3. Le potentiel électrique

publicité
Chapitre 3 OSPH
3.
Le potentiel électrique
18
Le potentiel électrique
Le mouvement d'une particule de charge positive q dans un champ électrique uniforme est
analogue au mouvement d'une particule de masse m dans un champ gravitationnel uniforme près
de la surface de la Terre. Un travail fourni par un agent extérieur, l'expérimentateur par exemple,
est nécessaire pour déplacer une particule contre le champ. Si la force extérieure est égale et
opposée à la force due au champ, l'énergie cinétique de la particule ne change pas. Dans ce cas, la
totalité du travail externe est emmagasinée sous forme d'énergie potentielle dans le système, c'està-dire:
W EXT   E p  E p ( f )  E p (i )
où E p ( f ) et E p (i ) sont les énergies potentielles finale et initiale.
La fonction de l'énergie potentielle gravitationnelle près de la
surface de la Terre est E p  mgy . On peut obtenir une fonction
indépendante de m en définissant le potentiel gravitationnel comme
étant l'énergie potentielle par unité de masse: Vg  E p m  gy .
L'unité SI de V g est le J/kg. Le potentiel gravitationnel en un point
correspond au travail extérieur nécessaire pour soulever une unité
de masse du niveau de potentiel zéro (y=0) jusqu'à une hauteur donnée sans variation de vitesse.
Une caractéristique utile de la fonction potentiel est qu'elle ne dépend que de la source du champ
(la Terre) représentée par la valeur du champ gravitationnel g, et non de la valeur de la masse
d'essai m.
Lorsqu'une charge q se déplace entre deux points dans un champ électrostatique, la variation de
potentiel électrique V est définie comme étant la variation d'énergie potentielle électrique par
unité de charge:
V 
E p
q
L'unité SI de potentiel électrique est le volt (V), appelée ainsi en hommage à Alessandro Volta,
inventeur de la pile voltaïque (la première pile électrique).
Notons que
1 V = 1 J/C
La quantité V dépend uniquement du champ créé par les charges sources, et non de la charge
d'essai. Lorsqu'on connaît la différence de potentiel entre deux points, on peut déterminer à partir
de l'équation précédente, le travail extérieur nécessaire pour déplacer une charge q sans variation
de vitesse:

W EXT  qV  q V f  Vi

Le signe de ce travail dépend du signe de q et des valeurs relatives de Vi et Vf.
Si WEXT>0, c'est l'agent extérieur qui effectue un travail sur la charge.
Si WEXT<0, le travail est effectué par le champ sur l'agent extérieur. Dans ce dernier cas, pour
maintenir la vitesse constante, la force extérieure agit en sens contraire du déplacement de la
charge.
L'équation nous permet de constater que ce sont les variations de potentiel qui ont de
l'importance, et non les valeurs de Vi et Vf. On peut donc choisir comme point de référence, de
potentiel nul, un point commode, à l'infini par exemple. Dans les circuits électroniques, on
Chapitre 3 OSPH
Le potentiel électrique
19
convient de considérer la prise de terre comme point de potentiel nul. Si Vi=0, on peut écrire
V f  WEXT q :
Le potentiel en un point quelconque est le travail extérieur nécessaire pour déplacer une unité de
charge positive, à vitesse constante, du point de potentiel nul jusqu'au point considéré.
Le potentiel électrique, qui se mesure en J/C, est analogue au potentiel gravitationnel, qui se
mesure en J/kg. Lorsque la hauteur d'une particule augmente, son énergie potentielle
gravitationnelle augmente. De même, lorsqu'une charge positive se déplace vers un point de
potentiel plus élevé, son énergie potentielle électrostatique augmente. Si on les laisse libres de se
déplacer, les charges positives ont tendance à se diriger vers les potentiels décroissants, tout
comme les masses. Par contre, les charges négatives ont tendance à aller vers les potentiels
croissants. Ainsi, dans un champ électrique extérieur, toutes les charges, positives et négatives,
ont tendance à subir une diminution d'énergie potentielle électrostatique.
Bien que la notion de travail fourni par un agent extérieur soit commode pour introduire celle
d'énergie potentielle, il est préférable d'examiner les forces conservatives agissant à l'intérieur d'un
système de particules en interaction. L'énergie potentielle en fonction du travail accompli par la
force conservative s'écrit E p  Wc ,. Le signe négatif nous indique qu'un travail positif de la
force conservative correspond à une diminution d'énergie potentielle. Dans un champ


