PAC • Précis d’Anesthésie Cardiaque CHAPITRE 09 ANESTHESIE EN CAS D’ISCHEMIE ET DE REVASCULARISATION CORONARIENNES Mise à jour: Juin 2014 Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 1 Table des matières Introduction Ischémie myocardique Sténose coronarienne Ischémie et infarctus Infarctus en chirurgie non-cardiaque Infarctus en chirurgie cardiaque Hibernation & reperfusion Préconditionnement Syndrome clinique Manifestations cliniques & SCA Méthodes diagnostiques Investigations coronariennes Echocardiographie Contractilité segmentaire ETO peropératoire ETO des complications ischémiques Traitement de l’ischémie myocardique Ischémie aiguë Ischémie chronique Traitement interventionnel 2 4 4 8 14 17 18 21 25 25 26 30 35 35 42 43 49 49 61 64 Comparaison des thérapeutiques Evaluation préopératoire du risque ischémique Facteurs de risque Revascularisation préalable Algorithme de prise en charge Anesthésie du patient ischémique Prémédication Agents d’anesthésie et ischémie Conduite de l’anesthésie Anesthésie rachidienne et combinée Ischémie/infarctus péri-opératoires Anesthésie pour revascularisation coronarienne Evaluation préopératoire Technique chirurgicale Monitorage Technique d’anesthésie Causes/traitement de l’ischémie perop Conclusions Bibliographie Auteurs 71 77 77 81 85 92 92 94 97 99 102 104 104 107 111 113 116 119 120 133 Introduction L'insuffisance coronarienne est la cardiopathie la plus fréquemment rencontrée chez les malades chirurgicaux. Dans les pays occidentaux, près de 20% des patients opérés souffrent de maladie coronarienne à des degrés divers [218]. Cette prévalence tend à augmenter avec l’aggravation des maladies cardiovasculaires et le vieillissement de la population. Dans cette cohorte, les patients de chirurgie vasculaire occupent une place à part. Plus de 60 % d'entre eux présentent des signes de coronopathie, et le taux d'infarctus postopératoire y oscille entre 4.7 et 8.5% [14]. C'est la raison pour laquelle la majeure partie des études sur l'ischémie périopératoire en chirurgie non-cardiaque est conduite chez des populations de malades vasculaires. On y trouve des relations entre la prise en charge anesthésique et le devenir postopératoire qui n'apparaissent pas forcément dans le reste de la population. Or cette catégorie à très haut risque ischémique ne représente que 10% de tous les malades chirurgicaux. Le type, la gravité et l'incidence de la pathologie coronarienne est variable selon les populations. Dans le cas des anévrismes de l’aorte abdominale, par exemple, l’incidence d’angor clinique est de 20% en France et de 49% en Suède, et celui d’infarctus respectivement de 16% et 50% [22,158]. La prévalence de la maladie coronarienne est nulle chez les esquimaux. Au Japon, elle n'est qu'un dixième de celle de l'Europe et des USA, mais l'incidence des complications cardiaques postopératoires dans ces populations n'est pas différente d'un continent à l'autre [309]. La réponse au traitement est également inhomogène: en Amérique du Nord, par exemple, la population noire répond moins bien aux béta-bloqueurs que la population blanche [367]. Il faut donc rester réservé sur les possibilités de transposer les résultats d’une population à une autre. Dans l’évaluation des résultats, il est également nécessaire de tenir compte des variations qui existent entre les différentes institutions: chaque hôpital a des conditions de travail particulières, une qualité de soin variable, une population de malades à plus ou moins haut risque et des caractéristiques de Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 2 morbidité et de mortalité qui lui sont propres. Lorsqu'on compare l'impact de techniques différentes sur le devenir des malades, ces biais prennent toute leur importance. D'une manière générale, la relation entre les évènements peropératoires et l'infarctus postopératoire est multifactorielle. De nombreux éléments entrent en ligne de compte : Le type de population (géographique, éthnique, masculine ou féminine) ; La variabilité génétique de la réponse aux médicaments ; L’importance de la stimulation sympathique et du syndrome inflammatoire ; Les pathologies associées (diabète, polyvascularité, insuffisance rénale) ; Le type de chirurgie et l’importance des perturbations hémodynamiques ; Le type de lésion ischémique (déséquilibre entre la demande et l’apport en O2 ou rupture de plaque instable) ; La qualité de la prise en charge médicale. Ces différents éléments influencent la morbi-mortalité aussi bien en chirurgie cardiaque qu’en chirurgie générale. Les données sur l'ischémie périopératoire en chirurgie de revascularisation coronarienne ne sont pas transposables aux patients de chirurgie non-cardiaque. Ces deux catégories de malades ne présentent ni les mêmes types de lésions, ni les mêmes relations entre les évènements peropératoires et les complications cardiaques postopératoires. Pour le formuler de manière simplifiée, les malades de chirurgie générale souffrent en général de lésions diffuses et périphériques se traduisant pas une ischémie sous-endocardique avec sous-décalage du segment ST et infarctus non-Q. Les patients subissant une revascularisation coronarienne chirurgicale ont des lésions tronculaires se traduisant par une ischémie segmentaire, une surélévation du segment ST et un infarctus avec onde Q. Les premiers courent davantage de risque pendant les premiers jours postopératoires que pendant la période peropératoire, alors que les seconds sont en principe guéri de leur affection par la chirurgie coronarienne, pour autant que la revascularisation soit complète. Ce chapitre aborde cinq thèmes principaux: Un rappel de la physiopathologie et de la clinique de l’ischémie myocardique (voir aussi Chapitre 05, Perfusion coronariene) ; Le traitement de la maladie coronarienne ; L’évaluation du risque ischémique (voir aussi Chapitre 03) ; L'anesthésie du coronarien pour la chirurgie non-cardiaque ; L'anesthésie pour la revascularisation coronarienne. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 3 Ischémie myocardique L’anatomie et la physiopathologie de la circulation coronarienne sont traitées en détail dans le Chapitre 05 (voir : Anatomie des coronaires, Perfusion coronarienne et ischémie myocardique, Flux coronarien, Apport et demande d’O2, Collatérales et phénomène de vol). Sténose coronarienne La sténose coronarienne est le fait d'une plaque d'athérome à laquelle se surimpose parfois un spasme musculaire. L'athéromatose elle-même est une réponse inflammatoire chronique à un dysfonctionnement endothélial, caractérisé par un taux excessif de protéine C-réactive, et à des stimuli biochimiques comme le cholestérol LDL (Low-density lipoprotins), la fumée ou le diabète. La dysfonction endothéliale est liée à une prédisposition génétique et au stress de paroi (hypertension artérielle). Elle aboutit à l'infiltration, d’abord discrète puis massive, de la paroi vasculaire par des cellules musculaires lisses et par des macrophages remplis de cholestérol à basse densité (foam cells). Il se forme une capsule fibreuse plus ou moins résistante à la rupture, qui isole la lésion du flux sanguin. La dysfonction de l’endothélium s’accompagne d’une perte de sa fonction anticoagulante et vasodilatatrice, et d’une augmentation des déclencheurs de l'adhésivité locale des plaquettes (voir Chapitre 08, Voie cellulaire) [43]. Sténose stable et plaque instable Schématiquement, la sténose coronarienne est liée à l’existence de deux types de plaques (Figure 9.1) [208]. Plaque athéromateuse stable caractérisée par une partie centrale lipidique de faible dimension, recouverte d'une couche fibro-musculaire épaisse, parfois calcifiée. Elle cause le plus souvent des sténoses serrées (> 75%), bien visibles à l’angiographie, qui croissent de manière progressive et qui limitent le flux sanguin dans tout un territoire. Plaque instable, de croissance discontinue et irrégulière, composée d'une partie centrale massive de nature lipidique à haute teneur en cholestérol (LDL), où se mêlent des macrophages et des facteurs tissulaires; cet amas est faiblement encapsulé par une couche fibreuse fine (50-65 mcm) qui présente des signes d’érosion et de cicatrisation. A l’angiographie, cette plaque ne se manifeste que par une sténose modeste (≤ 50%) et nonlimitative du flux, car elle tend à bomber vers l’extérieur et non vers l’intérieur de l’artère [207]. Son risque est tributaire de son activité inflammatoire et de sa susceptibilité à la rupture, mais non du degré de sténose qu’elle occasionne [61]. La fragile capsule fibreuse d’une plaque instable est tissée de collagène synthétisé par les cellules musculaires lisses. Les macrophages, stimulés par les cellules T activées lors d’une réaction inflammatoire, sécrètent des protéinases qui dégradent ce collagène. La rupture subséquente de la capsule met à nu le matériel lipidique et les macrophages, qui entrent alors en contact avec le sang. La violente réaction inflammatoire qui accompagne un infarctus ou une opération chirurgicale déstabilise les plaques sur tout l’arbre coronarien, ce qui explique la fréquence des syndromes coronariens aigus survenant à la suite de ces évènements et le rôle protecteur d’une revascularisation précoce [97]. Lorsque la capsule est fissurée, le facteur tissulaire (FT) présent sur les macrophages et les cellules musculaires lisses entre en contact avec le facteur VII circulant et déclenche la formation de thrombine (voir Figure 8.3). D’autre part, le facteur von Willebrand, lui aussi mis à nu par la rupture, immobilise et active les plaquettes en circulation (voir Figure 8.5) [207]. L'adhésivité de ces dernières est stimulée et conduit à une thrombose locale; celle-ci peut être spontanément lysée, emboliser en périphérie, se recanaliser, ou occlure totalement le vaisseau. Le résultat est un syndrome coronarien aigu ou un Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 4 infarctus. Les plaquettes stimulées induisent la libération vasoconstrictrices (thromboxane A2, sérotonine, endothéline). de substances puissamment Athérome intrapariétal Plaque stable Plaque instable Sténose > 70% Sténose < 60% Ischémie : DO2 insuffisant si mVO 2 ↑ Rupture + thrombus Ischémie sur obstruction © Chassot 2012 Figure 9.1 : Evolutions possibles d'une plaque athéromateuse. La lésion stable est riche en zones calcifiées, en fibre musculaire lisse et en collagène; elle est recouverte d'une capsule fibreuse résistante. La lésion instable a perdu ses fibres conjonctives et musculaires lisses; elle est remplie de matériel lipidique et de macrophages, sa fine capsule fibreuse est très inflammatoire. Sa rupture est potentialisée par les forces de cisaillement et le syndrome inflammatoire. La rupture de la plaque met le matériel lipidique et les éléments cellulaires en contact avec les facteurs de coagulation et les thrombocytes circulants. Un thrombus se forme. L'évolution peut se faire vers l'occlusion totale du vaisseau et l'infarctus, ou vers une fibrinolyse et une cicatrisation. Le thrombus peut secondairement se recanaliser. L'étendue de l'infarctus dépend du territoire perfusé par le vaisseau occlus, de son degré de collatéralisation, de la demande en O2 du myocarde au moment de l'accident évolutif, et des facteurs induisant la fibrinolyse et la recanalisation; l'état d'hypercoagulabilité périopératoire aggrave évidemment la situation. Ces deux types de lésions conduisent très schématiquement à trois modalités de pathologies ischémiques [8,207,251]. La plaque stable est responsable d'épisodes d'angor itératifs, caractéristiques d’un déséquilibre entre l’apport et la demande en O2 parce qu’elle limite le flux lorsque la demande est augmentée comme lors d’exercice, de tachycardie, d’hypertension, de stress ou de douleur (Demand ischaemia). Elle se caractérise par des sténoses serrées (> 75%) à l’angiographie et par des épreuves d’effort en général positives. Lorsqu'elle croît jusqu'à l'occlusion, cette sténose donne lieu à un infarctus de type non-Q, accompagné de sous-décalage du segment ST, correspondant à des lésions le plus souvent sous-endocardiques. Cet infarctus survient Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 5 fréquemment chez des malades âgés, diabétiques, insuffisants cardiaques, ou souffrant d'angor avec modifications du segment ST. Son étendue est inversement proportionnelle au degré de collatéralisation. La meilleure prévention contre cet accident est le béta-blocage. Un bas débit (hypotension sévère), une viscosité élevée (déshydratation) et/ou une vasoconstriction locale (stimulation sympathique, endothéline) peuvent parfois causer une thrombose aiguë sur une plaque stable lorsque la sténose est très serrée [127]. La rupture de plaque instable est sans relation particulière avec une demande accrue en O2, car elle ne produit que des sténoses modestes à l’angiographie (< 60%), et laisse les tests d’effort le plus souvent silencieux [280]. Sa thrombose cause une occlusion permanente du vaisseau (Supply ischaemia) et un infarctus transmural, accompagné de surélévation du segment ST et d'onde Q dans 75% des cas [5]. Elle est responsable de la majorité des syndromes coronariens aigus et des morts subites. L’infarctus survient dans des régions dépendant de vaisseaux peu sténosés à la coronarographie [134] : 80% des lésions coronariennes en relation avec ce type d'infarctus ne sont pas considérées comme significatives lors d'un examen préalable [82,104]. La prévention est surtout liée aux antiplaquettaires et aux statines. Ces dernières ont un effet stabilisateur sur l’équilibre des plaques athéromateuses qui s’étend au-delà de leur capacité à abaisser les lipides circulants [151]. La résorption du thrombus accumulé sur la plaque instable et la recanalisation spontanée de la lumière vasculaire se manifestent par un épisode d’angor instable sans surélévation du segment ST [43]. Des épisodes répétitifs peuvent déformer progressivement la paroi vasculaire jusqu’au moment où un thrombus devient occlusif et cause un infarctus. Alors qu’elle est la cause des trois quarts des syndromes coronariens aigus en clinique cardiologique, la rupture de plaque instable n’est à l’origine que de la moitié des infarctus postopératoires, où l’ischémie par déséquilibre DO2/VO2 est plus fréquente [191]. Le sort lié à un thrombus dépend de la durée et du degré d’occlusion de la coronaire. Dans un vaisseau terminal, une interruption totale du flux pendant plus de 20 minutes entraîne la nécrose des tissus. La balance entre thrombolyse et facteurs procoagulants, la réaction inflammatoire systémique, les conditions de flux, la géométrie de la lésion, l’éventuelle collatéralisation, et le degré de vasodilatation ou de vasoconstriction locale scellent le destin du myocarde distal à la lésion. Le patient vulnérable La vulnérabilité d’un patient à un accident cardiovasculaire aigu (ischémie, infarctus ou mort subite) est liée à quatre phénomènes : l’importance de la sténose coronarienne (sténose critique), le degré d’instabilité des plaques athéromateuses, la susceptibilité du myocarde et les facteurs déséquilibrants humoraux [252]. Une sténose stable critique est caractérisée par son haut degré d’obstruction au flux (> 90%), sa localisation sur un gros tronc (tronc commun, IVA ou CX proximales), sa faible collatéralisation et l’importance du territoire qu’elle vascularise. Une plaque instable est un phénomène dynamique dont l'évolution n'est pas prédictible [61]. De nombreux facteurs en accroissent le risque : • Facteurs structurels : grande taille de la masse centrale lipidique, fragilité de la capsule susceptible de se rupturer, nombre élevé de macrophages et pauvreté en cellules musculaires lisses. • Facteurs mécaniques : le mince recouvrement endothélial est facilement endommagé et rompu par les forces de cisaillement liées à une poussée hypertensive, à la tachycardie, au spasme coronarien ou à un flux turbulent. • Facteurs humoraux : le syndrome inflammatoire, le diabète, la nicotine et l'hypercholestérolémie déséquilibrent la masse lipidique. • Facteurs génétiques : certains malades développent des plaques fragiles alors que d'autres résistent à l'apport de cholestérol ; certaines populations sont particulièrement sensibles aux effets de la diète. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 6 Le myocarde module les effets de l’ischémie par une série de phénomènes : • Susceptibilité aux arythmies malignes. • Etendue et emplacement du territoire concerné. • Degré de collatéralisation. • Degré de stimulation sympathique. • Effet de préconditionnement par les épisodes déjà subis. La susceptibilité à la rupture et à la thrombose est liée à plusieurs éléments systémiques véhiculés par le sang [36,226,291] : • Anomalies coagulatoires ; les syndromes coronariens aigus sont associés à une élévation du fibrinogène et des inhibiteurs du plasminogène ; la période opératoire est caractérisée par une augmentation de l’adhésivité plaquettaire et une baisse de la fibrinolyse. • Facteurs inflammatoires : de nombreux facteurs sériques prédisent le risque de complications cardiovasculaires : interleukine-6, protéine C-réactive (CRP) ; le syndrome inflammatoire systémique (SIRS) accompagnant la chirurgie est un élément de fort déséquilibre pour les plaques instables. • Facteurs humoraux : taux élevé de catécholamines et de thromboxane A2 (vasoconstricteur libéré par les plaquettes activées), hyperviscosité. • Activation globale : on a démontré que les syndromes coronariens aigus sont fréquemment associés à une activation générale de toutes les plaques coronariennes, et à la fissure de nombreuses d’entre elles ; le plus souvent, une seule est l’objet d’une thrombose massive qui provoque un infarctus. Sténose coronarienne Il existe schématiquement 2 types de plaque athéromateuse dans l'arbre coronarien. La plaque stable: partie lipidique enfouie dans du tissu cicatriciel, endothélium épaissi, calcifications. - Sténose serrée (> 75%) ne permettant pas un DO2 suffisant en cas d’augmentation de mVO2, angor d'effort (demand ischaemia); - Visible à l'angiographie, test d'effort le plus souvent positif; - Conduit à un infarctus non-Q avec sous-décalage ST; - Responsible de de 50-60% des infarctus postopératoires (pic d'incidence: 3ème jour postop); - Prophylaxie: ↑ DO2 , ↓ mVO2, β-bloqueurs. La plaque instable: accumulation lipidique avec macrophages et réaction inflammatoire, recouverte d'une capsule mince et friable. - Sténose peu serrée (< 60%), ne compromettant pas le DO2; angor rare; - Sténose non-significative à l'angiographie, test d'effort le plus souvent négatif; - Instabilité, rupture et thrombose du vaisseau (supply ischaemia); - Conduit à un infarctus avec onde Q et sus-décalage ST (STEMI); - Responsable de la majorité des syndromes coronariens aigus en cardiologie, mais de seulement 40-50% des infarctus postopératoires (< 36 heures postop); - Prophylaxie: antiplaquettaires, statines. La vulnérabilité à l'ischémie est déterminée par: - Degré d'obstruction au flux d'une sténose stable serrée; - Degré d'instabilité d'une plaque inflammatoire instable; - Etendue et localisation du myocarde ischémié; - Facteurs humoraux (agrégabilité plaquettaire, syndrome inflammatoire, stress). Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 7 Dans la période postopératoire, la collusion du stress, des variations hémodynamiques, de la forte demande en O2, de la thrombogénécité augmentée et du syndrome inflammatoire chirurgical sont un cocktail particulièrement explosif pour des plaques instables. C’est la raison pour laquelle la protection myocardique (béta-bloqueur, antiplaquettaires, statines) doit être maximale chez les patients à risque. Ischémie myocardique et infarctus Alors que l'hypoxie est un apport insuffisant d'oxygène sans diminution de la perfusion tissulaire, l'ischémie se caractérise par une baisse de la perfusion entraînant un manque d'oxygène et de substrats métaboliques, et une élimination incomplète des métabolites. Elle représente une souffrance tissulaire due à un déséquilibre entre l’apport (DO2) et la demande (VO2) en oxygène (Figure 9.2). Autorégulation Figure 9.2 : Représentation schématique des facteurs affectant l'équilibre entre l'apport et la demande myocardique en oxygène. PAM aort: pression artérielle moyenne de l'aorte ascendante. PTD: pression télé-diastolique du VG. Contrôle métabolique et endothélial Compression extravasculaire Contrôle neurovégétatif Résistances vasculaires Facteurs humoraux PAM aort Durée de la diastole Flux sanguin coronaire PTD VG Fréquence Capacité de transport d'O2 Contractilité Tension de paroi DEMANDE APPORT O2 © Chassot 2012 L’insuffisance dans l’apport d’O2 (supply ischaemia) peut être due à un vasospasme, à une sténose serrée, à une obstruction (thrombose sur une plaque), à une hypotension, à une anémie ou une hypoxie sévères ; elle est le plus souvent responsable du syndrome coronarien aigu. Le myocarde survit à une ischémie sévère par une combinaison d'inhibition de la contraction (hibernation) et de glycolyse anaérobique. L’excès dans la demande en O2 (demand ischaemia) est lié à la tachycardie, à l’augmentation de la tension de paroi et à la stimulation sympathique de l’effort, non accompagnées d’une Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 8 augmentation correspondante du flux coronarien ; cette situation est caractéristique des épisodes d’angor stable chronique. La plaque coronarienne stable est un dépôt athéromateux fixe, fibrosé ou calcifié, occasionnant une sténose serrée (> 75%) et un angor chronique ; cette lésion est bien visible à la coronarographie et entraîne une symptomatologie décelable aux tests d’effort. La plaque instable est un dépôt lipidique très inflammatoire recouvert d’une capsule mince et friable, très susceptible de rupture ; comme elle représente une sténose peu serrée (≤ 50%), son risque est essentiellement lié à son activité inflammatoire, à son degré d’instabilité et à l’agrégabilité plaquettaire. Alors qu’elle est la cause de trois quarts des syndromes coronariens aigus en clinique, la rupture de plaque instable n’est à l’origine que de 45% des infarctus postopératoires ; dans le contexte chirurgical, l’ischémie par déséquilibre DO2/VO2 est plus fréquente (55% des cas) [191]. Des épisodes récurrents d'ischémie peuvent altérer structurellement le myocarde: hypertrophie, fibrose interstitielle, sclérose. La production endothéliale locale de NO• est très affaiblie en cas de sténose coronarienne, alors que la sécrétion d'endothéline et d'angiotensine II est élevée; ces deux substances ont des effets vasoconstricteurs mais aussi potentialisateurs de la fibrose interstitielle. L’angiotensine II est un des agonistes principaux parmi les nombreux déterminants moléculaires de l’HVG, mais les déclencheurs de croissance qui favorisent l’hypertrophie des cellules musculaires sont aussi des facteurs qui activent les fibroblastes et, à partir d’un certain seuil, engendrent l’apoptose [152]. L'angor est causé par la libération d'adénosine. L'angor stable est caractéristique d'une diminution chronique du flux sanguin local par une sténose coronarienne, entraînant une souffrance ischémique distale lorsque la demande en O2 augmente. Dans l'angor instable, une érosion ou une fissure dans une plaque instable mettent le flux sanguin en contact avec les lipides et les macrophages de la plaque. Ceci conduit à une vasoconstriction locale et à l'adhésion des thrombocytes, entraînant la formation d'un thrombus qui peut devenir occlusif ou être spontanément lysé en 10 à 20 minutes [127]. Syndrome coronarien aigu (SCA) Dans les premières minutes qui suivent une occlusion coronarienne survient une série de modifications qui se déroulent dans l’ordre chronologique suivant (Figure 9.3 et Tableau 9.1) [174] : Baisse de la compliance ventriculaire (dysfonction diastolique par défaut de relaxation active protodiastolique) ; Altération de la cinétique segmentaire (ACS) à l’échocardiographie ; Dysfonction systolique et baisse de la tension de paroi en systole ; Modification du segment ST à l’ECG ; Baisse de la FE mesurée (si la zone ischémiée est > 15% de la masse ventriculaire) ; Apparition de l’angor clinique ; Une absence totale de flux sanguin durant > 20 minutes entraîne la nécrose. La dysfonction segmentaire échocardiographique apparaît 1-2 minutes avant les signes électriques. Il faut une diminution de ≥ 60% du flux pour induire une hypokinésie et de ≥ 80% pour provoquer une akinésie; ces altérations de la cinétique segmentaire sont potentiellement réversibles par revascularisation. Une hypokinésie fixe apparaît à l’échocardiographie dans le territoire concerné lorsque > 20% de l’épaisseur de paroi est infarcie ; il faut un infarcissement de > 40% de l’épaisseur pour provoquer une akinésie. La baisse de la tension de paroi systolique atteint son nadir à la cinquième minute. La zone ischémiée présente un mouvement paradoxal sous forme d‘un raccourcissement et d’un épaississement post-systoliques qui ne contribuent pas à l’éjection du sang puisqu’ils ont lieu après la fermeture de la valve aortique (voir Figure 9.9, page 35) ; par contre, ils perturbent la relaxation protodiastolique. Les effets hémodynamiques dépendent de la masse ventriculaire touchée et de sa localisation : la perte de 25% du myocarde entraîne une insuffisance ventriculaire et celle de > 35% conduit au choc cardiogène [174]. Un infarctus antérieur ou latéral a Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 9 davantage de retentissement hémodynamique qu’une lésion septale ou postérieure, parce que le degré de raccourcissement radiaire en systole est plus élevé dans les parois antérieure et latérale que dans la paroi postérieure et dans le septum (voir Figure 5.18). Figure 9.3 : Chronologie des évènements après une interruption du flux coronarien. La dysfonction diastolique survient avant la dysfonction systolique. Les anomalies de la cinétique segmentaire (ACS) surviennent après 20 à 60 secondes et précèdent le décalage du segment ST de 30 secondes à 2 minutes. L'angor se manifeste moins d'une minute après l'occlusion coronarienne. PTD: pression télédiastolique du VG. FE: fraction d'éjection [174]. Apport d'O 2 DO2/VO 2 normal Infarctus ISCHEMIE Angor FE ↓ ACS Décalage ST PTD VG ↑ compliance ↓ Demande d'O2 Tableau 9.1 Traduction échocardiographique de l’ischémie coronarienne Diminution du flux coronarien de 50% : Diminution du flux coronarien de 80% : Interruption totale du flux : hypokinésie akinésie nécrose en 20 minutes* Infarctus sous-endocardique : Infarctus de 20% de l’épaisseur de paroi : Infarctus de 40% de l’épaisseur de paroi : en général pas d’ACS hypokinésie akinésie Infarctus de > 15% de la masse ventriculaire : Infarctus de > 35% de la masse ventriculaire : FE diminuée choc cardiogène * : en l’absence de collatéralisation ACS : altération de la cinétique segmentaire. FE : fraction d’éjection. D’un point de vue physiopathologique, les mécanismes en jeu dans les syndromes coronariens aigus peuvent être répartis en trois catégories [76]. Athéromatose ± obstructive avec réaction inflammatoire systémique ; cette dernière est accompagnée d’une flambée immunitaire et se caractérise par de multiples ruptures de plaques, une activation des neutrophiles, des macrophages et des cellules T, une CRP élevée et une libération locale de cytokines. Un thrombus obstrue la lumière. Athéromatose obstructive sans réaction inflammatoire ; des stresseurs physiques (stress mécanique de la paroi artérielle) ou émotionnels déclenchent une réaction sympathique majeure avec hypertension, vasoconstriction locale, activation plaquettaire et augmentation de Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 10 la mVO2. Les modifications physico-chimiques des plaques (température, pH, fumée, toxines) peuvent conduire à une cristallisation massive de leur cholestérol et à leur éclatement. Athéromatose non-obstructive ; une vascoconstriction intense est présente dans les vaisseaux épicardiques et dans la microcirculation, comme dans le syndrome de Takotsubo. La fonction endothéliale est altérée et induit un vasospasme alors qu’elle devrait produire du NO en réponse à la stimulation sympathique. La rupture de plaque instable et l'adhésion des plaquettes sur la zone cruentée provoquent la formation d'un thrombus plus ou moins occlusif qui est classiquement considéré comme le substrat physiopathologique commun des syndromes coronariens aigus puisque qu’on le retrouve dans > 75% des SCA, principalement sur des troncs proximaux ou des bifurcations [5,76]. Mais de nombreuses investigations ont montré la présence de thrombus sur des plaques fissurées sans pour autant que les patients ne présentent de symptômes ischémiques. Il s’ensuit que l’origine du SCA est certainement multifactorielle, résultant de la combinaison malheureuse d’un état inflammatoire, d’une hypercoagulabilité, d’un pic dans l’effet de toxines (lipides, fumée, polluants) ou dans la réponse au stress (catécholamines, hypertension), synchronisés avec le moment d’une rupture ou d’une fissure dans une plaque instable située à un endroit critique du réseau coronarien [8]. La position du segment ST à l'ECG occupe une place centrale dans la définition clinique du syndrome coronarien aigu (Figure 9.4). Il introduit une dichotomie fondamentale entre le sus-décalage et le sous-décalage ST [4,5,8]. Un quart des patients souffrant de syndrome coronarien aigu présente une surélévation du segment ST ; la majorité d'entre eux développe un infarctus avec onde Q (ST-elevation myocardial infarction ou STEMI) ; un thrombus coronarien est présent dans > 80% des cas. Les trois autres quarts présentent un sous-décalage ST et souffrent en majorité d'angor instable ; certains développeront un infarctus (élévation des troponines), en général de type non-Q (non-STEMI) ; un thrombus coronarien n’est présent que dans 35-60% des cas. Figure 9.4 : La position du segment ST à l'ECG occupe une place centrale dans la définition du syndrome coronarien aigu. L'élévation des troponines et le décalage ST certifient le diagnostic d'infarctus. La majorité des patients avec un sus-décalage ST développe un infarctus avec onde Q. Les patients qui présentent un sousdécalage ST souffrent en majorité d'angor instable; certains développent un infarctus (élévation des troponines), en général de type non-Q. La mortalité (5.1%) est la même pour des deux types d'infarctus (d'après réf 5). Syndrome coronarien aigu: angor, choc cardiogène ECG Sus-décalage ST 25% des cas Sous-décalage ST 75% des cas Troponine ⇑ Infarctus avec onde Q (75%) Occlusion coronaire totale TTT: reperfusion Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne Infarctus sans onde Q (35%) TTT: reperfusion Angor instable 65% des cas TTT médical 11 La mortalité (en moyenne 5%) est un peu plus élevée pour les infarctus de type STEMI. C'est l'élévation du taux d'enzymes cellulaires, essentiellement les troponines, qui certifie le diagnostic d'infarctus en cas de décalage du segment ST. Les patients qui présentent une surélévation persistante du segment ST sont candidats à une technique de reperfusion en urgence (thrombolyse ou angioplastie percutanée), alors que ceux qui ont une sous-dénivélation ST peuvent bénéficier d'un traitement médical anti-ischémique, suivi plus ou moins rapidement d'une revascularisation (voir Traitement de l’ischémie aiguë, page 49). Les antiplaquettaires font partie du traitement aigu des deux catégories de malades [4,5,12, 261,262,324]. Ischémie myocardique L'ischémie est une souffrance tissulaire due à un déséquilibre entre l’apport (DO2) et la demande (VO2) en oxygène: - La baisse de DO2 peut être due à: vasospasme, sténose serrée, obstruction par thrombose, hypotension, anémie, hypoxie. - L'excès de VO2 est lié à: tachycardie, augmentation de tension de paroi et de contractilité, stress, douleur. L'ischémie entraîne en < 5 minutes les évènements suivants, par ordre chronologique: - Dysfonction diastolique, - Altération de la cinétique segmentaire, - Dysfonction systolique, - Altérations ST (ECG), - Angor (dû à la libération d'adénosine). Une interruption totale du flux de > 20 minutes provoque la nécrose (en l’absence de collatérales). Les effets hémodynamiques dépendent de la masse ventriculaire lésée : 25% entraînent une insuffisance ventriculaire et > 35% un choc cardiogène. Le syndrome coronarien aigu est défini par la position du segment ST: sus-décalage (infarctus STEMI) ou sous-décalage (infarctus non-STEMI). L’infarctus est défini par l’élévation des troponines. L'infarctus En l'absence de collatérales, une interruption de flux sanguin pendant une vingtaine de minutes entraîne la nécrose. Le phénomène est accéléré si la mVO2 est élevée ou la pression artérielle basse. En revanche, le délai est étendu à 2 - 6 heures si le réseau collatéral est bien développé. La nécrose débute habituellement dans la zone sous-endocardique et s’étend progressivement vers l'épicarde pour devenir transmurale en 4 à 6 heures. Ce délai représente les golden hours pendant lesquelles on peut interrompre le processus en reperméabilisant le vaisseau concerné (voir Traitement de l’ischémie aiguë, page 49). On peut distinguer deux types d'infarctus selon qu’on est en présence d’une plaque stable ou d’une plaque instable (Tableau 9.2). Actuellement, la définition universelle de l’infarctus repose sur les deux points suivants (pour plus de détails, voir Syndrome clinique, pages 25-29) [340]. Elévation des marqueurs biochimiques (préférentiellement troponine), dont au moins une valeur est au-delà du 99ème percentile de la limite de référence supérieure. Association à au moins un des éléments suivants : Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 12 • • • • • Symptomatologie d’angor : douleur rétrosternale constrictive durant 20-30 minutes ; douleur épigastrique de même type ; irradiation dans la mâchoire, l’épaule et le bras gauche. Modifications ECG : sus-décalage > 1 mm (0.1 mV) ou sous-décalage > 1-2 mm du segment ST ; apparition d’un bloc de branche gauche. Développement d’ondes Q. Nouvelles anomalies de la contraction segmentaire. Présence de thrombus intracoronarien ou de thrombose de stent (PCI ou autopsie). Tableau 9.2 Différences schématiques entre infarctus avec et sans onde Q Caractéristiques Onde Q Non-Q Mécanisme Lésion Prévalence (médecine) Prévalence en postop Infarctus préexistant Artère occluse Collatéralisation ECG Elévation du segment ST Sous-décalage ST Pics enzymatiques Cinétique segmentaire Ischémie résiduelle rupture plaque instable transmurale 60-70% 45% rare 75-80% des cas peu fréquente sus-décalage ST 80% des cas rare élevés dysfonction segment ++ peu fréquente ischémie sur sténose serrée sous-endocardique 30-40% 55% fréquent 10-20% des cas fréquente sous-décalage ST 20% des cas > 80% des cas plus bas pas de dysfonction segment fréquente Le décès cardiaque accompagné d’une symptomatologie typique mais sans valeur connue de troponine est également considéré comme un infarctus. La valeur-seuil diagnostique d’infarctus est déplacée à 3 fois le 99ème percentile de la limite de référence supérieure après PCI et à 5 fois après pontages chirurgicaux [340]. Lors d'un infarctus, la dysfonction systolique des segments ischémiés est caractérisée par une hypokinésie (baisse de contractilité), une akinésie (absence de contraction) ou une dyskinésie (expansion vers l’extérieur en systole). Elle est partiellement compensée par une hyperkinésie des segments non touchés. D'autre part, la masse myocardique initialement hypo- ou akinétique au moment de l'ischémie aiguë est plus importante que la masse qui va ultérieurement être infarcie, car toute la zone bordante (pénombre) est immobile, alors qu'elle va potentiellement récupérer par la suite. La fraction d'éjection mesurée à un moment proche de l'évènement aigu peut être ainsi inférieure à ce qu'elle sera après récupération. Le degré d'augmentation du volume télésystolique et la présence d'une dysfonction diastolique sont des bons prédicteurs de la mortalité post-infarctus. La gravité d’un infarctus dépend de plusieurs éléments. La localisation ; un infarctus antérieur ou latéral a de fortes conséquences hémodynamiques parce que la contraction des parois antérieure et latérale contribue davantage au volume systolique que celle de la paroi postérieure et du septum. Le type de lésion ; un infarctus transmural modifie la contractilité d’un ou de plusieurs segments, alors qu’un infarctus sous-endocardique peut ne pas altérer significativement la fonction systolique du VG. Il faut une lésion impliquant plus de 20% de l'épaisseur de la paroi myocardique pour voir apparaître une altération de la cinétique segmentaire. