulatifs, cette étape devient moins nécessaire si elle est déjà abordée dans une ÉES. EXEMPLE : Un engagement ferme de la part du gouvernement pourrait restreindre les choix des filières énergétiques aux énergies propres dans un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les mesures d’atténuation proposées au niveau d’un projet de centrale thermique, par exemple, afin de réduire les impacts globaux de la production de gaz à effet de serre (GES), offrent généralement une performance mitigée à l’échelle planétaire. La sélection des filières énergétiques se fait à un niveau stratégique et c’est à ce même niveau que devraient être évalués les impacts à grande échelle que sont les gaz à effet de serre. Il en va de même pour les décisions stratégiques liées aux transports et à la gestion des déplacements, principalement en milieu urbain. CHAPITRE 3 : DISCUSSION Cette discussion à pour objectif de présenter les bénéfices environnementaux et économiques de l’ÉES en ce qui concerne le traitement des projets assujettis à la procédure québécoise d’examen et d’évaluation des impacts environnementaux. À la suite d’un bref rappel sur la procédure, nous présenterons chacune des étapes de celle-ci en fonction des implications, modifications et gains potentiels de temps et d’argent générés par la pratique de l’ÉES. Ces gains sont d’ailleurs perçus autant par les initiateurs privées et publics que par le ministère de l’Environnement. Rappel sur la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement La procédure québécoise d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement se déroule en six phases (voir figure 2). Au moment de la première phase, l’initiateur du projet dépose un avis de projet au ministre de l’Environnement qui lui transmet par la suite la directive sectorielle propre à la proposition de projet. La phase suivante consiste à la réalisation de l’étude d’impact par l’initiateur. Celle-ci sera par la suite analysée par les spécialistes du ministère de l’Environnement qui, s’il y a lieu, demanderont des précisions avant que l’étude d’impact ne soit rendue publique. Vient ensuite et simultanément les phases de la consultation publique et de l’analyse environnementale. Les consultations publiques sont conduites par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). Tous les dossiers sont alors rendus publics pour une période de 45 jours, durant laquelle une personne, un groupe ou une municipalité peut adresser une demande d’audience publique au ministre de l’Environnement. Lors d’une audience publique, la population peut s’informer sur le projet et soumettre ses commentaires. Le BAPE fait ensuite état de ses constatations et de l’analyse qu’il en a tirée dans un rapport qu’il transmet au ministre. Le mandat confié au BAPE pour tenir l’audience et rédiger son rapport est d’une durée d’au plus quatre mois. Parallèlement aux audiences publiques, les spécialistes du ministère de l’Environnement, en collaboration avec ceux d’autres ministères et organismes, analysent le projet afin de s’assurer qu’il respecte les lois et règlements en vigueur, qu’il est justifié, et que ses impacts, après atténuation, sont acceptables sur le plan environnemental. Au moment de la cinquième phase, le ministre de l’Environnement effectue sa propre analyse à partir du rapport du BAPE et du rapport d’analyse environnementale et fait une recommandation au gouvernement. Ce dernier rend sa décision par décret. À cette étape, l’initiateur du projet doit aussi soumettre ses plans et devis afin d’obtenir le certificat d’autorisation du ministère de l’Environnement. Enfin, l’initiateur du projet est responsable de la surveillance du chantier et du programme de suivi des impacts. Pour sa part, le ministère de l’Environnement exerce un contrôle pendant toutes les phases du projet (construction, exploitation, fermeture). 16 FIGURE 2 PROCÉDURE D’ÉVALUATION ET D’EXAMEN DES QUÉBEC (TIRÉ DE WWW.MENV.GOUV.QC.CA) IMPACTS SUR L’ENVIRONNEMENT AU 17 3.1 Avis de projet – Directive La première phase de la procédure québécoise d’évaluation et d’examen des impacts environnementaux consiste au dépôt de l’avis de projet par l’initiateur. Pour que les bénéfices des ÉES soient optimisés au niveau de l’évaluation des impacts environnementaux de projet, quelques modifications devront être apportées au formulaire d’avis de projet afin d’indiquer si le projet découle d’un PPP ayant été soumis à une évaluation environnementale stratégique. Si tel est le cas, le titre et la date de parution et les conclusions du rapport d’ÉES devront être fournis par l’initiateur du projet. Celui-ci devrait être tenu au courant des conclusions du rapport d’ÉES et des dispositions relatives aux projets par le ministère responsable du PPP avant d’entamer les procédures d’ÉIE. Par la suite, le ministre transmet une directive