électrostatique, la force (conservative) agissant sur une charge d'essai q est Fc  qE . Par
conséquent, la variation d'énergie potentielle, dE p   dWc , associée à un déplacement

infinitésimal ds , est
 
 
dE p   Fc  ds   qE  ds

La variation infinitésimale de potentiel associée au déplacement ds est donc
dV 
dE p
q
 
  E  ds
La variation finie de potentiel entre le point A et le point B est égale à la somme (l'intégrale) de
ces variations infinitésimales, c'est-à-dire:
 
V B  V A    E  ds
B
A
Comme le champ électrostatique est conservatif, la valeur de cette intégrale linéaire dépend
uniquement des points de départ et d'arrivée A et B, et non du trajet suivi. Le signe de l'intégrale

est déterminé (1) par les signes des composantes de E , et (2) par le sens du chemin emprunté,
qui est indiqué par les limites.
3.1.
Le potentiel et l’énergie potentielle dans un champ uniforme

Dans un champ uniforme, E est constant et l'intégrale précédente peut donc s'écrire :
 
V   E  s
équation 3.6
La figure représente un champ uniforme. Essayons de déterminer la variation de potentiel du
point A au point B, les deux points étant séparés par une distance d le long des lignes de champ.
Puisque le champ électrique a seulement une composante en x, l'équation 3.6 se réduit à
V   E x x . En remplaçant Ex, par E et x par +x, on obtient
Chapitre 3 OSPH
Le potentiel électrique
20
V ( x )  V (0)   Ex
équation 3.6b
Le potentiel décroît linéairement sur l'axe des x, comme le
montre le graphique de la figure. Soulignons que les lignes de
champ sont orientées des potentiels les plus élevés vers les
potentiels les moins élevés. Supposons maintenant que le trajet

réel de la figure soit remplacé par les deux étapes AC et CB. E
étant perpendiculaire au déplacement le long de BC, le travail
effectué sur une charge d'essai le long de ce segment est nul. Le
seul travail est celui accompli le long du segment AC parallèle
aux lignes de champ. Comme la composante du déplacement
parallèle ou antiparallèle aux lignes de champ est la seule qui
importe, l'équation 3.6b s'écrit souvent sous la forme
(E uniforme)
V   Ed
où d est la grandeur de la composante du déplacement parallèle ou antiparallèle au champ. Le
signe est positif lorsque le sens du déplacement est opposé au champ. D'après cette dernière
équation, on constate que le champ électrique peut aussi bien s'exprimer en V/m qu'en N/C:
1 V/m = 1 N/C
3.2. Les équipotentielles
Sur une carte topographique, on trace les courbes de niveau en joignant les points de même
altitude. En général, elles représentent des niveaux d'altitude équidistants, un intervalle de 100 m
par exemple. Les courbes sont rapprochées lorsque la pente est raide et elles sont plus éloignées
lorsque la pente est douce. Une équipotentielle est une surface qui joint les points de même
potentiel. Sur un tracé dans le plan, les surfaces apparaissent comme des courbes
équipotentielles. Les courbes de niveau représentent en fait les équipotentielles gravitationnelles;
de la même façon, on peut tracer des équipotentielles électriques.
Dans le champ uniforme de la figure précédente, à chaque valeur de x correspond une valeur
particulière de V. Les surfaces équipotentielles sont donc des plans. On remarque que les lignes
de champ électrique sont perpendiculaires aux équipotentielles et sont orientées des potentiels
élevés vers les potentiels plus faibles, c'est-à-dire dans le sens des potentiels décroissants. Le fait
que les lignes de champ soient perpendiculaires aux équipotentielles est un résultat général.