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 13 La dimension de la lésion ; plus il est étendu, plus un infarctus pénalise le débit cardiaque. Il faut que plus de 15% de la masse du VG ait une contraction anormale pour que la fraction d'éjection globale soit modifiée. Le risque d’arythmies ; la présence de tachy-arythmies auriculaires ou ventriculaires (TV, fibrillation) augmente la mortalité à court terme et aggrave le pronostic à long terme. Le degré de collatéralisation ; les sténoses serrées entraînent une ischémie chronique (angor d’effort) qui génère un recrutement de vaisseaux collatéraux, alors que la thrombose aiguë d’une plaque instable (sténose < 60%) est une occlusion brutale de vaisseau non collatéralisé. Le risque de complications ; la rupture pariétale et la CIV sont caractéristiques de lésions touchant une artère terminale non collatéralisée. L’insuffisance mitrale ; la survenue d’une IM majeure (degré III-IV) sur ischémie pariétale quadruple le risque d’insuffisance congestive et double la mortalité. Laissé à son évolution spontanée, un infarctus avec surélévation du segment ST a une mortalité de 30%, dans la moitié des cas pendant les premières heures par fibrillation ventriculaire ; cette mortalité tombe à 5% lorsque le malade est pris en charge agressivement [5]. Lors de la stabilisation et de la cicatrisation, le ventricule change de forme, de taille et d'épaisseur: c'est le remodelage. L'amincissement de la zone infarcie (< 0.6 cm d’épaisseur) entraîne une dyskinésie importante, qui réduit d'autant le volume éjecté. La dilatation du VG est une réponse physiologique à cette perte dans le but de maintenir la performance systolique, mais elle désavantage le ventricule à long terme car sa tension de paroi s’élève, et elle augmente le risque d'arythmies. Le degré d'augmentation du volume télésystolique est un excellent prédicteur de la mortalité post-infarctus. Les modifications géométriques des piliers peuvent donner naissance à une insuffisance mitrale (voir ETO des complications ischémiques, Figures 9.13 et 9.14, pages 44 et 45). Infarctus myocardique L’infarctus est une nécrose tissulaire qui survient après 20 minutes d’occlusion coronarienne totale. En présence de collatérales, ce délai est repoussé à 4-6 heures. Le phénomène est accéléré si la mVO2 est élevée ou la PA systémique basse. Les altérations de la cinétique segmentaire sont fonction de l’épaisseur de paroi touchée : ≥ 20% provoque une hypokinésie et ≥ 40% une akinésie. La FE baisse si ≥ 15% de la masse du VG est infarcie. En phase aiguë, la zone bordante (pénombre) élargit la taille de l’hypo/akinésie mais est potentiellement récupérable. On distingue 2 types d'infarctus selon la présence ou non d'une onde Q à l'ECG et selon l'étiologie relevant d’une plaque stable (déséquilibre DO2/mVO2) ou d’une plaque instable (thrombose). - En clinique cardiologique: 2/3 des infarctus sont dus à une rupture de plaque instable (sus-décalage ST > 1 mm, infarctus STEMI, présence d’onde Q) ; - En postopératoire: 50-60% sont dus à un déséquilibre DO2/mVO2 (sous-décalage ST > 2 mm, infarctus non-STEMI). Infarctus postopératoire en chirurgie non-cardiaque Ischémie myocardique Le taux d'ischémie et d'infarctus est plus faible en peropératoire qu’en-dehors de la salle d’opération (voir Figure 3.10) [191]. En effet, le malade analgésié, endormi et minutieusement monitorisé est dans une situation privilégiée. Dans le postopératoire, au contraire, il court quatre fois plus de risque Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 14 ischémique à cause du réveil, de la douleur, du stress et du relâchement de la surveillance [219]. Alors que les épisodes ischémiques peropératoires n’ont que peu de lien avec l’incidence de l’infarctus postopératoire, les évènements ischémiques postopératoires, eux, sont directement reliés à la survenue d’infarctus [193,218]. L'ischémie survient le plus souvent dans la période postopératoire immédiate (24-48 premières heures), qui est un moment de fort déséquilibre hémodynamique. Elle est silencieuse dans 90% des cas et ne se manifeste que par un sous- ou un sus-décalage (> 1 mm) prolongé du segment ST ou par un bloc de branche gauche, pour autant que le malade soit sous surveillance ECG constante. Elle est très souvent précédée ou accompagnée d’une période de tachycardie, qui débute dès les premières heures postopératoires [194]. Actuellement, ce sont les troponines qui sont considérées comme l’étalon-or pour la surveillance de l’ischémie postopératoire. En effet, leur élévation au-dessus du 99ème percentile de la valeur normale offre la meilleure corrélation avec la mortalité à 30 jours : l’odds ratio (OR) varie de 3.4 à 6.7 selon les études, bien que 80% des patients soient asymptomatiques [43a,92a,351a]. Plus leur taux est élevé, plus le risque est grand : OR 2.2 pour 0.02 mcg/L, OR 5.4 pour 0.03-0.3 mcg/L et OR 10.7 pour > 0.3 mcg/L [31a,92a]. La présence d’une souffrance myocardique caractérisée par un relargage de troponines sans signes ECG ni symptômes cliniques a la même valeur prédictive de mortalité qu’un infarctus ; après chirurgie non-cardiaque intermédiaire ou majeure > 45 ans, elle est aussi fréquente que la sepsis et l’embolie pulmonaire (8% des cas) [43a]. Comme le délai entre le pic de troponine et le décès varie de 9 [92a] à 12 jours [351a], on dispose largement du temps nécessaire pour prendre en charge le patient dans le cadre d’un infarctus aigu et avoir ainsi un impact thérapeutique majeur (voir Traitement de l’ischémie aiguë, page 49). Infarctus L’incidence d’infarctus myocardique dans la période périopératoire est de 1.4% dans la population générale, toutes interventions confondues ; elle s'élève à 3.9% dans les populations à risque [14,200,218]. La période postopératoire est particulièrement dangereuse pendant plusieurs jours à cause de la vulnérabilité du patient à trois phénomènes [252] : Syndrome inflammatoire systémique (acute phase reaction) : • Elévation de tous les marqueurs inflammatoires, activation leucocytaire ; • Activation généralisée de l’inflammation dans les plaques instables ; • Hypercoagulabilité : augmentation du nombre et de l’adhésivité des plaquettes, élévation du taux de fibrinogène, de facteur VIII et de von Willebrand, chute de la fibrinolyse. Augmentation de la demande en O2 (mVO2 ) : • Stimulation sympathique : hypertension artérielle, tachycardie et augmentation de la contractilité ; • Douleur, stress, hypothermie (les frissons augmentent la VO2 jusqu’à 4 fois) ; • Dans les coronaires : vasoconstriction épicardique, sécrétion locale d’endothéline, augmentation des forces de cisaillement sur les plaques instables. Baisse de l’apport d’O2 (DO2) : • Hypotension et hypovolémie ; • Anémie aiguë ; • Diminution des échanges gazeux (atélectasie, hypoventilation) ; • Augmentation de la viscosité (déshydratation). L’infarctus postopératoire est silencieux dans la majorité des cas [14,193] : l'angor n'est présent que chez 14% des patients, et des symptômes cliniques n'apparaissent que dans 53% des cas [218]. Sa mortalité de 10-20% est plus élevée que celle de l'infarctus qui survient en dehors d'un contexte chirurgical (5%). Après un acte de chirurgie générale, on rencontre les deux types d’infarctus mentionnés précédemment ; ils surviennent préférentiellement pendant les premières 24 à 96 heures. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 15 Infarctus sur sténose serrée et déséquilibre DO2/VO2 : ≥ 60% des accidents coronariens sont précédés de longs épisodes de tachycardie et de sous-décalage du segment ST (non-STEMI) [193,194] ; la durée de ce sous-décalage est directement associée à la valeur du pic de troponine enregistré ultérieurement [288]. L’ascension des troponines est tardive, et l’accident survient en général au 3ème ou 4ème jour [195,201]. Le β-blocage est une prévention possible. Infarctus sur rupture de plaque instable : 45% des infarctus apparaîssent en-dehors des sténoses les plus serrées à la coronarographie [82]. Ce type d’infarctus survient plus tôt, en général dans les 36 premières heures, mais il peut apparaître n’importe quand dans les dix jours qui suivent l’intervention [201]. Il n’est pas précédé de modifications du segment ST et se caractérise par une surélévation ST (STEMI) ; l’élévation des troponines est brusque et précoce. La seule prévention efficace est les antiplaquettaires (aspirine, clopidogrel, prasugrel, ticagrelor) et les statines [67]. Le traitement est une revascularisation d’urgence. Une étude de l'évolution postopératoire des taux de troponine I (cTnI) après chirurgie de l'aorte abdominale montre que le 14% des patients présente une élévation de la cTnI [201]. Chez 9%, cette élévation est inférieure au seuil fixé à 1.5 ng/L; il s'agit de lésion myocardique sans infarcissement (mortalité 7%). Chez 5%, le seuil de 1.5 ng/L est franchi, traduisant la présence d'un infarctus. Dans ce dernier cas, les malades se répartissent en deux catégories selon la période à laquelle apparaît le pic de cTnI (Figure 9.5): Taux d’infarctus ou d'ischémie Rupture de plaque Ischémie de stress Ischémie due au stress Taux de troponine 50% 75% 100% Mortalité d'infarctus lié aux ruptures de plaques Mortalité d'infarctus lié au stress 0 1 2 3 4 Jours postop Figure 9.5 : Représentation schématique de l'incidence d'ischémie, du taux de troponine, et de la mortalité de l'infarctus dans la période postopératoire précoce. On distingue deux types d'infarctus: infarctus non-Q lié à l'ischémie sur une sténose coronarienne serrée (trait plein), et infarctus avec onde Q dû à une rupture de plaque sur une sténose non significative (traitillé). L'infarctus lié à une ischémie de stress prolongée culmine entre vers le 3ème jour après l'intervention, alors que le deuxième est plus précoce [201]. La cartouche illustre l'incidence des deux types d'infarctus selon le degré de sténose coronarienne à l'angiographie: l'infarctus lié à une rupture de plaque est le plus fréquent dans les sténoses angiographiquement non significatives (50%), alors que l'infarctus lié à l'ischémie est d'autant plus courant que la sténose est plus serrée [191]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 16 Pic à 37 heures chez 2% ; mortalité 24% ; Pic à 74 heures chez 3% ; mortalité 21%. Le premier pic, très soudain, traduit probablement des infarctus liés à des ruptures de plaques instables. Le second pic survient après une période d'élévation constante de la troponine I traduisant une ischémie persistante, de même niveau que celle des lésions cellulaires sans infarctus. Dans ce cas, l’infarctus est probablement secondaire à une ischémie sur déséquilibre DO2/VO2. Le contrôle de la fréquence cardiaque est un élément capital dans la prévention de cet accident, d'où l'efficacité du bétablocage prophylactique. La dichotomie en deux types séparés d’infarctus est une simplification méthodologique pratique, mais probablement trop grossière. L’infarctus postopératoire est la manifestation ultime d’une longue cascade d’évènements multiples et interdépendants, qui interagissent entre eux de manière dynamique et imprédictible (voir Figure 5.131). Le nombre et la variété des mécanismes en jeu expliquent l’aspect aléatoire du phénomène et le peu d’impact de la revascularisation préopératoire sur le devenir des patients en chirurgie non-cardiaque. Ces données justifient la tendance actuelle de préférer une cardioprotection pharmacologique maximale (béta-bloqueurs, antiplaquettaires, statines, préconditionnement, anesthésie combinée) et le strict contrôle hémodynamique peropératoire (fréquence ≤ 65 batt/min, PAM ≥ 80 mmHg) à une série d’investigations préopératoires. Infarctus postopératoire en chirurgie non-cardiaque En chirurgie non-cardiaque, le taux d'infarctus postopératoire chez les coronariens stables varie de 16% selon le type de chirurgie (mortalité moyenne: 7-20%); en cas de syndrome coronarien instable, il varie de 15% à 35% (mortalité moyenne: 20%). Les épisodes ischémiques postopératoires, non peropératoires, sont liés à l'incidence d'infarctus. L'infarctus postopératoire est en général silencieux. Ses pics d'incidence sont à 24-36 heures (infarctus sur plaque instable) et à 72 heures (infarctus sur déséquilibre DO2/VO2, plus fréquent et en général précédé de longs épisodes de tachycardie). La meilleure protection contre l'infarctus périopératoire est une cardioprotection pharmacologique maximale (béta-bloqueurs, antiplaquettaires, statines, préconditionnement, anesthésie combinée) et un strict contrôle hémodynamique peropératoire (fréquence ≤ 65 batt/min, PAM ≥ 80 mmHg). Infarctus postopératoire en chirurgie cardiaque L’état clinique préopératoire est le premier facteur de risque de complications postopératoires en chirurgie de revascularisation coronarienne (PAC : pontage aorto-coronarien). Les différents indices de risque en usage (voir Chapitre 03, Facteurs de risque) démontrent une aggravation du pronostic avec différents éléments (par ordre de gravité décroissant) [254] : Choc cardiogène ou dysfonction ventriculaire (FE < 0.35) ; Ischémie aiguë ou infarctus préopératoires, angor instable ; Lésions du tronc commun ou de l’IVA proximale ; Opération en urgence ou réopération ; Comorbidités : insuffisance rénale, diabète ; Maladie artérielle polyvasculaire ; Age > 70 ans ; Sexe féminin. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 17 Le taux d’infarctus postopératoire après PAC varie de 0.1% à > 10% selon les études, avec une moyenne de 2.4% [255] à 3.42% (Society of Thoracic Surgery Database, 2001). Contrairement à la chirurgie non-cardiaque, la présence d’épisodes d’ischémie peropératoire, notamment avant la CEC, est un facteur de risque d’infarctus postopératoire ; ces épisodes sont souvent associés à une tachycardie. La persistance d’anomalies de la contraction segmentaire (ACS) du VG après la CEC est un facteur de mauvais pronostic, directement lié l’incidence d’infarctus postopératoire. Dans une étude sur les revascularisations à cœur battant, 71% des complications cardiaques postopératoires se retrouvent chez les patients qui n'ont pas récupéré de leur ACS en peropératoire, mais aucune complication n'est enregistrée chez ceux qui ont une contractilité segmentaire normale en fin d'intervention [240]. Le mode de définition de l’infarctus postopératoire est un problème majeur : l’incidence d’infarctus peut varier de 2.8% sur la base de l’ECG à 31% avec le scan au technetium [69]. La présence d’une onde Q ou d’une élévation des CK-MB de plus de cinq fois traduisent des lésions transmurales importantes, mais de petites zones sous-endocardiques peuvent échapper à la détection. Les troponines sont un indice plus fiable. Bien qu’elles ne permettent pas de faire la différence entre une ischémie et les dégâts de l’intervention chirurgicale elle-même, les troponines sont un indicateur assez spécifique d’infarctus en chirurgie cardiaque [63,340]. Un taux postopératoire de troponine T supérieur à 1.5 mcg/L est un prédicteur efficace de la mortalité à 6 mois [110]. Malheureusement, leur évolution dans le temps (pic à 12-24 heures) impose un certain délai diagnostique. La myoglobine est un marqueur plus précoce (1-3 heures après la lésion, pic à 6-12 heures), mais son élévation immédiate est peu spécifique après une opération; la persistence d’un taux élevé à 24 heures est un meilleur indice [182]. La retransfusion de sang médiastinal complique le diagnostic biologique de l’infarctus, car cette autotransfusion augmente artificiellement le taux des marqueurs habituels [355]. Infarctus postopératoire en chirurgie cardiaque En chirurgie cardiaque, le taux d’infarctus postopératoire après PAC varie en moyenne de 2 à 4%. Les épisodes d'ischémie peropératoires et la persistence d'altérations de la cinétique segmentaire après revascularisation sont des marqueurs d'une augmentation du risque d'infarctus postopératoire. Le diagnostic est posé sur les modifications de l’ECG et l’élévation des troponines (pic à 12 heures). Hibernation et lésions de reperfusion Deux phénomènes particuliers sont liés à l'ischémie, l'hibernation et le préconditionnement (voir Préconditionnement, page 21). Quatre autres processus sont liés à la reperfusion myocardique : les lésions de reperfusion irréversibles, la sidération, la non-reperfusion et les arythmies. Hibernation Entre l'ischémie aiguë sans traduction hémodynamique et la nécrose tissulaire de l'infarctus, il existe tout un éventail dans l'intensité et la durée de la dysfonction ventriculaire. Le myocarde hibernant est du tissu viable mais ischémié de manière continue et chronique, qui présente une dysfonction contractile grave et prolongée, sans signes de nécrose, pouvant s'étendre à tout le ventricule. Cette situation, liée à une hypoperfusion, est un mode d'auto-préservation, rapidement réversible en cas de reperfusion (Figure 9.6A) [47]. Le bas débit coronaire suffit à maintenir la viabilité métabolique, mais non la contractilité; le taux d'ATP est normal mais la densité des récepteurs β est diminuée [313]. La fonction peut être stimulée par des agents ionotropes, mais cette stimulation est potentiellement délétère, car l'hibernation est une forme d'autoprotection myocardique [105]. Une revascularisation Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 18 myocardique peut restaurer la fonction en l’espace de quelques heures à quelques jours [145]. Malgré la mauvaise fonction préopératoire, le pronostic est excellent si la viabilité du myocarde a pu être démontrée par les tests préopératoires (échocardiographie de stress à la dobutamine, IRM avec contraste, etc) [119]. L'examen échographique d'un coeur souffrant d'un infarctus frais laisse voir une zone dysfonctionnelle plus étendue que ne le sera la lésion cicatricielle ultérieure. C'est la zone bordante : la périphérie de la région ischémiée souffre d'une hypocontractilité associée à l'hypoperfusion, qui est une forme d’hibernation. Ce phénomène est réversible lors du rétablissement de la perfusion, alors que la partie centrale nécrosée ne peut plus récupérer. Valeur normale (%) Figure 9.6 : Hibernation sidération. et A: hibernation; la fonction segmentaire suit la même évolution que la perfusion régionale. B : sidération ; la fonction, effondrée durant la période ischémique, ne remonte que lentement après le rétablissement de la perfusion. 100 A Reperfusion Ischémie progressive Temps Fonction segmentaire Valeur normale (%) Flux régional 100 B Temps Ischémie Reperfusion © Chassot 2012 Lésions de reperfusion La reperfusion d’un tissu myocardique ischémié génère des lésions supplémentaires qui s’ajoutent à celles induites par l’interruption circulatoire, et met en route une cascade de phénomènes pouvant aboutir à des lésions cellulaires irréversibles [125,368]. Alors que la cellule ischémique s’était placée sur un mode de survie en anaérobiose, la reperfusion amène soudain un excès d’oxygène aux mitochondries. Il s’ensuit une libération importante de ROS (Reactive oxygen species, radicaux libres) dans le cytoplasme cellulaire et une réduction massive de la production de NO. L’ouverture des canaux mitochondriaux MTPT (mitochondrial permeability transition pore) laisse fuir dans le cytoplasme des agents oxydants et découple la phosphorylation oxydative source d’ATP (voir Figure 5.7). L’augmentation brusque du Ca2+ intracellulaire est lié au dysfonctionnement du réticulum sarcoplasmique ; elle engendre une hypercontracture des myocytes qui peut aller jusqu’au stone heart. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 19 L’activation des neutrophiles déclenche une cascade inflammatoire locale et une libération accrue de ROS. La vasodilatation massive de la zone ischémiée, qui abolit l’autorégulation, est responsable d’une flux sanguin excessif malgré une pression de perfusion normale, et d’un risque d’œdème et/ou de surpression à l’intérieur de l’organe au moment de la reperfusion. Bien que certaines substances utilisées dans des préparations animales (nicorandil, cyclosporine A, magnésium, méthylprednisolone, atorvastatine, anticalciques, etc) puissent atténuer les lésions de reperfusion, aucune étude clinique n’a mis en évidence un effet cardioprotecteur significatif [368]. Sidération (Stunning) Ce phénomène consiste en une persistance de la dysfonction ventriculaire après revascularisation, alors que l'angor, le segment ST et la perfusion ont récupéré. Malgré le rétablissement de la perfusion coronarienne, la récupération n’est pas immédiate comme dans l'hibernation, et la fonction contractile reste altérée pendant une période allant de quelques heures à plusieurs jours (Figure 9.6B) [44]. Cette lésion fonctionnelle survient à des degrés divers après angioplastie ou après pontage aorto-coronarien. Le myocarde lésé est caractérisé par des lésions ultrastructurales et électrophysiologiques sans nécrose, et par une perte de l'autorégulation coronarienne qui y rend le flux pression-dépendant. Il est "intoxiqué" par des radicaux libres (peroxydes) et par une augmentation du Ca2+ sarcoplasmique [119,374]. Bien que les réserves en ATP soient conservées, le couplage excitation-contraction est défaillant. La dysfonction est systolique et diastolique. Le myocarde sidéré reste stimulable par des agents catécholaminergiques. Non-reperfusion (No-reflow) Malgré la restauration d’un flux épicardique normal, le flux intramyocardique reste souvent compromis ou absent : c’est le phénomène du No-reflow, qui augmente la taille de l’infarctus, la mortalité et les complications (arythmies, insuffisance ventriculaire). On estime que la reperfusion n’est parfaitement rétablie que dans 35% des cas d’angioplastie ou de revascularisation chirurgicale [257]. Les causes de la non-reperfusion sont multiples, mais les possibilités thérapeutiques très limitées [282]. Embolisation distale d’athéromes, de thrombus et d’amas plaquettaires ; de nouveaux cathéters permettent d’aspirer les débris lors d’angioplastie. Lésions ischémiques ; traitements possibles : diminuer le délai de revascularisation, bétabloqueur, IEC, bloqueurs de l’angiotensine II. Lésions de reperfusion ; possibilités thérapeutiques : anti-plaquettaire anti-GP IIb/IIIa (abciximab), anti-endothéline E1 (bosentan), anti-thrombexane A2 (aspirine), postconditionnement (nicorandil, adénosine, cyclosporine ; voir Préconditionnement). Conditions métaboliques : hyperglycémie, hypercholestérolémie ; traitement : insuline, statines. Les arythmies Les déséquilibres électro-chimiques liés à la reperfusion peuvent entraîner le dysfonctionnement électrique de certaines cellules et occasionner des arythmies ventriculaires malignes réfractaires aux thérapeutiques habituelles. Toutefois, ces arythmies sont en général réversibles si l’on parvient à maintenir la perfusion myocardique pendant quelques heures. Leur prise en charge demande beaucoup de persévérance : certains patients sont sortis de l’hôpital en rythme sinusal après avoir été défibrillés une cinquantaine de fois pendant les premières heures post-CEC. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 20 Ischémie et reperfusion Hibernation: forme d'autoprotection dans laquelle le myocarde ischémié devient hypocontractile pour adapter sa mVO2 au faible DO2. L'étendue est variable, mais il n'y a pas de nécrose. La fonction de ce myocarde est stimulable par des catécholamines; elle est récupérable en cas de revascularisation (en quelques heures à quelques jours). Lésions de reperfusion: l’apport massif d’O2 libère des superoxydes et des radicaux libres toxiques pour la cellule et s’accompagne d’une hypercalcémie sarcoplasmique. Bien que la pression soit normale, le flux sanguin est excessif par rapport à la vasodilatation maximale des zones ischémiées. Des arythmies ventriculaires malignes sont fréquentes, mais potentiellement réversibles. Sidération: persistance de la dysfonction myocardique après revascularisation alors que la perfusion est récupérée; la durée est de quelques heures à plusieurs jours; la fonction est stimulable par des catécholamines. Non-reperfusion: absence de flux distal intra-myocardique alors que le flux épicardique est rétabli. Préconditionnement Le phénomène de préconditionnement a laissé entrevoir de nouvelles perspectives pour protéger le myocarde contre l'ischémie, mais ces promesses n’ont pas toujours été tenues. Le préconditionnement consiste en une amélioration de la tolérance à l'ischémie par de brefs épisodes d'occlusion du flux (entre 1 et 5 minutes) suivis de périodes de reperfusion (de 1 à 30 minutes) ; la durée de la protection pour une ischémie ultérieure est de 1 à 2 heures [248]. Expérimentalement, cette technique permet de réduire la taille de l'infarctus de 50-80%. Il existe plusieurs formes de préconditionnement. Préconditionnement ischémique par occlusion itérative de la coronaire (par exemple par le ballon d’angioplastie). Préconditionnement pharmacologique : il s’est avéré que certaines substances comme les gaz halogénés, le nicorandil ou la cyclosporine A ont des effets protecteurs similaires lorsqu’elles sont administrées avant l’épisode ischémique. Postconditionnement : les occlusions itératives ou les halogénés sont également efficaces lorsqu’ils sont administrés après l’épisode ischémique, pendant la période de reperfusion. Préconditionnement à distance : l’occlusion artérielle itérative d’un membre par une manchette à pression induit une protection contre l’ischémie ultérieure d’autres organes. Aspects physiopathologiques De multiples études expérimentales menées chez de nombreuses espèces de mammifères ont démontré une meilleure récupération fonctionnelle après une période d’ischémie ou une diminution de la taille de l’infarctus après ligature coronaire, lorsque l’ischémie est précédée de clampages itératifs de courte durée ou lorsque les animaux testés sont endormis sous halogénés [59,268]. L’halothane, l’isoflurane, le desflurane et le sevoflurane ont tous un effet maximal s'ils sont administrés avant la période d'ischémie et pendant la reperfusion immédiate du myocarde [86]. Cet effet protecteur a été décrit avec quatre catégories d’agents anesthésiques : les halogénés, les opiacés, le xénon et l’hélium [125]. Le préconditionnement par les halogénés est lié à plusieurs mécanismes cellulaires partiellement élucidés, mais qui convergent vers deux phénomènes principaux (voir Figure 5.129) [86,283, 334,373]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 21 L’ouverture des canaux potassiques dépendants de l’ATP (KATP) situés sur les membranes des mitochondries et sur celles de la cellule ; cette ouverture déclenche un courant potassique repolarisant vers l’intérieur de la cellule ; celui-ci conduit à une diminution de la charge en calcium ionisé (Ca2+) du cytoplasme cellulaire et du cytosol des mitochondries (d’où préservation du fonctionnement mitochondrial). La fermeture des canaux de perméabilité des mitochondries (MPTP : mitochondrial permeability transition pore) ; ceux-ci relâchent des radicaux libres toxiques (ROS : reactive oxygen species) au sein de la cellule lors de l’ischémie et de la reperfusion ; les ROS provoquent une peroxydation des lipides et des lipoprotéines. L’ouverture des canaux MPTP modifie également le fonctionnement mitochondrial (effacement des cristae, déplétion en ATP). La protection contre les effets de l'ischémie est attribuée à l'effet de sommation de la baisse du Ca2+ mitochondrial, de la régulation des ROS, de la préservation de la fonction mitochondriale, de la conservation des réserves énergétiques et de l'interférence avec les mécanisme apoptotiques. Ces phénomènes correspondent à la phase précoce de la cardioprotection, dont la durée est limitée à 1-2 heures. Il existe une deuxième phase, tardive, qui survient à 24 heures et dure jusqu'à 3 jours; elle offre moins de protection, et dépend d'un effet sur la transcription des gènes au niveau du noyau cellulaire, qui induit une synthèse de protéines à capacité cytoprotectrice ayant la propriété de moduler l'activation de l'apoptose [86]. Le post-conditionnement, qui permet également d'améliorer la tolérance myocardique à l’ischémie, est basé sur les mêmes mécanismes d’ouverture des canaux KATP et de fermeture des pores MPTP, auxquels s’ajoutent un blocage de la contracture post-ischémique (baisse du Ca2+ intracytoplasmique) et l’activation de kinases anti-apoptose [84,125]. Pour être efficace, l’agent doit être présent dans les secondes qui suivent la reperfusion. D’autres substances ont le même effet : facilitateurs des canaux KATP (nicorandil, adénosine), bloqueur des canaux MPTP (cyclosporine A). Certains facteurs et certaines substances interfèrent avec les mécanismes du préconditionnement. L’hyperglycémie abolit l’effet protecteur du préconditionnement, probablement par une inhibition des canaux KATP [172] ; L’effet bénéfique des halogénés disparaît avec l’âge, bien que le myocarde sénescent soit particulièrement sensible à l’ischémie [40] ; Le myocarde en insuffisance ventriculaire ou profondément remodelé par l’hypertrophie ne semble plus réceptif aux effets protecteurs des halogénés [334] ; Le thiopental et la kétamine bloquent le préconditionnement [247,373] ; Les inhibiteurs COX-2, les sulfonylurées, les béta-bloqueurs et l’aprotinine interfèrent avec le fonctionnement des canaux KATP et freinent le précondionnement [121,125,197]. Aspects cliniques Certains malades décrivent de l'angor au début de l'effort (angor d'échauffement), alors que les efforts subséquents sont asymptomatiques ; il s'agit d'une forme de préconditionnement ischémique spontané. En peropératoire, l'effet de préconditionnement maximal est obtenu en utilisant l’isoflurane, le desflurane ou le sevoflurane (1-1.5 MAC) en continu avant, pendant et après la CEC pour bénéficier de l’effet additif du pré- et du post-conditionnement [87,196]. Le résultat est une meilleure récupération de la fonction myocardique, une diminution des lésions ischémiques, et un abaissement des marqueurs de lésions cellulaires (troponine T ou I, CK-MB) ou de réaction inflammatoire (TNFa) [85,103,168,344]. Cette cardioprotection est également observée dans la chirurgie à coeur battant [74,142]. Toutefois, la plupart des méta-analyses souligne que ces bénéfices cellulaires n’ont pas de traduction sur la morbidité ni la mortalité des patients [34,332,369] ; une seule tend à démontrer que le sevoflurane et le desflurane, qui paraissent les agents les plus efficaces, réduisent les risques Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 22 d’infarctus (OR 0.51) et de décès (OR 0.31) postopératoires par rapport aux agents intraveineux [196]. La tendance du préconditionnement à baisser la morbi-mortalité en chirurgie de revascularisation coronarienne n’est donc pas bien établie [276], même si une étude longitudinale multicentrique dont la portée est assez faible montre une diminution de mortalité à 1 mois [33], et si deux études randomisées sur de petits collectifs montrent une réduction des infarctus [130] et de la mortalité [88] à 1 an. Le précontionnement à distance (Remote ischemic preconditioning) consiste à induire des ischémies dans une masse musculaire squelettique en vue d’augmenter la résistance d’un autre organe par voie neurogène ou humorale. Quelques études cliniques démontrent un bénéfice avec cette technique simple, inoffensive et peu coûteuse. Le gonflement d’une manchette à pression au bras gauche avant la CEC (3-4 épisodes itératifs de 5 minutes à 200 mmHg) diminue le taux de troponin I postopératoire de 17% ainsi que les complications cardiaques (HR 0.35) et la mortalité (HR 0.27) [338]. Cet effet est présent lorsque l’anesthésie est conduite sous halogéné (isoflurane) mais il est absent sous annesthésie intraveineuse au propofol [187]. Plusieurs grands essais cliniques randomisés sont en cours (ERICCA, RIPHeart, NATS), dans le but de juger l’impact réel de ce processus à large échelle. Alors que le préconditionnement n’est praticable que lorsque l’ischémie est programmée au cours d’une intervention, le postconditionnement présente l’intérêt d’agir au cours de la revascularisation qui suit un infarctus, par nature imprévisible : il est facile de procéder à des gonflements répétés du ballon d’angioplastie une fois la coronaire reperméabilisée. Certaines études ont montré une réduction de la taille des lésions en cas de STEMI [339,366], mais les résultats sont pour l’instant plutôt inconsistants, voire négatifs [146]. Si l’effet bénéfique des halogénés paraît bien exister en chirurgie cardiaque, il n’en est pas de même en chirurgie générale. Seuls des cas de chirurgie vasculaire semblent tirer avantage des volatils par rapport aux agents intraveineux, sous forme d’une diminution des troponines postopératoires [372]. Le sevoflurane ayant également un effet protecteur sur la fonction rénale [168], on a cherché s’il existe un préconditionnement pour d’autres organes. On a effectivement pu démontrer un effet analogue sur le foie, le cerveau et le poumon, mais les recherches sont moins avancées que sur le coeur. Les opiacés stimulant les récepteurs δ ont probablement un effet de préconditionnement [319]. La morphine, par exemple, potentialise l'effet de l'isoflurane [213]. Aux doses utilisées en clinique, aucun des agents intraveineux (barbituré, etomidate, midazolam) n’a un effet comparable. Les barbiturés et la kétamine ont même un effet antagoniste [247,373]. Le propofol possède certaines propriétés cardioprotectrices apparemment différentes de celles des halogénés, ce qui complique singulièrement les comparaisons entre anesthésie sous agents volatils et anesthésie intraveineuse [161]. Parmi les substances de la pharmacopée cardiologique, le nicorandil (Dancor) s'est avéré avoir un effet protecteur lors d'angioplastie [169] ; cette substance augmente la perméabilité des canaux potassiques KATP. Par contre, d'autres substances ont un effet freinateur sur le préconditionnement ; en clinique, elles auront tendance à aggraver les lésions ischémiques. Il s'agit de l’aprotinine, des inhibiteurs COX-2 sélectifs, et des anti-diabétiques oraux (sulfonylurées, glitazones) qui inhibent les canaux potassiques [121,334]. Ces deux dernières catégories de substances, déjà responsables d’une augmentation de mortalité en chirurgie cardiovasculaire, doivent donc être stoppées plusieurs jours avant l'opération chez les ischémiques ; dans le cas du diabète, les sulfonylurées sont remplacées momentanément par de l'insuline. Conclusion Les données liées au préconditionnement sont assez touffues et semblent manquer de cohérence, car les résultats dépendent d’une multitude de facteurs qui rendent les études mal comparables : population de malades, localisation et collatéralisation des lésions myocardiques, mode d’administration de l’halogéné, technique d’anesthésie, contrôle hémodynamique, qualité de la cardioplégie, technique chirurgicale, autres agents à effet protecteur, etc [268]. La majorité des études Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 23 montre une nette diminution de la souffrance ischémique myocardique. Toutefois, l’impact clinique de ce bénéfice n’est pas encore formellement prouvé. On est dans une situation identique à celle du pari de Pascal (Blaise Pascal, 1623-1662) : si la protection myocardique offerte par les halogénés est significative, on en bénéficie en les utilisant comme agents pour assurer l’anesthésie, et si elle ne l’est pas, on ne perd rien à utiliser ces substances plutôt que des agents intraveineux. Même si les évidences cliniques et expérimentales parlent essentiellement pour une amélioration de la reprise fonctionnelle immédiate et pour une diminution des lésions ischémiques cellulaires sans preuve manifeste d’un impact à long terme sur la morbi-nortalité, il est justifié de préférer un halogéné comme agent d'anesthésie pour la chirurgie de revascularisation coronarienne car le patient a tout à y gagner [155]. Bien que les données prouvant un impact en chirurgie non-cardiaque soient insignifiantes, il n’est pas interdit d’extrapoler les résultats obtenus en chirurgie cardiaque à la chirurgie générale vu les bénéfices potentiels. En l'état actuel de nos connaissances, on peut donc soutenir que le maintien de l’anesthésie par des halogénés chez le coronarien présente probablement des avantages supérieurs à ses risques, particulièrement en chirurgie de revascularisation et dans certaines catégories de patients [31]. Préconditionnement Le préconditionnement est une amélioration de la tolérance à l'ischémie par de brefs épisodes d'occlusion du flux suivis de périodes de reperfusion. Un effet protecteur identique est possible avec 4 agents anesthésiques (halogénés, opiacés, xénon, hélium) et certaines substances (nicorandil, cyclosporine); seuls les halogénés ont une activité clinique prouvée. Certaines substances inhibent le préconditionnement: anti-COX2, sulfonylurée, thiopental, kétamine, aprotinine, béta-bloqueurs. Postconditionnement: protection anti-ischémique lorsque l'agent n'est administré qu'à la reperfusion. Préconditionnement à distance: épisodes itératifs d’ischémie musculaire (manchette à pression sur un membre) qui diminuent les effets d’une ischémie ultérieure sur d’autres organes. En chirurgie de revascularisation coronarienne, les halogénés améliorent la récupération de la fonction myocardique, minimisent les lésions tissulaires et diminuent peut-être le risque d'infarctus; l'effet est maximal si l'halogéné est utilisé tout au long de l'opération, y compris en CEC. La morbidité et la mortalité pourraient être diminuées. Conclusion clinique: chez le coronarien, le maintien de l’anesthésie par des halogénés présente probablement des avantages de protection myocardique par rapport aux agents intraveineux. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 24 Syndrome clinique Manifestations cliniques et syndrome coronarien aigu (SCA) L'angor est évidemment le symptôme-clef pour le diagnostic. Il est habituellement défini en quatre classes selon la classification de la Société Cardiovasculaire Canadienne [58] : Angor stade I : survient seulement à l'effort intense ou prolongé ; Angor stade II : survient à l'effort modéré (escaliers, marche rapide à la montée), au froid, après les repas, lors d'émotions intenses, ou au réveil ; Angor stade III : limitation marquée de l'activité physique normale ; l'angor survient à la marche simple ou à un étage d'escaliers à pas normal ; Angor stade IV : l'activité physique n'est plus possible ; l'angor survient au repos ; toute modification ou apparition récente de l'angor est considérée comme un stade IV. Cliniquement, on peut différencier trois types d'angor: Angor stable : inconfort rétrosternal précipité par l'effort et soulagé par le repos ou la nitroglycérine en moins de 15 minutes ; la douleur peut irradier dans l'épaule, la mâchoire, la face interne du bras, ou la région épigastrique. Angor instable : apparition récente d'un angor nouveau, augmentation d'intensité, de durée ou de fréquence d'un angor ancien, état réfractaire au traitement médical, angor de plus de 20 minutes avec modifications du segment ST et/ou de l'onde T. Angor de Prinzmetal : angor dû à un spasme coronarien survenant en général au repos, sans relation avec l'effort ou les émotions, et accompagné de surélévation du segment ST. Enfin, l'ischémie peut être silencieuse : des modification électriques surviennent en l'absence de toute symptomatologie. Fréquente dans les angor instables, elle est de mauvais pronostic. La dyspnée peut être un équivalent silencieux de l’angor. Syndrome coronarien aigu L’angor instable, l’infarctus sans surélévation du segment ST (N-STEMI) et l’infarctus avec surélévation du segment ST (STEMI) sont considérés comme les trois aspects cliniques du syndrome coronarien aigu (SCA). L’angor instable est classiquement défini par trois critères : angor de repos, apparition d’une symptomatologie angineuse nouvelle, ou intensification soudaine d’un angor préexistant [45]. Lors de SCA, l’analyse du segment ST est le pivot central de l’orientation diagnostique et thérapeutique (voir Figure 9.4, page 11). Un quart des patients présente une surélévation du segment ST signant un infarctus transmural avec onde Q (STEMI), et les trois quarts affichent un sousdécalage ST et souffrent d'angor instable. Certains d'entre eux développent un infarctus N-STEMI (élévation des troponines), en général de type non-Q [4,5]. C'est l'élévation du taux d'enzymes cellulaires (CK-MB, troponines I et T) qui certifie le diagnostic d'infarctus en cas de décalage du segment ST. Les risques et la mortalité augmentent significativement en présence de CK-MB et de troponines, et ce proportionnellement au niveau maximal de leur taux sérique [4]. Or, la mise au point de tests ultra-sensitifs pour la troponine I (0.002-0.01 ng/mL) a progressivement étendu le nombre de N-STEMI diagnostiqués et diminué l’incidence d’angor instable. De ce fait, la prise en charge clinique de type invasive propre au diagnostic d’infarctus s’est étendue à des malades qui étaient jusque là traités conservativement parce que souffrant d’angor instable, mais, ce faisant, a amélioré leur pronostic [46]. Il est donc probable que le diagnostic d’angor instable s’adresse à de moins en moins de malades au fur et à mesure que s’affinent les dosages des enzymes cardiaques traduisant une lésion cellulaire. Ceci remet en question le diagnostic même d’angor instable, qui ne tient peut-être qu’à la sensibilité des tests enzymatiques utilisés. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 25 Méthodes diagnostiques Modifications électriques Dans les secondes qui suivent une occlusion coronarienne, le potassium fuit par les canaux KATP et s'accumule dans le tissu interstitiel, d'où il n'est pas éliminé puisqu'il n'y a localement plus de flux sanguin. Le gradient transmembranaire de K+ diminue, et la zone se dépolarise. Le potentiel transmembranaire négatif de la diastole faiblit et la région devient plus positive que le voisinage; le courant s'établit de la zone ischémique vers les tissus normaux. Ce phénomène apparaît dès que le flux baisse de plus de 20% [267]. En systole, l'ischémie diminue l'amplitude du potentiel d'action et raccourcit sa durée, si bien que la zone ischémique est plus négative que l'entourage; le courant passe alors de la zone saine vers la zone ischémique; sur le tracé de surface, il apparaît une surélévation du segment ST (Figure 9.7). Lors d'ischémie sous-endocardique, ce courant s'éloigne des électrodes de surface, et donne lieu à une image de sous-décalage du segment ST. Le degré de modification ST considéré comme significatif varie selon les dérivations et les classes de patients, mais il doit être présent dans au moins 2 dérivations contiguës ; il se calcule au point J de l’ECG (voir Figure 6.2) [354]. Sus-décalage ST ≥ 0.2 mV (2 mm) en V2 et V3 ou ≥ 0.1 mV (1 mm) dans les autres dérivations (infarctus type STEMI) ; en V2-V3, le seuil est abaissé à 0.15 mV (1.5 mm) chez les femmes et surélevé à 0.25 mV (2.5 mm) chez les hommes < 40 ans ; Sous-décalage ST ≥ 0.05 mV (0.5 mm) en V2 et V3 ou ≥ 0.1 mV (1 mm) dans les autres dérivations (angor instable ou infarctus non-STEMI). Figure 9.7 : Modifications ischémiques du potentiel d'action et de l'ECG de surface. En cas d'ischémie (trait rouge), le potentiel de repos est moins négatif; la dépolarisation est moindre, et le retour au potentiel de repos est plus rapide. En diastole, la dépolarisation ischémique donne lieu à une valeur moins négative dans la zone ischémique (pointillé rouge et jaune); le courant d'action va alors de la zone ischémique vers les zones saines. En systole, la zone ischémique est plus négative que son entourage, et le courant d'action va des régions saines vers la zone ischémique, ce qui se traduit par une surélévation du segment ST (d'après réf 267 et 354). Normal Ischémie -70 -90 Diastole KATP ouverts Potentiel d'action -15 +5 ST ECG Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne Systole Courant d'action 26 L'importance et l'étendue de ces modifications sont proportionnelles à la masse tissulaire ischémiée. L'onde Q de nécrose apparaît 4 à 12 heures plus tard. Sa probabilité augmente avec la taille de l’infarctus et avec le nombre de segments transmuraux touchés. L'importance du décalage du segment ST et le nombre de dérivations concernées traduisent l'étendue de la masse ventriculaire ischémiée. La présence ou l'absence d'onde Q ne sont pas assez fiables pour déterminer à elles seules si l'infarctus est transmural ou sous-endocardique [5]. Ce dernier ne présente des modifications typiques (sous-décalage ST, inversion de l'onde T) que dans 50% des cas vérifiés à l'autopsie. L'infarctus sans sur-élévation ST est plus fréquent chez les personnes âgées. Comme l'ECG de repos est normal chez la moitié des patients ischémiques, il est habituel de le compléter par des tests plus pertinents (voir Investigations coronariennes, page 30). ECG de Holter sur 24-48 heures ; ECG d'effort ; Echocardiographie (voir Echocardiographie, page 35) ; Scintigraphie au thallium-dipyridamole ; Echocardiographie de stress à la dobutamine ; IRM et CT-scan ; Coronarographie. L'échocardiographie transthoracique met en évidence les altérations de la cinétique segmentaire, la fonction ventriculaire globale, le volume des cavités, et la présence d'éventuelles valvulopathies d'accompagnement. Le test actuellement considéré comme l'étalon-or est le PET-scan (Positron Emission Tomography), puisqu'il permet de différencier la viabilité du myocarde (le fluorodéoxyglucose est un traceur du métabolisme cellulaire) et les anomalies du flux coronaire (le rubidium met en évidence la perfusion locale). La technique demande une installation complexe et coûteuse ; elle est peu disponible et en passe d’être détrônée par l’IRM cardiovasculaire. Modifications biologiques Pour être spécifique, un marqueur de lésion myocardique doit être une molécule qui se trouve en haute concentration dans le cœur et en très faible concentration dans les autres organes [173]. Pour être sensible, il doit apparaître très tôt et en forte quantité dans le plasma, et sa valeur doit être proportionnelle à l’importance de la lésion myocardique. Plusieurs marqueurs sont utilisés en clinique (Figure 9.8) [198]. La myoglobine se trouve dans le cytoplasme des cellules musculaires et des myocytes ; dans ces deux localisations, la séquence des amino-acides est la même, donc l’origine est indissociable. L’ascension du taux de myoglobine est la première modification enregistrée lors de souffrance cellulaire myocardique ; elle survient 1-3 heures après la lésion (pic à 6-12 heures). Les créatine-kinases (CK) sont des enzymes répandus dans tous les tissus contractiles, qui agissent comme régulateurs de la production de phosphates à haute énergie. Les CK-MB, spécifiques pour le coeur, sont décelables dans les 4-6 heures après le début des symptômes (pic à 12-24 heures, disparition à 48-72 heures). La valeur maximale des CK-MB n’est pas corrélée à la taille de l’infarctus [133], mais leur élévation après angioplastie et chirurgie coronarienne a une valeur prédictive pour les complications cardiaques [50]. Les troponines (TnC, TnI et TnT) règlent la liaison Ca2+-dépendante de la tropomyosine avec l’actine et la myosine. La majeure partie du complexe des troponines est liée aux myofibrilles, mais une partie est libre dans le sarcoplasme ; c’est cette dernière qui est responsable du pic sérique précoce (4-6 heures après la lésion, pic à 12-24 heures) ; les lésions structurales de myofibrilles sont responsables des taux tardifs (6-10 jours) [63]. Les troponines sont le marqueur actuellement le plus spécifique de la nécrose myocardique (troponine I > 0.04 Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 27 mcg/L, troponine T > 0.1 mcg/L, sensibilité 100% à 12 heures). L’ascension des troponines est proportionnelle à l’importance du dommage myocardique, mais n’est pas spécifique de sa cause. Le développement de tests ultrasensibles (0.002-0.01 ng/mL) pousse à classer comme infarctus N-STEMI des cas qui étaient considérés comme angor instable avec les tests de routine [46]. Le BNP (Brain natriuretic peptide) est libéré par les cellules ventriculaires en fonction de leur étirement ; il provoque une natriurèse, une diurèse, une baisse de la rénine et une vasodilatation artérielle et veineuse. Il est un mécanisme de rétroaction contre la surcharge. Son taux circulant est un critère fiable d’insuffisance ventriculaire, mais il n’est pas un marqueur de la souffrance ischémique [173]. Taux plasmatiques Myoglobine Figure 9.8 : Variations de la biologie sérique après infarctus du myocarde. La myoglobine est un marqueur précoce (d’après réf 173). CK MB Troponine LDH 6 24 48 72 Heures Bien qu’elles ne permettent pas de faire la différence entre une ischémie et les dégâts de l’intervention chirurgicale elle-même, les troponines restent un bon indicateur d’infarctus en chirurgie cardiaque et non-cardiaque. Une élevation des troponines dans le postopératoire, même en dessous du niveau traduisant un infarctus, a une valeur prédictive positive de 80% pour une augmentation de la mortalité et de la morbidité postopératoires ; plus élevée est la valeur du pic, plus grande est la mortalité dans l'année qui suit [179,194,195,201]. Une simple élévation périopératoire des troponines sans angor ni modifications du segment ST double la mortalité à 4 ans [176]. Une variation du taux de CK-MB n'a pas autant de valeur prédictive. Diagnostic dans le postopératoire Dans le postopératoire, les critères diagnostiques pour un infarctus sont souvent difficiles à remplir, vu que l'ischémie est en général silencieuse, que l'absence d'onde Q est fréquente et que les enzymes sont modifiées par la lésion chirurgicale. Le rapport des CK-MB aux CK totales peut d'ailleurs sousestimer la lésion cardiaque vu l'élévation des CK suite à l'opération. Les critères actuellement recommandés suivent prioritairement l'évolution du taux de troponine. Le diagnostic d'infarctus est posé dans les cas suivants [340,354]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 28 Montée et descente typiques du taux de troponine avec un pic après l'acte chirurgical (en l'absence d'autre explication, telle une embolie pulmonaire), en combinaison avec l'un au moins des éléments suivants : • Douleurs ischémiques. • Apparition progressive d'onde Q (≥ 30 ms dans 2 dérivations ECG contiguës). • Modifications du segment ST (sus-décalage ≥ 1 mm, sous-décalage ≥ 1-2 mm) dans au moins 2 dérivations contiguës ; apparition d’un bloc de branche gauche. • Inversion symétrique de l'onde T (> 1 mm). • Nouvelles altérations de la cinétique segmentaire à l'échocardiographie (lésion impliquant > 20% de l'épaisseur de la paroi myocardique). Développement de nouvelles ondes Q à l'ECG, si les enzymes n'ont pas été enregistrés pendant l'évènement aigu. Intervention sur les coronaires (thrombolyse, dilatation, pose de stent, pontage aortocoronarien). Infarctus aigu ou cicatrisé à la pathologie. Alors que l’infarctus survenant en-dehors du contexte chirurgical est défini par la présence d’au moins une valeur de troponine au-delà du 99ème percentile de la limite de référence supérieure, le seuil diagnostique d’infarctus est déplacé à 5 fois cette valeur après pontages coronariens chirurgicaux [340]. Après pontage aorto-coronarien, la mortalité croît linéairement avec le taux d’enzymes postopératoires, aussi bien pour les CK-MB que pour les troponines. Le risque relatif de mortalité passe de 3% (CK-MB 5-10 fois la norme) à 8.7% (20-30 fois la norme) et à 27% (> 40 fois la norme) ; pour les troponines, le risque de mortalité est de 2% lorsqu’elles sont augmentée de 20 fois, de 3.6% lorsqu’elles sont augmentées de 40 à 90 fois et de 11% au-delà de 100 fois [94]. La traîtrise particulière de la situation postopératoire est l'aspect le plus souvent silencieux des épisodes ischémiques et des nécroses myocardiques. Evaluation de la viabilité myocardique Il est capital de déterminer si une zone myocardique est nécrosée et cicatricielle, auquel cas elle est irrécupérable, ou si elle souffre d’ischémie active mais est encore viable, situation où elle peut bénéficier d’une revascularisation rapide. Ce dilemme est particulièrement épineux lorsque le ventricule souffre de dysfonction sévère (FE < 0.35), parce qu’une revascularisation inutile est un risque sans bénéfice, alors qu’une revascularisation de myocarde viable améliore la fonction du VG et le pronostic du patient [3]. Sous-estimer la potentialité de récupération de segments myocardiques conduit à une revascularisation partielle, ce qui augmente les risques de complications cardiaques postopératoire (incidence 48%), alors qu’une revascularisation totale les diminue de presque 4 fois (incidence 14%) [353]. La récupération d’une hibernation est rapide, alors que celle de la sidération prend de 3 jours à quelques semaines. Plusieurs techniques d’imagerie permettent de définir le degré de viabilité du myocarde et sa potentialité à récupérer après revascularisation [54]. Le SPECT (single photon emission computed tomography au thallium 201 ou au technetium 99) et le PET (positron emission tomography au fluorodéoxyglucose) évaluent l’intégrité de la membrane cellulaire (201Tl et 99mTc) et le métabolisme myocardique (18F-FDG). L’échocardiographie de stress à la dobutamine ; une amélioration de la contraction sous dobutamine est un signe de viabilité. L’IRM avec injection de gadolinium ; ce dernier restant dans le liquide extracellulaire, il s’accumule dans les zones cicatricielles non viables. Le PET-scan a la plus haute sensibilité et la plus grande valeur prédictive négative (95%), mais l’écho de stress et l’IRM/gadolinium la plus haute spécificité et la meilleure valeur prédictive positive (80%) [54]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 29 Plus la dysfonction ventriculaire est sévère, plus le bénéfice à long terme de la revascularisation est grand, même si le risque opératoire immédiat augmente [3]. Lorsque la FE est abaissée, revasculariser rapidement les zones viables donne de meilleurs résultats que le traitement médical, malgré le risque lié à l’intervention. Toutefois, le degré de remodelage et de dilatation du VG impose une limite ; lorsque son Dtd est > 7 cm (> 4 cm/m2), la revascularisation apporte moins de bénéfice [167]. Diagnostic de l’ischémie myocardique Anamnèse: angor, équivalents angineux (douleurs épigastriques, dyspnée) ECG: - STEMI: sus-décalage du segment ST, onde Q, bloc de branche aigu - N-STEMI: sous-décalage du segment ST, inversion de l’onde T - Arythmies Biochimie: troponines, CK-MB, myoglobine (signes d’infarctus) Examens complémentaires - Tests d’effort: ergométrie, écho de stress dobutamine - Tests de perfusion myocardique: scintigraphie technetium ou thallium-dipyridamole - Tests de viabilité myocardique: écho de stress, SPECT, PET-scan, IRM au gadolinium - Coronarographie: scan multibarrette, angiographie Critères pour le diagnostic d’infarctus 1) Ascension typique du taux de troponine accompagnée d’au moins 1 des éléments suivants: - Angor - Sus-décalage ST de > 1 mm ou sous-décalage ST de > 2 mm dans ≥ 2 dérivations contiguës - Onde Q à l’ECG - Inversion symétrique de l’onde T - Nouvelles ACS à l’échocardiograhie 2) Ondes Q apparues ultérieurement à l’ECG; 3) Intervention sur les coronaires; 4) Infarctus aigu ou cicatrisé à la pathologie. Investigations coronariennes Les investigations cardiologiques portant sur la coronaropathie sont traitées plus en détail dans le Chapitre 03 (voir Investigations cardiologiques) ; elles ne sont abordées ici que pour rappel. Ergométrie et épreuves de stress L'ergométrie (voir Chapitre 03) est l’examen de première intention chez les malades à probabilité intermédiaire de coronaropathie, mais il est limité par les anomalies électrocardiographiques (BBG, sous-décalage ST, pace-maker) qui empêchent son interprétation et par l’incapacité du patient à courir ou à pédaler (voir Figure 3.2A). Le but est d’augmenter le travail cardiaque par paliers jusqu’à atteindre au minimum le 85% de la fréquence théorique maximale (FTM: 220 – âge chez l'homme, et 200 – âge chez la femme) ou un double produit (fréquence x pression systolique) supérieur à 25'000. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 30 Le taux de complications requérant une hospitalisation est de 0.01% [224]. Plusieurs réponses à l’effort dénotent une forte probabilité d’ischémie myocardique [270]. Apparition d’angor typique. Sous-décalage du segment ST ≥ 1.0 mm (80 ms après le point J, ou 60 ms si fréquence > 130/min) de morphologie horizontale ou descendante. Sus-décalage du segment ST de ≥ 1.0 mm dans des dérivations sans onde Q ; cette modification est peu fréquente ; elle traduit une sténose proximale sévère, une zone hibernante ou un phénomène de Prinzmetal. Les modifications ascendantes du segment ST qui n’apparaissent qu’à l’effort intense et disparaissent en moins de 30 secondes à l’arrêt représentent en général un faux positif. Hypotension systolique ; elle est associée à une ischémie étendue, à une augmentation de mortalité et à un risque élevé d’arythmies ventriculaires. L’apparition précoce des symptômes et leur persistance après l’effort sont un élément diagnostic important. Il se peut que les signes positifs ne se manifestent que pendant la phase de récupération, notamment l’extrasystolie ventriculaire. Le risque ischémique augmente significativement lorsque le patient n'a pas pu atteindre les 85% de la capacité d’effort maximale et/ou de la fréquence prédites, mais les résultats du test sont moins bien interprétables dans ces conditions. L’ergométrie a une spécificité modérée (75%), mais une sensibilité qui varie en fonction du nombre de vaisseaux coronariens sténosés : respectivement 40%, 60% et 70% pour des lésions mono-, bi- ou tritronculaires [176]. Sa sensibilité est moindre si le test est sous-maximal. Elle est moins fiable et plus complexe à interpréter chez les patients vasculaires et chez les femmes [131]. Lorsque le risque ischémique pré-test est bas, la probabilité de faux positif est significative, mais par contre l’apparition de signes ECG chez un patient à probabilité pré-test élevée commande une approche invasive (coronarographie). Le résultat de l’ergométrie doit donc être interprété selon la probabilité pré-test de la coronaropathie et non selon une dichotomie binaire positif-négatif. Comme il est facile et bon marché, l'ECG d'effort reste le premier choix parmi les tests de dépistage, notamment pace qu’il a une valeur prédictive négative élevée (98%). L’échocardiographie de stress sous dobutamine (voir Chapitre 03) permet de quantifier la fonction segmentaire des 17 segments dans lesquels est divisé le VG (voir Figure 3.3) [62]. Avec la tachycardie et l’augmentation de contractilité dues à la dobutamine, la perfusion coronarienne ne peut plus subvenir aux besoins myocardiques en O2 dans les zones desservies par des vaisseaux sténosés ; il apparaît donc une hypokinésie ou une akinésie dans les segments correspondants (demand ischaemia) (voir Contractilité segmentaire, page 35). L’hypokinésie et l’akinésie surviennent lorsque le flux est diminué respectivement de 50% et de 80%. Les segments dont l’akinésie persiste sans changement au cours du test sont des zones infarcies ; ceux qui récupèrent une certaine activité à l’effort correspondent à des territoires hibernants, donc pouvant récupérer lors d’une revascularisation. Chaque segment est évalué sur une échelle de contractilité de 5 points : 1) normal, 2) hypokinésie légère, 3) hypokinésie sévère, 4) akinésie, 5) dyskinésie ; l’addition des points divisée par le nombre de segments observés fournit un score d’ischémie. Le pronostic est fonction du nombre de segments touchés, de leur degré d’altération cinétique, de leur localisation et de la durée nécessaire à la récupération de leur contractilité. Alors qu’elle a une sensibilité (86%) voisine de celle de la scintigraphie, l’écho de stress est plus spécifique, mais cette spécificité est fonction du nombre de vaisseaux atteints : elle est respectivement de 69%, 89% et 100% en cas de maladie mono-, bi- ou tritronculaire [265]. Sa valeur prédictive négative est très élevée (> 95%), mais sa valeur prédictive positive reste modeste (25-45%) [277]. Elle a une forte valeur prédictive chez les patients à risque intermédiaire ou élevé, et chez les malades de chirurgie vasculaire [176]. La présence d’une sténose aortique serrée ou d’une sténose sous-aortique dynamique sont des contre-indications relatives. L’IRM de stress (perfusion myocardique au gadolinium sous adénosine ou sous dobutamine) représente la meilleure alternative en cas d’échogénicité insuffisante pour une échocardiographie (voir Chapitre 03 IRM). Un enregistrement de 3 coupes en court-axe permet de visualiser 16 segments Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 31 myocardiques. La sensibilité et la spécificité sont de 85% à 94% [80]. En enregistrant les images 1020 minutes après la perfusion de gadolinium (late gadolinium enhancement), on peut différencier l’état de la région ischémique : obstruction microvasculaire (zone sombre), oedème (zone à risque), cicatrice (infarctus), ou hibernation (zone non fonctionnelle mais viable). L’avantage principal est une excellente évaluation de la viabilité du tissu, donc de sa capacité à récupérer lors d’une revascularisation. De plus, les thrombus intracavitaires sont très bien différenciés. Le gadolinium est contre-indiqué lorsque la clairance de la créatinine est < 30 mL/min. Imageries de la perfusion myocardique L’utilisation combinée d’un radiotraceur absorbé par les cellules myocardiques et d’un vasodilatateur permet d’évaluer la qualité du flux coronarien (voir Chapitre 03 Imageries de perfusion). Comme le lit vasculaire est maximalement dilaté au repos derrière une sténose, l’agent vasodilatateur augmente le flux dans les zones saines seulement, ce qui baisse la pression de perfusion à travers la sténose et induit un phénomène de vol sur la zone ischémiée dont la perfusion diminue. Deux agents sont utilisés à cet effet : le dipyridamole, qui bloque les récepteurs de l’adénosine et augmente la concentration libre de cette dernière, et l’adénosine, qui est le vasodilatateur physiologique dont la durée de vie est de quelques secondes. La scintigraphie au thallium-dipyridamole par gamma-caméra utilise les propriétés du thallium-201 de pénétrer rapidement dans les cellules myocardiques de manière analogue au potassium, en combinaison avec l’effet vasodilatateur du dipyridamole sur les territoires sains. Le tissu normal présente les mêmes images au repos et sous dipyridamole, alors que les zones présentant une ischémie active n’affichent le traceur que dans les séquences au repos ; elles apparaissent comme des zones muettes sous l’effet du dipyridamole. Les zones infarcies affichent les mêmes défauts de perfusion aux deux temps (défauts fixes) (voir Figure 3.2B). La scintigraphie au technetium-99m (99mTc sestamibi et 99m Tc tetrofosmine) permet une analyse analogue des défauts de perfusion. La technique scintigraphie permet en outre d’apprécier la cinétique des parois ventriculaires, de quantifier leur taille, et de calculer la fonction globale des ventricules [176]. La tomographie computérisée par émission de photon (SPECT) et la tomographie par émission de positrons (PET-scan) utilise les isotopes de certains éléments comme le carbone, l’azote, l’oxygène ou le fluor qui ont la particularités d’émettre des positrons. On peut alors suivre ces éléments avec une caméra et obtenir des images de la perfusion (en mL/min) ou du métabolisme glucidique myocardique (moles/gm/min) selon que l’élément reste extracellulaire ou est métabolisé. L’angio-CT permet de visualiser les artère coronaires épicardiques et de réaliser une coronarographie non invasive (voir Figure 3.5). Sa résolution spatiale (0.4 mm) et temporelle (100 msec) restent toutefois inférieures à celle de l’angiographie. Sa sensibilité est de 93% et sa spécificité de 76% [294]. La quantification du calcium déposé dans l’arbre coronarien permet d’établir un score à portée pronostique sur le risque d’ischémie clinique. Son association avec l’évaluation des caractéristiques des plaques athéromateuses et du degré d’obstruction coronarienne affine les possibilités de prévoir les risques de syndrome coronarien aigu [274]. Comme il a une valeur prédictive négative très élevée (96100%), le CT-scan permet d’exclure efficacement une maladie coronarienne lorsqu’il est normal, mais il ne remplace pas l’angiographie pour la définition précise des lésions coronariennes lorsqu’il en décèle. Ses indications peuvent être réparties en trois catégories [96]. Investigations avant chirurgie non-cardiaque : angor instable chez un patient symptomatique à risque intermédiaire ou élevé, tests fonctionnels (stress) non conclusifs ; bien qu’il ne procure pas d’information sur la perfusion myocardique, le CT-scan a l’avantage de fournir une vision anatomique de l’arbre coronarien et du cœur. Chirurgie cardiaque : dépistage de coronaropathie avant une intervention valvulaire ou avant une autre opération cardiaque non-coronarienne ; sa haute valeur prédictive négative et sa moindre invasivité en font un bon test en remplacement de la coronarographie. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 32 Chirurgie de revascularisation coronarienne : la coronarographie reste indispensable pour la définition précise des lésions coronariennes chirurgicales, mais le CT-scan lui est supérieur pour la visualisation des structures lors de reprise chirurgicale : position des pontages précédents, trajet de la mammaire interne, anatomie de la paroi sternale et des cavités cardiaques ; il permet également une bonne définition des calcifications présentes dans la paroi de l’aorte ascendante. Angiographie La coronarographie consiste à introduire un cathéter dans l’ostium du tronc coronaire et à y injecter du produit de contraste pour visualiser les trois troncs coronariens et leurs principales banches (jusqu’à une lumière de 1 mm) (voir Figures 3.6 et 3.7). La ponction se fait pas voie fémorale, humérale ou radiale ; cette dernière a l’avantage de limiter le risque hémorragique en facilitant l’hémostase par compression chez les malades sous antithrombotiques et antiplaquettaires. Le degré de sténose des vaisseaux est quantifié en pourcentage de rétrécissement de la lumière ; le seuil de signification est un rétrécissement de diamètre de > 50% (rétrécissement de surface de section > 75%). Il est également défini en terme de longueur et de tortuosité de la sténose. La coronarographie présente certains risques: la mortalité en est de 0.01% et la morbidité de 0.03- 0.25% [205]. Elle n'a de sens que si elle s'adresse à des malades qui peuvent potentiellement bénéficier d'une revascularisation. Ce sont : Syndrome coronarien aigu, angor instable stade III-IV ; Angor ne répondant pas au traitement médical, angor résiduel après infarctus ou revascularisation, angor et insuffisance cardiaque ; Patients dont le test d'effort a révélé une coronaropathie significative ou est équivoque ; Patients de > 45 ans (hommes) et de > 50 ans (femmes) devant subir une intervention de chirurgie cardiaque en CEC. Si la valve aortique n’est pas sténosée, la coronarographie est complétée d’une ventriculographie qui permet d’évaluer la cinétique segmentaire, la fonction ventriculaire (fraction d’éjection) et la présence d’une insuffisance mitrale. L’injection d’un bolus de produit de contraste hypertonique élève momentanément la pression télédiastolique du VG. L’intérêt majeur de la coronarographie est d’avoir une portée thérapeutique immédiate, puisqu’elle peut s’accompagner de l’aspiration du thrombus, de la dilatation du vaisseau incriminé (angioplastie) et de la pose de stent (voir Traitement interventionnel, page 64). La fraction de flux de réserve (FFR, fractional flow reserve) est le rapport entre le flux dans une artère sténotique et le flux dans la même artère en l’absence de sténose. Sa valeur normale est 1 ; plus la sténose est serrée, plus le rapport diminue (Voir Chapitre 05, Sténose coronarienne). Un rapport de 0.75 signifie que le vaisseau sténosé ne fournit que le 75% du flux en périphérie. C’est un index spécifique de la sévérité fonctionnelle des sténoses épicardiques. En coronarographie, il est beaucoup plus facile de mesurer la pression que le flux, raison pour laquelle on utilise le rapport entre la pression aortique et la pression moyenne distale à la lésion (mesurée par le cathéter intracoronarien) : Pdist / Pao [175]. Pour minimiser l’effet de la résistance artériolaire périphérique, on produit une hyperémie maximale par administration de vasodilatateur (adénosine, papavérine) et l’on enregistre la mesure au nadir de la Pdist. Un index < 0.8 est actuellement considéré comme un critère d’ischémie active et une indication à la revascularisation. Comparée à une angioplastie standard, l’évaluation de la FFR permet de diminuer le taux de mortalité, d’infarctus et de revascularisation itérative à 1 an [343]. Comparée au traitement médical seul, la PCI guidée par le calcul de la FFR abaisse la mortalité et le risque d’infarctus en cas de coronaropathie stable (OR 0.32) [83]. Elle conduit à réorienter 43% des patients entre traitement médical ou angioplastie par rapport à ce qui aurait été décidé sur les seuls critères angiographiques [349]. On peut obtenir des coronarographies de haute qualité par Angio-IRM, mais limitées aux vaisseaux proximaux, parce que la tortuosité des petits vaisseaux qui entourent le coeur et la résolution spatiale Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 33 plus faible que celle de l’angiographie limitent les performances de l’IRM; de plus, les calcifications vasculaires ne sont pas visibles. La résolution temporelle et l’imagerie dynamique de l’IRM sont supérieures à celles de l’angio-CT. Investigations coronariennes ECG d’effort : simple, peu onéreux et non-invasif, mais dépend de la mobilité du patient et de la fiabilité de l’ECG pour l’ischémie. Scan Thallium-dipyridamole : diagnostic des zones d’ischémie active et des zones infarcies, mais coûteux et utilisation de matériel radio-actif. Echo de stress dobutamine : diagnostic des zones d’ischémie active et des zones infarcies, fonction ventriculaire ; le plus sensible mais dépend de l’opérateur et de l’échogénicité du malade. La sensibilité des test d’effort augmente avec le nombre de vaisseaux coronariens sténosés à > 70%. Les tests d’effort ne sont pas sensibles pour les plaques instables. IRM : complexe et coûteux, mais précision maximale dans le diagnostic anatomo-pathologique et ischémique ; mesure la plus précise des volumes ventriculaires et de la viabilité myocardique. Angio-CT : imagerie coronarienne non-invasive avec haute valeur prédictive négative, mais insuffisante pour le diagnostic cardio-chirurgical précis des lésions coronariennes. Coronarographie : invasive et coûteuse ; indiquée chez les patients candidats à une revascularisation (angor instable, angor réfractaire, syndrome coronarien aigu, patients de chirurgie cardiaque > 50 ans). Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 34 Echocardiographie Contractilité segmentaire La cinétique de chaque segment du ventricule gauche est une visualisation en temps réel de la performance systolique des trois territoires coronariens, donc un reflet de l'adéquation de leur perfusion. La contraction est caractérisée par deux mouvements : un épaississement et un raccourcissement. Les deux éléments doivent être présents pour que la contraction puisse être qualifiée de normale. Alors que le raccourcissement est affecté par les mouvements de translation et de rotation du coeur en systole, l’épaississement ne l’est pas. En systole, l’épaississement du myocarde et le raccourcissement radiaire sont de 20-40%. Les altérations de la cinétiques segmentaires (ACS) apparaissent pour une réduction du flux coronarien de 50% ou plus. Elles surviennent dans les 30 secondes qui suivent l’interruption du flux et précèdent les modifications du segment ST de 1-2 minutes. L’ischémie provoque trois phénomènes systoliques (Figure 9.9) : Une diminution de la contraction radiaire et de l’épaississement local ; Un retard dans la contraction de l’endocarde ; Un raccourcissement post-systolique. Le raccourcissement post-systolique est lié à la dysfonction des fibres longitudinales sousendocardiques particulièrement sensibles à l’ischémie. Cette persistance de la contraction longitudinale supprime l’effet de succion du ventricule en protodiastole ; elle explique dysfonction diastolique et la baisse de vélocité du flux mitral E [153]. Contraction (%) Avant occlusion de l’IVA 30 5 min après occlusion 20 10 Figure 9.9 : Effet d’une occlusion de 5 minutes de l’interventriculaire antérieure (IVA) sur la contraction myocardique locale. Non seulement le déplacement radiaire de l’endocarde passe de 28% à 13%, mais il change de configuration : la contraction est retardée de 200 ms, et il apparaît un raccourcissement post-systolique qui survient pendant la phase de relaxation isovolumétrique normale [Référence : Carr-White GS, Lim E, Koh TW, et al. Regional ventricular dynamics during acute coronary occlusion: A comparison of invasive with noninvasive echocardiographic markers to detect and quantify myocardial ischaemia – observations made during off-pump coronary surgery. Int J Cardiol 2006; 113:376-84]. La paroi du VG est divisée en quatre régions: antérieure, latérale, postérieure et septale. En échocardiographie transoesophagienne, on distingue (Figure 9.10, Figure 9.11 et Figure 9.12): En vue 4-cavités mi-oesophage à 0°, parois septale et latérale. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 35 En vue 2-cavités mi-oesophage à 90°, parois antérieure et inférieure. En vue long-axe mi-œsophage à 120° : parois antéro-septale et postérieure. En vue transgastrique court-axe à 0°, parois septale, postérieure, latérale et antérieure ; cette incidence visualise les trois territoires coronariens dans leurs segments médio-ventriculaires, mais les deux tiers du VG échappent à cette vue qui ne met en évidence que 17% des ACS [298]. En vue transgastrique long-axe 90° : parois inférieure et antérieure, muscles papillaires et appareil sous-valvulaire de la mitrale. L'apex anatomique est visible en 2 cavités à 90° et en long-axe à 120° ; c’est la région la plus difficile à visualiser correctement en ETO ; elle présente un degré d’épaississement supérieur au reste du VG ; l’origine de sa vascularisation est variable. Figure 9.10 : Territoires coronariens en vue court axe transgastrique (TG), en vues 2 cavités et 4 cavités rétrocardiaques, et en vue schématique. Cette dernière est une projection circulaire de la vascularisation des différents segments avec l’apex au centre. CD : artère coronaire droite. CX : artère circonflexe. IVA : artère interventriculaire antérieure. Chaque segment est évalué sur une échelle de contractilité de 5 points : 1 = normal, 2 = hypokinésie légère, 3 = hypokinésie sévère, 4 = akinésie, 5 = dyskinésie. 5 11 CD 4 10 16 6 12 13 17 15 9 14 7 8 2 1 CX IVA Vue court axe TG 3 Vue schématique CD CX 0° 90° Ant IVA Post Lat Apex © Chassot 2011 Vue 2 cavités Vue 4 cavités Les quatre régions du VG sont à leur tour divisées en 17 segments (Figures 9.10D) [62] ; la numérotation commence à la base au sillon interventriculaire antérieur et tourne dans le sens inverse des aiguilles d’une montre avec 6 segments à la base, 6 dans la région médioventriculaire et 4 dans le tiers apical, le 17ème segment étant la coiffe apicale (voir Figure 27.4). La recherche d’ACS commande obligatoirement de balayer la totalité des différents territoires coronariens et d’y observer le degré de raccourcissement radiaire et d’épaississement de paroi. Il se peut que certains segments aient un déplacement vers le centre dû à la contraction des zones adjacentes, d’où l’importance d’en observer simultanément le degré d’épaississement, et de visualiser chaque région dans plusieurs plans. Les vues tronquées ou tangentielles induisent en erreur ; il est de la plus haute importance de respecter strictement les plans de coupe standards. Les ACS sont classées en cinq catégories. 1 - normokinésie ; la paroi du VG s’épaissit de 20-40% en systole. 2 - hypokinésie légère ; épaississement de 10-30% ; correspond à une diminution de 50% du flux coronaire. 3 - hypokinésie sévère ; épaississement de ≤ 10%. 4 - akinésie ; absence d’épaississement, paroi inerte ; diminution du flux coronaire à 5-10% de la norme, infarcissement de ≥ 40% de l’épaisseur de paroi. Si l’aspect structurel de la paroi Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 36 immobile paraît normal, il se peut que le myocarde puisse récupérer après une revascularisation (hibernation) ; une zone infarcie cicatricielle apparaît amincie (< 6 mm) et très échogène (tissu fibreux). Une reprise de la contraction sous perfusion de dobutamine (510 mcg/kg/min) est caractéristique d’une zone récupérable, alors qu’une zone infarcie ne réagit pas. La zone immobile peut apparaître plus importante que celle qui est réellement ischémiée à cause de la traction effectuée sur le voisinage par la région akinétique. 5 - dyskinésie ; le segment s’expand en systole au lieu de se contracter (mouvement paradoxal) ; l’anévrysme en est un cas particulier. L’adition des points (1 à 5) divisée par le nombre de segments observés permet de construire un score d’ischémie utile pour quantifier les ACS. Un score d’ACS > 1.7 signe un défaut de perfusion de > 20% du VG [263]. Il faut un minimum de deux quadrants fonctionnels, même hypokinétiques, pour assurer la survie du patient. L’observation des ACS est compliquée du fait que la contraction du VG est physiologiquement hétérogène. 0-20° A Figure 9.11: Vues échocardiographiqu es rétrocardiaques lorsque la sonde ETO est placée en position mioesophagienne. A: vue 4-cavités 0°; on voit la paroi latérale (PL) du VG et le septum interventriculaire. B: vue 2-cavités 90° qui montre la paroi antérieure (PA) et la paroi inférieure (PI) du VG; AAG: appendice auriculaire gauche. C: vue long-axe 120°, qui met en évidence la paroi antéro-septale (PAS) et la paroi postérieure (PP). OG OG OD OD VD VG PL VG VD 90° B OG OG AAG VG PI VG PA 120° C OG OG Ao Ao VD VD PP VG PA S VG Les quadrants antérieur et latéral ont davantage de course radiaire (35-45%) que les quadrants postérieur (25%) et septal (< 20%) ; ils sont les plus importants pour la performance ventriculaire. Ayant une course radiaire de moindre amplitude, la paroi postéro-basale peut paraître hypokinétique alors que sa contraction est physiologique. Le septum basal, partiellement fibreux, a peu d’épaississement. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 37 La partie sous-endocardique a davantage de déplacement radiaire que la partie sousépicardique. L’épaississement est le plus important à l’apex. Le mouvement de torsion systolique est plus marqué à l’apex qu’à la base. La contraction des segments basaux propulse davantage de volume que celle des segments apicaux. La contraction commence à l’apex et se termine dans la chambre de chasse. A 0° PP VD MPP VD PL Siv VG MPA PA 90° B PI MPP MPP MPA PA AAG MPA OG AAG Figure 9.12: Vues échocardiographiques lorsque la sonde ETO est placée en position transgastrique. A: vue court-axe du VG 0°; on voit la paroi postérieure (PP), la paroi latérale (PL), la paroi antérieure (PA) et le septum interventriculaire (Siv). B: vue 2-cavités 90° qui montre la paroi antérieure (PA) et la paroi inférieure (PI) du VG; AAG: appendice auriculaire gauche. MPP: muscle papillaire postérieur. MPA: muscle papillaire antérieur. Lorsque la fonction ventriculaire est sévèrement diminuée (FE < 0.3), la détection des ACS et la sensibilité de l’ETO sont abaissées. D’autre part, les ACS peuvent apparaître suite à de causes nonischémiques. Hétérogénéité accentuée de la contraction ventriculaire, hypokinésie relative normale de la paroi postéro-basale ; Mouvements de translation et de rotation du coeur ; Bloc de branche ou ou électro-entraînement par un pace-maker ; Extrasystolie ventriculaire ; Asynchronisme de contraction dû à une dilatation ventriculaire ; Traction effectuée sur le voisinage par la région akinétique ; Dyskinésie du septum interventriculaire lors de l’ouverture du péricarde (modification de l’interdépendance ventriculaire) ; Aplatissement du septum interventriculaire en cas de surcharge ventriculaire droite systolique (hypertension pulmonaire) ou diastolique (surcharge de volume) ; ce phénomène mime une hypokinésie septale ; Immobilisation basale par une prothèse mitrale ; Augmentation brusque de postcharge ou baisse soudaine de précharge ; Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 38 Sensibilité abaissée lorsque la fonction ventriculaire est mauvaise ; Image oblique et coupe tronquée de la paroi ; Hypovolémie sévère, qui ne permet pas au ventricule d’avoir une tension de paroi télédiastolique suffisante ; Myocardite, choc septique. Dans ces situations, l’observation du degré d’épaississement systolique de la paroi est un critère plus fiable que son déplacement. Le septum interventriculaire peut présenter un mouvement paradoxal sous forme d’un bascule droitegauche au cours de la systole. Plusieurs origines non-ischémiques sont possibles. Bloc de branche : la désynchronisation fait que le septum ne se contracte pas simultanément avec le reste du ventricule ; il bascule entre la droite et la gauche en fonction de la pression intraventriculaire gauche et de sa propre contraction, qui est tardive. Pace-maker : la stimulation du septum est précoce, et sa relaxation a lieu avant la fin de la contraction du reste du VG. Péricardotomie : n’étant plus contenus par le péricarde, les ventricules peuvent se dilater ; le septum bascule dans le VD dont la pression baisse. Hypertension pulmonaire sévère : comme le pic de pression du VD est plus retardé que normalement par rapport à celui du VG à cause de la postcharge élevée, le septum est d’abord repoussé vers la droite lorsque la pression intraventriculaire gauche est maximale, puis vers la gauche lorsque la pression intraventriculaire droite maximale est atteinte. L’image globale est celle d’une dyskinésie septale systolique (mouvement paradoxal). Surcharge de volume : la dilatation diastolique du VD repousse le septum vers la gauche ; ce dernier reprend sa position en systole. Péricardite constrictive ou tamponnade : en respiration spontanée, le septum a un mouvement oscillant synchrone avec la fréquence respiratoire, puisqu’il suit les variations de remplissage des deux ventricules en fonction de la pression intrathoracique (voir Figure 16.6). La zone bordant un infarctus est souvent immobilisée par la traction mécanique exercée par la région akinétique (tethering effect). Elle apparaît akinétique alors qu’elle conserve une fonctionalité normale. Ce phénomène conduit à surestimer la dimension de l’infarctus en période aiguë et contribue à la baisse apparente de la fraction d’éjection. Une des questions posées à l’échocardiographeur en salle d’opération est celle de la récupérabilité potentielle des zones hypo- ou akinétiques. En effet, la revascularisation d’un territoire non viable est inutile. Deux critères sont utilisables pour différencier le tissu définitivement inerte de celui qui n’est que momentanément immobile à cause de l’ischémie (hibernation). A l’image bidimensionnelle, une zone amincie (épaisseur < 0.6 cm) et hyperéchogène représente une cicatrice fibreuse, alors que le myocarde d’une zone viable présente une épaisseur et une échogénicité normales ; Un examen sous dobutamine (5-10 mcg/kg/min) permet de différentier le tissu irrémédiablement infarci de celui qui est en sidération ou en hibernation. L’amélioration de la cinétique segmentaire sous dobutamine signe la récupérabilité du territoire concerné ; le développement de nouvelles ACS ou l’aggravation de la cinétique locale indique une zone sous ischémie subintrante. Une réponse biphasique (hyperkinésie à faible dose de dobutamine et akinésie à dose élevée) est le critère échocardiographique le plus fiable pour traduire la viabilité d’un territoire hypoperfusé. Dans ces cas, la revascularisation sera bénéfique, alors qu’elle sera inutile si la test à la dobutamine ne modifie pas l’akinésie ou la dyskinésie locale [68,293]. Cette différentiation est importante, parce qu’une revascularisation partielle de territoires viables augmente les risques de complications cardiaques postopératoire (incidence 48%), alors qu’une Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 39 revascularisation totale les diminue de presque 4 fois (incidence 14%) [353]. La récupération d’une hibernation est rapide, alors que celle de la sidération prend de 3 jours à quelques semaines. Evaluation échocardiographique de l’ischémie myocardique L’altération de la cinétique segmentaire (ACS) est définie par 2 éléments : - Diminution de l’épaississement myocardique (normal 20-40% selon les segments) - Diminution du raccourcissement radiaire (normal 20-40%) Gradation : 1- normokinésie, 2 - hypokinésie légère, 3 - hypokinésie sévère, 4 - akinésie, 5 - dyskinésie Les ACS sont recherchées systématiquement dans les 4 quadrants au niveau basal, médio-ventriculaire et apical (vues 4-cavités. 2-cavités, long-axe mi-œsophage et court-axe transgastrique) Note : les différents quadrants du VG n’ont normalement pas le même degré de contraction Evaluation de l’infarctus Les altérations de la cinétique segmentaire systolique et diastolique surviennent dans les secondes qui suivent l’occlusion coronarienne et sont proportionnelles à la masse myocardique ischémiée (voir Tableau 9.1,page 10). Les segments associés à une surélévation du segment ST (STEMI) sont en général akinétiques, alors qu’une ischémie sous-endocardique, même étendue, peut ne donner aucun signe échocardiographique. La reperfusion rétablit la contraction locale, mais une zone ischémiée peut rester akinétique malgré le rétablissement du flux en cas de sidération (stunning). Certaines affections se traduisent par des ACS spontanément réversibles en quelques jours alors que les coronaires sont saines : ballonisation apicale (Takotsubo), hémorragie sous-arachnoïdienne, ou spasme de Prinzmetal. La distribution anatomique des troncs coronaires permet de définir les territoires dont la contraction est altérée en fonction du vaisseau obstrué (Figure 9.10). Lésion de la CD : paroi libre du VD (vue 4-cavité 0° et admission-chasse du VD 60°), paroi postéro-inférieure du VG (vues 2-cavité 90°, long-axe 120° et transgastrique 0° + 90°), tiers proximal du septum interventriculaire (vue 4-cavité 0°). Lésion de la CX : paroi latérale du VG en vues 4-cavité 0° et transgastrique 0° ; dans ces deux vues, les fibres myocardiques sont en majeure partie parallèles à l’axe des ultrasons, ce qui donne une image atténuée ; la paroi paraît peu dense et semble deshabitée, sans que cela représente une signe d’ischémie. Lésion de l’IVA : paroi antérieure et apex du VG (vue 2-cavité 90°), paroi antérieure (vues transgastrique 0° et 90°), paroi antéro-septale (long-axe 120°). L’évaluation de la fonction ventriculaire globale et la mesure de la FE du VG doivent tenir compte des ACS. Les approximations géométriques comme la formule de Teichholz ne sont plus applicables, car elles sont conçues pour une contraction homogène et symétrique du ventricule. Seule la règle de Simpson (voir Chapitre 25, Indices éjectionnels) permet une quantification qui prenne en compte la fonction des différentes parois du VG (voir Figure 25.64). L’évaluation fonctionnelle doit différencier deux éléments différents : Mesure de la fonction globale du VG (FE avec la règle de Simpson) ; celle-ci tient compte des zones akinétiques et dyskinétiques ; sa valeur est abaissée comme celle du débit cardiaque. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 40 Mesure de la fonction du myocarde valide à l’exclusion des ACS par la formule de Teichholz ou la fraction de raccourcissement de surface dans les zones saines ; elle est importante pour évaluer la capacité fonctionnelle du myocarde actif. L’infarctus du VD, lié à une obstruction de la CD, est en général associé à un infarctus de la paroi inférieure du VG. Le VD est dilaté lorsqu’il dysfonctionne parce que sa structure est mince, et sa paroi libre est akinétique ou sévèrement hypokinétique. L’apex échappe à l’akinésie parce qu’il est vascularisé par l’IVA. Très richement pourvue en récepteurs β, la chambre de chasse du VD conserve habituellement une contractilité importante malgré la défaillance du corps du ventricule. L’OD est dilatée et le septum interauriculaire bombe dans l’OG ; en cas de perméabilité du foramen ovale, il s’installe un shunt D - G visible au flux couleur et confirmé par un test aux microbulles. La dilatation du VD entraîne une insuffisance tricuspidienne dont la vélocité maximale (2-2.5 m/s) est proportionnelle à la valeur systolique de la pression artérielle pulmonaire, mais inversement proportionnelle au degré de dysfonctionnement du ventricule (elle diminue avec la baisse de la force motrice du ventricule). Bien que très précoce, la dysfonction diastolique ne présente pas de modifications spécifiques à l’ischémie, mais est altérée par le défaut de relaxation (voir Chapitre 25, Fonction diastolique) : Prolongation de la phase de relaxation isovolumétrique (> 100 ms) ; Diminution de la Vmax du flux protodiastolique E et prolongation de sa phase de décélération (dtE > 250 ms) (voir Figure 25.81) ; Diminution de la vélocité de propagation du flux mitral (< 40 cm/s) (Figure 25.82). Avec l’infarctus et la rigidité imposée par la cicatrice non-contractile, les pressions de remplissage du VG et de l’OG augmentent et les flux présentent une allure restrictive (Figure 25.81) : Raccourcissement de la phase de relaxation isovolumétrique (< 70 ms) ; Augmentation de la Vmax du flux protodiastolique E et raccourcissement de sa phase de décélération (dtE < 150 ms) ; Rapport E/E’ élevé (≥ 15). Le développement d’une dysfonction diastolique restrictive est de mauvais pronostic pour la fonction ventriculaire et pour la survie à long terme [241]. Evaluation échocardiographique de l’infarctus myocardique Localisation: - Territoire de la CX: akinésie latérale (vue 4-cavités 0°, court-axe transgastrique) - Territoire de l'IVA: akinésie antérieure (vue 2-cavités 90°, court-axe transgastrique) - Territoire de la CD: akinésie postéro-inférieure (2-cavités 90°, long-axe 120°, court-axe TG), akinésie paroi libre du VD Evaluation fonctionnelle mésestimée par la FE (Teichholtz) car les seules altérations de la cinétique segmentaire prises en compte sont celles présentes dans le plan de coupe médio-ventriculaire. Il est préférable d'utiliser la règle de Simpson. La ballonisation apicale transitoire du VG consiste en une dysfonction aiguë de l'apex du VG mimant un infarctus mais ne montrant aucune lésion coronarienne à l'angiographie. Décrite au Japon, on lui a donné le nom de maladie de Tako-tsubo parce que la dysfonction akinétique de l'apex ventriculaire Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 41 gauche (Figures 13.7 et 13.8) donne des images ressemblant au pot à col étroit qu'utilisent les pêcheurs japonais pour piéger les poulpes [188]. La clinique est identique à celle d'un infarctus aigu (douleurs précordiales intenses, dyspnée, défaillance gauche). L’hémorragie intracrânienne, plus particulièrement sous-arachnoïdienne, s’accompagne d’une dysfonction ventriculaire aiguë avec inversion de l’onde T dans 20-30% des cas [17] ; celle-ci est secondaire à la tempête sympathique accompagnée d’une poussée hypertensive maligne. L’atteinte du VG peut se présenter comme une dilatation et une dysfonction aiguë ou une hypokinésie sévère de la région basale ou apicale, sans corrélation avec la distribution normale des vaisseaux coronariens. Utilité de l’ETO peropératoire Lors d'angioplastie coronarienne, les altérations de la cinétique segmentaire (ACS) surviennent 1 à 2 minutes avant l'apparition des signes électriques à l’ECG. Lors de chirurgie de revascularisation, on estime que la moitié des incidents ischémiques visibles à l'ETO ne s'accompagne pas de modifications hémodynamiques enregistrables, et qu'il n'y a pas d'altérations électriques décelables dans le 40 % des cas [204]. De ce fait, l’ETO est une bonne technique pour visualiser les effets de l’ischémie myocardique tronculaire sur la contraction du ventricule. Chez les patients souffrant de lésions transmurales persistantes, ce qui est le cas des patients subissant des interventions de revascularisation coronarienne, la valeur prédictive positive de l’ETO pour l’infarctus postopératoire s’élève jusqu’à 88% [73]. Dans la chirurgie coronarienne à cœur battant (OPCAB), l’ETO a une meilleure sensibilité à l’ischémie que l’ECG ; sa valeur prédictive pour les complications cardiovasculaires postopératoire est plus élevée [240,356]. En chirurgie non-cardiaque, cependant, cette valeur prédictive n’est que de 33% [73,204]. Dans ce cas en effet, il s'agit le plus souvent de lésions sous-endocardiques invisibles à l'ETO mais entraînant des modifications électriques évidentes sur le segment ST. Bien qu’elle soit un moyen sensible et spécifique pour le diagnostic de l'ischémie myocardique, l'échocardiographie n’est donc pas un moyen de surveillance peropératoire efficace en-dehors de la chirurgie coronarienne. Dans le contexte de la chirurgie non-cardiaque, l’ETO est un moyen très efficace pour la surveillance du retentissement sur le VG ischémique des conditions hémodynamiques imposées par l’opération : baisse de précharge (hypovolémie), augmentation brusque de postcharge (clampage aortique), variations de contractilité, dilatation (souffrance ventriculaire). L’impact de l’ETO en chirurgie coronarienne est significatif, puisque l’examen pré-CEC induit un changement de stratégie chirurgicale dans 5% des cas de PAC isolés et dans 17% des cas de PAC associés à une chirurgie valvulaire ; l’examen post-CEC justifie un retour en pompe à cause de nouvelles ACS dans 3% des patients et à cause de problèmes sur la valve mitrale dans 5% des cas [106]. Dans notre série du CHUV (8'262 examens pour PAC), le taux de modifications chirurgicales est de 6% avant CEC et 3% après mise en charge [64]. Chez les patients ischémiques à haut risque, l’impact de l’ETO est plus prononcé : il est de 28% pour la prise en charge hémodynamique et 17% pour la prise en charge chirurgicale, alors qu’il est respectivement de 14% et 4% dans les cas simples [75,301]. En effet, l’ETO permet de diagnostiquer des décompensations liées à l’ischémie comme l’insuffisance mitrale ou la dysfonction ventriculaire aiguë qui ne sont pas décelables autrement. Ces données justifient l’utilisation de routine de l’ETO pour toute chirurgie de revascularisation coronarienne. Si la reconnaissance d'une contractilité normale est relativement aisée, il n'en est pas de même de la détection d'anomalies de la contraction segmentaire et de leur étendue, qui est difficile et très opérateur-dépendante ; elle demande une formation adéquate en échocardiographie, ce qui limite la portée de l’ETO comme mode de monitorage peropératoire [29]. Comme les conditions de la salle d’opération sont mal adpatées aux observations fines, la sensibilité du monitorage ETO de l'ischémie en temps réel varie entre 67 et 82% (moyenne 76%) en fonction de la formation et de l'expérience des anesthésistes [29]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 42 Bien qu'il ait une bonne sensibilité pour l'ischémie (85%), l'ETO n'a qu'une spécificité modérée pour ce diagnostic (70%) à cause du nombre de facteurs qui interfèrent dans l’image échocardiographique. En salle d’opération, le diagnostic échocardiographique d’ischémie n'est fondé qu'en l'absence de perturbations hémodynamiques telles que l'hypovolémie, l'hypertension ou la tachycardie extrême, qui peuvent être elles-mêmes à l'origine de perturbations de la cinétique segmentaire. D’autre part, les ACS n’ont de valeur pronostique pour les complications cardiaques postopératoires que si elles sont persistantes, et que si elles surviennent chez les patients souffrant de lésions transmurales tronculaires. Enfin, il n’y a surveillance de l’ischémie que dans la mesure où l’anesthésiste observe l’écran de l’appareil, ce qui ne peut pas être continu comme la surveillance du segment ST par le moniteur ECG. Monitorage de l’ischémie par ETO Les ACS persistantes diagnostiquées à l’ETO ont une valeur prédictive élevée pour l’infarctus postopératoire en chirurgie de revascularisation coronarienne (lésions tronculaires et infarctus de type STEMI), mais une valeur prédictive faible en chirurgie non-cardiaque (prédominance de lésions sousendocardiques et d’infarctus non-STEMI). Dans cette dernière situation, l’ETO est surtout efficace pour évaluer le retentissement sur le VG ischémique (fonction ventriculaire et ACS) d’évènements hémodynamiques peropératoires comme l’hypotension, les arythmies ou le clampage aortique. L’évaluation de la cinétique segmentaire en salle d’opération est souvent difficile et demande une bonne expérience échocardiographique. ETO des complications de l’ischémie L’échocardiographie est particulièrement utile pour mettre en évidence les principales complications de l’infarctus : dysfonction ventriculaire systolique et diastolique, insuffisance mitrale, anévrysme, rupture de paroi, tamponnade. Leur diagnostic précoce est capital car seul un traitement agressif permet de diminuer leur mortalité très élevée (> 50%). L’insuffisance ventriculaire gauche et la régurgitation mitrale sont des prédicteurs indépendants de la survie après infarctus [275]. Insuffisance mitrale ischémique La présence d’une insuffisance mitrale (IM) modérée ou sévère sans lésion significative des feuillets aggrave significativement le pronostic de l’infarctus parce qu’elle traduit une atteinte majeure du ventricule gauche [140]. En effet, la dilatation du VG ou l’akinésie d’une paroi exercent une traction sur les cordages qui empêche les feuillets mitraux de rejoindre leur point de coaptation en systole et les maintient en dessous du plan de l’anneau mitral ; cette retenue au déplacement systolique des feuillets est la cause d’une IM restrictive, dont l’importance est définie par la surface contenue entre les feuillets et le plan de l’anneau (tenting area) (Figure 9.13). L’IM ischémique, qui est traitée plus en détail dans le Chapitre 26 (IM ischémique), peut avoir plusieurs origines (Figure 9.14). Akinésie de la paroi où s’insèrent un muscle papillaire ; ne se contractant pas en systole, cette paroi tire sur les cordages correspondants et maintient un feuillet sur le versant ventriculaire ; ce mécanisme occasionne une IM plus ou moins excentrique par restriction d’un feuillet [113]. Ischémie d’un muscle papillaire (MP) ; un muscle non-contractile tend à s’allonger en systole ; si elle est associée à une akinésie de la paroi correspondante, l’ischémie d’un MP donne davantage de course aux cordages et tend à réduire la restriction au mouvement des feuillets et l’importance de l’IM [234]. Si la paroi se contracte normalement, l’ischémie d’un Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 43 MP occasionne le bascule d’une commissure mitrale dans l’OG et une fuite mitrale excentrique (Figure 9.15, page 46) [215]. Rupture partielle ou complète d’un muscle papillaire ; la commissure mitrale correspondante bascule dans l’OG ; un morceau de muscle papillaire oscille librement dans le ventricule ou entre le VG et l’OG au cours du cycle cardiaque. Dilatation de l’anneau mitral ; lors de dilatation du VG ou d’infarctus basal, l’anneau mitral s’agrandit ; les feuillets sont normaux mais ne peuvent pas se rejoindre en systole ; l’IM est proportionnelle au degré de dysfonction ventriculaire et à celui de la postcharge [138]. Déplacement systolique antérieur de la valve mitrale ; l’hyperdynamisme compensatoire de la paroi postérieure lors d’un infarctus antérieur et/ou latéral amène celle-ci trop à l’intérieur du VG en systole, ce qui translate le point de coaptation de la valve mitrale en avant en direction de la chambre de chasse du VG ; le long feuillet antérieur peut alors être aspiré dans la CCVG par effet Venturi au cours de l’éjection (SAM : systolic anterior motion). Il en résulte une IM méso-télésystolique (voir Figure 26.66 et Figure 26.67). A B Plan de l’anneau Diamètre de l’anneau Jet de l’IM Point de coaptation OG Tenting distance VC SOR CA VD VG Ant LA Post © Chassot 2012 Figure 9.13 : Insuffisance mitrale (IM) restrictive d’origine ischémique. A : vue 4-cavités d’une IM d’importance II/IV chez un patient souffrant d’ischémie coronarienne et d’une dilatation importante du VG (FE = 0.25). En systole, les feuillets sont retenus en dessous du plan de coaptation par la dilatation du ventricule, ce qui empêche la valve d’être étanche. B : l’importance de l’IM est définie par le diamètre du jet à son origine (vena contracta VC) et par la surface de l’orifice de régurgitation (SOR). La distance entre le point de coaptation et le plan de l’anneau mitral (double flèche bleue) est la tenting distance ; la surface triangulaire comprise entre les feuillets et le plan de l’anneau est la tenting area. Le degré de sphéricité du VG est défini par le rapport entre le court axe (CA), ou diamètre transverse, et le long axe (LA) du VG ; normalement, le court axe est inférieur à la moitié du long axe ; la dilatation du VG se traduit par un rapport > 0.7. Lorsqu’il se dilate, le VG devient plus sphérique et la restriction aux mouvements de la mitrale augmente, donc l’IM s’aggrave. Dans les IM aiguës, l’OG est en général normale et peu compliante ; de ce fait, le reflux systolique dans les veines pulmonaires est bien visible au Doppler pulsé (voir Figure 26.20). Lorsqu’elle est très excentrique, la régurgitation peut être dirigée vers les veines pulmonaires d’un seul côté et donner lieu à un oedème pulmonaire unilatéral. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 44 Les critères de gravité définissant l’IM sévère (degré IV) d’origine ischémique sont plus restrictifs que ceux de l’IM organique (voir Chapitre 26 Quantification de l’IM et Tableau 26.1) : vena contracta de ≥ 0.4 cm de diamètre, orifice de régurgitation de ≥ 0.3 cm2, volume de régurgitation de ≥ 30 mL (au lieu de 0.7 cm, 50 mm2 et 60 mL respectivement dans l’IM organique) [215]. A B C < FA FA A FP P L L D E F © Chassot 2012 Figure 9.14 : Insuffisance mitrale ischémique. L’IM peut être de type IIIb restrictif (A, B et C), de type II prolapsus (D et E) ou de type I fonctionnel (F). A : akinésie ou dyskinésie segmentaire entraînant le pilier vers l’extérieur et vers l’apex en systole ; le feuillet correspondant est restrictif ; l’IM est excentrique. B : akinésie ou dyskinésie segmentaire entraînant le pilier vers l’extérieur avec une traction excessive sur les codages de 2ème ordre ; ceci se traduit par une image en aile de mouette du feuillet antérieur. < FA : angle du feuillet antérieur à son extrémité avec le plan de l’anneau en systole. C : cardiomyopathie ischémique avec dilatation homogène du VG ; l’IM restrictive est centrale. D : la rupture complète d’un pilier provoque un bascule total de la commissure dans l’OG en systole ; on voit un morceau du pilier rompu oscillant au bout des cordages. E : ischémie d’un pilier occasionnant un prolapsus de la commissure correspondante parce que le pilier s’allonge au lieu de se contracter en systole. F : ischémie basale causant une dilatation postérieure de l’anneau mitral Ruptures myocardiques Les ruptures de structures myocardiques (paroi libre, septum interventriculaire, muscle papillaire) sont dues à l’obstruction aiguë d’un vaisseau terminal non collatéralisé. Elles surviennent typiquement dans les premiers jours qui suivent un infarctus inaugural de petite taille chez des malades souffrant en général d’une maladie monotronculaire. Elles se caractérisent par la survenue brutale d’un choc cardiogène accompagnée d’un souffle systolique. Sans traitement chirurgical d’urgence, leur pronostic est catastrophique. Ces lésions sont souvent inféro-postérieures et ne sont pas visibles dans les vues Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 45 mi-oesophagiennes, en particulier en 4-cavités ; on ne les met en évidence que dans des vues transgastriques, en balayant le coeur de 0° à 120° et en les recherchant en 2D et avec le Doppler couleur (Figure 9.16 et Figure 9.17). Foie A B OG OD Ao VD VD VG VG Péricarde Figure 9.15 : Pathologies ischémiques du muscle papillaire entraînant une insuffisance mitrale aiguë. A : rupture totale du muscle papillaire antérieur. On aperçoit un fragment de pilier à l’extrémité de cordages, flottant dans l’OG en systole et dans le VG en diastole. B : Embolisation d’air dans le muscle papillaire postérieur (territoire de la CD) après chirurgie cardiaque (grande flèche). On voit également une accumulation d’air intraventriculaire dans les trabéculations de la région antéro-septale (petite flèche). L’air apparaît comme un granulé très brillant. A B OG OG An An VG VG Figure 9.16 : Anévrysme et faux-anévrysme du VG. A : anévrysme postéro-basal avec un large collet. B : fauxanévrysme postérieur s’étendant vers le haut derrière l’OG ; le collet est étroit. Rupture de paroi libre ; elle apparaît souvent par une tamponnade et des caillots péricardiques, plus ou moins cloisonnés ; l’image 2D montre la rupture et le flux couleur met en évidence un va-et-vient systolo-diastolique. La survie n’est possible que si la rupture est cloisonnée par la réaction péricardique. Pseudo-anévrysme ; rupture de paroi partielle sous forme d’une poche contenue par l’épicarde ; plus fréquent dans la paroi postérieure, son collet est en général étroit ; le pseudoanévrysme contient du contraste spontané mis en mouvement en systole et fréquemment des thrombi muraux. Communication interventriculaire (CIV) ; due à une obstruction de la CD, elle apparaît sur la partie postérieure du septum et n’est visible qu’en vue transgastrique 0° ; due à une lésion de l’IVA, elle apparaît dans la partie moyenne et antérieure du septum. Une perforation de part Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 46 en part est visible en imagerie 2D, mais lorsqu’elle est serpentigineuse à travers les trabéculations, elle n’est mise en évidence qu’au flux couleur. Le flux à travers la CIV est systolo-diastolique. La dimension de la zone d’accélération concentrique (PISA) sur le versant gauche est un bon indice de l’importance de la CIV. En alignant l’axe du Doppler continu avec celui du chenal, on peut en mesurer la vélocité maximale (VmaxCIV ≈ 3-4 m/s), donc le gradient de pression entre les deux ventricules (équation de Bernoulli : ΔP = 4 V2) ; en l’absence de lésion aortique, on peut calculer la pression systolique du VD de cette manière : PsystVD = PAsyst - ΔPCIV. Rupture de muscle papillaire ; plus fréquente dans le muscle papillaire postéro-médian qui est vascularisé uniquement par la CD que dans le muscle antéro-latéral qui est vascularisé conjointement par l’IVA et la CX. Les ruptures complètes se traduisent par le bascule total d’une commissure et une IM massive non compatible avec la survie, sauf si on l’opère en urgence. A cause de la défaillance ventriculaire et de la grande taille de l’orifice de régurgitation, la Vmax de l’IM est basse (1-3 m/s) ; il n’y a que peu de flux tourbillonnaire au Doppler couleur. On rencontre plus fréquemment des ruptures partielles caractérisées par le bascule systolique dans l’OG de la partie commissurale d’un ou des deux feuillets mitraux, accompagné d’un fragment de pilier qui oscille indépendamment de la paroi dans le VG; le jet de l’IM est excentrique. Figure 9.17 : communication interventriculaire (CIV) au niveau du septum postérieur en vue transgastrique. Cette lésion n’est pas visible dans les vues mi-oesophagiennes, mais seulement en vue transgastrique. Le VD est dilaté à cause de la surcharge par le shunt G-D. VG VD Anévrysme et thrombus L’anévrysme est un cas extrême de dyskinésie survenant après un infarctus transmural : le ou les segments non perfusés et cicatriciels sont amincis, inertes, et bombent vers l’extérieur en systole. A l’origine, l’anévrysme est constitué de toute l’épaisseur de la paroi ventriculaire ; son collet est large. Il contient fréquemment un thrombus mural et est à l’origine d’arythmies ventriculaires malignes. Le flux systolique tournoie à l’intérieur. Les deux endroits les plus fréquents sont l’apex du VG et la paroi inféro-basale. L’immobilité d’une zone akinétique et un bas débit ventriculaire peuvent créer les conditions pour la formation d’un thrombus mural, que l’on rencontre le plus fréquemment à l’apex du VG. Un thrombus peut être laminaire et ancré dans les trabéculations, ou arrondi et mobile ; il est en général bien visible en vue mi-oesophagienne 2 cavités 90°, long axe 120° et transgastrique long axe 100-120°. Le diagnostic différentiel avec des trabéculations ou un muscle papillaire est parfois difficile : le thrombus est inhomogène, ne se contracte pas et apparaît identique dans plusieurs plans de coupe. Le thrombus laminaire est bien ancré dans les trabéculations et ne présente pas de risque embolique ; un thrombus arrondi et sessile est plus dangereux. Il est habituel de réséquer ce dernier par ventriculotomie en cours d’opération. Une résection n’est pas indiquée lorsque le thrombus est laminaire. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 47 ETO et complications ischémiques L’échocardiographie est essentielle pour diagnostiquer les principales complications de l’ischémie : - Dysfonction ventriculaire systolique et diastolique - Insuffisance mitrale - Rupture pariétale et CIV - Anévrysme - Thrombus intracavitaire Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 48 Traitement de l’ischémie myocardique Traitement de l'ischémie aiguë Le syndrome coronarien aigu (SCA) est précipité par un effondrement de l'apport d'oxygène par rapport au besoin du myocarde. La rupture d’une plaque athéromateuse ou l’occlusion d'une sténose serrée, accompagnées d’une hypercoagulabilité sanguine et d’un syndrome inflammatoire, entraînent une activation plaquettaire et une thrombose occlusive, souvent aggravée par une vasoconstriction coronarienne locale (voir Sténose coronarienne, page 4). L'ischémie est évidemment favorisée par une demande excessive en O2 : tachycardie, hypertension, stress émotionnel, anémie, hypoxémie. Alors que l’occlusion totale du vaisseau entraîne la nécrose myocardique, l'ischémie instable est caractérisée par une thrombose sub-occlusive. Le SCA regroupe un continuum de lésions coronariennes aiguës avec un risque qui va crescendo de l’angor d'origine récente avec ou sans modifications ECG jusqu’à l’infarctus myocardique transmural, en passant par l’angor de repos récent, l’angor de plus de 20 minutes avec anomalies persistantes du segment ST, l’infarctus sousendocardique et l’infarctus non-transmural (voir Ischémie-infarctus, page 8). La position du segment ST à l'ECG occupe une place centrale dans la définition clinique du SCA (voir Figure 9.4, page 11). Environ un quart des patients présente une surélévation du segment ST et va développer un infarctus avec onde Q. Les trois autres quarts présentent un sous-décalage ST et souffrent d'angor instable ; ces malades font en général un infarctus de type non-Q [5]. L'élévation des troponines confirme la nécrose myocardique en cas de décalage du segment ST. Le diagnostic d'infarctus repose sur la persistance de l’élévation des enzymes ; deux dosages doivent être pratiqués, à l’admission du patient et 6-12 heures plus tard. De manière simplifiée, les patients qui présentent une surélévation persistante du segment ST (STEMI) sont candidats à une technique de reperfusion en urgence (thrombolyse ou angioplastie), alors que ceux qui affichent un sous-décalage ST (non-STEMI) bénéficient en premier lieu d'un traitement médical anti-ischémique, suivi ultérieurement d'une PCI (Percutaneous coronary intervention) dans les cas à risque. Les antiplaquettaires et les anticoagulants font partie du traitement des deux catégories de malades. Les recommandations en usage sont présentées de manière simplifiée dans l’algorithme de la Figure 9.18 [4,12,112,165,205,261,262,324,360,365]. A titre d’exemple, l’attitude adoptée au CHUV est illustrée par des algorithmes pour l’angor instable/N-STEMI (Figure 9.19A et 9.19B) et pour l’infarctus STEMI (Figure 9.19C et 9.19D) [159a]. L'ischémie silencieuse, l’angor continu, l’élévation massive des troponines et la persistance des modifications électriques malgré un traitement maximal sont de mauvais pronostic. Si les signes électriques persistent pour plus de 12 heures, il faut penser à un infarctus non-Q ; l’hypothèse est à corréler au probable mouvement enzymatique. La mortalité immédiate du SCA est fonction de la masse de myocarde ischémié et des modifications hémodynamiques. Il existe une relation linéaire entre la mortalité et le taux maximal de troponine: plus il est élevé, plus la mortalité augmente [7]. Il en est de même pour le taux de CRP [291]. Le devenir à long terme est moins bon chez les malades souffrant d'angor instable ou d'infarctus sans sus-décalage ST que chez ceux qui présentent des infarctus avec surélévation ST [302]. Le score de risque GRACE est actuellement le plus utilisé, car il permet de pronostiquer la mortalité hospitalière immédiate et la mortalité à 6 mois (Tableau 9.3) [122]. La première dépend de l’âge, de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle sytolique, de l’insuffisance ventriculaire et de la créatininémie. La seconde dépend en plus de la déviation du segment ST, de l’élévation des enzymes et de la survenue d’un arrêt cardiaque. Ces données permettent de classer les patients en quatre catégories de risque. Risque très élevé : angor prolongé (> 20 minutes) et récurrent, angor persistant malgré un traitement maximal, sus-décalage persistant du segment ST (> 1 mm), décompensation Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 49 cardiaque avec ou sans nouvelle insuffisance mitrale, instabilité hémodynamique, arythmie ventriculaire maligne, élévation massive des troponines. Risque élevé : angor prolongé (> 20 minutes), ≥ 2 épisodes en < 24 heures, angor persistant malgré le traitement, sus- ou sous-décalage persistant du segment ST (> 1 mm), insuffisance mitrale nouvelle, élévation importante des troponines. Risque intermédiaire : angor de < 20 minutes, sous-décalage ST de 0.5-1 mm, inversion des ondes T, troponine peu élevée. Risque bas : angor d’effort d’apparition nouvelle, pas de modifications ou modifications transitoires de l’ECG, pas de modifications enzymatiques. Plusieurs autres facteurs interviennent dans l’évaluation du risque : le diabète, la polyvasculopathie, un bloc de branche gauche, ou un délai de > 4 heures depuis l’apparition des symptômes [245]. Après un SCA, la bithérapie antiplaquettaire (aspirine + ticagrelor, prasugrel ou clopidogrel) est poursuivie pendant 12 mois (voir Annexe B) [12,262]. Figure 9.18 : Algorithme de prise en charge du malade souffrant d'un syndrome coronarien aigu se présentant avec un susdécalage du segment ST (ST-elevation myocardial infarction ou STEMI). Le traitement de choix est la PCI (Percutaneous coronary intervention) si elle est réalisable dans les 2 heures après le premier contact médical (idéalement 90 minutes). Sinon, une fibrinolyse est réalisée dans un premier temps, et la PCI 12-24 heures plus tard [324]. Préhospitalier: aspirine, ticagrelor/clopidogrel, morphine ECG: sus-décalage ST ≥ 1 mm dans ≥ 2 dérivations < 30 minutes Urgences hospitalières: dosage troponines Anticoagulation Transfert direct en salle de cathétérisme PCI impossible dans un délai < 2 heures PCI possible < 2 heures Idéal < 90 min Fibrinolyse (< 2 heures) Angioplastie + stent PCI / PAC ultérieurs SCA avec sous-décalage du segment ST (angor instable et infarctus non-STEMI) L’angor instable et l’infarctus avec sous-décalage du segment ST (N-STEMI, non-ST-elevation myocardial infarction) se présentent initialement de la même manière, et ne sont différenciés qu’après quelques heures par l’élévation ou non des marqueurs de lésion myocardique (troponine, CK-MB) [12]. Le développement de tests ultrasensibles (0.002-0.01 ng/mL) pousse à classer comme infarctus N-STEMI des cas qui étaient considérés comme angor instable avec les tests de routine [46]. La prise encharge initiale est donc identique pour les deux entités ; elle est suivie ou non d’une angioplastie ± pose de stent (PCI) selon la gravité du cas (Tableau 9.4 et Figure 9.19A et 9.19B) [4,12,159a,165,261]. La prise en charge médicale est nécessaire à la stabilisation immédiate du Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 50 patient, mais celle-ci est une affaire d’heures et non de jours, car une stratégie invasive précoce améliore le pronostic. En effet, la mortalité et le taux d’infarcissement baisse de 30-50% si la PCI a lieu dans les 6-24 heures plutôt qu’à 3-5 jours [231,243,256]. Tableau 9.3 Scores de risque dans l’angor instable et l’infarctus sans surélévation ST (N-STEMI) Score TIMI (Thrombolysis In Myocardial Infarction) (chaque critère vaut 1 point) Age > 65 ans Présence de > 3 facteurs de risque (HTA, hyperlipidémie, diabète, tabagisme, anamnèse familiale) Coronaropathie avec > 1 sténose de > 50% Aspirine pendant les 7 jours précédents Angor récent (≥ 2 épisodes en ≤ 24 heures) Elévation des enzymes cardiaques Altération du segment ST ≥ 0.5 mm à l’admission Score de risque TIMI et risque cardiaque* 0-1 5% 2 8% 3 13% 4 20% 5 26% 6-7 41% * Risque de complications cardiaques: mortalité, infarctus, ischémie récidivante nécessitant une revascularisation (d’après référence 6). Score GRACE (Global Registry of Acute Coronary Events)* Age Fréquence cardiaque Pression artérielle systolique Insuffisance ventriculaire • Classe Killip 1 (absence de symptômes d'insuffisance cardiaque) • Killip 2 (râles de sase) • Killip 3 (oedème pulmonaire) • Killip 4 (choc cardiogène) Créatininémie Arrêt cardiaque Deviation du segment ST Déterminants supplémentaires de la mortalité à 6 mois Elévation des enzymes cardiaques Mortalité hospitalière: - Score < 108 < 1% - Score 109-140 1-3% - Score > 140 > 3% Mortalité à 6 mois: - Score < 88 < 3% - Score 89-118 3-8% - Score > 118 > 8% * Calculateur sur: www:outcomes.org/grace (d’après référence 122) Diagnostic initial: douleur thoracique typique avec irradiations, dyspnée, angoisse ; la présentation peut être atypique chez les femmes, les diabétiques et les personnes âgées. La nitroglycérine peut calmer la douleur, mais son effet n’a pas de valeur diagnostique [12]. Si nécessaire : sédation par morphine 2-5 mg iv. ECG 12 pistes : sous-décalage ST ≥ 0.05 mV en V2 et V3 ou ≥ 0.1 mV dans les autres dérivations, de type horizontal ou descendant. Traitement antiplaquettaire immédiat : aspirine 500 mg per os + dose de charge de ticagrelor (180 mg po) ou clopidogrel (300 mg po, 600 mg si PCI prévue). Le prasugrel (60 mg po) ne doit pas être administré en prétraitement avant que l’anatomie coronarienne ne soit connue en raison d’une augmentation du risque hémorragique; de plus, il ne diminue pas significativement le risque cardiaque à 30 jours dans les SCA non-STEMI [242a] ; il est contre-indiqué en cas d’AVC et d’âge > 75 ans [364]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 51 Dose d’entretien ultérieure : aspirine 150-325 mg à vie ; ticagrelor 2 x 90 mg/j ou clopidogrel 75 mg/j ; durée prévue de la bithérapie : 12 mois [324]. Les anti-GP IIb/IIIa (eptifibatide, tirofiban, abciximab) sont cantonnés au rôle de secours dans les cas à risque myocardique très élevé (troponine élevée, diabète) mais à risque hémorragique faible, et dans les cas de complications thrombotiques; ils sont déconseillés chez les patients dont l'anatomie coronaire n'est pas connue. Anticoagulation immédiate : héparine non-fractionnée (HNF), enoxaparine, fondaparinux ou bivalirudine ; l’HNF et la bivalirudine sont en principe prescrites pour les cas où une PCI est prévue, alors que l’enoxaparine et le fondaparinux sont une option possible pour les approches non-invasives (anticoagulants : voir Tableaux 8.1 et 8.3). L’anticoagulation est maintenue jusqu’à la sortie de l’hôpital [147a]. Un béta-bloqueur cardiosélectif n’est pas indiqué avant que le patient soit stabilisé, sauf en cas de tachyarythmies ; il est débuté à petites doses dans un deuxième temps. Les statines améliorent le pronostic et doivent être prescrites dès le premier jour ; un traitement en cours n’est pas interrompu. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) sont utiles en cas de dysfonction ventriculaire gauche, en général au-delà de 24 heures. Les dérivés nitrés atténuent l’angor. Les anticalciques ne sont utiles qu’en cas de vasospasme. Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens sont contre-indiqués [12]. Biomarqueurs : les troponines sont le marqueur le plus spécifique de la nécrose myocardique (troponine I > 0.04 mcg/L, troponine T > 0.1 mcg/L, sensibilité 100% à 12 heures), mais l’ascencion du taux n’est significatif que 4-6 heures après la lésion, le pic survenant à 12-24 heures. Le taux maximal est proportionnel à l’importance du dommage myocardique. L’utilisation simultanée des CK-MB augmente la sensibilité du test (voir Figure 9.8) [173]. Chez les patients qui présentent un SCA à risque élevé, un angor persistant malgré un traitement médical optimal, des arythmies et des troponines très élevées (infarctus sans surélévation ST confirmé par les enzymes à 6 heures) (score GRACE > 140) (voir Tableau 9.3) [122], on recommande une PCI (angioplastie et pose de stent) dans les 24 heures; le risque de récidive et de décès est ainsi diminué de plus de 30% par rapport au traitement médical seul [165,231,360]. De plus, la PCI est indiquée en cas de dysfonction ventriculaire (FE < 0.4), de choc cardiogène, d'arythmies ventriculaires, ou de récidive après revascularisation préalable [159a,165]. Pour les malades à risque intermédiaire (score GRACE 109-140), le traitement médical initial est en général suivi d’une angioplastie (PCI dans les 72 heures), mais l’option invasive est décidée en fonction de l’évolution [6]. Le traitement médical seul n’est recommandé que pour les malades à risque bas, c'est-à-dire ceux qui ont des troponines normales, un sous-décalage ST faible ou absent, des altérations fonctionnelles mineures et aucune complication [360]. Chez les patients à bas risque (score GRACE < 108), qui ne requièrent pas d’angiographie, un angio-CT, une angio-IRM ou une ergométrie (ECG d’effort, écho dobutamine) ont une valeur prédictive négative proche de 100% [259]; ces examens, réalisés dans les premiers jours, permettent un tri des patients en 2 catégories [12,137,159a] : • Examen normal : pas de coronaropathie, traitement médical ; • Examen positif : suite des investigations par angiographie ultérieure. La fibrinolyse est contre-indiquée dans l’angor instable sans surélévation ST et dans l’infarctus non-Q (non-transmural) [365]. Alors qu’elle est indiquée avec un délai < 2 heures dans les STEMI, la revascularisation par PCI ne modifie pas le pronostic si elle est réalisée à 12-24 heures dans les SCA non-STEMI [165,365]. Les pontages aorto-coronariens (PAC) en urgence ne sont indiqués que lors de persistance de l'angor malgré la PCI, d'occlusion ou de dissection du tronc commun ou de l'IVA proximale, et de revascularisation nécessaire dans une situation où l’anatomie coronarienne ne se prête pas à une PCI. Le bénéfice des PAC apparaît à long terme, chez les tritronculaires sévères et les diabétiques, et lors de dysfonction ventriculaire (voir Traitement interventionnel, page 64) [360]. Une élévation constante des enzymes signant un infarctus en cours est une contre-indication momentanée à la chirurgie. La cascade thérapeutique est fonction du risque de complications cardiaques que présente le Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 52 patient selon des scores tels que GRACE (Global Registry of Acute Coronary Events), TIMI (Thrombolysis In Myocardial Infarction) ou FRISC (Fast Revascularisation in Instability in Coronary Disease) (Tableau 9.3) [6,122,189]. Pour résumer, la prise en charge du SCA est adaptée à l’importance du risque présenté par le patient [4,165,365]. Tableau 9.4 Traitement de l’ischémie myocardique aiguë avec sous-décalage du segment ST (non-STEMI) En cours d'anesthésie Approfondir l'anaesthésie / analgésie Maintenir PAM > 80 mmHg Ventiler à FiO2 0.8 - 1.0 Optimaliser l’Hb (≥ 90 g/L) Prélever un échantillon de sang pour le dosage des troponines et des CK-MB Antiplaquettaires Aspirine (500 mg iv ou per os) Ticagrelor (180 mg po) ; si contre-indication ou indisponibilité : clopidogrel (300-600 mg po) Anticoagulation Héparine non-fractionnée (bolus 60 UI/kg, perf 12-15 UI/kg/h), bivalirudine (2 mg/kg/h), fondaparinux (2.5 mg scut) ou enoxaparine (1 mg/kg/12 h) Nitroglycérine en perfusion 5 – 20 mcg/kg/min (hors anesthésie, jusqu'à disparition des douleurs) Maintien de la pression de perfusion coronarienne Noradrénaline 0.03-0.5 mcg/kg/min Si choc cardiogène : Catécholamines α et β-stimulantes Contre-pulsion intra-aortique (CPIA) Baisse de la fréquence cardiaque (si la fonction ventriculaire gauche est conservée, FE > 0.35) β-bloqueur si tachycardie > 70 batt/min ou arythmie Metoprolol, atenolol, bisoprolol, ou autre β1-sélectif per os ou iv ; en anesthésie : bolus et/ou perfusion d'esmolol ; contre-indication : BAV, choc cardiogène Les β-bloqueurs ne sont pas indiqués en première intention Bloqueurs calciques Efficaces sur les spasmes coronariens, indiqués en deuxième ligne ou en cas de contre-indication aux bétabloqueurs Dilitiazem (0.1 mg/kg/min) ; avantage d'être bradycardisant (ne doit pas être associé à un β-bloqueur) Angioplastie coronarienne (PCI + stent) Délai de 12-24 heures Le succès initial de la reperméabilisation est de l’ordre de 95% Antagoniste GP IIb/IIIa (eptifibatide, tirofiban, abciximab) dans les cas à haut risque Cas à risque faible Traitement médical, pas de PCI Angio-IRM, angio-CT, épreuve d’effort secondairement Thrombolyse : contre-indiquée en cas de sous-décalage ST Risque élevé : aspirine, ticagrelor ou clopidogrel (ou prasugrel une fois que l’anatomie est connue et que la décision de PCI est prise), héparine non-fractionnée ou bivalirudine ou Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 53 fondaparinux ou héparine de bas poids moléculaire, coronarographie précoce impérative et PCI si indiquée (< 24 heures). Risque intermédiaire : aspirine, ticagrelor ou clopidogrel (ou prasugrel une fois que l’anatomie est connue et que la décision de PCI est prise), nitroglycérine, béta-bloqueur, fondaparinux ou héparine de bas poids moléculaire, coronarographie secondairement et PCI si indiquée (< 72 heures). Risque faible : aspirine, nitroglycérine en réserve, épreuve d’effort ultérieure. Figure 9.19A : Algorithme CHUV pour la prise en charge du malade souffrant d'un syndrome coronarien aigu : angor instable et infarctus non-STEMI [159a]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 54 Figure 9.19B : Algorithme CHUV pour la stratification du risque du malade souffrant d'un syndrome coronarien aigu : angor instable et infarctus non-STEMI [159a]. Infarctus aigu avec surélévation du segment ST (STEMI) Lorsqu'il y a menace d'infarctus transmural (STEMI, ST-elevation myocardial infarction), la thérapeutique de choix est une revascularisation en urgence par angioplastie (PCI), basée sur le raccourcissement maximal du délai entre le début des symptômes et la restauration du flux sanguin vers le myocarde ischémié, afin de limiter la taille de la lésion et les risques de complications (voir Figure 9.18) (Tableau 9.5) [12,261,324,360]. On ne dispose théoriquement que de 4-6 heures (golden hours) pour rétablir la perfusion, mais la mortalité à 1 an augmente de 8% pour chaque tranche de 30 minutes [90]. De ce fait, le délai recommandé est de ≤ 90 minutes entre le premier contact médical et la mise en place du cathéter dans la coronaire incriminée. Ceci impose la création d’un système intégré Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 55 et ultra-rapide depuis l’appel initial jusqu’au rétablissement de la perfusion myocardique en salle de cathétérisme (Figure 9.19C et 9.19D) [159a,262,324]. Tableau 9.5 Traitement de l’ischémie myocardique aiguë avec surélévation du segment ST (STEMI) En préhospitalier: Aspirine (250 mg iv ou po) Morphine (2.5 – 5 mg iv) Oxygénothérapie pour SaO2 > 90% Nitroglycérine (0.5 mg. perf 5 – 20 mcg/kg/min) ; traitement symptomatique des douleurs Raccourcissement maximal du délai jusqu’à la PCI (≤ 90 minutes), transfert direct en cathétérisme En cours d'anesthésie Approfondir l'anaesthésie / analgésie Corriger l'hémodynamique Ventiler à FiO2 0.8 - 1.0 Optimaliser l’Hb (≥ 90 g/L) Raccourcir au maximum du délai jusqu’à la PCI (≤ 90 minutes), abréger l’opération Prélever un échantillon de sang pour le dosage des troponines et des CK-MB Antiplaquettaires Aspirine (500 mg iv ou per os) Ticagrelor (180 mg po) ; si contre-indication ou indisponibilité : clopidogrel (600 mg po) Prasugrel (60 mg po) : seulement lorsque l’anatomie coronarienne est connue Anti-GP IIb/IIIa (abciximab, tirofiban, eptifibatide) : patients à haut risque ; contre-indications : hémorragie active ou dans les 30 jours, chirurgie récente, dissection aortique, péricardite aiguë, AVC Anticoagulation Héparine non-fractionnée (bolus 60 UI/kg, perfusion 15 UI/kg/h), bivalirudine (2 mg/kg/h) ou enoxaparine (1 mg/kg/12 h) Angioplastie coronarienne d’urgence (PCI + stent) Délai < 2 heures Tout STEMI datant de < 12-24 heures Dilatation-stenting limité au(x) vaisseau(x) incriminé(s) Fibrinolyse (taux de reperméabilisation de 50 – 60%) Indiquée dans les plus brefs délais si une PCI n’est pas envisageable avant 2 heures Par ordre décroissant d’efficacité : tenekteplase (30-50 mg), reteplase (2x 10 U en 2 min), alteplase (100 mg/ 90 min), streptokinase (1.5 millions UI / 30 min) PCI secondaire à 12-24 heures Diagnostic initial posé en ≤ 10 minutes sur le lieu de l’appel (premier contact médical) sur la base d’un ECG 12 pistes : surélévation du segment ST dans deux dérivations consécutives de ≥ 0.15 mV chez les femmes et ≥ 0.2 mV chez les hommes. Présentations atypiques possibles : bloc de branche gauche, ventricule électro-entraîné, élévation ST en aVR, symptomatologie douloureuse persistante malgré une variation ST non-diagnostique. La symptomatologie typique consiste en douleur angineuse durant > 20 minutes et ne cédant pas à la nitroglycérine, mais 30% des STEMI présentent des symptômes atypiques. Traitement immédiat : aspirine 500 mg per os ou iv ; ticagrelor 180 mg per os (à défaut : clopidogrel 600 mg per os) ; si nécessaire : morphine 2-5 mg iv. Le prasugrel (60 mg per os) n’est pas recommandé tant que l’anatomie coronarienne n’est pas connue, ni en cas de risque hémorragique élevé. Logistique raccourcissant au maximum le délai jusqu’à la reperfusion : transfert direct dans un hôpital assurant un service de cathétérisme cardiaque 24/24 heures et 7/7 jours dans un délai de 20 minutes, court-circuit des urgences et du déchocage au profit d’un acheminement direct en salle de cathétérisme (door-to-balloon delay < 60 minutes), appel téléphonique unique Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 56 mettant en route toute la chaîne des intervenants, protocole commun à tout le réseau hospitalier de la région, télétransmission de l’ECG de départ au cardiologue de garde. Reperfusion : tout patient présentant un STEMI dans les 12 heures précédentes (idéalement 90 minutes) est candidat à une reperfusion en urgence par angioplastie coronarienne, accompagnée ou non de pose de stent. Cette option est étendue au-delà de 12 heures pour les malades chez qui persiste l’évidence d’une ischémie active (symptômes cliniques ou ECG), mais non aux malades asymptomatiques. La PCI est nettement supérieure à la fibrinolyse. La fibrinolyse est recommandée s’il est impossible de réaliser une PCI dans un délai de ≤ 120 minutes depuis le diagnostic (hôpital ne disposant pas de cathétérisme cardiaque). Elle doit être conduite le plus rapidement possible. Chez les patients qui n’ont pas eu accès à une PCI immédiate (< 2 heures), la fibrinolyse accompagnée d’antithrombotique/antiplaquettaire et couplée à une PCI retardée à 12-24 heures permet une reperfusion aussi efficace que la PCI d’emblée [11]. Bien qu’environ la moitié des patients présentant un STEMI souffre d’une maladie tritronculaire, seul le vaisseau incriminé dans l’infarctus aigu en cours doit être dilaté et stenté en urgence. Peuvent faire exception à cette règle des lésions critiques (sténose proximale > 90%) ou instable chez un patient en choc cardiogène [324]. La pose de stent dans la foulée diminue le risque de réoclusion. Un stent passif (BMS, bare metal stent) est préférable à un stent actif (DES, drug-eluting stent) en cas de risque hémorragique élevé, d’incapacité à suivre un traitement antiplaquettaire de 12 mois, ou d’intervention chirurgicale prévisible dans l’année qui suit [261,262]. La PCI est précédée de l’administration d’antiplaquettaires : bithérapie avec aspirine + ticagrelor (à défaut clopidogrel) ; le prasugrel est indiqué une fois l’anatomie coronarienne connue et seulement si le risque hémorragique est faible. Elle est accompagnée d’une anticoagulation par héparine non-fractionnée (HNF), bivalirudine ou enoxaparine; en l’absence d’indications propres (FA, thrombo-embolie, etc), celle-ci n’est pas prolongée au-delà de la PCI. Les anti-GP IIb/IIIa (tirofiban, eptifibatide, abciximab) ne sont plus indiqués de routine, particulièrement lors d’utilisation de ticagrelor et de bivalirudine, mais seulement comme sauvetage dans les cas de thrombus massif, de phénomène de non-reperfusion (no-reflow) ou de complication thrombotique. La fibrinolyse est maximalement efficace si elle est pratiquée moins de 2 heures après le début des symptômes avec un fibrinolytique spécifique (tenecteplase, alteplase, reteplase). Ses contre-indications sont un AVC hémorragique, un risque élevé d’hémorragie digestive et une intervention chirurgicale ou un traumatisme récents. Elle est accompagnée d’une anticoagulation pendant 2-8 jours (HNF, enoxaparine ou fondaparinux) et d’une bithérapie antiplaquettaire pendant 2 semaines (aspirine + clopidogrel) [262]. L’échec de la fibrinolyse ou la survenue d’un choc cardiogène nécessite le transfert dans une institution où peut se pratiquer une PCI (délai de 2-3 heures après l’administration du fibrinolytique) [262]. La revascularisation angiographique donne des meilleurs résultats que la fibrinolyse à court et à long terme, particulièrement si le délai se prolonge jusqu’à 12 heures : son taux de reperméabilisation immédiate est de 95% au lieu de 50-60% pour la fibrinolyse [7] ; la réduction de la taille de l'infarctus est deux fois plus importante avec la PCI, et ceci à tous les délais d'intervention [306]. La PCI est également préférable en cas d’atteinte de la paroi antérieure du VG, de choc cardiogène, de persistance ou de récidive des symptômes au-delà de 12 heures, et chez les patients à risque hémorragique élevé, notamment intracrânien. Toutefois, la PCI n’est pas indiquée au-delà de 24 heures si le vaisseau incriminé est totalement occlus et le patient asymptomatique [262]. Lors de choc cardiogène, la PCI peut s’accompagner d'une contre-pulsion intra-aortique, mais cet élément ne semble pas apporter de bénéfice sur la mortalité [262,324,360]. La place des pontages aorto-coronariens (PAC) dans l'infarctus aigu est très restreinte, parce qu'une revascularisation chirurgicale précoce entraîne une extension et une hémorragie de la zone infarcie (CEC, clampage aortique, cardioplégie, manipulation du cœur, etc). Les PAC ne sont indiqués en urgence que dans les situations de STEMI suivantes [262,324,360]. Menace d'infarcissement d'un territoire étendu dans une anatomie défavorable à la PCI (tronc commun, IVA proximale) ; Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 57 Anatomie défavorable à la PCI accompagnée de choc cardiogène ou d’ischémie persistante (angor subintrant, signes électriques à l’ECG) ; Pontages simultanés à une intervention en CEC pour des complications aiguës de l’infarctus (IM massive, CIV, rupture pariétale) ; Echec de PCI, dissection coronarienne proximale. Figure 9.19C : Algorithme CHUV de prise en charge extrahospitalière du malade souffrant d'un syndrome coronarien aigu : infarctus STEMI [159a]. Une élévation majeure des troponines signant un infarctus en cours est une contre-indication à la chirurgie. La mortalité opératoire des patients opérés 12 à 48 heures après infarctus est de 15 à 20%, alors qu'elle retombe à 4-5% au-delà de 48 heures [336]. Après un infarctus, le but de la Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 58 revascularisation est de limiter la taille de la lésion et de protéger la zone bordante compromise. Les PAC en urgence sont souvent réalisés dans des conditions hémorragiques difficiles, car les anticoagulants et les antiplaquettaires ne peuvent pas être interrompus dans les délais habituels (voir Tableau 9.8 et Tableau 8.12). Figure 9.19D : Algorithme CHUV de prise en charge hospitalière du malade souffrant d'un syndrome coronarien aigu : infarctus STEMI [159a]. A la suite d’un STEMI, le traitement médical consiste en antiplaquettaires et statines. Les bétabloqueurs ne sont formellement recommandés (classe I) qu’en cas d’insuffisance cardiaque (FE ≤ Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 59 0.4) ; dans ce cas, le béta-bloqueur est débuté dans les premières 24 heures s’il n’y a pas de contreindications. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les bloqueurs du récepteur de l’angiotensine (BRA) ne sont indiqués qu’en présence d’insuffisance cardiaque (FE ≤ 0.4), de diabète ou d’infarctus antérieur ; l’IEC/BRA est également débuté dans les premières 24 heures [262,324,360]. Ischémie et infarctus per- et post-opératoires Dans la période périopératoire, la survenue d’altérations électriques à l’ECG (sus- ou sousdénivellation du segment ST, bloc de branche gauche) et/ou l’élévation des troponines doivent déclencher une prise en charge clinique analogue à celle recommandée pour l’infarctus STEMI ou non-STEMI [31a]. Mesures générales • Approfondir l'anaesthésie ou l’analgésie • Maintenir PAM > 80 mmHg • Ventiler à FiO2 0.8 - 1.0 • Optimiser l’Hb (> 90 g/L) • Prélever un échantillon de sang pour le dosage des troponines et des CK-MB Antiplaquettaires • Aspirine 500 mg iv ou per os • Ticagrelor (180 mg po/sonde gastrique) ; si contre-indication ou indisponibilité : clopidogrel (300-600 mg po/sonde gastrique) Anticoagulation • Héparine non-fractionnée (bolus 60 UI/kg, perf 12-15 UI/kg/h), ou bivalirudine (2 mg/kg/h), ou fondaparinux (2.5 mg scut) ou enoxaparine (1 mg/kg/12 h) Autre traitement médical • Noradrénaline (0.03-0.5 mcg/kg/min) • Nitroglycérine (5-20 mcg/kg/min) • Atorvastatine (20 mg per os/sonde gastrique), simvastatine (20 mg) Patient hémodynamiquement stable ou en cas de tachycardie/arythmie • Béta-bloqueur : metoprolol, atenolol, bisoprolol, ou autre béta-1-sélectif per os ou iv • En anesthésie : bolus et/ou perfusion d'esmolol • Contre-indication : BAV, choc cardiogène Patient hémodynamiquement instable • Catécholamines α et β-stimulantes • Contre-pulsion intra-aortique (CPIA) Angiographie coronarienne (± dilatation et pose de stent) • Dans les 90 minutes si STEMI • Dans les 12-24 heures si non-STEMI ou angor instable Complications du SCA Plusieurs complications graves menacent le patient dans les jours qui suivent un SCA, particulièrement de type STEMI. Choc cardiogène et insuffisance ventriculaire ; la contre-pulsion intra-aortique (CPIA) est la mesure de choix pour soulager le VG et améliorer la perfusion coronarienne sans augmenter la mVO2. Arrythmies : FA, bloc AV, tachycardie ou fibrillation ventriculaires. Insuffisance mitrale sur dilatation du VG, ischémie pariétale ou rupture de muscle papillaire ; dans les IM sévères, la CPIA est efficace dans l’attente de la réparation chirurgicale. CIV : la fermeture chirurgicale s’impose en urgence. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 60 Rupture pariétale : le plus souvent létale par tamponnade aiguë. Anévrysme pariétal du VG : les IEC inhibent le remodelage, mais l’excision chirurgicale est souvent nécessaire. Thrombus intraventriculaire gauche : il survient en général sur une zone akinétique, le plus souvent à l’apex ; l’anticoagulation est requise pour au moins 6 mois. Traitement du syndrome coronarien aigu (SCA) Syndrome coronarien aigu sans surélévation ST (N-STEMI) : - Le traitement est axé sur le degré de risque du patient ; - Le traitement médical est le premier choix chez les patients à risque bas ; - L’angioplastie (PCI) ± stents est recommandée dans les 12-24 heures chez les patients à risque élevé. Syndrome coronarien aigu avec surélévation ST (STEMI) : - L’angioplastie (PCI ± stents) en urgence est le traitement de choix de tout STEMI survenu dans les 12 heures - Le délai idéal entre le diagnostic et la PCI est ≤ 90 minutes - La thrombolyse intraveineuse est une alternative possible dans les 2 heures suivant l’apparition des symtômes si la PCI est impossible dans les délais ; cette dernière est réalisée ultérieurement (dans les 12-24 heures) Indications aux pontages aorto-coronariens en urgence : - Menace d’infarcissement dans un territoire étendu où la PCI n’est pas indiquée (tronc commun, IVA proximale) ; - Occlusion ou dissection du tronc commun ; - Persistance de l’angor malgré un traitement maximal ; - Complications aiuës (IM massive, CIV, rupture de pilier ou de paroi). Traitement médical de l'ischémie myocardique chronique Il est important pour un anesthésiste d’être au courant des grandes lignes thérapeutiques de l’ischémie chronique pour deux raisons : 1) connaître les substances que prennent les patients qu’il endort, et 2) pouvoir équilibrer un traitement préopératoire. Le traitement de la maladie coronarienne vise à améliorer le pronostic et à réduire les symptômes [60,112,123,124,164,214]. Il est basé sur deux pôles : Une hygiène de vie (Tableau 9.6) ; Un suivi médicamenteux (Tableau 9.7). Traitement de la coronaropathie Le but est de réduire le nombre et le volume des plaques athéromateuses, de stabiliser les lésions instables et d’améliorer la fonction endothéliale. Modifications du style de vie ; Inhibition de l’agrégation plaquettaire ; Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 61 • Aspirine 75 – 325 mg/j à vie ; réduction de mortalité de 20% après syndrome coronarien aigu (SCA) ; • Clopidogrel (75 mg/j) en cas d’intolérance à l’aspirine, ou en association pendant 12 mois après un SCA ; Hypolipémiants : • Statines pour maintenir le LDL à 2.6 mmol/L ; les statines ont des effets hypolipémiants, anti-inflammatoires et stabilisateurs des plaques athéromateuses ; chez le coronarien, elles réduisent de 30% la mortalité et le risque de récidive cardiovasculaire ; • Ezétimide (inhibition de l’absorption entérale du cholestérol). Tableau 9.6 Prévention de l'ischémie myocardique chronique Arrêt complet de la fumée ; Maintien du poids à un BMI de 20 et du tour de taille à < 102 cm chez l’homme et à < 89 cm chez la femme : Apport total de graisse de ≤ 30% de l’apport total d’énergie ; Apport de graisses saturées à ≤ 10% de l’apport total des graisses ; Apport quotidien de cholestérol < 300 mg ; Remplacement des graisses saturées par des graisses poly-insaturées ; Cinq prises quotidiennes de fruits et légumes ; Au moins deux repas de poisson par semaine (ou oméga-3) ; Limitation de l’alcool à deux verres de vin par jour ; Limitation de l’apport de sel à 100 mmol par jour ; Activité physique aérobique régulière (30 min/jour, ou 4 heures/sem) ; Hypolipémiants : statines, acide nicotinique, ezetimibe ; Maintien de la pression artérielle ≤ 140/85 mmHg ; Contrôle de la glycémie ; Aspirine chez patients à risque CV ≥ 20% à 10 ans. D’après réf 164. Traitement du remodelage ventriculaire Le but est de prévenir les modifications structurelles défavorables qui surviennent dans le myocarde à cause de l’ischémie ou d’un infarctus, et de freiner l’installation d’une insuffisance ventriculaire. Béta-bloqueurs : améliorent le pronostic après infarctus ou insuffisance du VG (réduction de risque de 30%) ; traitement à vie ; • Baisse du tonus sympathique et de la pression artérielle ; • Amélioration du rapport DO2/VO2 myocardique ; • Diminution du risque d’arythmie. Inhibiteurs de l’enzyme de conversion du système rénine-angiotensine (IEC) ; • Vasodilatateurs des vaisseaux de résistance et de capacitance ; • Freinateurs du remodelage ventriculaire et de l’apoptose ; • Stabilisation endothéliale ; • Indiqués chez tous les patients coronariens avec dysfonction du VG asymptomatique ou symptomatique, hypertension artérielle, et/ou diabète. Antagonistes des récepteurs de l’angiotensine (ARA) : prescrit en cas d’intolérance aux IEC ; effets identiques. Inhibiteur de l’aldostérone (éplérénone) : efficace si débuté immédiatement après un infarctus avec FE abaissée (FE ≤ 0.4), insufisance cardiaque ou diabète. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 62 Tableau 9.7 Traitement de l’ischémie myocardique chronique Dérivés nitrés : Veinodilatation et dilatation des vaisseaux coronariens épicardiques et collatéraux ; Une tolérance s'installe en cas d'utilisation constante, d’où la nécessité de prévoir une fenêtre quotidienne, habituellement la nuit. β-bloqueurs : Diminution de la mVO2 (baisse de fréquence, de contractilité et de postcharge) et augmentation du DO2 (allongement de la diastole) ; diminution des arythmies ; Les β1-séléctifs diminuent la mortalité et le taux de morts subites après infarctus myocardique et chez les hypertendus. Antiplaquettaires: Aspirine ; elle réduit le risque de récidive d’accidents cardiovasculaires de > 30% ; Clopidogrel; indiqué en cas d'intolérance à l'aspirine et/ou de plaques instables. Statines Hypolipémiant, antiinflammatoire et stabilisateur des plaques athéromateuses ; Réduction de mortalité et de récidive cardiovasculaire de > 30% ; Des hypolipémiants sont ajoutés en complément aux statines pour baisser les LDL. Inhibiteurs de l'enzyme de conversion Utiles en cas d'hypertension artérielle et/ou d'insuffisance cardiaque associée; ils diminuent la mortalité chez les patients ischémiques avec FE basse ou insuffisance gauche après infarctus ; Pas indiqués de routine en l'absence de dysfonction ventriculaire. Bloqueurs calciques: Vasodilatateurs épicardiques et systémiques, ils baissent la contractilité et la fréquence (sauf la nifédipine), et freinent la conduction AV ; Alternative pour les malades qui ne supportent pas les β-bloqueurs (asthme, angor de Prinzmetal, vasculopathie artérielle) ; Potentiellement dangereux en cas d'insuffisance cardiaque associée. Traitement de l’ischémie myocardique chronique Le but est d’améliorer le transport d’O2 et de diminuer sa consommation au niveau myocardique. On joue sur plusieurs facteurs (voir Tableau 9.7). β-bloqueurs : ils diminuent la mVO2 (bradycardie, effet inotrope négatif). • Ils sont un traitement d’appoint dans le SCA et un bon effet contre l’angor ; • Ils ne sont pas associés à une réduction du risque cardiovasculaire dans la coronaropathie stable [15]; • En préopératoire, ils ont les mêmes indications qu’en dehors du contexte chirurgical (voir Chapitre 3 β-bloqueurs) [120]. Bloqueurs calciques : vasodilatateurs épicardiques et systémiques, ils baissent la contractilité de manière variable et sont potentiellement dangereux en cas d'insuffisance cardiaque associée. • Non-dihydropyridines (diltiazem, vérapamil) : effet inotrope et chronotrope négatifs, frein à la conduction AV ; risque de bradycardie et de bloc ; • Dihydropyridines (amlodipine, nifédipine) : effet tachycardisant ; • Alternative pour les malades qui ne supportent pas les β-bloqueurs (asthme, angor de Prinzmetal, vasculopathie artérielle) ; • Excellents anti-hypertenseurs (mais risque de PAdiast trop basse). Dérivés nitrés : vasodilatateurs des vaisseaux veineux, épicardiques et des collatérales, mais non des vaisseaux résistifs. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 63 • Freinent la vasoconstriction due au dysfonctionnement endothélial dans la maladie athéromateuse (par libération de NO•) ; • La veinodilatation diminue la tension de paroi ventriculaire ; • Risque d’accoutumance ; • Traitement de la crise d’angor, pas d’effet prophylactique ni d’amélioration du pronostic à long terme. Molsidomine : effet et mécanisme identique à ceux des nitrés. • Libération de NO• ; • Vaodilatation veineuse et coronarienne. Nicorandil : activateur des canaux potassiques (KATP) et diminution du Ca2+ cytoplasmique. • Vasodilatateur veineux et coronarien ; • Améliore le pronostic à long terme. Ranolazine : inhibition du courant sodique tardif et diminution du Ca2+ cytoplasmique. • Effet lusitrope positif et effet anti-ischémique ; • Allongement QT ; • Adjuvant en cas d’angor réfractaire. Ivabradine : inhibiteur d’un canal ionique spécifique du nœud sinusal. • Effet bradycardisant (allongement de la diastole) ; • Pas d’effet inotrope, pas d’hypotension ni de bloc AV ; • Alternative en cas de contre-indication aux β-bloqueurs. Traitement interventionnel La revascularisation coronarienne est le premier choix thérapeutique de la maladie coronarienne sévère et des syndromes coronariens instables. Le but de toute revascularisation est triple : Reperfusion de la masse myocardique ischémiée ; Soulagement de l'angor persistant malgré le traitement médical ; Amélioration de la survie à long terme. Angioplastie coronarienne et stents passifs Les lésions qui ont le meilleur pronostic pour l'angioplastie percutanée sont des obstructions nonexcentriques, sans calcifications importantes, sur des vaisseaux de dimensions moyennes, à distance d'embranchements importants, chez des malades mono- ou bi-tronculaires avec une fonction ventriculaire conservée (FE > 0.4). Les facteurs de risque qui péjorent les résultats sont l'âge avancé (> 75 ans), le diabète, le sexe féminin, la sténose du tronc commun, la dysfonction ventriculaire, et une zone de myocarde à risque très étendue [205]. La PCI est indiquée dans les 2 heures lors d'ischémie aiguë avec surélévation du segment ST. En résumé, les indications classiques sont: Coronaropathie mono- ou bi-tronculaire ; Absence de lésion, ou lésion protégée, du tronc commun ou de l’origine de l'IVA ; Configuration anatomique adéquate ; Fonction VG conservée ; Intervention de sauvetage. Le taux de perméabilité des stents métalliques classiques (stents passifs, bare metal stents ou BMS) est de 85 à 90% à 1 an. Le taux d'infarcissement sur thrombose du stent pendant le premier mois est de 12% [147,310]. Les premiers jours, l’armature est en contact direct avec le sang, puis une mince membrane de fibrine recouvre le stent. Il faut 6 semaines pour qu'il soit protégé par ce qui n'est encore qu'une couche de cellules musculaires lisses, et 12 semaines pour que la prothèse soit complètement recouverte d'endothélium (voir Figure 3.13) [139]. Ceci explique que le stent soit l'équivalent d'une plaque instable pendant plusieurs semaines. Passés les 9 premiers mois, le gain est stable pendant Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 64 plusieurs années. Le taux de thrombose est d’à peine 2% pendant le premier mois et < 0.1% au-delà. Le problème majeur avec les stents passifs est leur taux élevé de resténose : 12-25% entre 6 et 12 mois [9,310]. Chez les malades peu compliants, chez ceux qui présentent un risque hémorragique majeur, et chez ceux qui ont une probabilité élevée d’intervention chirurgicale dans un futur proche, il est préférable de n’implanter que des stents passifs, ou de prévoir des pontages aorto-coronariens [67,98,324]. Stents actifs C'est pour parer au risque de resténose que les stents à élution, ou stents actifs (drug-eluting stent ou DES), sont recouverts de substances qui libèrent progressivement des produits antiprolifératifs. Ces stents sont constitués de trois composants : Armature : elle assure la rigidité du stent ; les nouveaux alliages permettent un meilleur déploiement, davantage de flexibilité et une apposition plus complète ; la taille des barrettes diminue (60-160 µm) ; • Acier, alliages chrome-cobalt ou platine-cobalt ; • Résorbable : magnésium, polymère d’acide L-lactique. Matrice : support chimique de l’agent antiproliférant, elle assure la cinétique et l’homogénéité de l’élution ; • Polyoléfine, phosphorylcholine, polyéthylène-métacrylate, fluoropolymère ; • Résorbable : acide polylactique. Agent antiproliférant : dérivés liposolubles d’immunosuppresseurs et d’antifongiques ; • Sirolimus (Orsiro™); • Paclitaxel (Taxus™); • Stents actifs de 2ème et 3ème génération : zotarolimus (Endeavor™, Resolute™), everolimus (Xience V™, Synergy™), biolimus (Biomatrix™). Les stents à élution ont réduit à 0.5-3% le taux de resténose à 1 an, sans modification de la mortalité [24,147,159,322]. Mais le prix à payer pour cet avantage est un long délai pour la réendothélialisation, car le relargage de ces substances est très progressif. Dans une étude angioscopique réalisée entre 3 et 6 mois, seuls 13% de la surface des stents enduits de sirolimus étaient réendothélialisés, alors que tous les stents passifs étaient complètement recouverts [186]. Sur une période d’observation allant jusqu’à 40 mois, des examens autopsiques de malades porteurs de stents actifs ont montré que l’endothélialistion ne dépasse pas 46% de la surface à 1 an, alors que les stents passifs sont entièrement recouverts entre 3 et 6 mois ; ce retard est plus important chez les patients avec des thromboses que chez ceux dont les stents sont perméables [166]. Contrairement à la néointima épaisse qui se forme après angioplastie ou après stent passif, la surface des stents actifs est couverte d’une couche endothéliale fine et fragile, très voisine de celle d’une plaque instable [363]. Cette situation augmente le risque de thrombose [89] et requiert une double thérapie antiplaquettaire (aspirine + ticagrelor, prasugrel ou clopidogrel) en sus de l’aspirine pendant 6-12 mois [141,185,205,324]. Le risque de thrombose de stent (TS) est de 2-3% pendant le 1er mois, de 2% jusqu’à 6 mois et de 1% entre 6 mois et 1 an ; au-delà d’un an, lorsque les patients ne sont plus sous bi-thérapie continue, le risque de thrombose tardive est de 0.4-0.6% par an (2.2% à 4 ans), ce qui est plus élevé que pour les BMS [53,81,89,317,318,323,327]. Bien qu’elle soit un événement rare, la thrombose de stent est extrêmement dangereuse, car elle correspond à l’occlusion abrupte et totale d’un vaisseau dont le flux était normal et la collatéralisation faible. Elle est grevée d’un taux d’infarctus de 11-48% et d’une mortalité de 9-45% (moyenne 25%) [225]. La resténose, au contraire, est un événement progressif et bénin, dont la mortalité est < 1% [329,363]. L’accroissement de thrombose tardive avec les stents actifs de première génération par rapport aux stents passifs (2.2% versus 0.7% à 4 ans) est compensé par un plus faible taux de thrombose précoce et une moindre nécessité de revascularisation secondaire Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 65 [363]. Les stents actifs sont très dépendants de la bithérapie. Les individus porteurs de stents actifs et prenant toujours du clopidogrel après 24 mois ont un taux combiné de mortalité et d’infarctus de 3.1%, alors que ceux qui ont arrêté leur clopidogrel à 6 mois ont un taux combiné de 7.2% [102]. Chez les porteurs de stents passifs, le clopidogrel à long terme n’apporte aucun bénéfice. Ces données concernent les stents actifs de première génération. Avec les DES de 2ème et 3ème générations, des progrès techniques (armature en magnésium ou en polylactate, matrice biorésorbable) et de nouvelles substances anti-prolifératives (zotarolimus, everolimus, biolimus) modifient les résultats, car l’endothélialisation y est plus rapide et le taux de thrombose 2 à 3 fois plus faible [269,286]. La bithérapie peut même être raccourcie à 9 mois (everolimus) ou à 6 mois (biolimus sur stent biodégradable) [57,330]. Toutefois, la plupart des études sur les DES de nouvelles générations concerne des situations à risque coronarien modéré ; d’autre part, l’absence de recul à long terme et le manque d’expérience dans le périopératoire, qui est une situation à haut risque, n’autorise pas pour l’instant à modifier les recommandations en vigueur, à savoir le maintien de la bithérapie en cours pendant les 12 premiers mois et un délai idéal d’un an pour toute intervention chirurgicale noncardiaque élective. La thrombose de stent est un accident d’origine multifactorielle, dont les principaux prédicteurs peuvent être classés par ordre d’importance décroissante [79,81,129,310,318]. La durée du traitement antiplaquettaire (voir Arrêt des antiplaquettaires, page 87). Le délai entre la revascularisation et l’interruption de la bithérapie est probablement l’élément le plus important, notamment lorsqu’il est inférieur à 6 mois. La chirurgie non-cardiaque. L’acte chirurgical s’accompagne d’un syndrome inflammatoire systémique et d’un état hypercoagulable, particulièrement importants lors d’intervention majeure. D’autre part, le risque est d’autant plus élevé que le délai entre la pose de stent et l’opération est plus bref. La pose de stents lors de syndrome coronarien aigu (SCA) et la persistance d’un syndrome coronarien instable. La progression de la maladie coronarienne. La moitié des complications au-delà d’une année après revascularisation coronarienne survient dans le vaisseau incriminé, mais la moitié apparaît dans un autre vaisseau sous forme d’une progression de la maladie athéromateuse [328]. L’anatomie coronarienne. Les stents très proximaux ou ceux situés dans les vaisseaux dominants sont considérés comme à haut risque. Les stents sous-dimensionnés dans de petits vaisseaux ont une haute incidence de thrombose [246]. Les problèmes techniques : malapposition, dissection, emboîtement de stents, etc. Ils sont une cause prédominante de thrombose dans les 30 premiers jours après l’implantation, alors que les thromboses tardives sont essentiellement influencées par le degré de recouvrement endothélial et par l’intensité du traitement antiplaquettaire. Les indications hors recommandations (off-label indications) des stents actifs : plus de 50% des DES sont placés dans des situations qui ne correspondent pas aux indications formelles pour lesquels ils ont été conçus : stents multiples, emboîtés, situés à des bifurcations, longueur de sténose > 36 mm, coronopathie polytronculaire. Ceci double le risque de thrombose tardive (HR 2.3) [222,362]. Les comorbidités : diabète, insuffisance rénale, dysfonction ventriculaire, maladie cancéreuse (hypercoagulabilité, syndrome paranéoplasique), âge avancé. Une inhibition plaquettaire inadéquate. Compte tenu de l’incidence de faibles répondeurs à l’aspirine et au clopidogrel, environ 20% des patients revascularisés ne bénéficient pas d’un traitement optimal. Outre le respect de leurs indications propres (voir Comparaison des thérapeutiques, page 71), plusieurs stratégies pourraient améliorer la sécurité des stents actifs [162]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 66 Prolonger la durée de la bithérapie, ce qui accroît le taux d’hémorragies (+ 30%), mais est justifiable dans certaines situations à très haut risque (voir ci-dessous) [363]. Augmenter la puissance de la thérapie antiplaquettaire : clopidogrel 150 mg/jour, adjonction de cilostazol (Pletal®, 200 mg/jour) [333], remplacement du clopidogrel par du prasugrel ou du ticagrelor [128]. Déterminer la résistance des patients aux antiplaquettaires par un test d’agrégabilité plaquettaire au moment de la pose de stent et y adapter la thérapeutique : doses élevées de clopidogrel, passage au prasugrel ou au ticagrelor, stent passif ou PAC chez les nonrépondeurs. Malheureusement, aucun des tests actuels n’est suffisamment fiable pour assurer une disicrimination rigoureuse [111], et l’étude de leur impact donne des résultats qui ne répondent pas aux attentes [72,284]. Utiliser exclusivement des stents actifs de nouvelles générations, moins thrombogènes. Bien que la durée du traitement antipaquettaire puisse probablement être raccourcie avec les stents résorbables, on ne dispose d’aucune donnée sur leur risque propre en périopératoire. Durée du traitement antiplaquettaire Pendant les 48 premières heures après une PCI avec pose de stents, les anti GP IIb/IIIa ont été souvent prescrits pour éviter les thromboses précoces (SCA, stents à haut risque), mais leur utilisation n’est plus recommandée dans les nouvelles Guidelines européennes [147a,324,360]. Une double thérapie antiplaquettaire (aspirine + clopidogrel ou prasugrel ou ticagrelor) est prescrite pour les durées suivantes, variables selon les situations (recommandations européennes) (Tableau 9.8) [147a,243a,324,360]. 