à l’initiateur dans laquelle sont précisés les éléments que doit contenir l’étude d’impact en fonction des informations fournies dans l’avis de projet. Une des principales craintes face à l’ÉES est le dédoublement du travail d’un niveau à l’autre. Dans le cas où le projet découlerait d’un PPP ayant été soumis à une ÉES, une directive ad hoc, adaptée d’une directive sectorielle existante, devra être réalisée par le ministère de l’Environnement afin de préciser quelles composantes sont toujours à évaluer. En effet, les composantes ayant été évaluées dans une ÉES antérieure n’auront pas à être évaluées à nouveau dans l’étude d’impacts du projet. La justification du projet, l’analyse des solutions de rechange, la description du milieu à l’échelle régionale ou toutes autres composantes ou évaluations (impacts cumulatifs et à grande échelle, mesures d’atténuation) ayant été analysées dans une ÉES antérieure au projet pourront être soustrait de l’étude d’impact du projet. Cette étape demandera du temps supplémentaire au ministère de l’Environnement pour rédiger une directive ad hoc à la lumière des informations fournies dans le rapport d’ÉES. Cependant, cette nouvelle directive pourra servir pour tous les projets découlant de ce même PPP. Puisqu’un traitement de l’information aura déjà eu lieu dans l’ÉES, les indications de la directive pourront être plus concises, mais surtout davantage ciblées. Par ailleurs, l’autorisation du programme soumis à une ÉES pourrait comprendre une entente-cadre entre le ministère/organisme responsable du PPP et le ministère de l’Environnement dans laquelle seraient indiquées les composantes pouvant être soustraites de l’étude d’impact. Tous les rapports d’ÉES devront par conséquent être consignés au ministère de l’Environnement. Nous avons tenté d’illustrer, à partir d’un exemple de PPP et d’un projet connexe, les différences dans la portée des évaluations environnementales selon les niveaux de planification (voir tableau 1). Cet exemple permet de démontrer que certains enjeux sont mieux pris en considération à un niveau de planification plutôt qu’à l’autre et que, par conséquent, s’il est traité au niveau supérieur, il n’aura pas à être analysé à nouveau au niveau suivant. 18 Le projet de modernisation de la rue Notre-Dame à Montréal, découlant du plan de gestion des déplacements de la région métropolitaine de Montréal, s’est présenté comme un exemple intéressant pour démontrer les écarts dans le traitement des enjeux environnementaux en fonction de ces deux niveaux. Pour remplir la section du tableau portant sur l’étude d’impact sur l’environnement nous avons utilisé l’étude d’impact déposée par le ministère des Transports du Québec. Comme le plan de gestion des déplacements n’a pas fait l’objet d’une évaluation environnementale, nous nous sommes inspiré du Manual on Strategic Environmental Assessment of Transport Infrastructure Plans (1999) de la Commission Européenne pour tenter d’illustrer les éléments qu’une évaluation environnementale stratégique aurait pu analyser. Cet exercice n’est nullement exhaustif et doit être considéré à titre d’illustration. La première partie du tableau permet de visualiser les différents éléments de contexte de chacun des niveaux de planification devant être pris en considération lors des évaluations environnementales. La seconde partie analyse les impacts à évaluer et les actions à prendre selon les enjeux environnementaux biophysiques et socio-économiques majeurs, toujours en fonction des niveaux de planification. Les éléments qui ressortent du tableau sont principalement liés aux variations d’échelle de traitement (spatiale ou temporelle) des impacts et par conséquent, à l’analyse du type d’impact le plus approprié à l’évaluation environnementale. Les actions à prendre au niveau du projet sont généralement ponctuelles et ciblées tandis qu’au niveau du plan de gestion des déplacements, les actions visent l’ensemble du réseau de transport métropolitain et des autres composantes qui l’animent (activités industrielles, résidentielles, agricoles, administratives, etc.). Une troisième constatation se dégage du tableau et témoigne de la limite de chacun des niveaux à traiter certains enjeux. Les composantes biophysiques « Énergie » et « Changements climatiques » sont particulièrement difficiles à évaluer au niveau du projet tandis que les composantes socio-économiques « Bruit » et « Sécurité publique » démontrent une évaluation limitée ou peu appropriée au niveau du plan de gestion des déplacements. Le niveau de planification antérieur ou postérieur est généralement plus approprié au traitement de chacun de ces enjeux. 