Non classifié DAF/COMP(2012)13/REV1
Organisation de Coopération et de Développement Économiques
Organisation for Economic Co-operation and Development
10-Oct-2012
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Français - Or. Anglais
DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIÈRES ET DES ENTREPRISES
COMITÉ DE LA CONCURRENCE
DÉFINITION DU MARCHÉ PERTINENT
-- Note de référence du Secrétariat --
La présente note de référence a été soumise au Comité de la Concurrence POUR EXAMEN au titre du point XI
de l’ordre du jour de la réunion tenue les 13 et 14 juin 2012.
JT03328329
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TABLE DES MATIÈRES
1. Introduction ...................................................................................................................................... 3
2. Principes économiques du concept de marché pertinent .................................................................. 6
2.1 Pouvoir de marché et prix concurrentiel ..................................................................................... 7
2.2 Définir le marché pertinent pour évaluer indirectement le pouvoir de marché........................... 8
2.3 Les fonctions du marché pertinent .............................................................................................. 9
3. Le test du monopoleur hypothétique .............................................................................................. 13
3.1 Version récente du TMH........................................................................................................... 13
3.2 Mise en œuvre du TMH ............................................................................................................ 16
3.3 Autres méthodes de définition du marché pertinent ................................................................. 27
3.4 Conclusion ................................................................................................................................ 28
4. Définir le marché pertinent dans certains types de marchés particuliers ........................................ 29
4.1 Marchés à discrimination par les prix ....................................................................................... 29
4.2 Marchés des pièces de rechange ............................................................................................... 30
4.3 Marchés groupés ....................................................................................................................... 31
4.4 Marchés de produits différenciés .............................................................................................. 32
4.5 Marchés fonctionnant par appels d’offres ................................................................................. 37
4.6 Marchés bifaces ........................................................................................................................ 40
4.7 Marchés dynamiques et innovants ............................................................................................ 44
4.8 Conclusion – réactions à ces problèmes.................................................................................... 45
5. Nouveaux concepts et alternatives possibles au marché pertinent ................................................. 46
5.1 Indices de pression sur les prix – UPP, UPP* et GUPPI ........................................................... 46
5.2 Modèles de simulation de fusions ............................................................................................. 60
5.3 Approche fondée sur les effets directs dans les affaires
de monopole et d’abus de position dominante .......................................................................... 62
5.4 Outils et méthodes alternatifs – Conclusions ............................................................................ 66
6. Le concept de marché pertinent : aspects juridiques ...................................................................... 68
6.1 Remplacer ou compléter la définition du marché pertinent ? ................................................... 70
6.2 Acceptabilité juridique : la définition de marché, une condition préalable............................... 71
6.3 Supprimer ou compléter la définition de marché : conséquences juridiques ............................ 74
6.4 Contraintes institutionnelles ...................................................................................................... 81
6.5 Alignement international........................................................................................................... 82
7. Conclusion ...................................................................................................................................... 83
Bibliographie ............................................................................................................................................. 85
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DÉFINITION DU MARCHÉ PERTINENT
Note de Référence du Secrétariat *
1. Introduction
1. La procédure de définition du marché pertinent est l’un des outils d’analyse les plus importants
dont disposent les autorités de la concurrence pour examiner et évaluer les problèmes de concurrence. En
définissant un marché pertinent avant de calculer et d’attribuer les parts de marché, les autorités cherchent
à évaluer le pouvoir le marché des entreprises, une étape essentielle pour comprendre les effets de la
concurrence1. Délimiter le marché pertinent permet en outre de déterminer quels en sont les opérateurs,
d’en établir les frontières et de déterminer l’aire de concurrence effective.
2. Pour autant, la définition du marché est plus qu’un simple outil pratique puisqu’on le retrouve
désormais dans le droit de la concurrence, où les fondements de ce concept sont profondément ancrés2. Au-
delà de définir le marché pertinent3 dans chaque affaire, ce concept a influencé la réflexion des
professionnels sur les questions de concurrence puisqu’il est étroitement lié à l’émergence du droit de la
concurrence dans les préoccupations des pouvoirs publics.
3. Les professionnels du droit de la concurrence débattent depuis quelques années pour savoir si la
définition du marché est un outil adéquat pour l’analyse des fusions et dans les cas de monopolisation et de
position dominante. Les Lignes directrices américaines sur les fusions horizontales (Horizontal Merger
Guidelines) de 2010 illustrent ce débat puisqu’elles stipulent par exemple que l’analyse d’une fusion ne
doit pas nécessairement débuter par la délimitation du marché. Cette position tranche avec la pratique qui
avait cours et a lancé un vaste débat parmi les professionnels du droit de la concurrence sur le rôle, la
fonction et l’importance de la définition du marché comme instrument d’analyse des éventuels effets sur la
concurrence dans toute affaire. Ce débat avait déjà pris forme avec l’avènement et l’utilisation de modèles
de simulation de fusions dans l’analyse des fusions. Cette fois, cependant, les discussions semblent avoir
pris une dimension plus fondamentale, même si elles ont pu être alimentées par les débats précédents. Tout
comme par le passé, c’est l’évolution du contrôle des fusions qui semble la plus débattue. Cependant, le
* Cette note de référence a été rédigée par MM. Ulrich Schwalbe (Département d’économie de l’université
d’Hohenheim, Allemagne) et Frank Maier-Rigaud (OCDE) avec l’aide précieuse de Mme Anna
Pisarkiewicz (OCDE) pour les recherches et, notamment, l’ébauche et la rédaction des sections juridiques.