D'après l'équation 3.4, la variation de potentiel associée à un déplacement infinitésimal ds est
 
 
dV   E  ds . Si le déplacement est parallèle à une équipotentielle, alors dV = 0 et E  ds  0 ,


d'où l'on conclut que E est perpendiculaire à ds . Le déplacement d'une particule le long d'une
équipotentielle ne demande aucun travail.
3.3. Les charges en mouvement
Le mouvement d'une charge dans un champ électrique peut être étudié en fonction de la
conservation de l'énergie, E p  E c  0 . Lorsqu'on parle de « l'énergie potentielle d'une
charge », il est sous-entendu que les autres charges sont fixes. En fonction du potentiel, la loi de
conservation de l'énergie peut s'écrire
E c   qV
équation 3.7
Le signe de E p dépend du signe de q et du signe de V . Par exemple, si q > 0 et si la charge se
déplace vers les potentiels décroissants ( V  0 ), elle va gagner de l'énergie cinétique. Pour
mesurer l'énergie des particules élémentaires, comme les électrons et les protons, on utilise
Chapitre 3 OSPH
Le potentiel électrique
21
souvent une unité appelée l'électronvolt (eV), qui n'est pas une unité SI. Lorsqu'une particule de
charge e traverse une différence de potentiel d'un volt, son énergie cinétique varie d'un
électronvolt. D'après l'équation 3.7,
E c  eV  (1,602  10 19 C ) (1V )
Donc,
1 eV  1, 602  10 19 J
Exprimées dans cette unité, les énergies de liaison chimique sont de l'ordre de quelques
électronvolts. Dans un tube à rayons cathodiques, les électrons du faisceau ont une énergie de
104 eV environ.
EXEMPLE: Un proton, de masse 1, 67  10 27 kg , pénètre dans la région comprise entre deux
plaques parallèles distantes de 20 cm l'une de l'autre. Il existe un champ électrique uniforme de
3 x 105 V/m entre les plaques. Si le proton a une vitesse initiale de 5 x 106 m/s, quelle est sa vitesse
finale ?
EXERCICE. Soit une charge q (< 0) en mouvement dans champ électrique. Si elle se déplace
dans le sens des potentiels croissants, son énergie cinétique va-t-elle augmenter ou diminuer ?
3.4. Le potentiel et l’énergie potentielle de charges ponctuelles
Nous allons examiner maintenant comment le potentiel varie
au voisinage d'une charge ponctuelle Q. Le champ électrique
est de la forme


kQ 
E  Er ur  2 ur
r

E étant radial (figure), seule la composante radiale du
 
 

déplacement ds contribue à E  ds ; donc E  ds  E r dr .
D'après l'équation 3.5, la variation de potentiel lors du
déplacement de A à B, quel que soit le trajet suivi, est
B
B
1
1
 kQ 
V B  V A   E r dr   
 kQ   Si

 r A
 rB rA 
A
l'on choisit V = 0 lorsque r   , et en posant
rA   et rB  r , le potentiel à la distance r de la
charge Q devient
V
kQ
r
équation 3.9
Cette fonction potentiel, qui dépend uniquement de la charge
source Q, est représentée à la figure. Puisqu'à chaque valeur de
r correspond une seule et unique valeur de V, les
équipotentielles sont des surfaces sphériques centrées sur la
charge. Elles sont dessinées en cercles pointillés sur la figure.
Près de la charge, le potentiel varie rapidement selon la
distance, de sorte que les équipotentielles sont très
rapprochées. Les lignes de champ (en lignes continues) sont normales aux équipotentielles et
Chapitre 3 OSPH
Le potentiel électrique
22
vont des potentiels élevés vers les potentiels plus faibles. Le champ est d'autant plus intense que
les équipotentielles sont plus rapprochées.
3.5. Le potentiel d'un système de charges ponctuelles
Nous avons vu au chapitre 2 que le champ électrique obéit au principe de superposition. Comme
la fonction potentiel découle du champ électrique (équation 3.5), elle obéit au même principe.
Dans le cas de plusieurs charges ponctuelles, le potentiel total en un point quelconque est égal à
la somme algébrique des potentiels créés par chacune des charges:
V 
kQi
ri
équation 3.10
Le potentiel étant un scalaire, nous ne devons tenir compte dans cette somme que des signes des
charges.
3.6. L'énergie potentielle de charges ponctuelles
Considérons une charge ponctuelle q située en un point où le potentiel est V. L'énergie potentielle
correspondant à l'interaction de cette charge unique avec les charges créant le potentiel V est
E p  qV
équation 3.11
Si la source de potentiel est une charge ponctuelle Q, l'énergie potentielle partagée par les deux
charges q et Q distantes de r est
Ep 
kqQ
r
équation 3.12
L'hypothèse E p  0 pour r   , implicite dans l'équation 2.12, permet l'interprétation suivante:
L'énergie potentielle du système formé par deux charges est le travail extérieur qu'il faut fournir
pour amener les charges de l'infini jusqu'à la distance r sans variation d'énergie cinétique.
Lorsque les deux charges sont de même signe, leur énergie potentielle est positive et il faut
fournir un travail positif pour réduire la distance qui les sépare et vaincre leur répulsion mutuelle.
Lorsque les charges sont de signes opposés, le travail extérieur est négatif. Dans ce cas, la force
extérieure doit empêcher les particules de prendre de la vitesse, ce qui signifie qu'elle est de sens
opposé au déplacement. Lorsque l'énergie potentielle est négative, il faut fournir un travail
extérieur pour séparer les charges.
EXEMPLE 1. Soit une charge ponctuelle q1  2 C en (- 2 m, 0) et une charge q 2  3 C en
(4 m, 3 m). On donne le point A de coordonnées (0, 0) et le point B de coordonnées (4 m, 0). (a)
Déterminez le potentiel total aux points A et B. (b) Quel travail doit-on fournir pour déplacer une
charge ponctuelle q3  5 C de A à B à vitesse constante?
EXEMPLE 2. En 1913, Niels Bohr proposa un modèle de l'atome d'hydrogène dans lequel
l'électron est en orbite sur une trajectoire circulaire autour d'un proton immobile. Trouver l'énergie
mécanique totale de l'électron sachant que le rayon de l'orbite est égal à 0,53 x 10-11 m.
3.7. La détermination du champ à partir du potentiel
On peut déterminer une force conservative au moyen de la dérivée de la fonction d'énergie
potentielle correspondante, Fx   dE p dx . De même, lorsqu'on connaît la fonction du potentiel
Chapitre 3 OSPH
Le potentiel électrique
23
(scalaire), on peut déterminer le champ électrique (vecteur). D'après l'équation 3.4, la variation de