3.2 Réalisation de l’étude d’impact – Questions et commentaires du MENV Comme la directive émise par le ministre de l’environnement est réduite, des gains en temps et en argent pourront être directement perçus par l’initiateur du projet lors de la réalisation de l’étude d’impact. L’optimisation de l’enveloppe budgétaire de l’initiateur pourrait idéalement permettre d’approfondir certaines études. À partir de l’étude d’impact et des informations fournies dans le rapport d’ÉES, les questions et commentaires du ministère de l’Environnement pourront aussi être plus ciblées, plus spécifiques à l’égard de l’initiateur de projet. Ce rehaussement de la qualité des informations environnementales dans les études d’impacts profitera à toute la population. 19 TABLEAU 1 - ILLUSTRATION DE CERTAINES DIFFÉRENCES DANS LA PORTÉE DE L’ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE SELON LE NIVEAU DE PLANIFICATION EN CAUSE : LE CAS DU TRANSPORT DANS LA RÉGION DE MONTRÉAL. Éléments à traiter lors de d’évaluation environnementale Niveau de planification Plan de gestion des déplacements 2000-2010 Région métropolitaine de Montréal Projet de modernisation de la rue NotreDame, Montréal Éléments d’ordre général Aire d’étude Région métropolitaine de Montréal Objectif de l’action projetée Planification des travaux et des investissements 2000-2010 du MTQ dans la région de Montréal Solutions analysées Solutions de rechange (réfection de structures existantes, transport en commun, transport privé, nouvelles infrastructures, …) Consultations ciblées ou audiences publiques Tronçon de 9,2 km Plans et devis d’un ouvrage visant à décongestionner la circulation dans ce secteur de la ville (voir étude d’impact) Variantes (tracés, nombre de voies, tunnel, transport collectif) Audiences publiques (BAPE) Groupes environnementaux nationaux et régionaux, Intervenants susceptibles Groupes environnementaux nationaux et régionaux, experts, regroupement de citoyens, citoyens experts, regroupement de citoyens de se manifester riverains du projet Mode de consultation Enjeux biophysiques majeurs : types d’impacts à évaluer et d’actions à prendre Diversité biologique Qualité de l’eau Qualité de l’air Impacts à évaluer Actions à prendre Impacts à évaluer Actions à prendre Impacts à évaluer Actions à prendre Impacts à évaluer Énergie Changements climatiques Actions à prendre Impacts à évaluer Actions à prendre Cumulatifs Sur habitats/espèces, échelle régionale Classement de certaines zones en fonction d’indicateurs de la biodiversité dans la région Cumulatifs ex. : Contamination par les déglaçants et particules notamment au niveau du bassin versant Mesures d’atténuation génériques (ex. : Choix des déglaçants) Cumulatifs Évolution de la qualité de l’air de la région métropolitaine (polluants atmosphériques) Réseau de suivi de la qualité de l’air, répartition des stations d’échantillonnage sur l’ensemble du réseau routier de la RMM Cumulatifs Analyse comparée des modes de transport dans la consommation d’énergie Comparaison des modes de transport, consolidation du réseau de transport collectif, utilisation d’outils économiques (mesures fiscales, programmesemployeurs) Cumulatifs Gaz à effet de serre générés par l’ensemble des modes de transport Choix modal (scénarios multimodaux), privilégier les modes de transport à faible émission de GES, mesures fiscales Directs/Indirects Sur habitats/espèces, échelle locale Protection de certains habitats/espèces locales (ouvrages particuliers, mesures de compensation) Directs/Indirects Contamination des eaux de surface et souterraines Canalisations de captage, système de traitement de l’eau de ruissellement, etc. Directs Qualité de l’air dans les quartiers touchés lors des travaux et de l’opération Gestion des poussières sur le chantier, installation de stations d’échantillonnage le long de l’ouvrage, privilégier les nouvelles technologies moins polluantes pour les travaux de construction Difficile à évaluer (contribution du trafic local) Optimisation de la consommation d’énergie lors de la construction (machinerie) et de l’opération (élimination des feux de circulation Difficile à évaluer Mesures favorisant la fluidité du trafic (élimination des feux de circulation, etc.) 20 Éléments à traiter lors de d’évaluation environnementale Niveau de planification Plan de gestion des déplacements 2000-2010 Région métropolitaine de Montréal Projet de modernisation de la rue NotreDame, Montréal Enjeux socio-économiques majeurs : types d’impacts à évaluer et d’actions à prendre Impacts à évaluer Bruit Actions à prendre Impacts à évaluer Santé publique Actions à prendre Difficile à évaluer Harmonisation avec schéma d’aménagement ou plan d’urbanisme, Classement des éléments sensibles de la région (écoles, hôpitaux, résidentiels, etc.) Cumulatifs Impacts des nuisances (poussières, bruit, polluants) à l’échelle régionale (activités industrielles, portuaires, routes) Identification des zones sensibles, gestion des déplacements (fluidité du trafic, confinement du trafic de