1 Il ne faut pas perdre de vue que le marché pertinent n'a pas de valeur en soi. Certes, c'est un instrument
puissant pour déterminer le pouvoir de marché – et donc les effets de la concurrence –, mais il n'est ni le
seul outil à cette fin, ni celui qui fournira la meilleure analyse dans tous les cas de figure.
2 Bien entendu, cette influence est plus ou moins significative selon le droit de la concurrence concerné et
elle dépend essentiellement de l'époque à laquelle le pays a adopté un régime de droit de la concurrence et
du système juridique auquel ce régime appartient.
3 L'article 102 TFUE du droit de la concurrence européen illustre parfaitement cette influence. En effet,
quelle que soit l'analyse ultérieure des effets économiques, il est nécessaire que la position dominante soit
établie pour le l'article lui-même s'applique, étant entendu que la position dominante est généralement
définie comme la détention d'une part de marché d'au moins 40 %.
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rôle et l’importance de la délimitation du marché comme première étape de l’analyse sont également
étudiés dans les affaires de monopolisation et d’abus de position dominante4.
4. C’est sans nul doute le Sherman Act qui a jeté les bases, en 1890, du droit de la concurrence,
mais aussi en un certain sens de la procédure de définition du marché, de même que de l’idée générale
selon laquelle les grandes sociétés, que l’on mesurera plus tard au moyen de leur part de marché sur des
marchés pertinents, exercent un pouvoir économique et bien souvent aussi politique important qui
nécessite de mettre en place des contrôles pour protéger les consommateurs et préserver l’efficience mais
aussi la démocratie. Si, dans les premières affaires de monopolisation survenues aux États-Unis, les
autorités n’ont pas eu recours à la méthode de la définition du marché, la situation a progressivement
changé au fil du temps et ce concept a été officiellement adopté pour la première fois dans les Lignes
directrices américaines de 1982 et a depuis encore évolué5.
5. En règle générale, une analyse de la concurrence débute toujours par la définition du marché
pertinent, l’identification des concurrents concernés et le calcul et la répartition des parts de marché. Cet
usage a été renforcé par la structure-comportement-performance (SCP) qui a nettement influencé le droit
de la concurrence des États-Unis et de l’Union européenne jusqu’au milieu des années 1970 et qui
soulignait l’importance de la structure de marché, suggérant un lien entre degré de concentration et pouvoir
de marché6. De fait, le critère de dominance exigé dans bon nombre de droits de la concurrence à travers le
monde – y compris dans le droit de la concurrence allemand et de l’Union européenne – s’explique en
partie par les préoccupations nourries à l’égard du pouvoir de marché, que l’on pensait corrélé à la part de
marché. L’arrivée de la procédure de définition du marché a permis aux calculs statistiques du degré de
concentration, comme les ratios de concentration et, plus tard, l’indice Herfindahl-Hirschman (IHH), de
guider les mesures d’application. Lorsque la définition du marché et les mesures de concentration ont fait
leur apparition dans le cadre de l’analyse de la concurrence, la principale préoccupation en matière de
concurrence était le phénomène des ententes dans les secteurs concentrés7. Le marché pertinent était donc
plus ou moins destiné aux secteurs dotés de produits homogènes. Lorsque le rôle des ratios de
concentration a été revu à la baisse et que l’IHH a commencé à être utilisé pour mesurer la concentration
dans les Lignes directrices américaines sur les fusions de 1982, ce sont les marchés de produits industriels,
où la collusion était jugée être le principal problème, qui étaient au premier rang des préoccupations.
6. Au cours des années suivantes, les secteurs de produits différenciés tels que les biens et services
de consommation de marque ont gagné en importance dans les pays industrialisés. Parallèlement, l’on a
pris conscience que les fusions touchant ces secteurs pouvaient porter atteinte à la concurrence par d’autres
moyens que par des comportements collusoires ou coordonnés. Dans ces secteurs, a-t-on remarqué,
l’âpreté de la concurrence entre les entreprises était plus importante que la taille de la part de marché ou le
degré de concentration global du secteur. Des rivaux produisant de proches substituts s’imposaient
mutuellement de fortes contraintes concurrentielles. Cependant, dès lors qu’une fusion entre ces acteurs,
quand bien même elle donnait naissance à de faibles parts de marché, levait ces contraintes
concurrentielles, la nouvelle entité était incitée à accroître le prix d’au moins l’un de ses produits en
l’absence d’effet compensateur dû à des gains d’efficience. Ces effets, qui ne résultent pas de la
coordination entre les entreprises mais d’une décision tarifaire indépendante, sont appelés effets
unilatéraux.