potentiel associée au déplacement ds est
 
dV   E  ds   E ds cos 


Comme E s  E cos est la composante de E parallèle à ds , l'équation précédente peut s'écrire
sous la forme dV   E s ds , d'où on déduit que
dV
équation 3.13
ds

La direction de ds étant arbitraire, on peut interpréter l'équation 2.13 de la façon suivante:

n'importe quelle composante de E peut être déterminée à partir du taux de variation de V par
rapport à la distance dans la direction choisie. Il y a une direction pour laquelle ce taux de

variation est maximal. La valeur absolue de E correspond à cette valeur maximale de la dérivée
spatiale, c'est-à-dire E  (dV / ds ) max . Le maximum a lieu dans la direction où les
équipotentielles sont le plus rapprochées.
Es  
EXEMPLE 3: Le potentiel créé par une charge ponctuelle est donné par V  kQ r . Trouver: la
composante radiale du champ électrique.
3.8.
Le potentiel d’un conducteur
La figure représente une cavité vide à l'intérieur d'un
conducteur en équilibre électrostatique qui peut être chargé
ou placé dans un champ électrique uniforme. À l'intérieur du

matériau du conducteur, E  0 , la variation de potentiel,
B 

V B  V A   E  ds , est donc nulle entre deux points dans le
A
matériau du conducteur, y compris à la surface. Puisque
l'intégrale est nulle quel que soit le trajet suivi, même à

travers la cavité, on en conclut que E est également nul
dans la cavité. En général,
Tous les points à l'intérieur et sur la surface d'un
conducteur en équilibre électrostatique sont au même potentiel.

Pour un déplacement ds sur la surface du conducteur, on a
 

dV  E  ds  0 , ce qui signifie que E est perpendiculaire à

ds . Comme nous l'avons déjà remarqué précédemment, les
lignes de champ sont perpendiculaires à la surface.
La figure représente un conducteur sphérique non chargé dans
un champ uniforme. On peut s'attendre à ce que, en un point
éloigné de la sphère, la configuration du champ ne change pas:
les lignes de champ sont uniformes et les équipotentielles sont
des plans. Près de la sphère, les équipotentielles doivent être
sphériques et les lignes de champ radiales. Les charges dans la
sphère se répartissent de telle sorte que ces conditions soient vérifiées. Le champ est nul à
l'intérieur de la cavité parce que le conducteur « protège » les points intérieurs contre les champs
Chapitre 3 OSPH
Le potentiel électrique
24
extérieurs. Cette propriété est utile lorsqu'on veut isoler de l'équipement ou un câble de
transmission des influences externes.
Supposons que deux sphères chargées de rayons R1 et R2
soient reliées par un long fil conducteur. La charge va
s'écouler d'une sphère à l'autre jusqu'à ce que leurs potentiels
soient égaux, c'est-à-dire V1 = V2. Les sphères étant
suffisamment éloignées l'une de l'autre, leurs charges sont réparties uniformément et le potentiel
de chaque sphère peut s'écrire V  kQ R . L'égalité des potentiels donne:
Q1 Q 2