transit à l’extérieur des quartiers résidentiels, promotion du transport collectif, etc.) Impacts à évaluer Difficile à évaluer Actions à prendre Interventions sur le réseau Sécurité publique Aménagement du territoire (étalement urbain/effet structurant) Impacts à évaluer Actions à prendre Impacts à évaluer Paysage Actions à prendre Patrimoine Impacts à évaluer Actions à prendre Étalement urbain : terres (agricoles) perdues au profit de l’étalement urbain Effet structurant : évolution des changements de zonage dans schémas d’aménagement, dans secteurs d’activité Identification des zones d’activités prioritaires à l’échelle régionale, incitatifs au transport collectif Impacts sur l’équilibre de la région en terme de paysage (industriel, récréo-touristique, résidentiel, agricole, etc.) Harmonisation avec schéma d’aménagement ou plan d’urbanisme, identification des priorités régionales ou éléments du paysage à conserver ou à mettre en valeur Nombre d’éléments patrimoniaux affectés par les infrastructures routières sur le territoire de la CUM Établir listes et normes de protection et de préservation des éléments patrimoniaux Directs Nuisances sonores lors du chantier et de l’opération Écrans acoustiques temporaires, respect des horaires de travail permis sur le chantier, géométrie du tracé, élimination des puisards et des feux de circulation, choix des matériaux de revêtement, etc. Cumulatifs sur les nuisances (poussières, bruit, polluants) à l’échelle locale Abat-poussière, écrans acoustiques temporaires, réduction de l’herbe à poux, confinement du trafic de transit sur les voies prévues à cet effet Directs Nb d’accidents (construction, aménagements définitifs) impliquant piétons, cycliste, automobile ou camions, vitesse des véhicules Signalisation de chantier, amélioration de la géométrie, terre-plein centrale, voies d’accès limitées, absence de feux de circulation, traverses circonscrites pour les piétons, réaménagement plus sécuritaire de la piste cyclable existante Directs/Indirects Changement de zonage pour implanter l’ouvrage ayant des répercussions sur d’autres zones d’activités Mesures de compensation économiques Directs Impacts visuels à proximité de l’emprise, Cumulatifs de l’ensemble des installations linéaires à proximité l’emprise (ligne de chemin de fer, de transport d’énergie, autres routes, etc.) Bonification par ajout de parcs, composantes de projet atténuantes (encaissement de la route, géométrie, architecture des ouvrages, etc.) Directs Nombre d’éléments patrimoniaux affectés par le projet Mise en valeur des éléments patrimoniaux situés dans la zone d’étude ou affectés par les travaux 21 3.3 Participation du public Dans la pratique actuelle le mandat d’audience que le ministre donne au BAPE en vertu du troisième alinéa de l’article 31.36 de la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE) est très large. Cette disposition de la LQE n’empêche toutefois pas le ministre de cibler le mandat du BAPE sur les aspects d’un projet qu’il jugerait davantage pertinents d’étudier dans le contexte de l’audience ou de l’enquête. Ainsi, dans le cas d’un projet découlant d’un PPP ayant fait l’objet d’une ÉES, le ministre pourrait exercer cette prérogative pour exclure du mandat du BAPE les aspects d’un projet qui auraient été abordés dans le cadre d’une ÉES afin d’éviter de revenir sur les décisions déjà prises. Dans le cas où le mandat du BAPE serait restreint par une décision du ministre, des indications claires devront être transmises par les commissaires du BAPE à la population afin de concentrer les questions et commentaires du public sur les composantes ciblées par la procédure d’ÉIE. La durée du mandat du BAPE pourrait aussi être réduite à moins de quatre mois pour les projets faisant suite à un PPP ayant été soumis à une ÉES. En outre, d’importants coûts et délais peuvent être sauvés à cette étape si, par exemple, la justification du projet, qui fait souvent l’objet de plusieurs questions et commentaires de la part du public, n’a pas à être évaluée à nouveau au niveau de l’ÉIE puisque déjà justifiée au niveau de l’évaluation environnementale stratégique. Cependant, pour que cette pratique corresponde aux objectifs démocratiques de consultation de la population, des audiences publiques devront avoir eu lieu à propos des questions de justification du projet lors de l’ÉES. Dans de tels cas, les propositions ayant déjà passées par des évaluations environnementales où le public a été consulté et intégré dans le processus d’évaluation bénéficient généralement d’une plus grande acceptation des projets en bout de ligne (Nooteboom, 1999). Toutefois, des mécontentements peuvent aussi résulter des audiences publiques lors d’une ÉES. Si les décisions prises au niveau stratégique ne satisfont pas la population, des répercussions se feront nécessairement sentir par la suite au niveau des projets, surtout si le mandat ciblé par le ministre soustrait justement les questions ayant soulevé des controverses majeures. 