Gratte-Ciel - Théâtre L`Échangeur

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mise en scène Pascal Kirsch
Avec les acteurs de la promotion 2016 de l’ESAD École Supérieure d’Art Dramatique de Paris
du 23 au 26 juin à l’Aquarium pour le Festival des Ecoles,
et du 1er au 3 juillet en reprise au Théâtre L’Échangeur de Bagnolet.
Auteur – SONIA CHIAMBRETTO / Metteur en scène – PASCAL KIRSCH
Scénographie et costumes – Anaïs Heureaux
Jeu- Avec les acteurs de la promotion 2016 de l’ESAD École Supérieure d’Art Dramatique de Paris : Boris Balsan,
Teddy Bogaert, Mattias De Gail, Sylvain Deguillame, Lucie Dordoigne, Benjamin Dussud, Paul-Eloi Forget, Vera
Franskevich, Magdalena Galindo, Diane Kristanek, Adil Laboudi, Mélodie Le Blay, Achille Sauloup, Maxime
Vervonck
Vidéo – Mathieu Kauffmann / Création lumière et régie générale – Marinette Buchy
Administration – Marie Nicolini
Production PSPBB/ESAD – École supérieure d’art dramatique de Paris, département théâtre du Pôle Supérieur
Paris Boulogne-Billancourt | Co production COLLECTIF 2 PLUS.
Coréalisation L’ÉCHANGEUR – Cie Public Chéri.
"Dans un ciel brillant le plan Obus bouillonne. [...]
C’est fou, c’est plein, c’est
intense. C’est frénétique. "
GRATTE-CIEL de Sonia Chiambretto est une pièce historique mais d'une forme
nouvelle. Cette nouveauté implique une redéfinition de la lecture, un reformatage de
notre "façon" de lire l'histoire, de relier les histoires. C'est un manifeste, comme Plan
Obus l'a été pour L.C.
La pièce apparaît d'abord comme un réseau complexe de ramifications mais au fur et à
mesure nous découvrons une parole proche, évidente, une fois accepté de perdre
connaissance avec une forme pré-établie de narration.
La pièce se déroule
1/ dans un lieu unique :
Alger, non pas telle qu'elle existe mais telle qu'elle a été imaginée par Le Corbusier dans
un plan architecturale de 1931, le Plan Obus.
2/ en trois parties :
1992 - aujourd'hui / 1957 - 1962 / Demain.
Un gigantesque récit de ces trois périodes se compose à partir des témoignages de
personnages invisibles de l'Histoire, avec un grand H, mais reliés les uns aux autres par
une géographie et des évènements.
On suit un groupe de jeunes gens à travers lesquels nous sont racontés des chocs
historiques majeurs, mais sans perspective centrée. Au contraire, c'est une multiplication
de points de vue mineurs qui forment une contre-histoire officielle. Chaque récit, comme
dans la loi des fractales, contient les éléments encastrés des autres témoignages et des
autres évènements.
Ce n'est pas une thèse sur les périodes historiques en question – Décennies Noires,
Guerre d'Algérie, Demain ? – mais plutôt une impression, une photographie, une
radiographie qui fait apparaître notre monde, tel qu'il devient et d'où il vient.
Un même groupe de jeunes gens traversent les trois parties, gardent le même âge.
Comme si la pièce nous demandait ce qu'aurait pu être chacun dans des circonstances
historiques différentes.
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La pièce parle de colonisation, des mains sales du pouvoir, de jeunesse, de terrorisme,
d'une poussée religieuse, du corps des femmes, du regard des hommes.
C'est un poème longuement mûrit, parfaitement expérimental au sens où il sera difficile
de lui trouver un équivalent et parce qu'il ne cesse d'être en train de s'écrire, d'être
rattrapé par ce qui vient, ce qui advient.
L'action principale, c'est la langue. Et cette langue fait sens, c'est-à-dire, donne direction
et rend intelligible.
Pour jouer cette pièce, il faut une poignée de jeunes gens. C'est pourquoi il m'a semblé
parfaitement adéquat de proposer à Serge Tranvouez et à la promotion 2016 de l'ESAD de
nous atteler à ce grand-œuvre : cette pièce a besoin d'un groupe comme le nôtre et
réciproquement, de jeunes acteurs ont besoin me semble-t-il de pièces comme celle-ci,
de
langue neuve, aiguisée, de pièce à longue portée politique, en prise avec notre quotidien,
avec une nécessité absolue de donner la parole, de donner à penser.
Et cependant le temps nous manque. L'édifice est immense et nous ne pourrons pas
donner toute la dernière partie. J'ai préféré l'évoquer plutôt que de l'amoindrir en
travaillant vite et donc mal avec les acteurs et avec le texte. C'est une invitation au voyage
: vous verrez une visée, comme dans cette première séquence de la pièce où du toitterrasse, dans un plan d'ensemble, on voit le cœur des opérations. C'est ce que nous avons
essayé en tout cas.