R1 R2
Pour une densité superficielle de charge uniforme la charge totale est Q  4R 2 L'équation
précédente devient:
 1 R2

 2 R1
équation 3.18
De l'équation 3.18, on déduit que   1 R : la densité superficielle de charge sur chaque sphère
est inversement proportionnelle au rayon. Cette relation nous permet de faire au moins une
remarque d'ordre qualitatif concernant la distribution de charge sur un conducteur de forme
irrégulière: la densité superficielle de charge est la plus grande dans les régions qui ont le plus
petit rayon de courbure.
Si le champ a une intensité suffisante (environ 3  106 V m par temps sec), il peut provoquer une
décharge électrique dans l'air. Cette décharge se produit parce que l'air contient en général des
molécules qui ont été ionisées (qui ont perdu des électrons) par les rayons cosmiques ou par la
radioactivité naturelle du sol. Sous l'effet du champ électrique, les électrons accélèrent, entrent en
collision avec d'autres molécules et créent davantage d'ions. À ce stade, l'air perd ses propriétés
isolantes et devient conducteur. Il se produit alors une décharge appelée «effet de couronne» qui
s'accompagne d'un halo visible. Le feu de St-Elme et le halo parfois perceptible autour des lignes
électriques sont des exemples de cet effet. Pour éviter les décharges par effet de couronne, les
équipements haute tension ont des surfaces lisses et leurs rayons de courbure sont les plus
grands possibles.
Mais les points anguleux sont parfois souhaitables. Ainsi, le paratonnerre est conçu pour produire
une décharge continue tendant à neutraliser le nuage situé juste au-dessus. Les tiges métalliques
fixées aux ailes des avions ont la même fonction.
Le potentiel à la surface d'une sphère chargée est V  kQ R et l'intensité du champ est
E  kQ R 2 . Par conséquent, V  ER à la surface. Ainsi, pour une intensité donnée du champ
disruptif, V  R . On peut élever jusqu'à 3  105 V le potentiel d'une sphère de rayon 10 cm avant
d'atteindre le potentiel disruptif. Par contre, un grain de poussière de 0,05 mm peut donner lieu à
une décharge de 150 V. Dans les silos à grains ou les tours de stockage du ciment, les poussières
peuvent facilement se charger par frottement et atteindre ce potentiel. Les décharges électriques
qui en résultent ont déjà entraîné de graves explosions au Canada et aux États-Unis.
3.9. Les orages
Dans les systèmes électriques, on utilise fréquemment la surface de la Terre comme référence du
potentiel. On fixe sa valeur à zéro et on exprime toute différence de potentiel par rapport à ce
Chapitre 3 OSPH
Le potentiel électrique
25
point. La mise à la terre constitue d'ailleurs l'opération par laquelle on établit un contact
électrique avec le sol; elle entraîne que le potentiel soit nul sur le dispositif qu'on branche.
Toutefois, la valeur du potentiel au sol n'a aucun lien avec la charge électrique qu'il porte. Au
contraire, la surface de la Terre possède une charge négative dont la valeur totale est d'environ
106 C. Evidemment, étant donné sa vaste étendue, sa densité surfacique de charge sera très faible.
Quoi qu'il en soit, elle crée un champ électrique dirigé vers le sol et dont l'intensité se situe aux
environs de 100 V/m, au niveau du sol. Il s'affaiblit légèrement avec l'altitude, maintenant une
différence de potentiel de près de 300'000 V avec l'électrosphère, que l'on situe à 50 km. Une
charge positive, dont la concentration atteint un maximum à cette altitude (d'où le nom
« électrosphère »), annule la charge négative du sol, conservant ainsi la neutralité du système
terrestre.
L'atmosphère terrestre, exposée aux rayonnements cosmiques et à différents autres phénomènes,
est parsemée d'ions. Soumis au champ électrique qui règne à la surface de la Terre, ces ions se
déplacent et, naturellement, contribuent à faire disparaître la séparation de charges: les ions
positifs vont vers le bas et les autres montent, annulant progressivement la charge au sol et celle
de l'électrosphère. Selon la théorie la plus