3.4 Analyse environnementale Au niveau de l’analyse environnementale par les spécialistes du ministère de l’Environnement, une certaine réduction du temps, et par conséquent des coûts, pourrait aussi être observée. Comme le projet est la conclusion d’une ou de plusieurs évaluations environnementales, seuls les enjeux (et composantes) spécifiques au projet sont encore à évaluer. 3.5 Analyse et recommandation du ministre – Décision du gouvernement – Autorisation ministérielle Afin de justifier la soustraction de certaines composantes normalement obligatoires dans l’étude d’impact, des mentions au dispositif du décret devraient être ajoutées pour préciser la présence d’une ÉES antérieure au projet. De plus, des ajouts aux conditions d’autorisation gouvernementale peuvent aussi avoir lieu afin que le projet se déroule conformément aux décisions prise lors de l’ÉES. 6 Le troisième alinéa de l’article 31.3 est libellé comme suit : À moins qu’il ne juge la demande frivole, le ministre requiert le Bureau de tenir une audience publique et de lui faire rapport de ses constatations ainsi que l’analyse qu’il en a faite. 22 3.6 Surveillance, Suivi et Contrôle En présence de conclusions spécifiques au suivi des projets dans le rapport d’ÉES, l’initiateur pourrait reprendre ces mêmes conclusions dans la présentation des mesures de suivi en les adaptant, au besoin, au contexte de son projet. Les conclusions de l’ÉES pourraient également mener à une rationalisation du suivi en précisant, par exemple, des indicateurs de performance environnementale applicables aux projets faisant suite au PPP. Un meilleur système de récupération de l’information générée par les programmes de suivi pour chacun des projets pourrait permettre, à moyen terme, de proposer des programmes de suivi uniformisés pour chacun des projets répondant aux conditions prescrites dans l’ÉES. CONCLUSION Une des conclusions du rapport de Nootebom (1999) spécifiait que l’évaluation environnementale stratégique ne remplace pas la procédure d’évaluation des impacts environnementaux de projet. Effectivement, ces deux formes d’évaluation se complètent, procèdent même de façon similaire, mais n’agissent pas sur les même niveaux de planification. Par conséquent, l’évaluation environnementale, qu’elle soit stratégique ou de projet, ne peut générer les même conclusions puisque chacun des niveaux de planification possède une portée et un champ d’actions spécifiques. Des mécanismes d’arrimage entre les différentes évaluations environnementales permettent d’ailleurs de coordonner leurs résultats et même de générer une synergie de leurs valeurs individuelles. Trois mécanismes ont été identifiés par Nooteboom (1999). Le premier réfère à la portée des différents niveaux de planification évalués et des possibilités d’analyse des solutions de rechange qui leur sont propres. En effet, l’ÉES aborde des solutions de rechange qui ne peuvent être étudiées au niveau de l’ÉIE de projet. Cette dernière ayant davantage de latitude sur les variantes du projet que sur de réelles solutions de rechange au projet. Le second mécanisme est directement associé aux gains de temps et d’argent que peut engendrer la réalisation d’une ÉES antérieure à l’ÉIE de projet, tout au long du processus de planification gouvernementale. Ces bénéfices sont perçus puisque l’ÉES permet de réduire ou au moins raffiner le cadrage (la directive) des niveaux inférieurs d’évaluation environnementale. À même ce mécanisme, trois moyens permettent de générer ces gains, soit l’effet d’entonnoir, la présence d’un cadre de planification environnementale ainsi que le transfert d’information. Le premier, l’effet d’entonnoir, consiste simplement à n’évaluer que les impacts des options sélectionnées aux niveaux supérieurs sans revenir sur les décisions prises en amont au moment des prises de décisions aux niveaux inférieurs. La présence d’un cadre de planification environnementale permet d’insérer une structure de contrôle, d’identification et d’analyse des impacts potentiels à même le PPP et chacun des niveaux de planification subséquents à partir d’un plan d’action, d’un guide ou d’une politique environnementale. Finalement, le transfert d’information permet surtout de raffiner le contenu du cadrage (directive) par la réutilisation d’information, mais aussi d’intégrer les préoccupations du public et des parties prenantes aux processus de planification. Enfin, le troisième mécanisme fait référence aux types d’impact que chacune des formes d’évaluation est davantage adaptée à évaluer. Les impacts à grande échelle ou les impacts cumulatifs peuvent être beaucoup mieux pris en compte par l’ÉES puisque la portée des évaluations stratégiques