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Conseil Supérieur d’Hygiène
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1. INTRODUCTION – CONTEXTE DU PROJET
Dans notre société actuelle, les facteurs psychosociaux prennent de plus en plus de place dans
les questions de santé publique. Traduction d’un mal-être, la dépression, la dépressivité et le
suicide atteignent dans certaines régions comme chez nous, en Europe occidentale, des taux
relativement importants, particulièrement dans les tranches d’âge les plus jeunes et les plus
âgées.
Bien que le taux de suicide en Europe ait globalement tendance à diminuer ou à stagner dans les
dix dernières années, nous savons par ailleurs que le taux de suicide a tendance à augmenter
par paliers sur de plus longues périodes. C’est ainsi qu’il a globalement connu une hausse
importante dans les années quatre-vingt pour ensuite diminuer et se stabiliser actuellement à un
niveau cependant supérieur à celui de la fin des années septante.
Ainsi, d’après les estimations de l’OMS, plus de deux mille personnes dans le monde se donnent
la mort chaque jour, soit une toutes les quarante secondes. Des estimations sérieuses
permettent de dire que le nombre de tentatives de suicide est dix à vingt fois supérieur. Depuis
longtemps, le suicide fait partie des cinq à dix causes de mortalité les plus fréquentes dans la
plupart des pays européens et des Etats d’Amérique du Nord, toutes populations confondues.
Dans les pays dont le niveau de vie est élevé, le suicide se place en général entre le premier et le
troisième rang dans le tableau statistique des causes de décès pour les quinze à trente-quatre
ans. Les statistiques montrent qu’au moins deux fois plus d’hommes que de femmes se donnent
la mort. En 1980, on compte approximativement 28 hommes pour 11 femmes; en 1999, 26 pour
9.
En Belgique, pour 1997, on comptait un taux de 21,08 pour cent mille, c’est-à-dire en moyenne
près de six suicides par jour. En France, trente personnes meurent chaque jour du fait de leur
propre volonté. En Allemagne, le taux était en 1999 de 20,2 hommes et de 7,3 femmes pour cent
mille habitants. Pour la Hongrie, traditionnellement touchée par ce fléau, on compte trente-deux
décès pour cent mille habitants. Dans ces différents pays, le nombre de décès par suicide est
nettement plus élevé que ceux par accidents de la route. De plus, on suppose généralement que
certains accidents de la route sont en réalité des suicides. En comparaison avec ses voisins, la
Belgique est un des pays d’Europe qui a le taux de suicide le plus élevé.
Contrairement à une idée fort répandue, ce n’est pas chez les jeunes qu’il y a le plus de suicides,
mais chez les personnes d’âge moyen (particulièrement chez les hommes entre 40 et 59 ans) et
chez les personnes âgées. Malgré cela, le public reste particulièrement frappé par l’augmentation
des suicides chez les jeunes, car l’interruption brutale d’une vie qui n’en était qu’à ses débuts
revêt un caractère encore plus tragique.
Ces faits jettent la lumière sur un problème qui résiste à toute interprétation générale (comme le
renvoi habituel à la perte du sens). Il faudrait expliquer toute une série de résultats empiriques
paradoxaux: le taux de suicides varie beaucoup à l’échelle des nations; il est soumis à des
fluctuations sur le long terme dans certains pays, mais comparé à d’autres pays, il reste
étonnamment stable; en période de guerre le taux baisse, etc.
Partant de ce premier constat général, les objectifs de ce rapport sont de faire le point sur la
situation en Belgique. Quelle est l’ampleur de la problématique en Belgique? Quels sont les
chiffres disponibles à ce sujet? Y a-t-il des populations plus fragiles ou des facteurs
prédisposants? Quels sont les programmes de prévention ou de prise en charge existants?
Quels sont ceux qu’il faudrait développer?
Ce rapport tente de donner un aperçu des recherches existantes sur ces questions, d’inventorier
ce qui existe déjà en matière de prévention et de prise en charge et enfin, sur ces différentes
bases, de dresser un tableau des recommandations sur lesquelles les experts du groupe de
travail se sont entendus.