courante, les orages électriques et la
foudre sont des mécanismes qui
s'opposent à cet affaiblissement, en
drainant vers le sol suffisamment
d'électrons pour créer un équilibre.
Comme on le voit à la figure,
l'atmosphère terrestre est en réalité un
immense circuit, dans lequel les 300
orages qui ont lieu sur toute la surface de
la Terre chaque jour en moyenne
représenteraient la pile.
Les orages naissent à l'intérieur des cumulonimbus. Ces formations nuageuses, dont la hauteur
dépasse fréquemment 10 kilomètres, apparaissent lorsque certaines conditions atmosphériques
sont favorables, par exemple en présence d'air très chaud et très humide. On ne comprend pas
encore tout à fait les mécanismes à l’œuvre au sein d'un cumulonimbus. Plusieurs théories
expliquent l'apparition de zones chargées à l'intérieur du nuage, mais aucune ne reçoit vraiment
l'appui de tous les chercheurs. Selon le modèle le plus simple, le nuage, qui se forme à environ
1 km d'altitude, apparaît comme un immense dipôle. Une charge positive se situe entre 6 km et
7 km d'altitude; dans la partie inférieure, à 3 km ou à 4 km de hauteur, on observe une charge
négatives. Puisqu'un orage permet de transporter 20 C à 30 C d'électrons vers le sol, on peut
supposer que la charge qui se trouve dans ces deux régions est du même ordre de grandeur.
La foudre est directement liée à la présence de ces charges. Dans plus de la moitié des cas, les
décharges ont lieu à l'intérieur du nuage. Lorsqu'elles se produisent avec le sol, nombre de
situations sont possibles: transport d'électrons vers le haut, vers le bas, à partir du nuage ou du
soi. Quoi qu'il en soit, dans 90 % des cas, il y a transport d'électrons vers le sol, en accord avec
l'hypothèse selon laquelle les orages rechargent la Terre. Plusieurs étapes précèdent l'apparition
de l'éclair proprement dit (voir figure page suivante). Au départ, suivant le cas le plus commun,
un traceur quitte le nuage et se dirige vers le sol par bonds. Une pause de 50 ms sépare chaque
bond, mais le traceur progresse tout de même à plus de 200’000 m/s, ionisant l'air et créant un
canal propice au passage des charges. Ce canal est rempli d'électrons disponibles, n'attendant que
l'occasion de rejoindre la Terre. À l'approche du sol, le traceur se dirige vers tout corps
conducteur mis à la terre ou rejoint un autre traceur (chargé positivement) émergeant de ce corps
conducteur. C'est au moment du contact que la décharge se produit. On estime que plusieurs
coulombs d'électricité passent du nuage au soi; toutefois, le mouvement s'amorce au point de
Chapitre 3 OSPH
Le potentiel électrique
26
contact, là où la masse des électrons se met en mouvement. On comprend dès lors pourquoi la
lumière, signe évident du mouvement des charges, commence généralement au sol et monte vers
le nuage. Se produisant en quelques millisecondes, la décharge peut se répéter de nombreuses
fois et ainsi provoquer le clignotement caractéristique des éclairs.
Le tonnerre, dont l'intensité sonore surprend parfois plus que l'éclair, résulte de la décharge. Lors
du passage du courant, l'air se réchauffe et atteint une température proche de 30'000 K.
L'expansion rapide que provoque ce réchauffement engendre une onde de choc se propageant à
la vitesse du son et dont l'énergie se dissipe rapidement. À une distance de plus de 25 km, il est
presque impossible d'entendre le tonnerre même si l'impression visuelle est très présente: les
fameux « éclairs de chaleur » ne sont en réalité que des décharges lointaines.
L'orage n'a besoin que de cinq secondes pour recréer une charge capable de produire de nouveau
la foudre. Entre sa formation et le moment où il se transforme en un nuage bien ordinaire,
seulement 45 minutes se seront écoulées et pourtant, une énergie supérieure à 1 milliard de joules
aura été dissipée. On a longtemps pensé qu'il serait possible de récupérer cette énergie en
canalisant le courant électrique et en l'utilisant à des fins domestiques. Cependant, aujourd'hui