est beaucoup plus vaste que ne l’est celle de l’ÉIE de projet. Un arrimage fort entre les différents niveaux d’évaluation environnementale permettra de gérer efficacement les évaluations en s’assurant que les décisions prises aux niveaux supérieurs ne seront pas remises en question aux niveaux inférieurs. Il aura aussi pour effet d’augmenter la transparence du processus auprès du public et des parties prenantes, d’améliorer par conséquent sa crédibilité auprès de la population et surtout, de bonifier la pratique à long terme. L’expérience acquise permettra alors de percevoir une réduction des délais et des coûts de réalisation des rapports d’évaluation environnementale. RÉFÉRENCES AGENCE CANADIENNE D’ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE, 2000. La directive du Cabinet de 1999 sur l’évaluation des politiques, plans et programmes – Lignes directrices pour la mise en œuvre de la directive du Cabinet, Ottawa, 11p. http://www.acee.gc.ca BOOTHROYD, P., 1995. « Policy assessment » dans Environmental and Social impact Asessment, sous la direction de Vanclay, F. et D. A. Bronstein, John Wiley & Sons Ltd., pp. 83125. COMITÉ INTERMINISTÉRIEL DU DÉVELOPPEMENT DURABLE (CIDD), 1999. L’évaluation environnementale stratégique : un outil pour le développement durable, Groupe de travail sur l’évaluation environnementale stratégique, Québec, 102p et annexes. COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES, 1990. Proposition de directive concernant l’évaluation environnementale des incidences sur l’environnement des politiques, plans et programmes, Bruxelles, 18p. COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES, TRANSPORT DGVII, 1999. Manual on Strategic Environmental Assessment of Transport Infrastructure Plans, DHV Environment and Infrastructure BV, Pays-Bas, 118p. DOM, A., 1997. L’évaluation environnementale stratégique dans le secteur des transports, Éditions de l’OCDE, Paris, 96p. FALQUE, M., 1995. Évaluation environnementale des politiques, plans et programmes, Ministère de l’Environnement et SOMI-consultants, Le Barroux (France), 116p. LEDUC, G. A. et M. RAYMOND, 2000. L’évaluation des impacts environnementaux : un outils d’aide à la décision, Éditions MultiMonde, Québec, 403p. MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL, 2001. Cadre pour l’évaluation environnementale des négociations commerciales, Ottawa, 22p. http://www.dfait-maeci.gc.ca/tna-nac/social-f.asp NOOTEBOOM, Sibout, DHV ENVIRONMENT AND INFRASTRUCTURE, 1999. Environmental Assessments of Strategic Decisions and Project Decisions : Interactions and Benefits, Ministry of Housing, Spatial planning and the environment of the Netherlands with support of the European Commission DGXI, 75p et annexes. RISSE, N., 1998. Évaluation environnementale stratégique : état de la situation au Québec, ailleurs au Canada et à l’étranger (Document de travail), Ministère de l’Environnement et de la Faune, Direction de l’évaluation environnementale des projets industriels en milieu hydrique, Québec, 38p et annexes. SADLER, B. 1996. L’évaluation environnementale dans un monde en évolution : évaluer la pratique pour améliorer le rendement, Étude internationale sur l’efficacité de l’évaluation environnementale – Rapport final, Travaux publics et Services gouvernementaux, Ottawa, 300p. 26 THÉRIVEL, R., E. WILSON, S. THOMPSON, D. HEANY et D. PRITCHARD, 1992. Strategic Environmental Assessment, Earthscan Publication, Londres. THÉRIVEL, R. et M. R. PARTIDÁRIO, 1996. The practice of Strategic Environmental Assessment, Earthscan Publications, Londres, 206p. TRANSPORT CANADA, 2001. L’évaluation environnementale stratégique à Transport Canada – énoncé de politique, Ottawa. http://www.tc.gc.ca/envaffairs/english/envass/sea_f.htm UNION EUROPÉENNE, 2001. Directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, Luxembourg, 19p et annexes. ANNEXE 1 RÉSUMÉ DE NOOTEBOOM NOOTEBOOM, Sibout, DHV ENVIRONMENT AND INFRASTRUCTURE, 1999. Environmental assesments of strategic decisions and project decisions : interactions and benefits Ministry of Housing, Spatial Planning and the Environment of the Netherlands with support of European Commission DGXI. Les objectifs principaux de ce rapport sont d’analyser et de décrire les relations et les bénéfices possibles qu’offrent l’évaluation environnementale stratégique (ÉES) des politiques, plans et programmes (PPP) alliée à l’évaluation des impacts environnementaux (ÉIE) au niveau des projets. La méthodologie employée pour atteindre ces objectifs se base sur une revue de littérature spécialisée, l’analyse de cas de pratique de l’ÉES et de l’ÉIE dans certains pays de l’Union européenne (Allemagne, Danemark, Finlande, France, Grande-Bretagne, Pays-Bas et Suède) ainsi que sur des informations recueillies auprès d’experts nationaux lors d’entrevues et de groupes de