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Faire œuvre d’historien ne signifie pas savoir « comment les choses se sont réellement passées ».
Cela signifie s’emparer d’un souvenir, tel qu’il surgit à l’instant du danger.
Walter Benjamin
Sonia Chiambretto est une des langues vivantes de la littérature contemporaine, du
théâtre contemporain. Elle travaille depuis trois ans à ce qui me semble un grand-oeuvre.
On y retrouve les thèmes récurrents de son écriture, mais elle jette l’ancre ailleurs qu’à
Marseille, cette fois. Un autre port, de l’autre côté de la Méditerranée : Alger. À travers
des personnages de fiction, derrière lesquels toujours se cachent des êtres réels, le livre
retrace trois périodes de l’histoire d’Alger au cours des 60 dernières années. Non telles
que les choses se sont réellement passées, mais dans la ville rêvée par Le Corbusier en
1931, lorsqu’il imagina un plan d’Alger : Le projet OBUS. Le titre fait référence à une
explosion des idées reçues en vue d’un bond vers l’avenir. Titre manifeste. À la lecture du
texte de Sonia Chiambretto, on comprend qu’il y a cette visée : le texte projette des
fragments d’histoire pour penser l’avenir. Et la fiction relie ce qui jusque là semblait
éparse, étanche, hétérogène. Et l’on voit apparaître ce qui vient à nous, ce qui fera notre
présent. Et l’avenir en question nous rattrape. Et l’histoire algérienne, algéroise, vue par
Sonia Chiambretto, apparaît comme le laboratoire de notre histoire. Nous autres,
humains.
Toute ressemblance avec des faits réels ne serait que pure et fortuite coïncidence
L.C. arrive à Alger par la mer : il voit la baie et, derrière, les montagnes de Kabylie.
Le Plan Obus est une ville imaginée par Le Corbusier, mais qui n'a jamais vu le jour.
20 ans il va se battre pour ce projet architectural qui devait faire exploser toutes les idées
reçues.
Quelques temps avant la révolution algérienne, il comprend que le plan obus ne verra
jamais le jour.
Imaginons maintenant que le Plan Obus ait été réalisé.
Imaginons le Plan Obus au point de rupture historique entre une jeunesse qui n'a pas de
place et un pouvoir tenu par les pères qui ont libérés le pays de l'occupant.
Imaginons dans ce pays, post-révolution, les premières élections démocratiques. Et que le
premier tour montre un déni total de la jeunesse pour le parti « historique ».
Imaginons que cette jeunesse, délaissée, sans travail, sans logement, se soit tournée vers
un parti très peu démocratique et très religieux, en quête d'origines.
Imaginons que l'Etat décide d'annuler la suite de l'élection et que la jeunesse se sente
flouée de sa voix, de son choix.
Alors le Plan Obus sombrerait irrémédiablement dans le chaos :
Une partie de la jeunesse dans le maquis, dans l'action armée, violente en réponse à la
violence de l'Etat. Un Etat qui chercherait par TOUT les moyens à juguler cette révolte,
ce terrorisme.
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Imaginons la population civile au milieu, perdue entre les deux camps, au milieu du
champ de bataille.
Cela durerait des années, une montée inexorable de violences, de vengeances, de
représailles qui s'apparenteraient à une guerre civile. Cela pourrait en arriver au point où
une trêve quasi inconditionnelle serait établie entre les deux camps, au mépris des
souffrances de la population qui est l'otage de chacun.
Après une accalmie, une rechute de la violence.
Puis une nouvelle concorde civile.
Tout finirait en silence comme cela, sans explications, sans éclaircissements, sans
solutions.
Essayons de raconter cette histoire, cette décennie, non pas avec un grand H mais à
travers quelques jeunes gens, par touchent, en regardant comment cela agit sur leur
quotidien, sur leurs pensées, sur leurs rêves.
Écoutons la génération coupable des héros dont certains pensent que « tout aurait été
autrement si la révolution était allée jusqu'au bout, jusqu'aux lendemains qui chantent ».
Puis revenons à la révolution, à ce qui s'est passé pour cette génération et imaginons ce
qu'auraient pu être tous ces jeunes que nous avons vu jusqu'ici, dans une autre séquence
historique, celle de leurs pères.
Puis tentons d'imaginer ce que sera la jeunesse du Plan Obus dans des décennies, et ce
que pourraient être tous ces jeunes que nous avons vu jusqu'ici, dans une autre séquence
historique, celle de leurs petits-enfants.
Et voilà GRATTE CIEL
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