encore, l'apparition imprévisible et irrégulière des orages refoule cette idée au domaine des rêves.
En a) et b), le traceur amorce et poursuit sa descente ; en c), le contact s’établit avec un autre
traceur venant du sol. En d), la décharge se produit, transportant la charge négative vers le bas.
Chapitre OSPH
Le potentiel électrique
1. Un éclair peut faire passer jusqu'à 30 C de
charge sous une différence de potentiel de
108 V. (a) Quelle est l'énergie mise en jeu ?
(en eV). (b) Pendant combien de temps
cette quantité d'énergie pourrait-elle
alimenter une ampoule de 60 W ?
2. Il faut fournir un travail extérieur de
4  10 7 J pour déplacer une charge de
5 nC à vitesse constante jusqu'à un
point où le potentiel est égal à –20 V. Quel
est le potentiel au point initial?
3. Sachant qu'un électron part du repos dans
un champ uniforme, quelle est la
différence de potentiel nécessaire pour lui
faire acquérir les vitesses suivantes: (a)
11,2 km/s; (b) 0,1 c ?
4. Les armatures d'une bougie d'automobile
sont distantes de 0,1 cm. Quelle différence
de potentiel est nécessaire pour produire
une étincelle, sachant que le champ
disruptif dans l'air a une intensité de
3 10 6V / m .
5. Deux grandes plaques conductrices
parallèles distantes de 5 cm portent des
charges égales et opposées. Une charge;
ponctuelle de 8C placée entre elles est
soumise à une force de 2, 4  10 2 N .
Trouvez la différence de potentiel entre les
plaques.
6. Par temps clair, il existe à la surface de la
Terre un champ électrique uniforme
d'intensité 120 V/m vertical et dirigé vers le
bas. Quelle est la différence de potentiel
entre le sol et les hauteurs suivantes: (a) le
sommet de la tête d'une personne
mesurant 1,8 m; (b) le sommet d’une tour
de 433 m ?
7.
Deux plaques infinies parallèles distantes
de 3 cm sont reliées à une batterie de
120 V. Un électron initialement repos part
de la plaque négative. (a) Quelle est
l'intensité du champ électrique? (b) Quel
est le travail effectué par le champ sur
l'électron au moment où celui-ci touche la
plaque positive ? (c) Quelle est la variation
de potentiel de l'électron ? (d) Quelle est la
variation
d'énergie
l'électron ?
27
potentielle
de
8. Dans un noyau, deux protons sont séparés
de 10 15 m . (a) Quelle est leur énergie
potentielle électrique ? (b) Sachant qu'ils
partent du repos et qu'ils sont libres de se
déplacer, trouvez leur vitesse lorsqu'ils se
trouvent à 4  10 15 m l’un de l'autre.
9. Un noyau d'uranium de charge 92 e subit
une fission spontanée et donne deux
fragments de charges égales. Ils sont
initialement au repos et distants de
7, 4  10 15 m . (a) Quelle est l'énergie
potentielle initiale? (b) Quelle est l'énergie
cinétique finale des fragments lorsqu'ils
sont séparés par une distance infinie? (c)
En supposant que 30 % de l'énergie
cinétique des fragments peut être utilisée
dans un réacteur nucléaire, quel est le
nombre de fissions par seconde nécessaire
pour produire 1 MW?
10. Un électron se déplace suivant les lignes
d'un champ électrique uniforme. Sa vitesse
initiale est de 8  10 6 m s et sa vitesse
finale, après avoir parcouru une distance
de 3 mm dans le sens des x positifs, est
égale à 3  10 6 m s . (a) Quelle est la
différence de potentiel entre les deux
points ? (b) Quel est le champ électrique?
11. Une particule  de masse 6, 7 10 21 kg et
de charge + 2e a une énergie cinétique
initiale de 4,2 MeV. Elle est projetée sur un
noyau d'or de charge + 79e. En supposant
le noyau reste au repos et que la particule
a revient sur sa trajectoire initiale, trouvez
la distance du point de sa trajectoire où
elle est le plus proche du noyau.
12. Deux sphères creuses métalliques
concentriques ont pour rayons respectifs a
et b. La sphère intérieure de rayon a porte
la charge Q et la sphère extérieure la
charge -2Q. Représentez graphiquement V
et E en fonction de la distance r à partir du
centre.
Chapitre OSPH
Potentiel électrique
Le potentiel électrique
28
Page 28
Téléchargement