travail. Cadre légal à la Communauté européenne Depuis 1985, la Directive 85/337/EEC (amendée 97/11/EC) a introduit la mise en application d’une procédure d’ÉIE préalable à l’autorisation des projets listés en annexe I et II de la Directive. Dans le but de compléter le système d’évaluation des impacts environnementaux, la Commission européenne à mis de l’avant une proposition de directive pour l’évaluation environnementale aux niveaux stratégiques des plans et programmes. La procédure d’ÉES proposée par la Directive (COM/96/511 et COM/99/73) est semblable à la procédure d’ÉIE, mais est adaptée aux niveaux de prises de décision des plans et programmes1. Concepts Puisque tous les pays n’utilisent pas la même terminologie, certains concepts ont été définis afin de généraliser leur signification aux différentes études de cas. Ces concepts sont les suivants : • La distinction entre ÉES et ÉIE, • Les éléments communs aux procédures d’ÉIE et d’ÉES • La liaison de l’ÉIE à l’ÉES par la procédure de planification et de prise de décision. • Les systèmes de planification et de prise de décision, • Les niveaux de prise de décision, • La hiérarchisation des évaluations environnementales, 1 La Directive 2001/42/CE du Parlement et du Conseil relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programnmes sur l’environnement a été adoptée le 27 juin 2001. 28 • Les solutions de rechange et les impacts, • Les impacts à grande et à petite échelle, • La nature stratégique des décisions, solutions de rechange et des impacts, Revue de littérature Cinq documents d’ÉES analysant des cas d’origine majoritairement européenne ont été étudiés afin d’en extraire les informations à propos des dispositions légales et des relations entre les différents niveaux d’évaluation environnementale. Les résultats démontrent qu’aucun auteur ne discute de dispositions légales concernant les interactions indirectes entre l’ÉES et l’ÉIE des cas analysés, bien que les bénéfices que l’ÉES peut avoir sur l’ÉIE dépendent sans doute de la façon dont l’ÉIE est réalisée. On remarque aussi que certains pays incorporent des éléments stratégiques au niveau des projets. Quatre tendances principales se dégagent de cette analyse, soit : 1. L’ÉES propose des solutions de rechange qui ne sont pas appropriées au niveau de l’ÉIE de projet; 2. L’ÉES évalue des impacts qui ne sont pas jugés au niveau de l’ÉIE de projet; 3. Les ÉES et l’ÉIE de projet peuvent être hiérarchisées ou intégrées verticalement, et, 4. L’ÉES peut réduire le temps et les coûts associés à l’ÉIE au niveau des projets. Études de cas Les cas sélectionnés ont pour but de présenter des interactions entre les différents niveaux d’évaluation environnementale. Pour chacun des cas étudiés, une mise en contexte est premièrement dressée, puis les interactions sont identifiées et expliquées. Treize cas sont ainsi analysés, dont la majorité sont décrits en détails en annexe. Les secteurs représentés dans les analyses de cas font référence à la planification territoriale, aux mines, à l’énergie, aux transports, au développement économique, à la gestion des matières résiduelles, à l’eau potable et à l’agriculture. Les principaux résultats de cette analyse de cas démontrent que la présence d’une ÉES préalable offre souvent des avantages aux évaluations environnementales subséquentes et que les bénéfices les plus importants se produisent lorsqu’un certain nombre de conditions sont en place, ces bénéfices pouvant être rehaussés par des dispositions formelles. Les principales constatations de l’analyse des cas se résument en neuf points : • L’ÉES ne remplace pas l’ÉIE. Dans aucun des cas étudiés, l’ÉIE des projets n’a été annulée suite à l’application d’ÉES aux niveaux supérieurs de prises de décision. 29 • L’ÉES propose des solutions de rechange qui ne s’abordent pas au niveau des projets. Différents types de solutions de rechange sont évalués ou sont étudiés à différents degrés de détails pour chaque niveau d’évaluation environnementale. • L’ÉES peut être utilisée pour raffiner le cadrage aux niveaux inférieurs d’évaluations environnementales. Les problèmes qui doivent être évalués aux niveaux inférieurs deviennent plus faciles à identifier à la suite d’une ÉES. Les évaluations environnementales subséquentes devraient être concentrées sur les impacts pouvant vraiment être influencés par les décisions prises à ces niveaux inférieurs. Trois mécanismes permettent de parvenir à ces résultats : • Premièrement, l’effet d’entonnoir fait en sorte que toute solution de rechange rejetée au niveau de l’ÉES ne fait plus l’objet d’une analyse au niveau subséquent. • Deuxièmement, l’ÉES peut être utilisée pour développer un cadre de planification environnementale permettant d’identifier, surveiller et d’évaluer les impacts des décisions prises aux niveaux inférieurs. • Troisièmement, le