4 Voir par exemple EAGCP (2005) et ministère américain de la Justice (2009).
5 Voir Werden (1992).
6 L'approche SCP a donné naissance à un nombre important d'études empiriques de la part des organisations
internationales cherchant à calculer une corrélation entre le degré de concentration, les prix et la rentabilité.
7 Shapiro (2010).
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7. Ces mutations économiques se sont accompagnées d’une évolution de la théorie économique. À
l’aide d’outils et de concepts de la théorie des jeux, la théorie de l’économie industrielle a fait des progrès
considérables dans l’analyse du comportement des sociétés dans les marchés en concurrence imparfaite.
Elle a également mené analysé de manière plus approfondie le comportement concurrentiel des entreprises,
en tenant compte notamment des effets stratégiques et des réactions des rivaux. À partir du paradigme
SCP, la Harvard School était partie du principe que de nombreuses pratiques adoptées par des entreprises
dotées d’un pouvoir de marché étaient anticoncurrentielles. L’école de Chicago a quant à elle expliqué le
comportement des entreprises essentiellement par des considérations d’efficience. Contrastant avec ces
deux approches, la nouvelle théorie de l’économie industrielle reconnaît que la plupart des pratiques
commerciales se sont toujours accompagnées d’effets à la fois favorables et défavorables pour la
concurrence. Dans de nombreux cas, des considérations d’efficience permettent d’expliquer le comportement
observé, du moins en partie. Une autorité de la concurrence doit décider si, dans une affaire donnée, ce sont
les effets favorables ou défavorables priment. On accorde donc davantage d’importance aux effets
concurrentiels effectifs du comportement en question.
8. Parallèlement à cette évolution et aux progrès de l’analyse économique des effets des fusions et
du comportement des entreprises, de nouvelles technologies ont fait leur apparition et ont eu un impact
colossal sur les données disponibles, le traitement de ces données et les outils empiriques permettant de les
analyser. Les caisses à lecteur de code-barres des magasins fournissent quantité de données sur le
comportement des acheteurs, leur sensibilité aux prix et les comportements de substitution. Les progrès de
l’informatique ont permis de traiter toutes ces données. Ceci a permis d’affiner les méthodes
économétriques employées pour analyser les marchés et d’estimer les fonctions de la demande ainsi que
des systèmes de demande entiers.
9. Ces évolutions ont posé les jalons d’une approche tenant davantage compte des effets dans
l’application du droit de la concurrence, notamment dans le domaine du contrôle des fusions. Le test du
monopoleur hypothétique (TMH) a été intégré aux Lignes directrices américaines de 1982 pour calculer
des parts de marché révélatrices. Les Lignes directrices américaines de 1992 ont tenu compte des effets
unilatéraux. Il était en effet devenu évident que se fonder simplement sur les parts de marché et le degré de
concentration du marché, même si ces données provenaient du TMH, pouvait occulter de sérieux effets
anticoncurrentiels des fusions, notamment lorsque le marché était doté de produits différenciés. Les parts
de marché ne reflètent pas toujours justement le poids des effets unilatéraux sur la concurrence. Les Lignes
directrices américaines sur les fusions horizontales de 2010 ont cessé d’exiger que l’on procède avant tout à
une définition du marché lors de chaque analyse de fusion.
10. Les évolutions récentes, qui semblent minorer l’importance de la définition du marché, ont
entraîné diverses réactions. La première est l’adaptation de cette procédure aux conditions particulières de
certains types de marchés, comme les marchés à effets de réseau, les marchés d’enchères et fonctionnant
par appels d’offres et les marchés bifaces. La deuxième est la mise au point de nouveaux outils qui, dans
certaines conditions, sont liés à la définition du marché, mais permettent d’évaluer plus directement les
effets escomptés d’une fusion ou d’un autre comportement d’entreprise. Ces outils comptent, entre autres,
les indices de pression sur les prix (IPP), les réductions compensatoires du coût marginal, les simulations de
fusion et l’approche fondée sur les effets directs. En règle générale, on ne considère pas que ces concepts
puissent se substituer à la définition du marché, mais doivent être vus comme des substituts optionnels ou des
méthodes venant compléter cette procédure en fournissant des informations supplémentaires.
11. Ces réactions et les nouvelles approches récemment proposées ont posé la question de savoir
comment la politique et le droit de la concurrence devaient réagir. Les nouvelles lignes directrices
devraient-elles rester fidèles au principe selon lequel toute analyse de la concurrence commence par (ou à
tout le moins comprend) une définition du marché ou d’autres outils doivent-ils être autorisés à la place ou
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