transfert d’information fourni par l’ÉES aux niveaux inférieurs permet de partir avec une longueur d’avance. • L’ÉES traite aussi d’autres types d’impact que ceux analysés lors de l’ÉIE (impacts à grande échelle, cumulatifs ou synergiques). Certaines questions correspondent davantage au niveau stratégique et leur analyse est plus appropriée à ce niveau. De même que certains impacts sont difficiles à atténuer au niveau d’un projet mais qui, lorsqu’ils sont abordés aux niveaux stratégiques, augmentent les possibilités de choix de mesure d’atténuation ou de mitigation. Ceci peut se produire dans différents cas : • Certains PPP ne mènent pas à des projets soumis à une ÉIE • Les impacts cumulatifs et synergiques de PPP à projets multiples sont mieux pris en charge et peuvent être mieux atténués au niveau stratégique. • L’ÉES peut examiner les impacts à grande échelle plus efficacement puisque ces impacts sont davantage influencés par des choix stratégiques que par des variantes de projet. • L’ÉIE de projets n’est pas suffisante pour valider l’intégration de l’environnement dans les prises de décision sectorielles. 30 • Les bénéfices de l’ÉES peuvent être aussi présents lorsque aucun PPP ne lie les différents niveaux d’évaluation environnementale Les niveaux d’évaluation peuvent être intégrés par la coordination des démarches (intégration verticale) ou par le transfert spontané de méthodes et d’expérience. Exemples de bénéfices directs de l’ÉES aux niveaux inférieurs : • Une augmentation de la transparence de l’ensemble du processus de planification et d’évaluation pour le public et les parties prenantes. • L’utilisation répétée de méthodes semblables (bases de données, méthodes prédictives, présentations) appliquées et validées précédemment, augmentent leur crédibilité. • La communication entre les experts engagés dans une suite d’évaluations augmente le processus d’apprentissage mutuel. • L’ÉIE ne s’effectue pas toujours au niveau le plus bas de la prise de décision ce qui crée des « zones grises » entre le niveau d’évaluation stratégique et le niveau d’évaluation de projet. La différence entre l’ÉES et l’ÉIE n’est pas toujours très claire. Les différences étant principalement au niveau des décisions auxquelles les évaluations font référence. Les PPP constituent parfois une structure pour donner l’autorisation à des décisions prises à l’intérieur même du PPP, comme lorsque plusieurs propositions de développement sont fortement liées entre elles et que par conséquent, l’autorisation doit être donnée à l’ensemble des projets. Si des incertitudes persistent quant à l’identification du niveau d’approbation des projets (à même un PPP ou au niveau inférieur de prise de décision), un tel PPP est considéré dans une « zone grise » entre l’ÉES et l’ÉIE de projet. Si un PPP est dans une « zone grise », les différents projets qui le composent peuvent être élaborés et intégrés à un cadre de planification environnementale afin d’assurer qu’aucun impact non-acceptable n’apparaîtra aux niveaux subséquents de prise de décision sur les projets. • L’ÉES semble souvent réduire les coûts et le temps aux niveaux inférieurs. Les limites du cadrage ont été, dans la plupart des cas, réduites et raffinées, grâce aux interactions directes et indirectes entre les niveaux d’évaluation. Ceci a permis une réduction de la charge de travail et probablement, la réduction des coûts et du temps nécessaires à la réalisation des évaluations environnementales des niveaux inférieurs. La quantification de ces réductions est toutefois très difficile à produire. 31 • Certaines conditions permettent à l’ÉES d’être plus efficace. Les interactions bénéfiques entre les différents niveaux d’évaluation décrites précédemment dépendent d’un certain nombre de conditions. Celles-ci ne se présentent pas en tout temps. Ces conditions sont les suivantes : • La volonté et la possibilité de coordonner les niveaux et de tirer des leçons de chacune des évaluations. • Le temps écoulé entre les différentes évaluations devrait être le plus court possible. • Les PPP devraient être suffisamment contraignants à travers un système de planification et de prise de décision formel. • Certaines dispositions légales pourraient permettre de prendre en considération les différences sectorielles et les différences dans les niveaux de planification afin d’augmenter les bénéfices de l’ÉES. Des dispositions légales pourraient : • Définir différemment le niveau d’approbation des projets. • Considérer des ajustements au mécanisme de prise de décision si l’effet d’entonnoir ou un cadre environnemental liant ne peut être ajusté à un PPP. Cependant, les bénéfices et interactions ne sont pas les mêmes pour tous les secteurs politiques et toutes dispositions légales devraient pouvoir tenir compte de ces différences par une approche flexible.