2 semaines après angioplastie élective au ballon simple ; 3 mois après angioplastie au ballon à élution ; 4 semaines après la mise en place de stents passifs (BMS), idéalement 12 mois en cas de SCA ; 12 mois après l’implantation de stents actifs (DES) de 1ère génération, 6-12 mois après implantation de DES de 2ème et 3ème génération ; durée > 12 mois possible en cas de stents à très haut risque, mais cette option s’avère de moins en moins justifiée [348] ; 12 mois lors de traitement conservateur de SCA. Ces durées correspondent à celles nécessaires pour que l’armature métallique des stents soit recouverte d’une couche cellulaire ; tant que ce n’est pas le cas, les stents se comportent comme des plaques instables. Ces recommandations s’accompagnent d'un renvoi de toute opération élective pendant 6-12 semaines après stents passifs et pendant une année après stents actifs. L’aspirine est prescrite à vie et ne doit pas souffrir d’interruption, quel que soit le type de stent. Sous antiplaquettaires, un stent est l’équivalent d’une coronaropathie stable ; lorsqu’on les arrête, il se comporte comme une plaque instable [115,141]. La question de la durée de la bithérapie est encore débattue (voir Annexe B). Dans les stents à très haut risque ou chez les patients qui ont déjà subi une thrombose de stent, il est probablement plus sûr de continuer le clopidogrel (ou prasugrel/ticagrelor) à très long terme [129,360] ; c’est le cas de 29% des DES [89]. Dans les situations habituelles, il semble que le clopidogrel au-delà d’un an diminue peu la mortalité à long terme [102]. L’étude PRODIGY, qui compare la prescription de clopidogrel pour 6 mois versus 24 mois chez 2'013 patients porteurs de stents, ne trouve pas de différence dans les taux d’infarctus, d’AVC, de thrombose de stent ni de décès (HR 0.98) ; par contre, le risque hémorragique est nettement plus élevé (HR 2.96) chez les malades qui consomment le plus longtemps du clopidogrel [348]. Dans l’étude sud-coréenne EXCELLENT (6 ou 12 mois de clopidogrel après stents actifs), l’incidence de mortalité et d’infarctus à 1 an n’est pas globalement différente (4.8% versus 4.8%), sauf chez les diabétiques et les patients à haut risque, où elle est significativement plus élevée chez ceux qui ne reçoivent que 6 mois de clopidogrel (HR 3.16-6.02) [144]. Il est même possible de restreindre la bithérapie à 3 mois avec certains DES de 3ème génération chez des patients à bas risque sans SCA [178]. Mais la nature de l’interruption a un impact significatif sur les complications : celles-ci sont 2 à 7 fois Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 67 plus fréquentes lors d’un arrêt « sauvage » que lors d’un arrêt préopératoire (+ 41%) ou d’un arrêt programmé (- 37%) [230]. Pour l’instant, ces travaux ne remettent pas en question la bithérapie pendant 12 mois après la pose de stents actifs lorsqu’elle est indiquée, mais soulignent l’équilibre à rechercher par rapport au risque hémorragique. D’autre part, cesser la bithérapie après 6 mois dans une situation à bas risque et une coronaropathie stable n’est pas un scénario extrapolable à la période périopératoire, qui est une période à haut risque accompagnée d’un syndrome inflammatoire massif et d’une hyperactivité thrombocytaire puissante. La faisabilité d’un traitement de seulement 6 mois dans certaines circonstances n’est en aucun cas un argument pour interrompre une thérapie en cours afin de programmer une intervention chirurgicale dans des délais raccourcis. Tableau 9.8 Recommandations pour la durée du traitement antiplaquettaire après un évènement coronarien Aspirine (75-325 mg/jour): à vie sans interruption Clopidogrel (75 mg/jour), ticagrelor (2 x 90 mg/j), prasugrel (10 mg/j): • • • • • • • Angioplastie (ballon simple) Angioplastie (ballon à élution) Stents passifs électifs Stents passifs en cas de SCA Infarctus Stents actifs SCA (traitement conservateur) 2 semaines 3 mois 4-6 semaines 12 mois 3-6 mois 6-12 mois 12 mois Recommandations pour les délais entre revascularisation coronarienne et chirurgie non-cardiaque Angioplastie sans stent Stents passifs • Chirurgie vitale • Chirurgie élective Pontages aorto-coronariens • Chirurgie vitale • Chirurgie élective Stents actifs • Chirurgie vitale • Chirurgie élective 2-4 semaines (chirurgie vitale) 6 semaines 3 mois 6 semaines 3 mois 6 mois 12 mois Recommandations pour les délais d'interruption préopératoire des antiplaquettaires Aspirine: en principe pas d'interruption; si nécessaire: stop 5 jours Clopidogrel: stop 5 jours Prasugrel: stop 7 jours Ticagrelor: stop 5 jours; si urgence, stop 3 jours SCA: syndrome coronarien aigu Pontages aorto-coronariens Le pontage aorto-coronarien (PAC) a pour but d'apporter un débit suffisant au-delà des sténoses de plus de 50% dans des vaisseaux jusqu'à 1 mm de diamètre. Les indications actuelles sont les suivantes [112,148,205,324,360]. Coronaropathie tritronculaire avec IVA proximale ; les résultats à moyen terme (> 2 ans) sont supérieurs à ceux de la PCI pour les tritronculaires ; Coronaropathie sévère et diffuse ; Sténose (> 50%) du tronc commun (TC), sténose proximale de l'IVA (équivalent de TC) ; Anatomie impropre à la PCI ; Dysfonction ventriculaire (FE < 35%) ; Angor persistant malgré une thérapie maximale ; Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 68 Diabète ; Revascularisation simultanée à une autre intervention chirurgicale cardiaque (remplacement valvulaire, résection d’anévrysme, etc). La mortalité opératoire des PAC varie de 0.5 à 3% [255]; en cas d'angor instable, elle est de 4-20% [244]. Le risque d'infarctus postopératopire est 2.4-8.7% (moyenne 5%) [19,180,255]. Entre 80 et 90% des patients deviennent asymptomatiques sans traitement médical, avec un taux de récidive de 3% par an [370]. La perméabilité des pontages artériels est supérieure à celle des pontages veineux: 88% versus 52% à 10 ans [91,337]. Le pontage tout-artériel, qui utilise les deux artères mammaires et des greffons artériels libres, donne les meilleurs résultats à long terme [147]. Chez les diabétiques, les résultats des PAC sont meilleurs que ceux de la PCI [10,320,360]. En urgence, les PAC sont indiqués pour limiter la taille de l’infarctus et revasculariser la zone de pénombre si on peut procéder à la chirurgie dans les 4-6 heures après l’évènement ; au-delà, la chirurgie augmente l’hémorragie, l’oedème lésionnel et la mortalité (15-20%) ; il faut attendre 48-72 heures pour retrouver des conditions favorables, avec une mortalité de 4% [336]. L’indication aux PAC en urgence est l’échec de la PCI, la persistance de l’angor malgré la reperméabilisation ou la présence de complications. Outre la revascularisation, la chirurgie est indiquée lors de certaines complications majeures de l'infarctus qui surviennent en général dans les 3 à 6 jours après la lésion, et qui sont le fait d'obstruction de vaisseaux terminaux non collatéralisés entraînant des infarctus transmuraux. Insuffisance mitrale aiguë par rupture de pilier ; plus fréquente sur le pilier postéro-médian qui n'est vascularisé que par la CD, alors que le pilier antéro-latéral est vascularisé par l'IVA et la CX. La rupture est le plus souvent partielle, car la rupture totale est rapidement léthale (voir Figure 9.13). Elle se traduit par la survenue d'un OAP dans les 4 à 7 jours après un infarctus. Comme l'OG est de compliance normale, les ondes "v" sont gigantesques sur la courbe de PAPO. La mortalité est de 20-50%, malgré un traitement pharmacologique intense (inotropes, vasodilatateurs artériels), une assistance ventriculaire (CPIA) et un remplacement chirurgical de la valve (une plastie est en général impossible). L'insuffisance mitrale ischémique peut aussi être due à une akinésie pariétale qui maintient un feuillet en dessous du plan de coaptation en systole (voir Figure 9.14) ; dans ce cas, l’IM est moins importante (grade II-III). Le traitement est une plastie mitrale associée à des pontages aorto-coronariens. Rupture de paroi libre; en général sur la paroi antérieure ou latérale du VG, plus fréquente lors d'infarctus inaugural, associée à un infarctus étendu; la survie tient au fait que le péricarde couvre la lésion, mais la tamponnade est fréquente (voir Figure 9.16). Communication interventriculaire (CIV); de l'importance du shunt dépend le degré de détérioration hémodynamique; en cas de lésion antérieure, la CIV est plutôt apicale; en cas d'infarctus postérieur, elle touche le septum basal et est de plus mauvais pronostic (voir Figure 9.17). Reperfusion Après recanalisation par thrombolyse ou dilatation, la perfusion tissulaire peut rester suboptimale malgré la restauration du flux épicardique. Le score TIMI (Thrombolysis in myocardial infarction) décrit le degré de reperfusion observé à l’angiographie [132]. TIMI degré 0 : pas de perfusion au-delà du lieu de l’occlusion ; TIMI degré 1 : passage de contraste mais sans opacification complète du lit vasculaire distal ; TIMI degré 2 : reperfusion partielle ; la progression du contraste est ralentie ; TIMI degré 3 : reperfusion totale ; la vitesse de perfusion est identique en deçà et au-delà de la sténose. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 69 Le phénomène de no-reflow indique un défaut de perfusion microvasculaire dans la zone ischémiée ; il est associé à un mauvais pronostic (voir Lésions de reperfusion, page 19) [290]. La perfusion microvasculaire est mieux préservée par angioplastie que par thrombolyse. Traitement palliatif Lorsqu'un patient présente un angor réfractaire au traitement médical et qu'il n'est pas (ou plus) candidat à une manoeuvre de revascularisation, on peut encore proposer des techniques palliatives dont le but est simplement d’améliorer les douleurs angineuses [331]. Implantation d'une péridurale cervicale ou thoracique haute (D2-D3) avec perfusion continue de bupivacaïne; la rémission de l'angor est significative, immédiate, et dure de 7 jours à 3 ans [37]. Implantation d'un stimulateur spinal au niveau C7-D1; le flux coronarien est augmenté de 11%, avec redistribution vers les zones ischémique [237] ; comparée au PAC dans une série de malades avec angor réfractaire, la stimulation électrique offre autant de rémission symptomatologique et une plus faible mortalité immédiate [220]. Canalisation pariétale depuis la cavité ventriculaire par laser transmyocardique (voir Chapitre 10, Laser transmyocardique). La thérapie cellulaire régénérative (administration de cellules souches), encore en investigation, est une thérapeutique apparemment prometteuse. Les études cliniques conduites jusqu’ici en ont prouvé la faisabilité et la sécurité, mais les résultats restent encore modestes [159b]. Traitement interventionnel Indications classiques (on label) à l’angioplastie coronarienne (PCI) et pose de stents : - Coronaropathie mono- ou bi-tronculaire ; - Absence de lésion proximale du tronc commun ou de l’IVA ; - Configuration anatomique adéquate, vaisseaux de taille intermédiaire ; - Fonction VG conservée ; - Intervention en urgence (STEMI). Indications aux pontages aorto-coronariens : - Lésions tritronculaires avec IVA proximale ; - Coronaropathie sévère et diffuse, anatomie impropre à la PCI ; - Sténose non protégée du tronc commun ou de l’IVA proximale ; - Dysfonction ventriculaire (FE < 0.35) ; - Angor persistant malgré une thérapie maximale ; - Diabète ; - Revascularisation simultanée à une autre intervention chirurgicale cardiaque. Stents intracoronariens - Stents métalliques simples (passifs ou BMS) : taux de resténose important ; - Stents à élution (actifs ou DES) : taux de resténose moindre, mais risque de thrombose même à long terme (0.6%/an) ; meilleurs résultats avec les stents de 2-3ème génération ; - Aspirine (75-150 mg) à vie ; - Double thérapie (aspirine + clopidogrel, ticagrelor ou prasugrel) pendant 6 semaines (BMS) à 12 mois (DES), voir davantage si situation à très haut risque. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 70 L’angiogenèse thérapeutique est une technique encore expérimentale qui consiste à injecter in situ du facteur de croissance fibroblastique ou endothélial et provoquer, par transfert génétique, le développement de collatérales entre la zone ischémiée et les zones vascularisées voisines. Dans les premières études, l'amélioration de la perfusion locale est de 23% à 4 semaines [212]. Pour l’instant, il n’est pas sûr que cette technique tienne ses promesses. Comparaison des thérapeutiques Traitement médical versus traitement interventionnel Le traitement médical est la première option pour l'angor stade I-II. Chez les patients souffrant de maladie coronarienne stable, la PCI n’offre aucun bénéfice en terme de mortalité, d’infarctus ou de revascularisation ultérieure comparée au traitement médical, en l’absence d’ischémie myocardique significative [171]. L’étude COURAGE analyse la survie et les récidives d’ischémie chez deux groupes de patients souffrant de coronaropathie stable strictement randomisés entre traitement médical optimal (1'138 patients sous béta-bloqueurs, antiplaquettaires, nitrés, IEC et hypolipémiants) et traitememt médical avec PCI (1'149 patients) [39]. Un suivi de 2.5 à 7 ans ne révèle aucune différence entre les deux groupes ni dans la mortalité, ni dans l’incidence d’infarctus, ni dans le taux d’ictus (Figure 9.20A). L’analyse d’un sous-groupe de cette étude comprenant des malades souffrant d’angor stade III n’a pas non plus démontré de différences [221]. L’étude BARI-2D (2'368 patients avec diabète type II, randomisation entre PAC, PCI et traitement médical) ne décèle pas non plus de modifications de mortalité ou d’événements cardiovasculaires à 5 ans entre les groupes [126]. On peut en conclure que la revascularisation ne fait pas partie du traitement initial de l’angor stable à fonction ventriculaire conservée en l’absence d’ischémie myocardique significative, ni a fortiori de la préparation préopératoire à une intervention chirurgicale non-cardiaque. Toutefois, l’étude FAME 2 a démontré un bénéfice sur le devenir, principalement sur les récidives de SCA à 12 mois, dans le groupe revascularisé par rapport au groupe sous traitement médical seul lorsqu’une ischémie active est prouvée par une FFR < 0.8 (Fractional Flow Reserve, voir Angiographie, page 33) [83]. La revascularisation a donc une place dans la coronaropathie stable lorsqu’on peut démontrer la présence d’une ischémie active persistante. Par rapport au traitement médical, les PAC garantissent une baisse de la mortalité à 5 et à 10 ans dans les groupes à haut risque [370]. Les patients les plus symptomatiques, avec l'ischémie la plus étendue et la plus mauvaise fonction ventriculaire, tirent le maximum d'avantages du traitement chirurgical. En cas de lésion mono- ou bi-tronculaire et de bonne fonction ventriculaire, le PAC ne présente pas d’intérêt par rapport au traitement pharmacologique ou à l’angioplastie. PCI versus PAC C'est évidemment la comparaison entre la PCI (Percutaneous coronary intervention) et les PAC (pontages aorto-coronariens) qui fait couler le plus d'encre, car l'angioplastie percutanée est une thérapeutique moins agressive que la chirurgie aux yeux du malade et les enjeux financiers sont gigantesques, autant pour l’industrie que pour le corps médical. D’une manière générale, le taux d'infarctus après PCI ou PAC est quasi-similaire (environ 5%), mais le risque de devoir répéter la revascularisation dans les 10 ans est plus élevé pour la PCI que pour les PAC [20]. Une remarque s’impose ici : la comparaison de la perméabilité à long terme des deux modes de revascularisation est compliquée, parce que les BMS et les DES de 1ère, 2ème ou 3ème génération sont des systèmes très différents, et parce que la fonctionnalité des greffons veineux ou artériels n’est pas la même. A 10 ans, les pontages veineux ont un taux de perméabilité inférieur à 40% [114], alors que les greffons artériels restent perméables à > 90% [91,337], y compris lors de pontages artériels multiples [371]. Lorsqu'on place des stents métalliques simples (BMS), le taux d'infarctus est de 5.3%, et le risque de devoir répéter la revascularisation est de 17% à 1-3 ans [312]. Plus la maladie coronarienne est Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 71 étendue ou proximale et plus la fonction ventriculaire est diminuée, plus les pontages chirurgicaux donnent de meilleurs résultats. Une étude rétrospective portant sur 59’314 malades comparant les résultats respectifs de la PCI avec stent passif et des PAC à 3 ans démontre que les PAC ont un plus faible taux de réinterventions et une mortalité inférieure chez les malades bi- et tritronculaires avec sténose proximale de l'IVA ou du tronc commun (Figures 9.20B et 9.20C) [148]. En l’absence de sténose proximale serrée, les malades tritronculaires continuent de bénéficier des PAC, mais les monoet bi-tronculaires ont des résultats marginalement meilleurs avec la PCI. Toutefois, les PAC reprennent l’avantage pour la mortalité à 5 et 8 ans [143]. La présence d’une sténose proximale de l’IVA ou du tronc commun reste donc déterminante pour l’indication aux PAC (Figure 9.20D). A Survie globale % B 30 1.0 0.9 Stent puis PCI 20 0.8 PCI 0.7 10 Traitement médical 0.6 Stent puis PAC PAC puis PCI 0.5 PAC puis PAC Années 0 2 1 3 4 5 1 6 Années C Survie globale (%) 3 2 100 D Mortalité (%) 16 PAC PCI 95 12 90 8 PCI 85 4 PAC 80 Années 1 2 2 vaiss Ø IVA 2 vaiss + IVA 3 vaiss Ø IVA 3 vaiss + IVA 3 Figure 9.20 : Comparaison des résultats entre traitement médical, PCI et PAC dans l’ischémie coronarienne stable. A : Courbes de survie sans mortalité et sans infarctus chez 2’287 patients souffrant de coronaropathie stable répartis entre traitement médical et PCI [39]. B : Pourcentage des patients subissant une deuxième revascularisation après PCI avec stents ou après PAC [148]. C : Courbes de survie des patients tritronculaires avec lésion proximale de l’IVA revascularisés par PCI ou par PAC [127]. D : Mortalité à 3 ans des patients revascularisés par PCI ou PAC en fonction du nombre de vaisseaux atteints et de la présence d’une lésion proximale de l’IVA [143]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 72 Bien qu’une étude randomisée (988 patients) montre une mortalité à 6 ans diminuée pour les PAC par rapport aux stents passifs (HR 0.34) [42], deux méta-analyses comparant la PCI avec stent passif aux PAC et portant sur 3'051 patients [77] et 9'963 patients [48] ne trouvent aucune différence dans l’incidence de mortalité et d’infarctus à 5 et à 10 ans. Il existe toutefois deux différences significatives : 1) le risque d’AVC est plus élevé après des PAC qu’après une PCI (1.2% versus 0.6%), et 2) le taux de revascularisation secondaire est 4 fois plus faible avec les PAC qu’avec la PCI (OR 0.23). L’analyse de mortalité montre que celle-ci est plus basse avec des PAC chez les malades qui ont la maladie coronarienne la plus sévère, mais plus faible avec la PCI chez les malades dont les lésions sont moins graves [48]. Les études comparant les stents à élution (DES) avec les PAC montrent que les stents actifs ne présentent pas d’avantage sur les stents passifs en terme de mortalité, mais diminuent le taux de revascularisation secondaire [143]. La comparaison à 18 mois de 9'962 malades tritronculaires porteurs de stents actifs avec 7'437 malades tritronculaires opérés de PAC se révèle également en faveur de la chirurgie : hazard rate 0.75 pour l’infarctus et 0.80 pour la mortalité [149] ; le taux de revascularisation secondaire est de 5.2% après PAC et de 28% après stents actifs. L’étude SYNTAX (1'800 patients avec maladie tritronculaire ou sténose du tronc commun randomisés en PCI et stent actif versus PAC) démontre une supériorité pour les PAC en terme de complications cardiaques (17.8% versus 12.4%) et de revascularisation secondaire (13.5% versus 5.9%) (Figure 9.21) [311]. Le risque de décès est identique avec les deux techniques, mais celui d’ictus est plus élevé avec les PAC pendant la première année (0.6% versus 2.2%) ; il s’amenuise à 3 ans. Taux cumulé (%) A 20 Taux cumulé (%) B 20 17.8 PCI 13.5 PCI 10 12.4 10 5.9 PAC PAC 6 12 6 Mois 12 Mois Figure 9.21 : Comparaison des résultats à 12 mois de la dilatation percutanée avec pose de stent actif (PCI) et des pontages aorto-coronariens (PAC). A : taux cumulé de revascularisation secondaire ; le risque de devoir répéter la revascularisation est plus élevé avec la PCI (risque relatif 2.29). B : taux cumulé de complications cardiaques majeures et d’ictus ; le risque est plus élevé avec la PCI (risque relatif 1.44). La mortalité globale (4.4% versus 3.5%) ainsi que le taux d’infarctus et d’ictus (5.5% versus 5.4%) ne sont pas significativement différente [311]. Dans le registre ASCERT (86'244 PAC et 103'549 PCI), les mortalités respectives de l’angioplaste et de la chirurgie font jeu égal à un an, mais à 4 ans les PAC reprennent le dessus chez les patients de plus de 65 ans, chez les bi- et chez les tri-tronculaires (RR 0.79) [357]. Même si le risque de resténose était complètement éliminé, les courbes prévisionnelles montrent que les stents actifs restent inférieurs Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 73 aux PAC chez les tritronculaires, les bitronculaires avec sténose de l’IVA proximale, les diabétiques et les patients avec dysfonction ventriculaire [18,107,143,148,149,156]. Ces études confirment un taux d’évènements majeurs doublé dans les groupes angioplastés par rapport aux groupes chirurgicaux, mais un taux d’AVC plus élevé lors de revascularisation chirurgicale. Le choix entre les deux techniques de revascularisation peut être épaulé par l’utilisation de scores comme le score SYNTAX II qui prend en compte 8 paramètres (âge, sexe, créatinine, fonction du VG, lésions tritronculaires, lésion circonflexe, BPCO, atteinte polyvasculaire) [108]. Les recommandations europérennes au sujet de la revascularisation myocardique formulent clairement les indications relatives de la chirurgie et de l’angioplastie (Tableau 9.9) [324,360]. Tableau 9.9 Indications de la chirurgie (PAC) et de l’angioplastie (PCI) chez les patients stables dont les lésions coronariennes relèvent des deux procédures et présentant un faible risque chirurgical. D’après les Recommandations Européennes pour la revascularisation myocardique (2010) (référence 360) En faveur de la chirurgie Mono- ou bi-tronculaire, IVA non proximale Mono-tronculaire, avec IVA proximale Bi-tronculaire, avec IVA proximale Tritronculaire, lésions simples accessibles à PCI Tritronculaire, lésions complexe mal accessibles à PCI Tronc commun isolé Tronc commun + 2-3 vaisseaux Tronc commun + 2-3 vaisseaux, lésions complexes IIb C IA IA IA IA I A (I B) IA IA En faveur de l’angioplastie IC IIa B (I A) IIa B (I C) IIa B III A IIa B IIb B III B Entre parenthèse () : modifications introduites dans les nouvelles recommandations européennes à paraître en été 2014. Note : Classes de recommandations en fonction de l’évidence d’une thérapeutique Classe I: évidences que le traitement est bénéfique, utile et efficace Classe II : évidences divergentes au sujet de l’efficacité du traitement o IIa: poids de l’évidence en faveur de l’efficacité o IIb : efficacité moins bien établie Classe III : évidences que le traitement n’est ni utile ni efficace Niveaux d’évidence Niveau A : données dérivées de multiples études cliniques randomisées et contrôlées Niveau B : données dérivées d’une seule étude clinique contrôlée-randomisée ou de plusieurs grandes études nonrandomisées Niveau C : consensus d’experts, données dérivées de registres ou d’études rétrospectives Angor stable (stade I-II) à fonction ventriculaire conservée : traitement médical. Maladie mono- ou bi-tronculaire sans IVA proximale : angioplastie et stent. Maladie mono- ou bi-tronculaire avec IVA proximale : préférence à la chirurgie. Maladie tritronculaire : préférence à la chirurgie ; angioplastie possible si anatomie favorable. Tronc commun : préférence à la chirurgie. Maladie tritronculaire avec tronc commun, fonction ventriculaire diminuée et/ou diabète : chirurgie. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 74 D’une manière générale, les PAC offrent un meilleur pronostic à longue échéance en terme de mortalité et de revascularisation secondaire, mais au prix d’une morbi-mortalité immédiate supérieure à celle de la PCI, notamment à cause d’un taux d’ictus plus élevé. Ces indications s’entendent chez des malades stables dont les lésions relèvent des deux procédures et qui présentent un faible risque chirurgical. Si la mortalité opératoire prévisible dépasse 15-20%, une tentative d’angioplastie est probablement préférable. D’une manière générale, plus l’ischémie est étendue, plus la revascularisation est profitable ; d’autre part, plus les lésions sont diffuses et évolutives, plus la chirurgie est bénéfique. En effet, court-circuiter une lésion par un pontage met à l’abri de l’évolution de la maladie proximalement à l’anastomose. Alors que la PCI coûte initialement 35% moins cher que les PAC, l’écart n’est plus que de 5% à 5 ans [181]. Les PAC sont une stratégie logique dans le cadre de la revascularisation coronarienne avant chirurgie non-cardiaque. En effet, ils ne nécessitent pas de double thérapie antiplaquettaire mais seulement de l’aspirine (75-150 mg) à vie. Ils permettent d’opérer plus vite : le délai entre revascularisation et chirurgie est de 6 semaines pour les interventions vitales et 3 mois pour les interventions électives [49]. Dans le cas extrême où une revascularisation est impérative et la chirurgie non-cardiaque urgente, on peut envisager une intervention combinant simultanément des pontages aorto-coronariens et la chirurgie vasculaire. Le diabète Les diabétiques sont un cas particulier. Le diagnostic de diabète type I est équivalent à un diagnostic de coronaropathie puisque les diabétiques sans anamnèse coronarienne souffrent de la même mortalité cardiovasculaire à 5 ans que les patients non-diabétiques qui ont fait un infarctus (voir Chapitre 21 Diabète) [10]. En effet, les cellules diabétiques produisent un excès de superoxydes dans leurs chaînes d’oxydo-réduction mitochondriales et un excès de cytokines inflammatoires déversées dans la circulation. La fonction endothéliale est anormale, et la production de NO est abaissée. D’autre part, le diabète s’accompagne d’une hyperactivité plaquettaire dont le turnover est accéléré, et d’une potentialisation des estérases plasmatiques qui transforment le clopidogrel en un métabolite inactif, d’où la faible efficacité de cette substance chez les diabétiques. La combinaison d’une hyperglycémie, d’une résistance à l’insuline, d’un excès d’acides gras libres et d’une dysfonction endothéliale conduit à une artériopathie athéromateuse généralisée. La coronaropathie est 4 fois plus fréquente chez les hommes diabétiques et 5 fois plus chez les femmes que dans la moyenne de la population [10]. En cas de STEMI chez un diabétique, une angioplastie primaire est préférable à une fibrinolyse, et en cas de NSTEMI, une stratégie invasive précoce est préférable à une prise en charge médicale. Comme ils souffrent le plus souvent d’une maladie tri-tronculaire, les diabétiques ont un meilleur pronostic avec une revascularisation chirurgicale (si possible avec des pontages artériels et non des pontages veineux) qu'avec une angioplastie et pose de stent [19,239,273,360]. A 5 ans, l’incidence d’infarctus est diminuée de moitié (6% versus 14%) et la mortalité abaissée d’un tiers (18% versus 26%) après des pontages aorto-coronariens par rapport à une PCI avec stents actifs (étude FREEDOM, 1900 patients randomisés PAC vs DES) [107]. Même avec les stents de nouvelles générations, qui donnent de meilleurs résultats, les patients insulino-requérants ont un taux de complications après angioplastie qui est doublé par rapport à celui des coronariens non-diabétiques [320]. Le prasugrel est l’antiplaquettaire de choix chez les diabétiques, puisqu’il est presque 2 fois plus efficace que le clopidogrel [364]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 75 Indications respectives du traitement médical, de l’angioplastie et de la chirurgie Angor stable (stade I-II) à fonction ventriculaire conservée : traitement médical Maladie mono- ou bi-tronculaire sans IVA proximale : angioplastie et stent Maladie mono- ou bi-tronculaire avec IVA proximale : préférence à la chirurgie Maladie tritronculaire : préférence à la chirurgie ; angioplastie possible si anatomie favorable ; Tronc commun : préférence à la chirurgie ; Maladie tritronculaire avec tronc commun, fonction ventriculaire diminuée et/ou diabète : chirurgie. Les PAC offrent un meilleur pronostic à longue échéance en terme de mortalité et de revascularisation secondaire, mais au prix d’une morbi-mortalité immédiate supérieure à celle de la PCI, notamment à cause d’un taux d’ictus plus élevé. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 76 Evaluation préopératoire du risque ischémique en chirurgie non-cardiaque L’évaluation préopératoire du risque cardiaque fait l’objet du Chapitre 3, où le sujet est traité extensivement (voir Evaluation cardiaque en chirurgie non-cardiaque). On n’abordera ici que les aspects concernant l’évaluation du risque lié à la coronaropathie. Facteurs de risque L’estimation du risque chez le patient coronarien requiert une évaluation de l’importance de la cardiopathie ischémique, de sa stabilité ou de son instabilité, de la réserve fonctionnelle du malade, et de la gravité de l’intervention prévue [65]. Elle doit déterminer la nécessité d’un examen cardiologique préopératoire, d’un traitement médicamenteux ou d’une revascularisation coronarienne. Les recommandations pour l'évaluation préopératoire sont fondées essentiellement sur le bon sens, la logique et l'opinion d'experts, car les études de haut degré d'évidence sont très rares; la plupart d'entre elles concernent les patients vasculaires chez lesquels le risque ischémique est élevé, mais qui ne représentent qu'une petite partie de la population chirurgicale. En effet, les complications de nature ischémique (infarctus, ischémie, arythmies, insuffisance ventriculaire et décès cumulés) restent assez rares: elles surviennent en moyenne dans moins de 2% des cas de chirurgie générale. L'évaluation préopératoire est fondée sur trois éléments [65] : Les facteurs de risque liés à l'anamnèse du patient (Tableau 9.10); La capacité fonctionnelle du patient (Tableau 3.3); Les risques liés à l’intervention chirurgicale (Tableau 3.6). D’une manière générale, l’attitude concernant l’évaluation préopératoire a sensiblement évolué au cours de ces dernières années. Au lieu de chercher à stratifier le risque au moyen de multiples examens, on s’est orienté vers une attitude plus pro-active visant à offrir une cardioprotection optimale au patient [13]. Cette tendance est fondée sur plusieurs constatations. Les béta-bloqueurs et les statines tendent à diminuer la mortalité et l’incidence de complications cardiovasculaires chez les patients souffrant de coronaropathie [65,116,277]. Les antiplaquettaires diminuent le risque de thrombose coronarienne sans que leur prescription ne présente de risque hémorragique excessif, sauf dans certaines catégories d’interventions [66,67,98,115,185,277] (voir Chapitre 3, Cardioprotection périopératoire). Les examens préopératoires qui ne débouchent pas sur une sanction thérapeutique sont inutiles. Le but des tests préopératoires est de sélectionner les malades à haut risque pouvant profiter d’une revascularisation coronarienne (< 5% des cas) [41]. Ils ne sont indiqués que chez les patients présentant un angor sévère (stade III-IV), une insuffisance ventriculaire ou des arythmies malignes [23] (voir Chapitre 3, Investigations cardiologiques). Envisager des investigations cardiologiques présuppose que l’on modifiera le plan thérapeutique en fonction de leurs résultats, sinon elles sont sans intérêt. En cas de revascularisation, l’opération peut être renvoyée de 6 à 12 semaines (PAC, stents passifs), voir 12 mois (stents actifs). Les investigations n’ont pas de sens si ce délai potentiel ne pourra pas être respecté (intervention vitale, par exemple). La coronarographie n’est indiquée que si une revascularisation est envisagée ; elle est nécessaire pour l’évaluation précise des lésions avant revascularisation. Le CT-scan multibarrette (320 détecteurs), moins invasif, n’est pas encore assez précis dans ce but, mais il possède une haute valeur prédictive négative (98-100%) qui en fait une excellente technique pour exclure une coronaropathie lorsque la probabilité de revascularisation est modérée [96]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 77 En cas de reprise chirurgicale, il offre l’avantage de bien visualiser l’anatomie des greffons et leur position par rapport au sternum, au péricarde, à l’aorte et aux ventricules. Les mortalités et morbidités cumulées de la revascularisation préopératoire et de la chirurgie non-cardiaque sont très généralement plus élevées que celles de la chirurgie non-cardiaque accompagnée d’un traitement médical optimal [65,66]. En cas de coronaropathie stable, la mortalité et le taux d’infarctus après chirurgie noncardiaque sont identiques chez les patients revascularisés et chez ceux traités médicalement [135,228,281]. La revascularisation impose un certain délai avant de pouvoir procéder à une intervention de chirurgie non-cardiaque ; certaines pathologies ne sont pas compatibles avec ce délai (néoplasme envahissant, anévrysme en voie de rupture, fracture instable, etc). Dans ces conditions, seule une préparation médicale adéquate est faisable [278]. Un contrôle strict de la fréquence cardiaque (60-65 batt/min) avant, pendant et après l’intervention associé au maintien de la stabilité hémodynamique per- et postopératoire (mDO2/mVO2 optimal) est le facteur capital pour diminuer l’incidence d’accidents ischémiques périopératoires [281]. Tableau 9.10 Facteurs de risque liés au patient Prédicteurs majeurs (coronaropathie instable) • Infarctus ou revascularisation < 6 semaines • Angor instable (stade III - IV) • Angor résiduel post-infarctus • Insuffisance ventriculaire ischémique • Arythmies malignes associées • Sténose aortique serrée symptomatique associée (stade IV) Prédicteurs intermédiaires (coronaropathie stable) • Infarctus de 6 semaines à 3 mois ou > 3 mois si complications • Revascularisation entre 6 semaine et 3 mois • Angor stable (stade I - II) • Patient asymptomatique sous traitement optimal • Evénement ischémique probable documenté • Ischémie silencieuse • Insuffisance cardiaque compensée (FE < 0.35) • Valvulopathie autre que sténose aortique serrée symptomatique • Ictus entre 6 semaines et 3 mois • Age > 70 ans • Insuffisance rénale (créatinine > 200 µmol/l) Prédicteurs mineurs (probabilité augmentée de coronaropathie) • Anamnèse familiale de coronaropathie • Tabagisme • Hypercholestérolémie • Hypertension artérielle mal contrôlée • Status polyvasculaire • Infarctus > 3 mois, patient asymptomatique • Revascularisation > 3 mois, patient asymptomatique • Patient asymptomatique sans médications • Ictus anamnestique (> 3 mois) • Rythme non sinusal, BBG, HVG La situation la plus équivoque est celle des patients situés dans une catégorie à haute prévalence de coronaropathie (anamnèse familiale positive, faible hygiène de vie, obésité, hypertension, hypercholestérolémie, maladie vasculaire) mais ne souffrant pas de symptômes cliniques. Ces malades Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 78 ont un risque opératoire de complications cardiovasculaires inférieur à 1% [65], et n’ont aucun bénéfice à tirer d’un traitement prophylactique comme le béta-blocage [93]. Pourtant, 6.5% de ces individus asymptomatiques présente des anomalies de la contraction segmentaire (ACS) à l’échocardiographie, ce qui augmente de 2.5 fois leur risque d’accident cardiovasculaire à 8 ans [71]. Comme l’ischémie postopératoire est en général silencieuse, la surveillance des enzymes (CK-MB, troponines) est essentielle. Leur élévation a une valeur pronostique pour les complications cardiaques ultérieures et la mortalité à long terme [195]. En cas de menace d’infarctus postopératoire (surélévation du segment ST, élévation des troponines), on procède à une revascularisation d'urgence par dilatation percutanée (PCI). Cette stratégie agressive abaisse la mortalité à 20-35% [26]. Mais la pose de stent reste problématique à cause du syndrome inflammatoire massif de la période postopératoire immédiate qui s’accompagne d’une hyperagrégabilité plaquettaire. Vu le risque hémorragique, l’utilisation des anti-GP IIb/IIIa et la thrombolyse sont impossibles. Il peut être préférable de renoncer momentanément à la pose de stent et se contenter d’une angioplastie. Ischémie instable et intervention vitale Il existe une combinaison particulièrement défavorable: c'est le groupe des malades avec un angor instable (risque d'accident cardiaque > 20%), dont l'écho de stress révèle des altérations de la cinétique segmentaire dans plus d'un tiers du ventricule gauche et la coronarographie des sténoses critiques, et qui présentent des indications à une intervention non cardiaque urgente ou vitale (chirurgie oncologique, menace digestive, fracture instable, anévrysme en voie de rupture, etc). En se fondant sur les données à disposition actuellement, on peut formuler les recommandations suivantes pour trois situations possibles (Figure 9.22) [66,98,115,277]. L’opération peut être renvoyée de 6-8 semaines. Ceci permet de procéder à des pontages aorto-coronariens ou à une PCI avec pose de stents passifs et bithérapie antiplaquettaire de 4-6 semaines ; l’opération non-cardiaque est programmée à plus de 6 semaines après la revascularisation [49,271]. Le délai possible pour l’intervention non-cardiaque n’est que de 2-4 semaines. En cas de flux coronaire très instable, de sténose très proximale (tronc commun) ou de vaste zone de myocarde à risque, on peut envisager une angioplastie simple sans pose de stent [13,51]. En effet, l’incidence de décès et d’infarctus liés à la chirurgie non-cardiaque pratiquée 2-4 semaines après angioplastie simple est la même que 3 mois plus tard [52]. Lorsque le résultat obtenu par la dilatation est optimal (stent-like), les taux de mortalité, d’infarctus et de revascularisation à 12 mois sont les mêmes avec ou sans stent passif [2]. Bien que de nombreux cardiologues y soient réticents parce que le résultat de l’angioplastie simple est mal prévisible, cette attitude est une stratégie défendable pour revasculariser des patients qui doivent être opérés dans de brefs délais [115]. Si l’opération doit avoir lieu dans les 24-72 heures, aucune revascularisation n’est envisageable ; une coronarographie est inutile parce que ses conclusions ne modifieront pas le choix thérapeutique. Tout au plus, une échocardiographie transthoracique pourra déterminer la fonction ventriculaire et la présence d’éventuelles valvulopathies qui influenceront le choix de la technique d’anesthésie. Le patient doit être placé sous cardioprotection maximale : bétabloqueur, aspirine et clopidogrel (dose de charge 300 mg, puis 75 mg/j) ou ticagrelor (dose de charge 180 mg, puis 90 mg 2 x/j), éventuellement anticoagulant. Dans toutes ces circonstances, il est prudent d’opérer les malades sous traitement périopératoire continu de béta-bloqueur, aspirine, clopidogrel/ticagrelor et statine. Ces médicaments sont continués jusqu’à la prémédication et repris le plus tôt possible après l’intervention. L’intervention devrait se dérouler dans un centre qui dispose de cardiologie invasive 24/24 heures [51]. Les stents actifs ne sont pas une option dans ces circonstances, car l’intervention chirurgicale aurait lieu pendant la période de ré-endothélialisation, lorsque le risque de thombose est le plus élevé (après pose de stents actifs, le délai pour une intervention non-cardiaque vitale est de 6 mois). Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 79 Coronaropathie instable + opération vitale Opération semi-élective mais vitale Délai possible ≥ 6 semaines Opération semi-urgente Délai possible 2-4 semaines Opération urgente Délai impossible Coronarographie PCI + stent passif ou PAC Eventuellement PCI sans stent Pas de coronarographie Pas de PCI Opération + β-bloqueur + aspirine + clopidogrel/ticagrelor + statine Stent actif : seulement si délai > 12 mois Coronaropathie stable : opération + traitement médical © Chassot 2014 Figure 9.22 : Algorithme d'évaluation du patient souffrant de maladie coronarienne instable devant subir une intervention urgente ou vitale (exemples: anévrysme, tumeur, fracture invalidante, drainage d'abcès, obstruction ou infection digestive) [66]. Syndrome coronarien instable : angor instable (stade IV), angor de repos ou persistant, non-réactivité aux nitrés, modification récente de la symptomatologie angineuse, période précoce (612 semaines) après revascularisation. PCI : angioplastie coronarienne percutanée. Les mêmes prescriptions s’appliquent au clopidogrel, au prasugrel et au ticagrelor. Infarctus anamnestique Le risque opératoire après un infarctus myocardique tient moins à son âge qu'à sa taille, à sa localisation, à son degré de complications, à la quantité de muscle à risque d'ischémie subséquente, et au status fonctionnel du ventricule. Par sécurité, on admet une limite de trois mois après l'évènement comme délai opératoire, mais un petit infarctus non compliqué sans angor résiduel autorise une chirurgie non-cardiaque impérative après 6 semaines déjà. A l'opposé, un patient avec un infarctus étendu, des symptômes résiduels et une FE < 0.35 présente un risque ischémique élevé même après 6 mois. Le délai pour opérer après un infarctus est habituellement subdivisé en trois catégories de risque [65,115,277]. Moins de 6 semaines après l'évènement: période à haut risque; une intervention chirurgicale est contre-indiquée ; Entre 6 semaines et 3 mois: période à risque intermédiaire permettant une chirurgie impérative; le délai de 6 semaines représente la durée minimale pour la cicatrisation des lésions de la zone infarcie et pour la ré-endothélialisation des vaisseaux [236] ; Au-delà de 3 mois: période à risque faible, pour autant qu'il n'y ait ni complications ni symptômes résiduels. La persistance de symptômes nécessitant un traitement médical continu autre que l'aspirine préventive place le malade dans la catégorie à risque intermédiaire. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 80 En guise de conclusion, il faut souligner que toutes ces données évoluent très rapidement au fil des publications et des progrès techniques. Les attitudes recommandées ici seront certainement modifiées au fur et à mesure que la littérature s'enrichit d'études plus importantes et statistiquement mieux construites. Mais la tendance actuelle évolue clairement vers une préférence pour un traitement cardioprotecteur optimal continué pendant la période opératoire plutôt que vers des investigations et éventuellement une revascularisation avant l’intervention. Evaluation préopératoire des patients coronariens Les examens cardiologiques et les tests d’effort qui ne modifient pas la thérapeutique sont inutiles. Ils ne sont indiqués que chez les patients souffrant d’angor stade III-IV, de dysfonction ventriculaire ou d’arythmie sévère. Dans l’attente d’une intervention chirurgicale, la fréquence cardiaque du patient coronarien doit être strictement contrôlée à 60-65 batt/min (β-bloqueur). La revascularisation préopératoire prophylactique n’a pas de sens ; les indications à la revascularisation (PCI + stent ou PAC) sont les mêmes qu’en-dehors du contexte chirurgical : - Coronaropathie instable (angor stade III-IV) ; - Angor persistant malgré un traitement maximal ; - Lésions à haut risque. Dans les coronaropathies stables (stade I-II), même sévères, une optimalisation du traitement médical (β-bloqueur, antiplaquettaires, statine) est préférable à une revascularisation. Toute revascularisation coronarienne impose des délais avant de pouvoir procéder à un acte chirurgical ; en-deçà des délais, le risque cardiovasculaire est augmenté 5-10 fois. Lorsque la maladie du patient réclame un traitement chirurgical dans un délai court (< 4 semaines), un traitement médical optimalisé (béta-bloqueur, antiplaquettaires, statine) est préférable à une tentative de revascularisation, même si la maladie coronarienne est peu stable. La préférence actuelle va à un traitement cardioprotecteur optimal continu plutôt qu’à des investigations et à une revascularisation préopératoire. Revascularisation coronarienne préalable Les études des années quatre-vingt-dix avaient montré que la meilleure protection périopératoire pour la chirurgie non-cardiaque est une revascularisation complète, parce que dans ce cas, l'incidence de complications ischémiques (infarctus 0.8%, mortalité cardiaque 1.7%) est équivalente à celle de la population générale présentant les facteurs de risque équivalents mais sans maladie coronarienne [150]. Il existe toutefois des limites à ces données (voir Figure 3.12). Toute manipulation coronarienne transforme une sténose en lésion instable ; cette période d'instabilité correspondant à la durée nécessaire à la ré-endothélialisation (6 semaines à 12 mois selon le type de revascularisation), pendant laquelle le risque de thrombose et d'infarctus est augmenté de 5-10 fois. • La mortalité de la chirurgie non-cardiaque à < 3 semaines, à 6 semaines et à > 3 mois après PAC est respectivement de 21%, 4% et < 1% [49,150,255]; • La mortalité de la chirurgie non-cardiaque après angioplastie percutanée et pose de stents passifs est superposable : elle est de 26%, 4% et < 1% à < 3 semaines, à 6 semaines et à > 3 mois, respectivement [315]; Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 81 • Le bénéfice de la revascularisation n’est complet qu’après 3 mois, lorsque l’incidence d’accident cardiovasculaire devient identique à celle des patients non coronariens; il est donc logique d’attendre au moins 3 mois après PCI + stents passifs ou PAC pour toute chirurgie élective. Les mortalités de la chirurgie non-cardiaque et de la revascularisation sont additionnelles. La revascularisation a une certaine mortalité (PAC 1.7%; PCI 0.1%) et fait courir un risque d'infarctus (PAC 2.4%; PCI 0.9%); chez les polyvasculaires, la mortalité des PAC est de 36%, celle de la PCI de 0.5-1%. Si l'on ajoute cette mortalité à celle de la chirurgie majeure ou vasculaire (1-5%), on trouve un résultat supérieur à celui de l'intervention sous préparation médicale optimale (béta-bloqueur, antiplaquettaires, statines) mais sans revascularisation [49,150,255,279]. La revascularisation, lorsqu'elle est réussie, a un effet limité dans le temps; la protection offerte par des pontages aorto-coronariens (PAC) dure plus longtemps (6 ans, puis diminution progressive) que celle d'une angioplastie percutanée (< 3 ans) ; d’autre part, la moitié des récidives survient dans un territoire différent de celui qui avait été revascularisé, traduisant ainsi la progression de la maladie de base. Le bénéfice de la revascularisation préopératoire est également limité par le fait que la moitié des infarctus périopératoires survient sur des plaques instables (sténose < 60%) non dépistables par les épreuves d’effort ni par la coronarographie [104]. D’autre part, la corrélation entre la localisation des ACS survenue à l’écho de stress et celles survenues à l’ETO peropératoire est faible [280]. Les études comparant des malades souffrant de coronaropathie stable revascularisés en vue d'une intervention de chirurgie vasculaire majeure à des malades non revascularisés mais traités médicalement (béta-bloqueurs, antiplaquettaires, statines) n'ont pas montré de différence dans l'incidence d’infarctus et de décès cardiaque postopératoires, même si l’écho de stress est très significativement positif [135,228,281]. Par contre, il est impératif que la fréquence cardiaque soit maintenue à 60-65 batt/min pendant et après l’intervention. La revascularisation préopératoire n’est donc pas indiquée en cas d’angor stade I ou II (coronaropathie stable) ; elle n'a de sens que si certaines conditions sont remplies [273,360] : L'indication est liée à la présence d’un syndrome coronarien instable. L'ischémie est liée à un déséquilibre du rapport DO2/VO2 dû à une sténose serrée. Les délais imposés entre la revascularisation et l'opération non-cardiaque (6 semaines à 12 mois) doivent être compatibles avec l'affection chirurgicale (tumeur, anévrysme, etc). Les risques de la revascularisation sont plus élevés chez les malades polyvasculaires (mortalité des PAC : 6% au lieu de 1.7%) qui sont les plus fréquemment concernés par ce débat. Les risques additionnés de la revascularisation (PAC ou PCI) et de la chirurgie non-cardiaque doivent être inférieurs au risque de l'intervention sous simple protection médicamenteuse (béta-bloqueurs, antiplaquettaires, statines). Or la revascularisation augmente le risque de complications cardiaques dans le postopératoire immédiat ; à long terme, les PAC diminuent le risque cardiaque chez les polyvasculaires (OR 0.6), alors que la PCI ne le modifie pas [32]. L’étude COURAGE, réalisée en-dehors d’un contexte chirurgical, a analysé la survie et les récidives d’ischémie chez deux groupes de patients souffrant de coronaropathie stable strictement randomisés entre traitement médical optimal et traitement médical avec PCI ; elle n’a révélé aucune différence entre les deux groupes ni dans la mortalité, ni dans l’incidence d’infarctus, ni dans le taux d’ictus au cours d’un suivi de 3 ans [39,358]. L’analyse d’un sous-groupe de cette étude comprenant des malades souffrant d’angor stade III n’a pas non plus démontré de différences [221]. On peut en conclure que la revascularisation ne fait partie ni du traitement initial ni de la préparation préopératoire de l’angor stable à fonction ventriculaire conservée [171,273,360]. Il reste néanmoins que le bénéfice à long terme de la revascularisation est évident, puisqu'elle traite la maladie de base du coronaropathe. En préopératoire, les indications à une revascularisation sont donc les mêmes qu'en dehors du contexte chirurgical [273,360] : Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 82 Indications générales : syndrome coronarien aigu ou instable (stade III-IV), ischémie étendue ou symptomatique malgré un traitement médical optimal, tests d’effort significativement positifs. Indications aux PAC : sténose du tronc commun, maladie tritronculaire sévère, angor subintrant, maladie bi- ou tritronculaire avec dysfonction ventriculaire et/ou diabète ; les résultats à moyen terme (> 2 ans) sont supérieurs à ceux de la PCI pour les tritronculaires. Indications à la PCI avec stents : infarctus avec surélévation ST/onde Q, maladie mono- ou bitronculaire, maladie tritronculaire si FE > 0.4 et anatomie favorable; l’IVA proximale est une indication possible selon les circonstances. Coronaropathie stable: PCI en cas de maladie mono- ou bi-tronculaire sans IVA proximale, PAC préférable dans tous les autres cas. Délais après revascularisation Après des PAC, le risque opératoire est d'autant plus élevé qu'on est proche de la revascularisation; il est nettement dégressif au-delà de 6 semaines, mais il faut attendre 3 mois pour bénéficier du plein effet de l’intervention et rejoindre le taux de mortalité des malades non-coronariens. Le taux de complications ischémiques en cas de chirurgie non-cardiaque est de 30% (mortalité opératoire: 20%) pendant 4-6 semaines; il est d'environ 4% entre 2 et 3 mois, et de < 1% au-delà de 3 mois. On peut donc considérer un délai de 6 semaines comme le minimum pour envisager une opération non cardiaque nécessaire ou vitale; le délai de sécurité pour une intervention élective est de 3 mois [49]. Après PCI et pose de stent, la durée du délai est liée à celle de la réendothélialisation du stent. Dans un stent métallique simple, ou stent passif (BMS), il faut attendre 6 semaines pour que l’armature soit recouverte par une couche cellulaire et 3 mois pour être complètement endothélialisée (voir Figure 3.13) [139]. Tant que le stent n’est pas entièrement recouvert, le risque de thrombose par adhésion des thrombocytes nécessite une double thérapie antiplaquettaire par aspirine et clopidogrel (ou prasugrel, ou ticagrelor). Le taux de thrombose est ainsi inférieur à 2% pendant le premier mois et < 0.1% audelà. Cependant, le néo-endothélium tend à proliférer, ce qui provoque un taux de resténose de 1220% à 9-12 mois [310]. Après PCI et stent passif, le risque opératoire est directement lié au délai entre la revascularisation et la chirurgie. Durant les 6 premières semaines, les risques de thrombose et d’infarctus sont d’environ 35% (mortalité opératoire: 18-26%) ; l’incidence décroît à 3-5% dès 6 semaines et devient inférieure à 1% au-delà de 3 mois [315,316]. Ces résultats s’entendent pour des malades maintenus sous bithérapie pendant 6 semaines. Avec les stents à élution, ou stents actifs (DES), le taux de resténose est passé à 3% à 1 an et 6% à 3 ans, mais ce progrès s’accompagne d’un ralentissement considérable de la réendothélialisation [310]. En effet, l’endothélialistion des stents à élution ne dépasse pas 60% de leur surface jusqu’à 40 mois, alors que le 95% de la surface des stents passifs est entièrement recouverte à 3 mois (voir Figure 3.14) [166]. Contrairement à la néointima épaisse qui se forme dans les stents passifs, la surface des stents actifs est couverte d’une couche endothéliale fine et fragile accompagnée d’une réaction inflammatoire, très voisine de celle d’une plaque instable. Cette situation requiert une double thérapie antiplaquettaire prolongée (12 mois) (voir Traitement interventionnel, page 64). Les délais recommandés entre la revascularisation coronarienne et une intervention non-cardiaque sont donc fonction de ces différentes situations (Tableau 9.8) (voir Annexe B) [66,98,115,141,185,277]. Dilatation simple, sans pose de stent : 2-4 semaines Stent métallique simple (stent passif, BMS) : • opération vitale : 6 semaines • opération élective : 3 mois Stent à élution (stent actif, DES) : • opération vitale : 6 mois • opération élective : 12 mois Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 83 Pontage aorto-coronarien (patient asymptomatique sans traitement) : • opération vitale : 6 semaines • opération élective : 3 mois Les études sur le devenir des stents actifs ont démontré une diminution du taux de revascularisation secondaire quatre fois plus bas que pour les stents passifs, mais une augmentation du risque de thrombose tardive de 0.6%/an (2.2% à 4 ans) lorsque les patients ne sont plus sous bi-thérapie [327]. Le problème tient au fait que la thrombose de stent a un taux d’infarctus allant jusqu’à 50% et une mortalité de 11-45% (moyenne 25%), alors que la resténose est un événement bénin dont la mortalité est < 1%. En effet, la thrombose de stent correspond à l’occlusion abrupte d’un vaisseau dont le flux était normal et la collatéralisation faible. Les prédicteurs de la thrombose de stent sont par ordre croissant d’importance [222,362] : Les comorbidités : diabète, insuffisance rénale, dysfonction ventriculaire, âge avancé ; La progression et l’évolutivité de la maladie coronarienne ; Les indications hors recommandations (off-label indications) : plus de 50% des stents actifs sont placés dans des situations qui ne correspondent pas aux indications formelles pour lesquels ils ont été conçus (stents multiples, emboîtés, bifurcations, situations très proximales ou très distales) ; La pose de stents lors de syndrome coronarien aigu ou accompagnée de problèmes techniques (malaposition) ; Le type de chirurgie et le délai entre la revascularisation et l’acte opératoire ; L’interruption prématurée des antiplaquettaires ; cet élément est le plus important. Toutes ces données concernent les stents actifs de première génération. Des progrès techniques (armature et matrice biorésorbables) et de nouvelles substances antiprolifératives (zotarolimus, everolimus, biolimus) vont certainement modifier ces données. Toutefois, l’absence de recul à long terme et d’expérience dans le périopératoire avec les stents actifs de deuxième et troisième génération n’autorise pas pour l’instant à modifier les recommandations faites concernant les délais et le traitement antiplaquettaire après pose de DES. Revascularisation coronarienne préopératoire La mortalité de la revascularisation et de la chirurgie sont additionnelles Le risque cardiaque est très augmenté pendant 6 semaines après la revascularisation (mortalité 25%) Le bénéfice n’apparaît qu’après 3 mois (mortalité < 1%) Pour les stents actifs (DES), le bénéfice n’apparaît qu’après 12 mois L’angor stable (I-II) n’est pas une indication à la revascularisation Délais pour la chirurgie après revascularisation Dilatation simple 2-4 semaines Stent métallique simple (BMS, stent passif) ou pontages aorto-coronariens (PAC) Opération vitale 6 semaines Opération élective 3 mois Stents à élution (DES, stent actif) Opération vitale Opération élective 6 mois 12 mois Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 84 Recommandations pour la durée du traitement antiplaquettaire après évènement coronarien Clopidogrel (75 mg/jour), ticagrelor (2 x 90 mg/j) ou prasugrel (10 mg/j): - Angioplastie (ballon simple) 2 semaines - Angiopastie (ballon à élution) 3 mois - Stents passifs électifs 4-6 semaines - Stents passifs en cas de SCA 12 mois - Infarctus 3-6 mois - Stents actifs 6-12 mois (> 12 mois si stent à très haut risque) - SCA (traitement conservateur) 12 mois Aspirine (75-325 mg/jour): à vie sans interruption Recommandations pour les délais d'interruption préopératoire des antiplaquettaires Aspirine: Clopidogrel: Prasugrel: Ticagrelor: en principe pas d'interruption; si nécessaire: stop 5 jours stop 5 jours stop 7 jours stop 5 jours; si urgence, stop 3 jours Algorithmes de prise en charge préopératoire Plusieurs algorithmes décisionnels publiés ces dernières années résument les recommandations actuelles dans l'évaluation préopératoire des malades à risque cardiovasculaire [65,115,277]. Ils sont construits à partir de l'évaluation clinique (facteurs de risque liés au patient), de la tolérance à l'effort et du type d'intervention chirurgicale; ils mentionnent la place des examens cardiologiques complémentaires, et conduisent à trois possibilités: 1) opération sans mesure particulière, 2) opération sous protection pharmacologique, 3) opération après traitement cardiologique ou chirurgical et renvoi de l'opération pour un certain délai. L’algorithme de la Figure 9.23 illustre cette démarche chez les patients coronariens. D'une manière générale, le risque opératoire augmente avec le nombre de facteurs étiologiques, la dysfonction ventriculaire, l'instabilité de la maladie coronarienne, l'importance de l'acte chirurgical, les complications de l'infarctus et l'étendue des lésions. Indications aux β-bloqueurs Après plusieurs années pendant lesquelles on a généreusement béta-bloqué les malades en préopératoire, l’étude POISE (8'351 patients randomisés entre placebo ou métoprolol) a démontré une augmentation significative de la mortalité (3.1% versus 2.3%, HR 1.33) et du taux d’ictus (1.0% versus 0.5%, HR 2.17) chez les patients béta-bloqués, bien que le métoprolol ait abaissé de 27% le taux d’infarctus par rapport aux contrôles [93]. Par ailleurs, l'étude a mis en évidence moins de fibrillation auriculaire (HR 0.76), mais davantage d'épisodes de bradycardie (HR 2.74) et d'hypotension (HR 1.55) dans le groupe béta-bloqué (voir Chapitre 3, β-bloqueurs). Il se pourrait que les AVC soit liés au metoprolol lui-même, car leur taux n’est pas modifié chez les patients qui reçoivent du labetalol ou de l’esmolol [223a]. Tout récemment, une analyse du Registre Danois (28'263 patients ischémiques) a montré que les béta-bloqueurs périopératoires ne profitaient qu’aux malades en insuffisance cardiaque ou souffrant d’un infarctus récent [4a]. Il s’avère donc que seules certaines catégories de malades tirent un avantage du béta-blocage (diminution de 25% du taux d’infarctus), à savoir les patients bénéficiant d’une indication Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 85 Opération Clinique du patient cardiologique formelle [41,116,277]. Les patients à bas et moyen risque ne bénéficient pas du traitement, qui tend à augmenter leur mortalité (+ 25% à 1 mois) et leur risque d’AVC (doublé) [15,16,93]. Chez les patients souffrant de syndrome coronarien instable, le béta-blocage fait partie de la thérapeutique mais est insuffisant à lui seul pour diminuer la mortalité. Seuls les patients déjà bétabloqués doivent continuer leur traitement de manière ininterrompue en périopératoire [120,307]. Facteurs de risque mineurs Marqueurs de risque de coronaropathie, mais non facteurs de risque opératoire indépendants Absence d’angor clinique Complications cardiaques: < 1% Facteurs intermédiaires Maladie coronarienne stable infarctus ou angor anamnestique Patient asymptomatique sous traitement optimal Complications : 1-6% CF ≥ 5 MET Opération mineure, intermédiaire ou majeure CF ≤ 4 MET Opération vasculaire ou majeure Décision Investigations 1) 2) 3) CF 1-10 MET Opération élective Délai ≥ 6 sem possible Opération vitale Délai impossible Ergométrie : ECG d'effort Echo dobutamine, Scan thallium dipyridamole IRM, CT-scan Coronarographie Pas de revascularisation Opération sans préparation Facteurs de risque majeurs Syndome coronarien instable Evènement coronarien < 6 sem Stent actif < 6-12 mois Association d’arythmie sévère ou décompensation cardiaque Complications: 10-30% Opération + β blocage selon indications cardiologiques Indication à la revascularisation PCI + stent ou PAC Délais* 6 sem – 12 mois Opération + β -bloqueur + antiplaquettaires selon indic cardiol © Chassot 2014 Figure 9.23 : Algorithme d'évaluation du patient ischémique ou à risque coronarien pour la chirurgie noncardiaque. Evènement coronarien : infarctus, syndrome coronarien aigu, revascularisation chirurgicale ou par stent passif. Les flèches en traitillé représentent des indications possibles dans certaines circonstances à haut risque ; ces indications ne sont plus reconnues comme une routine. Dans le syndrome coronarien instable, le risque de thrombose coronarienne à l'arrêt des antiplaquettaires (aspirine + clopidogrel) est plus grave que celui d'hémorragie chirurgicale sur continuation de ces derniers; l'anesthésie loco-régionale rachidienne est contreindiquée sous bi-thérapie. Chez les malades coronariens, l'anesthésie générale est conduite de manière préférentielle avec des halogénés, pour bénéficier de la protection du préconditionnement. MET: équivalent métabolique. PCI: Percutaneous Coronary Intervention. PAC: pontage aorto-coronarien. Bien que les recommandations américaines [116] soient plus restrictives que les recommandations européennes [277], les indications formelles (classe I) actuellement admises pour le béta-blocage préopératoire se réduisent à deux situations [15,116,117,118] : Patients déjà chroniquement sous béta-bloqueurs; le traitement est continué en périopératoire; Patients souffrant d'ischémie coronarienne avérée chez lesquels il existe une indication cardiologique propre au béta-blocage (insuffisance ventriculaire, infarctus récent). Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 86 Le but du béta-blocage est de stabiliser la fréquence cardiaque à 60-65 batt/min au moyen d’un agent béta-1-sélectif [118]. Le risque est une augmentation des épisodes peropératoires de bradycardie et d’hypotension, et un doublement de l’incidence d’AVC [15,93]. Pour éviter ces effets néfastes, il est capital de maintenir une stabilité hémodynamique rigoureuse (PAM ≥ 80 mmHg, fréquence à 60/min) pendant l’intervention et en postopératoire [93]. β-bloqueurs préopératoires chez les coronariens Les β-bloqueurs β1-sélectifs diminuent l’incidence d’ischémie et d’infarctus postopératoires d'environ 25%, pour autant qu’ils soient titrés de manière à maintenir la fréquence cardiaque à 60-65 batt/min et à éviter l’hypotension artérielle. Mais ils augmentent la mortalité à 1 mois d'environ 25%, doublent le risque d'AVC, et accroissent le risque d’hypotension et de bradycardie. Indications aux β-bloqueurs en préopératoire (identiques aux indication cardiologiques): - Patients déjà β-bloqués - Coronaropathie sévère (indication cardiologique) Méthode: agent β1-sélectif à un dosage réglé pour une fréquence cardiaque de 60-65 batt/min et maintien d’une pression artérielle normale. Arrêt des antiplaquettaires Globalement, les antiplaquettaires en prévention secondaire diminuent de 20% la mortalité et le risque de récidive après syndrome coronarien aigu, infarctus et AVC. Ils sont essentiels pour prévenir la thrombose coronarienne après angioplastie et pose de stents. La durée du traitement est variable selon les situations (voir Revascularisation coronarienne préalable, page 81). Clopidogrel (75 mg/jour), ticagrelor (2 x 90 mg/j) ou prasugrel (10 mg/j): • Angioplastie (ballon simple) 2 semaines • Angioplastie (ballon à élution) 3 mois • Stents passifs électifs 4-6 semaines • Stents passifs en cas de SCA 12 mois • Infarctus 3-6 mois • Stents actifs 6-12 mois (> 12 mois si stent à très haut risque) • SCA (traitement conservateur) 12 mois Aspirine (75-325 mg/jour) à vie sans interruption L’arrêt prématuré de ce traitement est le facteur principal de l’occlusion coronarienne et de la thrombose de stent [101,159]. Cette dernière présente deux caractéristiques qui pénalisent lourdement le pronostic. Son taux d’infarcissement et sa mortalité sont en moyenne de 40% et 35% respectivement. Le syndrome inflammatoire et l’augmentation de l’agrégabilité plaquettaire périopératoires fonctionnent comme déclencheurs de la thrombose aiguë. Les antiplaquettaires sont souvent stoppés en préopératoire à cause d’une augmentation de 20% (monothérapie) à 50% (bi-thérapie) du risque hémorragique. Toutefois, leur maintien ne modifie le taux de transfusion que de 20% et ne change pas la mortalité chirurgicale, sauf en neurochirurgie intracrânienne [66,67,98]. Sous antiplaquettaires, le risque ischémique est celui d’un angor stable (taux d’infarctus et de mortalité de 1-6% selon le type de chirurgie), alors que l’interruption du Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 87 traitement entraîne un taux d’infarctus de 10-50% et une mortalité voisine de 25% [260,285,315,316]. De plus, le risque des transfusions (incidence globale des complications : 1.3%) est bien inférieur à celui d’une revascularisation en urgence dans le postopératoire immédiat (mortalité : 30%) [26,346]. Dans l’état actuel de nos connaissances, le risque de thrombose coronarienne à l'arrêt des antiplaquettaires est donc plus grave que celui d'hémorragie chirurgicale sur continuation de ces derniers (voir Chapitre 3, Antiplaquettaires). Les seules exceptions à cette formulation sont : Les interventions chirurgicales dans un espace clos (crâne, canal médullaire, chambre postérieure de l’œil) ; Les opérations accompagnées d’un risque hémorragique excessif et d’une hémostase difficile (transplantation pulmonaire, chirurgie hépato-pancréatique, etc). En-dehors de ces deux circonstances, il est recommandé de ne pas interrompre les antiplaquettaires en préopératoire ou de renvoyer l’opération pendant la durée de leur prescription. Il est évident que l'anesthésie loco-régionale rachidienne est exclue sous double thérapie antiplaquettaire. La gestion des antiplaquettaires en préopératoire pour les situations cliniques les plus fréquentes est illustrée par deux algorithmes décisionnels et résumée par l’attitude pratique suivante (Figure 9.24 et Figure 9.25) (voir Annexe B) [66,67,98,141,185]. Patient sous aspirine en prévention primaire simple : • Stop Aspirine 5 j avant l’intervention, si nécessaire ; Patient sous aspirine (ou clopidogrel seul) en prévention primaire à haut risque (diabète I, risque d’accident cardiovasculaire > 5%/an) ou en prévention secondaire après accident vasculaire cérébral (AVC), infarctus du myocarde (IdM), stent coronarien, artériopathie des membres inférieurs, pontage aorto-coronarien (PAC), syndrome coronarien aigu (SCA) : • Poursuivre sans interruption le traitement d’aspirine (ou de clopidogrel) ; • Patients sous aspirine et dipyridamole après AVC : poursuivre les deux médicaments ; • Seule exception : cas à haut risque de neurochirurgie intracrânienne (stéréotaxie). Patient sous aspirine + clopidogrel/prasugrel/ticagrelor, mais risque cardio- et cérébrovasculaire bas (> 3 mois après AVC, angioplastie coronaire, stent passif ou PAC, > 6 mois après IdM sans complications, > 12 mois après SCA ou stent actif) : • Poursuivre le traitement d’aspirine ; • Stop avant l’intervention : clopidogrel ou ticagrelor 5 jours, prasugrel 7 jours ; • Reprendre bithérapie < 24 h, si possible avec une dose de charge* pour le clopidogrel : aspirine (Aspegic™) 250 mg + 150 mg/j ; clopidogrel 75 mg/j ; prasugrel 10 mg/j ; ticagrelor 90 mg 2x/j. Patient sous aspirine + clopidogrel/prasugrel/ticagrelor, avec risque cardio- et cérébrovasculaire élevé (< 6 semaines après AVC, angioplastie simple, stent passif ou PAC, < 3 mois après IdM, < 12 mois après SCA ou stent actif, ou davantage si stent à très haut risque). Chirurgie élective : • Renvoi à 3 mois après AVC, angioplastie simple, stent passif ou PAC ; • Renvoi à 6 mois après IdM ; • Renvoi à 12 mois après SCA, stent actif ou IdM avec complications; • Après ces délais : maintenir/doubler aspirine ; si clopidogrel/prasugrel/ticagrelor encore prescrits, discuter avec le cardiologue pour l’arrêt ou le maintien avant l’intervention. Chirurgie urgente ou vitale : • Maintenir aspirine et clopidogrel/prasugrel/ticagrelor ; • Eventuelle substitution du clopidogrel par tirofiban, eptifibatide ou cangrelor en cas d’intervention à risque hémorragique très élevé ou de coagulopathie • Après AVC/AIT, maintien de l’aspirine/dipyridamole, mais arrêt du clopidogrel (sauf < 1 mois après stents carotidiens) ; Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 88 • L’héparine est est inefficace comme substitution des antiplaquettaires. * : la dose de charge est rarement praticable à cause du risque hémorragique ; son indication devrait se fonder sur un test de réactivité plaquettaire. Patients sous monothérapie (aspirine ou clopidogrel) Prévention primaire, risque cardiovasculaire faible Patients sous bithérapie (aspirine + clopidogrel, prasugrel ou ticagrelor) Prévention secondaire après événement cardio-vasculaire. Prévention primaire si risque CV > 5%/an Neurochirurgie intracrânienne à haut risque Stop 3-5 jours avant opération si nécessaire Toute chirurgie Haut risque cardiaque < 6 sem après PCI, BMS, AVC < 3 mois après infarctus < 6-12 mois après DES ou SCA > 12 mois si stents à haut risque Chirurgie élective Renvoi Opération sous traitement continu Situations cardiaques à risque bas** + Chirurgie à haut risque hémorragique Chirurgie vitale/urgent Risque hémorrag excessif*** Stop clopidogrel* Maintien aspirine Stop clopidogrel* 5 j + substitution Maintien aspirine Reprise clopidogrel* < 24 h postop © Chassot 2014 Figure 9.24 : Algorithme de prise en charge des patients sous traitement antiplaquettaire préopératoire [66,98]. BMS : bare metal stent (stent passif). DES : drug-eluting stent (stent actif). AVC : accident vasculaire cérébral. SCA: syndrome coronarien aigu. PCI: Percutaneous Coronary Intervention. CV : cardiovasculaire. * : les mêmes prescriptions s’appliquent au clopidogrel, au prasugrel et au ticagrelor à l’exception des délais d’interruption : clopidogrel 5 jours, ticagrelor 5 jours, prasugrel 7 jours. ** : Exemples de situations à risque faible: > 3 mois après stents passifs ou PCI sans stents, > 6 mois après infarctus ou ictus non compliqués. *** : Risque hémorragique excessif : chirurgie en espace clos (neurochirurgie intracrânienne, chirurgie du canal médullaire, chirurgie de la chambre postérieure de l'œil), présence de coagulopathie, chirurgie invasive accompagnée d’hémorragie massive et d’hémostase difficile. Dans ces situations, le rapport risque / bénéfice doit être évalué cas par cas. Le clopidogrel seul est l’équivalent de l’aspirine seule. Dosage de l’aspirine : 50-325 mg/j. Stents à haut risque: stents proximaux, multiples, malapposés, bifurqués ou en succession, situations où le vaisseau stenté dessert un vaste territoire myocardique, patients ayant déjà thrombosé des stents précédents. En cas d’arrêt, les antiplaquettaires doivent être repris < 24 heures après l’intervention, Substitution du clopidogrel/prasugrel : perfusion d’eptifibatide ou de tirofiban 3-5 jours préop, stop 6-8 heures avant opération, reprise < 12 heures. Dans le cas où il s'avère impératif d'interrompre le clopidogrel, le prasugrel ou le ticagrelor une semaine avant une intervention à cause d'un risque hémorragique grave en espace clos (neurochirurgie intracrânienne, par exemple), on peut leur substituer un agent anti-GP-IIb/IIIa de courte durée d’action. Le tirofiban (perfusion 0.1 mcg/kg/min) ou l’eptifibatide (perfusion 1-2 mcg/kg/min) ont des demi-vie de 2 heures. Administrés en perfusion dès le 3ème jour préopératoire, ils sont arrêtés 4-6 heures avant l’intervention [303]. L’opération a lieu pendant la fenêtre d’inactivité antiplaquettaire, ce qui réduit le risque hémorragique, et le clopidogrel/ticagrelor/prasugrel est repris dans les 24 heures postopératoires avec une dose de charge de 300 mg. L’aspirine n’est pas interrompue. Le cangrelor iv Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 89 sera une alternative intéressante pour cette substitution, puisque sont activité disparaît 1 heure après l’interruption de la perfusion. Risque cardio- et cérébro-vasculaire Prise en charge des patients sous agents antiplaquettaires Risque hémorragique chirurgical Bas Intermédiaire Elevé > 3 mois après infarctus, PCI, stent passif, PAC ou AVC > 6 mois après les mêmes si complications > 12 mois après stents actifs (DES) ou SCA, sans complications 6-12 semaines après PCI, stents passifs, PAC ou AVC (sans complications) 12-24 semaines après infarctus 6-12 mois après DES à bas risque ou SCA > 12 mois après DES à haut risque (long, proximal, diabète) < 6 semaines après PCI, stents passifs, PAC, AVC < 3 mois après infarctus < 6 mois après les mêmes si complications < 12 mois après SCA, stent actif ou stent à haut risque Chirurgie élective: OK Traitement continu avec aspirine ou clopidogrel Chirurgie élective: OK Traitement continu avec aspirine, statine & clopidogrel, prasugrel, ticagrelor (si prescrits) Chirurgie élective: renvoi Chirurgie vitale: OK Maintenir / doubler l’aspirine Maintenir statine & clopidogrel, prasugrel, ticagrelor Chirurgie élective: renvoi Chir vitale: OK Maintenir aspirine, statine & clopidogrel, prasugrel, ticagrelor (si prescrits) Chirurgie élective: renvoi Chirurgie vitale: OK Maintenir / doubler l’aspirine Maintenir, statine & clopidogrel, prasugrel, ticagrelor Risque bas Transfusions non nécessaires Chirurgie générale, périphérique, plastique, biopsies, dermatologie Orthopédie mineure ORL & endoscopies Chirurgie de la chambre antérieure de l'oeil Chirurgie et extraction dentaires Risque intermédiaire Transfusions fréquemment requises Chirurgie viscérale & cardiovasculaire Orthopédie, ORL et chir reconstructive majeures Urologie endoscopique Chirurgie élective: OK Traitement continu avec aspirine ou clopidogrel Risque élevé Transfusions massives requises et hémostase difficile Risque d’hémorragie en espace clos : Neurochirurgie intracrânienne Chirurgie du canal médullaire & chambre postérieure de l’œil Chirurgie élective: OK Continuer statine Stop aspirine ou clopidogrel possible (max 5 jours) © Chassot 2013 Chirurgie élective: renvoi Chirurgie vitale: OK Maintenir aspirine & statine Stop clopidogrel 5 j, prasugrel 7 jours, ticagrelor 5 jours Reprendre < 24 heures postop OK seulement pour chirurgie vitale ou urgente Maintenir aspirine Stop clopidogrel 5 j, prasugrel 7 jours, ticagrelor 5 jours Remplacer par tirofiban/eptifibatide Reprendre < 24 h postop Figure 9.25 : Prise en charge des patients sous antiplaquettaires en chirurgie non-cardiaque Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 90 Antiplaquettaires préopératoires (I) L’arrêt prématuré des antiplaquettaires augmente 5-10 fois le risque de mortalité et d’infarctus et de 3 fois le risque d’AVC L’arrêt des antiplaquettaires est le principal facteur de risque pour la thrombose de stent (mortalité 25%), car ils font la différence entre une lésion stable et une lésion instable La réaction inflammatoire opératoire entraîne une hyperactivité plaquettaire L’aspirine augmente de 20% le risque hémorragique peropératoire La combinaison aspirine + clopidogrel augmente de > 50% le risque hémorragique Aspirine + clopidogrel n’augmentent pas la mortalité ni la morbidité chirurgicales, sauf si : - Chirurgie en espace clos (crâne, chambre postérieure de l’oeil, canal rachidien) - Chirurgie très hémorragique avec hémostase difficile Sauf ces exceptions, le risque hémorragique sous antiplaquettaire est moins important que le risque ischémique lié à leur interruption. Il est donc recommandé de les maintenir en périopératoire lorsqu’ils sont prescrits en prévention secondaire après AVC, SCA, infarctus ou stents. Antiplaquettaires préopératoires (II) : recommandations pratiques Aspirine ou clopidogrel en prévention primaire : stop 5 jours Aspirine ou clopidogrel en prévention secondaire : pas d’interruption Aspirine et clopidogrel, risque cardiovasculaire bas : continuer l’aspirine, interrompre le clopidogrel 5 jours (prasugrel: 7 jours, ticagrelor 5 jours) Aspirine et clopidogrel/ticagrelor/prasugrel, risque cardiovasculaire élevé, chirurgie élective: - Renvoi 3 mois après AVC, BMS, PAC - Renvoi 12 mois après syndrome coronarien aigu (traitement conservateur) - Renvoi à 12 mois après DES - Continuer l’aspirine sans interruption Aspirine et clopidogrel/ticagrelor/prasugrel, risque cardiovasculaire élevé, chirurgie vitale - Maintenir aspirine et clopidogrel/ticagrelor/prasugrel - Eventuelle substitution avec eptifibatide ou tirofiban Risque clopidogrel seul = risque aspirine seule Prasugrel : même prescriptions que pour le clopidogrel, mais arrêt 7 jours préopératoires car risque hémorragique plus élevé Ticagrelor: arrêt 5 jours préopératoires; si intervention vitale: arrêt de 3 jours possible Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 91 Anesthésie du patient coronarien en chirurgie non-cardiaque Prémédication La visite préopératoire est le premier contact du patient avec l’anesthésiste. C’est l’occasion d’établir une relation thérapeutique basée sur la confiance et le respect mutuel. C’est aussi le moment d’expliquer au malade les différentes procédures de l’anesthésie et leurs risques, et de discuter avec lui de ses propres options lorsque des choix sont possibles. Sans pour autant l’effrayer, il faut aborder la question de la réanimation, au cas où surviendrait une situation grave. Il est important de connaître son opinion de manière à pouvoir respecter son autonomie lorsqu’il n’est plus en état de décider. Ce dialogue est consigné sous une forme écrite et signée. Pour avoir tout son sens et assurer un réel confort au malade, la prémédication pharmacologique ne doit pas être elle-même désagréable (piqûre, nausées, mauvais goût), et doit avoir lieu suffisamment tôt par rapport au transfert en salle d’opération. L’effet de la morphine s’installe en 20 minutes, et celui des diazépines orales en 30 minutes; il est donc capital de prémédiquer les patients au moins 45 minutes avant leur arrivée en salle d’opération. Deux types de prémédication sont d’usage courant. Benzodiazépine per os (midazolam, oxazepam, lorazepam, etc) : amnésie, anxiolyse, confort pour le patient, sédation profonde, hémodynamiquement stable, mais absence d'analgésie et risque de réaction paradoxale. Diminuer les doses de moitié chez les personnes âgées (≥ 70 ans) ou débilitées ; éviter le midazolam et le diazepam au dessus de 65 ans et préférer le lorazepam ou l’oxazepam. Combinaison de morphine (0.1 mg/kg) et de scopolamine (0.2-0.4 mg) intra-musculaire : analgésie, sédation, amnésie, mais risque d'hypotension et de confusion au-dessus de 65 ans. Désavantage majeur : inconfort de la piqûre. Avantage : analgésie en cas de pathologie douloureuse. La deuxième solution provoque moins d'inhibition sympathique que la première lors de l'induction d'une anesthésie avec un fentanyl ; il se manifestera moins de bradycardie. L'effet anticholinergique central de la scopolamine peut avoir un intérêt par sa capacité présumée à diminuer l'intensité de la rigidité musculaire thoracique due aux doses élevées de fentanyl, qui relève d'une stimulation extrapyramidale cholinergique. Il est préférable d’éviter toute sédation préopératoire chez les personnes âgées, débilitées, hémodynamiquement instables ou à risque d’hypoxie. Traitement médicamenteux préopératoire Le traitement déjà mis en oeuvre pour stabiliser le patient indique le degré d'altération fonctionnelle et la direction dans laquelle doit tendre la prise en charge pharmacologique peropératoire. D’une manière générale, les médicaments nécessaires à l’équilibre hémodynamique ou rythmologique du malade sont conservés en périopératoire et administrés à la prémédication, à l’exception de quelques substances qui interfèrent avec l’anesthésie. Concernant les malades coronariens, on peut relever les points suivants (explicités plus en détail au Chapitre 3, Médication préopératoire). Les dérivés nitrés doivent être maintenus aux dosages habituels jusqu'à l'intervention, même s’ils diminuent la précharge ; ils sont administrés le matin du jour opératoire, car leur arrêt brusque peut induire une ischémie, une hypervolémie relative ou une défaillance droite. Les béta-bloqueurs sont impérativement administrés à la prémédication, parce qu’ils diminuent l'incidence d’infarctus (- 25%) périopératoire chez les coronariens chez qui ils sont prescrits pour une insuffisance ventriculaire ou à cause d’un infarctus récent [4a,16]. Leur interruption provoque un effet rebond, augmente le taux d’ischémie aiguë à 48-72 heures et double le risque d’infarctus postopératoire [351]. La prise chronique de béta-bloqueurs à long terme est bénéfique seulement si la fréquence cardiaque est contrôlée, au besoin par des doses Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 92 supplémentaires [307] ; en effet, les béta-bloqueurs sont efficaces dans la mesure où la fréquence cardiaque est maintenue à 60-65 batt/minute (voir Chapitre 3, Les béta-bloqueurs). La fixité de la fréquence sous béta-bloqueurs limite significativement l'adaptabilité du débit cardiaque aux variations de la demande métabolique et du remplissage vasculaire ; de ce fait, le béta-blocage est associé à une augmentation des épisodes hypotensifs et du taux d’AVC [93]. Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) vasodilatent les vaisseaux de résistance et de capacitance ; il est recommandé des les interrompre 12-24 heures avant l’intervention lorsqu’ils sont prescrits comme traitement anti-hypertenseur, mais de les maintenir si leur indication est une insuffisance ventriculaire gauche congestive ; leur arrêt ne provoque pas d’effet rebond. Les statines diminuent la mortalité, les complications cardiaques et l’incidence d’ictus en chirurgie cardio-vasculaire [206] ; comme leur interruption augmente la mortalité, elles sont continuées en préopératoire (voir Chapitre 3, Statines). Les anticalciques sont des vasodilatateurs des vaisseaux de résistance ; il est recommandé de les maintenir jusqu'à l'intervention, bien que leur interruption ne paraisse pas occasionner d'ischémie aiguë et que leur maintien puisse augmenter le besoin en catécholamines et en volume, et prolonger l'effet des curares. La nifédipine et l'isradipine induisent une tachycardie réflexe, alors que le diltiazem et le vérapamil ont des effets inotorope et chronotrope négatifs susceptibles d’induire une bradycardie sévère en cas d’administration simultanée de bétabloqueur ou d’amiodarone. Les alpha-2-agonistes (clonidine, dexmedetomidine) limitent la tachycardie et l'hypertension, et induisent de plus une sédation et une analgésie; ces effets sont tout bénéfice en peropératoire, et diminuent l'incidence de complications cardiaques postopératoires [266]. La dexmedetomidine peut être utilisée comme prémédication. Les diurétiques sont en général suspendus le jour opératoire pour minimiser le risque d’hypovolémie, d’hypokaliémie et à d’hyponatrémie peropératoires. Les antiarythmiques sont conservés, bien que les substances du groupe I prolongent l'effet des curares ; l'amiodarone (Cordarone) provoque un bloc sympathique alpha et béta noncompétitif qui peut être à l'origine d'hypotensions sévères. Lorsqu’elle est indiquée pour ralentir la réponse ventriculaire en cas de FA, la digitale est maintenue jusqu’à l’opération, mais n’est pas prescrite avec la prémédication vu sa longue demi-vie ; dans le cadre de l’insuffisance cardiaque son bénéfice est marginal. L’aspirine en prévention secondaire est un traitement à vie qui n’est jamais interrompu ; elle est administrée à la prémédication. Le clopidogrel ou le ticagrelor sont arrêtés 5 jours avant l’opération (prasugrel 7 jours), si le risque hémorragique peropératoire le justifie (voir Chapitre 3, Antiplaquettaires) ; ils sont maintenus si l’intervention a lieu pendant la période à haut risque de thrombose coronarienne après des stents passifs (6 semaines), un infarctus (6 mois), des stents actifs (12 mois) ou un syndrome coronarien aigu (12 mois) (voir Tableau 9.8) [63]. Leur interruption peut être justifiée dans la chirurgie en espace clos (neurochirurgie intracrânienne, chirurgie de la chambre postérieure de l’oeil, chirurgie du canal médullaire) ou lorsque le risque hémorragique peropératoire est excessif et l’hémostase particulièrement difficile [62,87]. La décision doit être prise de manière collégiale entre cardiologues, chirurgiens et anesthésistes en fonction de chaque cas particulier (voir Figure 9.24 et Figure 9.25). Un délai de 5 jours avant l'opération est suffisant pour l’arrêt de l’aspirine, du ticagrelor et/ou du clopidogrel ; ceci permet la récupération fonctionnelle de la moitié des plaquettes, ce qui donne un profil de coagulation normal. Par sécurité, le délai est allongé à 7 jours pour le prasugrel parce qu’il est plus puissant que le clopidogrel. Les anticoagulants coumariniques sont interrompus 5 jours avant l’intervention (Marcoumar® 10 jours), et remplacés 3 à 5 jours préopératoires par de l'héparine (10'000-15'000 UI/jour) ; on recherche un INR égal à 1.5 fois la valeur de départ (voir Figure 8.13). Les héparines sont stoppées 4 heures préopératoires pour l’héparine non-fractionnée, 12 heures pour les HBPM prophylactiques, et 24 heures pour les HBPM à dose thérapeutique (48 heures si insuffisance rénale). Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 93 Les nouveaux anticoagulants sont arrêtés selon le schéma simplifié suivant (voir détails au Chapitre 8 Gestion périopératoire) : • Fondaparinux (Arixtra®) 48 h (4 jours si insuffisance rénale) • Dabigatran (Pradaxa®) 36 h (3-4 jours si insuffisance rénale) • Apixaban (Eliquis®) 36 h (2-3 jours si insuffisance rénale) ® • Rivaroxaban (Xarelto ) 24 h (2-3 jours si insuffisance rénale), 48 heures si risque hémorragique élevé (CEC) Toutes les substances nécessaires à l’équilibre du patient sont reprises le plus tôt possible après l’intervention (≤ 24 heures), par voie orale (par sonde gastrique si nécessaire) ou intraveineuse (nitrés, béta-bloqueurs, diurétiques, cordarone, etc). Vu leurs effets opposés à la protection myocardique par préconditionnement, les anti-COX2 et les sulfonylurées doivent logiquement être stoppés quelques jours avant l'intervention. Les antidiabétiques oraux peuvent être remplacés par de l'insuline. Prémédication du patient coronarien Régler le β-blocage pour une fréquence cardiaque de 60-65 batt/min. Maintenir les médicaments anti-angineux, anti-arythmiques et anti-hypertenseurs. IEC: suspendre 24 heures préop si prescrit pour hypertension artérielle, maintenir si prescrit pour dysfonction ventriculaire. Prévoir une sédation et une anxiolyse avec une diazépine. Si douleurs préopératoires: morphine + scopolamine. Agents d’anesthésie et ischémie myocardique Agents intraveineux Les agents d'anesthésie intraveineux ont en général peu d'effets directs sur la vascularisation coronarienne, mais certains peuvent perturber l'équilibre entre la demande (VO2) et l'apport d'oxygène (DO2) par tachycardie ou stimulation sympathique centrale. Le midazolam (0.2 mg/kg) provoque un abaissement simultané et parallèle du flux coronaire (-24%) et de la mVO2 (- 26%) ; il ne modifie donc pas l'autorégulation coronarienne [223] ; il baisse la précharge et la postcharge, mais non la contractilité ni la fréquence. Son effet majeur est une sympatholyse centrale. L'étomidate (0.3 mg/kg) a un léger effet vasodilatateur coronarien de type nitré, mais ne modifie pas le rapport DO2/VO2 myocardique [177] ; comme il n’altère pas les réflexes autonomes, il ne protège pas d’une poussée hypertensive ou tachycardisante en cas de stimulus majeur, mais il assure la meilleure stabilité hémodynamique en cas de dysfonction ventriculaire ou de valvulopathie. Le propofol abaisse surtout la précharge et modérément la postcharge du VG, sans modification de la fréquence cardiaque car il bloque le réflexe cardio-accélérateur [249,295]; il diminue la consommation d'O2 du myocarde par son faible effet inotrope négatif et vasodilatateur coronarien [183,253]. Pour autant que la chute de la PAM ne compromette pas la perfusion coronarienne, l'autorégulation est préservée [352]. Cependant, lors d'hypovolémie, l'hypotension causée par le propofol diminue la perfusion coronaire au-delà de la baisse de la mVO2 et aggrave l'ischémie myocardique [227]. Le thiopental induit une tachycardie importante (+ 30%) qui provoque obligatoirement une augmentation de la mVO2 , dangereuse pour le coronarien ; l'effet inotrope négatif (- 25%), la baisse de précharge (- 25%) et le blocage des baroréflexes conduisent à un déséquilibre Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 94 hémodynamique significatif [99]. La conjonction de la tachycardie et du stimulus de l'intubation représente un facteur aggravant majeur pour l’ischémie myocardique. La kétamine provoque une stimulation sympathique centrale caractérisée par une sécrétion accrue de nor-adrénaline [375] ; elle est la cause d’une hypertension systémique (+ 40%) et pulmonaire (+ 45%) et d’une tachycardie prohibitive (+ 50%). Même si le flux coronaire augmente parallèlement chez l'individu sain, l'élévation de la mVO2 occasionnée par ces deux phénomènes est largement excessive pour le patient coronarien. D’autre part, la kétamine a un effet inotrope négatif direct sur le myocarde qui est masqué par la stimulation sympathique centrale, mais qui devient apparent dans l'insuffisance cardiaque chronique et dans les situations où la réponse sympathique est inhibée, épuisée, ou déjà maximalement stimulée (patients en réanimation, par exemple). D'une manière générale, les fentanils ont peu d'effet hémodynamiques à part une bradycardie due à leur effet vagal central, qui est plutôt bénéfique pour le coronarien. Ils peuvent occasionner une hypotension systémique chez les malades dont les résistances artérielles sont très élevées à cause d’une stimulation sympathique centrale excessive (stress, douleur, etc). Ils ne modifient pas le rapport entre la demande et l'apport d'oxygène. Les opiacés stimulants les récepteurs δ ont probablement un certain effet de préconditionnement myocardique [319]. Le fentanyl est sans effet sur la réactivité des vaisseaux coronaires et sur le métabolisme myocardique [35] ; il n'est pas associé non plus à la production de lactate par le myocarde. Le sufentanil est davantage sympathicolytique que le fentanyl, mais ne modifie pas le rapport DO2/VO2 [321]. L'alfentanil pourrait induire un phénomène de vol [235]. Le rémifentanil occasionne une baisse modérée de tous les paramètres hémodynamiques avec une dose d’induction de 2-5 mcg/kg : pression artérielle (- 25%), fréquence cardiaque (- 20%), dP/dt, débit cardiaque [308] ; même avec une dose de 1 mcg/kg, la bradycardie peut être profonde (< 30 batt/min) et présenter un risque de bas débit cardiaque et de dilatation ventriculaire par prolongement excessif de la diastole [92]. La plupart des curares actuels sont sans effets hémodynamiques, à l’exception du pancuronium qui augmente la fréquence de 20% par effet vagolytique central. Toutefois la curarisation est fréquemment associée à une hypotension systémique importante pour deux raisons. Baisse du retour veineux par la veine cave inférieure dû à : • Baisse de la pression abdominale par la myorelaxation de la paroi ; • Augmentation de la pression intrathoracique par la ventilation en pression positive ; Disparition de la contention musculaire des grandes veines et pooling veineux périphérique. Les effets hémodynamiques généraux des agents d'anesthésie sont détaillés le Chapitre 4 (voir Effets hémodynamiques des agents d’anesthésie) et résumés dans les Tableaux 4.3, 4.4 et 4.6. Agents volatils La réduction du métabolisme cardiaque secondaire à la dépression myocardique des halogénés leur confère une certaine capacité de protection contre l'ischémie, dans la mesure où la chute de la pression artérielle moyenne, les variations de la fréquence cardiaque et l'augmentation de la pression télédiastolique ventriculaire ne compromettent pas la perfusion coronarienne. Tous les halogénés produisent une vasodilatation artérielle systémique et coronarienne dans l'ordre de puissance suivant: isoflurane > desflurane > enflurane > sevoflurane > halothane [233]. Leur effet chronotrope négatif prédispose au passage en rythme jonctionnel ; la perte du remplissage télédiastolique par la contraction auriculaire peut être mal tolérée par les patients souffrant de dysfonction diastolique. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 95 Aux doses cliniques habituelles, l’halothane a un effet inotrope et chronotrope négatif important et se comporte comme un puissant β-bloqueur (baisse de la mVO2) ; il est retiré du marché européen à cause de son hépatotoxicité, sauf pour l'utilisation vétérinaire. L’isoflurane abaisse la postcharge du VG par vasodilatation artérielle (baisse de la PAM de 20%) et provoque une légère tachycardie compensatrice. La vasodilatation de l’isoflurane a été décrite comme responsable d’un phénomène de vol intracoronarien : il s'agit d'une redistribution du flux vers des zones saines où la résistance baisse, à partir de zones ischémiées où le flux ne peut pas augmenter parce que le territoire est déjà maximalement vasodilaté. Ce phénomène, s’il existe, est sans portée clinique aux concentrations usuelles de ce gaz pour autant qu’il n’y ait pas d’hypotension artérielle (voir Chapitre 5, Collatérales et phénomène de vol). Le sevoflurane induit moins de tachycardie et moins de vasodilatation artérielle que l’isoflurane ; il ne provoque pas de vol coronarien [342]. Le desflurane paraît plus stable à cause de sa stimulation sympathique importante, mais il provoque une tachycardie et une augmentation des RAS et des RAP lors de l'accroissement de la fraction inspirée > 1 MAC [100,250], qui le rendent impropres à l’anesthésie du patient coronarien [154]. Le protoxyde d’azote (N2 O) provoque une légère stimulation sympathique centrale accompagnée de tachycardie [238] ; il augmente les RAP chez l’adulte, non chez l’enfant. Le phénomène du préconditionnement par les halogénés représente une forme de protection myocardique pour les patients coronariens (voir Préconditionnement, page 21). Cette protection diminue les dommages myocardiques et facilite la reprise fonctionnelle ventriculaire lors de chirurgie de revascularisation coronarienne, mais elle n’influence pas significativement la mortalité postopératoire. Bien que les données prouvant un impact en chirurgie non-cardiaque soient insignifiantes, il n’est pas interdit d’extrapoler les résultats obtenus en chirurgie cardiaque à la chirurgie générale vu les bénéfices potentiels. En l'état actuel de nos connaissances, on peut donc soutenir que le maintien de l’anesthésie par des halogénés chez le coronarien présente probablement des avantages supérieurs à ses risques, particulièrement dans certaines catégories de patients comme les vasculaires ou les enfants [31]. Le phénomène de vol intracoronarien attribué à l’isoflurane ne paraît pas correspondre à une réalité rencontrée en clinique, sauf en cas d’hypotension extrême. Agents d’anesthésie et ischémie myocardique Pour autant que la chute de la PAM ne compromette pas la perfusion coronarienne, le midazolam et le propofol ne modifient pas le rapport DO2/VO2 myocardique. L’étomidate assure la meilleure stabilité hémodynamique. Le thiopental péjore le rapport DO2/VO2 parce qu’il provoque une tachycardie et une hypotension. La kétamine augmente la mVO2 et peut causer une défaillance ventriculaire majeure en cas d’épuisement sympathique. Les halogénés causent une vasodilatation coronarienne par ordre décroissant: isoflurane > desflurane > enflurane > sevoflurane > halothane. - Isoflurane: vasodilatation artérielle et légère tachycardie; risque potentiel de vol coronarien si Fi > 2 MAC et si hypotension sévère; - Sevoflurane: ni hypotension, ni tachycardie; - Desflurane: stimulation sympathique, tachycardie, augmentation des RAS et des RAP; - Halothane: baisse de la mVO2 par effets inotrope et chronotrope négatifs marqués (équivalent à un β-blocage). Tous les halogénés induisent une protection myocardique contre l’ischémie (préconditionnement). Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 96 Conduite de l’anesthésie du patient coronarien L'évaluation préopératoire ayant permis d'identifier et de préparer les patients à risque, le but de l'anesthésie est double : Maintenir un équilibre optimal entre l'apport et la demande en O2 du myocarde (voir Figure 9.2, page 8) ; Identifier et traiter le plus tôt possible la survenue d'un épisode ischémique. Beaucoup d’épisodes ischémiques peropératoires surviennent en l’absence de modifications hémodynamiques, suggérant ainsi qu’ils ont pour origine une insuffisance dans l’apport d’oxygène (insuffisance coronarienne, spasmes, instabilité de plaques athéromateuses, hypotension, anémie) plutôt qu’un excès de demande métabolique myocardique (tachycardie, stress, douleur, hypertension). Le risque d'une coronaropathie cliniquement instable (angor stade III-IV) est donc plus élevé que celui d'un angor stable ou stabilisé (stade I-II). L'ischémie peropératoire est un phénomène multifactoriel, complexe et partiellement aléatoire ; la sténose coronarienne est dynamique, et la mVO2 réduite sous anesthésie. Il n'est donc pas surprenant qu'il soit difficile de déterminer des seuils hémodynamiques au-delà desquels le risque d'ischémie soit certain. Il n'en reste pas moins que la rapidité de réaction est un facteur essentiel dans le maintien de l'équilibre du patient. Toute modification de la pression artérielle ou de la fréquence cardiaque doit être corrigée immédiatement : vasoconstricteur, vasodilatateur, béta-bloqueur, approfondissement de l'anesthésie ; L’apparition de signe d'ischémie doit être traitée agressivement : vasoconstricteur systémique, antiplaquettaires, anticoagulation, nitroglycérine, béta-bloqueur, revascularisation (voir Tableau 9.4 et Tableau 9.5, ainsi que Figures 9.19A, 9.19B, 9.19C et 9.19D). Le taux de complications cardiaques et la mortalité postopratoire sont directement proportionnelles à l’importance de trois facteurs : 1) l’hémorragie peropératoire, 2) l’hypotension artérielle, et 3) la tachycardie. Des pertes sanguines supérieures à 1 L, une PAM < 45 mmHg et une fréquence > 85 b/min pendant > 10 minutes décuplent le risque postopératoire [289]. Si le premier facteur relève du chirurgien, la correction des deux autres est le domaine de l’anesthésiste. On sait que le choix de la technique d'anesthésie a peu d’impact sur le devenir des patients coronariens : conduite avec rigueur, n'importe quelle manière de procéder est efficace pour autant qu'elle atténue les réactions de stress per- et post-opératoire et maintienne l’équilibre du rapport DO2/VO2. Toutefois, la cardioprotection pharmacologique (voir Chapitre 3, Cardioprotection périopératoire) et le phénomène du préconditionnement par les halogénés (Préconditionnement) font que certains agents peuvent influencer le devenir de ces patients. Technique d'anesthésie générale Des remarques précédentes sur la pharmacologie, il ressort que le thiopental et la kétamine sont inadaptés à l'anesthésie du coronarien, alors que le midazolam et l'étomidate sont inoffensifs. Si la pression artérielle est maintenue stable, le propofol est une bonne solution pour l’induction, mais les halogénés lui sont préférables pour le maintien de l’anesthésie à cause de leur effet de précondionnement. Isoflurane et sevoflurane sont à peu près équivalents ; le sevoflurane assure une meilleure stabilité hémodynamique. La vasodilatation artérielle de l'isoflurane en fait le premier choix chez l'hypertendu ou chez le patient souffrant d'une insuffisance valvulaire mitrale ou aortique. Le desflurane fait courir le risque d'une hyperactivité sympathique et d'une hypertension pulmonaire liée à l'augmentation de la concentration inhalée ; il n’est pas indiqué chez le coronarien. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 97 La tachycardie et l'hypotension sont certainement les évènements les plus nocifs chez le coronarien, surtout s'ils persistent plus de 10 minutes. Un repère utile est le rapport de Buffington : le coronarien entre dans la zone dangereuse lorsque sa pression artérielle moyenne (PAM) est inférieure à sa fréquence cardiaque (FC). Le rapport PAM / FC doit rester > 1 [55]. La fréquence cardiaque à laquelle sont survenues les altérations cinétiques ou électriques à l’épreuve d’effort préopératoire indique la fréquence cardiaque à ne pas dépasser ; il est souhaitable de maintenir la fréquence du malade 20% en dessous de cette valeur. Le contrôle hémodynamique est opéré par quatre éléments. La profondeur de l'anesthésie ; Le volume circulant ; L’administration d’un vasoconstricteur α (phényléphrine, nor-adrénaline) ; L'administration de β-bloqueur (esmolol, loprésor, métoprolol). Le but recherché peut être résumé simplement dans un raccourci sur l'état idéal du patient coronarien : Lent - Mou - Fermé PAM / FC > 1 Monitorage L'ischémie peropératoire est par nature silencieuse. Le diagnostic repose essentiellement sur les modifications du segment ST à l’ECG et accessoirement sur les altérations de la cinétique segmentaire à l’ETO. Une surveillance hémodynamique optimale réclame un monitorage continu de la fréquence cardiaque, de l’ECG et de la pression artérielle par voie invasive (cathéter radial ou fémoral) (voir Chapitre 6, Monitorage de l’ischémie). La seule mesure objective de l’ischémie est une diminution de l’extraction de lactate et une augmentation de sa production dans le sinus coronaire, mais la canulation de ce dernier n’est pas une technique facilement utilisable en clinique. L'ECG est le monitorage le plus spécifique et le plus sensible pour surveiller en permanence l'ischémie sous-endocardique. Le degré de sous-décalage ou de surélévation du segment ST est directement proportionnel à la taille du territoire ischémié. L’observation du segment ST dans les dérivations D2 et V5 permet de déceler 80% des épisodes ischémiques ; l'addition de V4 augmente le degré de détection à 96% [211]. On peut aussi afficher les dérivations correspondant aux territoires dans lesquelles les anomalies les plus importantes ont été découvertes au cours du test d’effort préopératoire. La spécificité et la sensibilité de l’analyse automatique du segment ST sont de l’ordre de 75% [192]. D'autres signes électriques peuvent traduire des épisodes ischémiques : ESV multifocales, tachycardie ventriculaire, fibrillation ventriculaire, blocs de branche intermittents ou permanents. La surveillance continue de la pression artérielle est capitale parce que le flux est pression-dépendant derrière les sténoses et dans les collatérales. Une baisse de la pression artérielle moyenne de plus de 30%, ou en dessous de 65 mmHg, a une valeur prédictive positive de 84% pour une ischémie périopératoire [209]. Il est habituellement recommandé de la maintenir la PAM au-dessus de 75-80 mmHg pour avoir une marge de sécurité. Le danger est maximal lorsqu’elle devient inférieure à la fréquence cardiaque (rapport de Buffington < 1). L'ETO observe les altérations de la cinétique segmentaire (ACS) ; celles-ci n’apparaissent qu'en cas de lésions sur les troncs coronariens avec ischémie transmurale ou englobant au minimum 20% de l’épaisseur de paroi. La valeur prédictive positive de l’ETO pour l’infarctus postopératoire est élevée en chirurgie coronarienne où les lésions sont tronculaires et segmentaires, mais elle est faible en chirurgie non-cardiaque où les lésions prédominantes sont sous-endocardiques et sans traduction échocardiographique [73,192]. L’ETO n’est donc pas un mode de surveillance adéquat de l’ischémie en chirurgie générale, alors qu’elle est très pertinente en chirurgie de revascularisation coronarienne. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 98 Par contre, elle a une capacité inégalée à démontrer les décompensation hémodynamiques liées à l'ischémie : dysfonction ventriculaire gauche (ischémie aiguë, dilatation sur postcharge excessive), dysfonction droite, insuffisance mitrale, etc. L’ETO est un moyen de surveillance inégalé de la tolérance du ventricule aux manipulations hémodynamiques comme le clampage de l’aorte lors d’une cure d’anévrysme. Le cathéter pulmonaire témoigne de l'éventuelle conséquence hémodynamique d’une ischémie du VG (stase pulmonaire, onde « v », bas débit cardiaque), mais cela implique une lésion étendue englobant plus de 30% de la masse ventriculaire. Il n’est pas en soi une technique de surveillance de l’ischémie coronarienne [350]. Anesthésie du patient coronarien Deux priorités: - Maintenir un rapport DO2/VO2 myocardique optimal; - Traiter précocement et agressivement tout épisode ischémique. Maintien rigoureux de la pression artérielle (PAM ≥ 80 mmHg) et de la fréquence (FC 60-65 batt/min) Maintien du rapport PAM / FC > 1. Hémodynamique idéale: Lent – Mou – Fermé Monitorage: ECG (D2 et V5) avec surveillance du segment ST et cathéter artériel (PA invasive). L’ETO permet de surveiller: 1) les altérations de la cinétique segmentaire survenant en cas d’obstruction tronculaire et 2) la fonction des ventricules et leur tolérance aux modifications hémodynamiques. Le cathéter artériel pulmonaire n’est pas une technique de surveillance de l’ischémie myocardique. Anesthésie loco-régionale rachidienne et anesthésie combinée Le rationnel de l'anesthésie loco-régionale (ALR) ou de l'anesthésie combinée est triple: Diminuer la douleur et le support ventilatoire postopératoires ; Diminuer la réponse neuro-endocrine (sécrétion d’adrénaline, de cortisol, de déclencheurs du syndrome inflammatoire) et sympathique (tachycardie, hypertension) au stress ; Diminuer l'hypercoagulabilité périopératoire (baisse de la fibrine et fibrinolyse accrue). D'une manière générale, les marqueurs de la réaction de stress sont abaissés chez les malades qui ont une péridurale thoracique : noradrénaline, adrénaline, cortisol, taux de lactate dans le sinus coronaire sont diminués [109]. La fibrinolyse est accrue, moins de fibrine est formée et l’adhésivité des plaquettes est diminuée [297,361]. Les effets de l'anesthésie rachidienne varient selon le niveau de celle-ci. Il faut distinguer le bloc thoracique haut (C7-D5), le bloc médio-thoracique (D5-D10), et le bloc lombaire. Les études mentionnées ci-dessous ne comportent que des cas dont la péridurale fonctionne normalement. Or, on a montré que dans la réalité clinique quotidienne près de 30% des loco-régionales ont des problèmes d’efficacité : douleurs persistantes, nausées, bloc moteur excessif, retrait prématuré, ou échec technique [229]. ALR thoracique haute L'administration d’anesthésiques locaux par voie épidurale thoracique haute (C7-D5) vasodilate le réseau coronarien, diminue l'angor, induit une bradycardie, et améliore la fonction systolo-diastolique Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 99 chez les coronariens [37,304,305]. Pendant une épreuve d'effort, la péridurale thoracique haute améliore les performances du patient et diminue le sous-décalage du segment ST [184]. Toutefois, la sympathicolyse cardiaque ainsi provoquée peut diminuer la contractilité myocardique lorsque celle-ci est dépendante de la stimulation sympathique centrale [136]. Le bloc sympathique thoracique provoque une vasodilatation des vaisseaux de capacitance et une hypotension. Malgré le bénéfice d’une baisse de sa mVO2, le ventricule peut souffrir d’une diminution de la pression de perfusion coronaire lorsque la pression diastolique aortique est abaissée de plus de 50% de sa valeur initiale. Chez les patients éveillés, cet effet est compensé par une réaction sympathique réflexe dans les territoires non bloqués. Sous anesthésie générale, par contre, on peut assister à une hypotension liée à une absence de réflexe vasoconstricteur dans les zones non bloquées et à une cardiodépression supplémentaire par les agents d'anesthésie [21]. Une hypotension sévère peut même conduire à des altérations de la cinétique segmentaire du VG typiques d'une ischémie transmurale [299]. En chirurgie thoracique, l’hypotension est très fréquente, puisque l'usage de vasoconstricteurs et l'augmentation des volumes perfusés sont nécessaires dans 50-90% des cas [326]. Le bloc cervical bas ou thoracique haut inhibe la vasodilatation pulmonaire active neurogène, non-dépendante du NO• ; chez l’individu normal, les résistances pulmonaires peuvent augmenter sensiblement, alors qu’elles tendent à baisser chez les patients souffrant d’hypertension pulmonaire. ALR thoracique basse et lombaire Les deux techniques peuvent induire une hypotension par baisse de précharge et de postcharge, et une bradycardie sévère. La bradycardie qui survient avec un bloc lombaire est due au réflexe de BezoldJarisch (baisse de fréquence associée à la baisse de distension auriculaire droite) et non à une sympathectomie cardiaque comme c'est le cas dans la péridurale thoracique haute. La bradycardie due au réflexe de Bezold-Jarisch est particulièrement rebelle à l'atropine [242] ; l'effet alpha veineux central de l'éphédrine en est le meilleur traitement. Lors d’une péridurale lombaire ou d’une rachianesthésie, l'hypotension n'est pas accompagnée d'une baisse de mVO2 par sympathectomie cardiaque ; elle peut même être aggravée par la stimulation sympathique des segments supérieurs non bloqués par l'ALR [335]. Le flux coronarien en aval d'une sténose peut alors diminuer à cause de l'hypotension, quand bien même la demande en O2 augmente, aggravant ainsi la situation [232]. Avec une péridurale thoracique haute, la diminution du flux coronarien est accompagnée d'une diminution de la mVO2 ; l'équilibre est maintenu. Le même degré d'hypotension dans une ALR thoracique ne cause pas d'altération ischémique de la cinétique segmentaire alors qu'il le fait dans une ALR lombaire [299,300]. On peut en conclure que l'ALR dorso-lombaire ne diminue probablement pas les risques opératoires pour le malade souffrant d'ischémie coronarienne, alors qu’une épidurale thoracique haute peut diminuer l’incidence d’ischémie myocardique de 40% [305,306]. ALR rachidienne et orthopédie Parmi les nombreuses études sur ce thème, on ne trouve pas de différence significative entre l'ALR rachidienne et l'anesthésie générale dans le devenir postopératoire des patients, sauf dans l'incidence des thromboses veineuses profondes et dans la gravité des embolies pulmonaires qui sont toutes deux diminuées avec l’ALR [347]. Bien qu'entraînant davantage d'épisodes hypotensifs peropératoires, l'ALR ne crée pas de différence non plus au niveau des épisodes d'insuffisance cardiaque ou de l'incidence d'infarctus postopératoire [264]. ALR rachidienne et chirurgie abdominale majeure Les études comparatives randomisées de l'anesthésie combinée et de l'anesthésie générale seule dans le cadre de la chirurgie abdominale majeure donnent des résultats conflictuels ou des avantages peu Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 100 significatifs pour la péridurale [25]. Hormis une extubation précoce, l'anesthésie combinée ne crée pas de différence dans la mortalité, la morbidité ou le devenir des patients lors d’opérations sur l’aorte abdominale dans une étude randomisée de 168 patients [258]. Dans une autre étude contrôlée (1'021 patients), la péridurale diminue l'incidence d'infarctus du myocarde, d’ictus et de pneumonie de 40% dans le groupe opéré de l’aorte abdominale, mais non dans les interventions digestives majeures [272]. Un essai randomisé portant sur presque 1'000 patients n’a pas pu mettre en évidence de différence dans la mortalité ou les complications cardiaques [292], alors qu’une méta-analyse (revue de 88'188 patients de chirurgie intermédiaire et majeure) trouve une légère tendance vers une réduction de morbi-mortalité [359]. Cette littérature montre essentiellement que l’ALR diminue le taux d’insuffisance respiratoire postopératoire de 30% en chirurgie abdominale majeure et le taux de thromboses de pontages périphériques de 35% en chirurgie vasculaire [70,292,345]. Mais si la morbidité cardiaque est diminuée dans plusieurs études (en moyenne de 35%), cela paraît être plutôt en relation avec la qualité de la réhabilitation et de l’analgésie postopératoires qu'avec la sympathectomie peropératoire [21,38,272]. Ceci correspond à deux phénomènes connus : 1) les épisodes d’ischémie sont moins fréquents en peropératoire qu’en postopératoire, et 2) l’ischémie peropératoire n’a qu’une faible incidence sur l’infarctus postopératoire [219]. L'ALR est certainement un gain majeur pour diminuer la douleur, le stress, le syndrome inflammatoire et l'hypercoagulabilité dans les premiers jours postopératoires, à une période où les épisodes d’ischémie sur demande excessive en O2 sont directement liés à l’infarctus [193,194]. Le bénéfice est donc marqué en postopératoire, mais non démontré en peropératoire. De ce fait, il est logique d’utiliser la péridurale préférentiellement dans le postopératoire, en installant le bloc pendant la fermeture de la laparotomie. Cette manière de procéder présente deux avantages : 1) une meilleure stabilité hémodynamique pendant l’intervention (diminution du volume de cristalloïde/colloïde et du taux de vasopresseurs administrés), et 2) une analgésie optimale dès le réveil du patient. La péridurale est évidemment mise en place avant l’induction de l’anesthésie. Anesthésie loco-régionale rachidienne et ischémie myocardique L’ALR rachidienne améliore l’analgésie et la ventilation postopératoires; elle diminue la réaction au stress, l’hypercoagulabilité et le syndrome inflammatoire post-chirurgical. Son but est un meilleur confort postopératoire pour le patient, mais elle ne modifie pas significativement la mortalité ni le risque cardiaque. Si vingt ans d’études comparatives n’ont pas réussi à démontrer clairement l’avantage de l’ALR/combinée sur le risque cardiovasculaire, il est évident que cette technique ne crée pas de différence majeure dans la morbi-mortalité cardiaque. Par contre, ces mêmes études ont montré 3 avantages à la péridurale: - Analgésie très efficace et confort de haute qualité pour le patient; - Réduction des complications pulmonaires; - Diminution des thromboses en chirurgie vasculaire et en orthopédie. La péridurale cervico-thoracique (C7-D5) réalise une sympathectomie cardiaque qui peut favorablement influencer le rapport DO2/VO2 chez le coronarien. Mais l’ALR rachidienne en dessous de D6 ne modifie pas significativement la morbidité cardiaque. Il n’est pas justifié d’interrompre un traitement antiplaquettaire au seul titre de pouvoir pratiquer une ALR rachidienne, car le taux de complications cardiovasculaires de cet arrêt est largement supérieur au bénéfice escompté de la loco-régionale. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 101 Depuis quelques années, de nombreuses études ont démontré que l’arrêt préopératoire des antiplaquettaires entraîne un risque excessif de thrombose de stent (taux d’infarctus postopératoire 1050%, mortalité moyenne 25%) [260,285,315,316]. Or la protection offerte par l’ALR rachidienne est très modeste dans ce contexte : la péridurale thoracique haute diminue la morbidité cardiaque de 40%, mais l’ALR réalisée en dessous de D6 n’a pas d’effets significatifs sur le risque cardiovasculaire. Dans l’état actuel de nos connaissances, il est donc évident que l’interruption des antiplaquettaires au seul titre de pouvoir pratiquer une péridurale ou une rachianesthésie est injustifiée [66,98]. Ischémie et infarctus péri-opératoires Ischémie aiguë peropératoire En cours de chirurgie non-cardiaque, la survenue d’une modification profonde (> 2 mm, > 0.2 mV) et durable (> 10 minutes) du segment ST, avec ou sans altération hémodynamique, commande une décision rapide : l’acte opératoire doit être terminé aussi rapidement que possible, que ce soit par une simplification qui permette de l’abréger ou par une interruption pure et simple si cela est faisable. Dans l’intervalle, une série de mesures doit être prise (voir Tableau 9.4). Approfondir l'anaesthésie / analgésie ; Ventiler à FiO2 0.8 - 1.0 ; Maintenir la normothermie ; Maintenir la PAM > 80 mmHg (noradrénaline 0.03-0.5 mcg/kg/min) ; Nitroglycérine en perfusion: (5 – 20 mcg/kg/min) ; Aspirine 500 mg iv, ticagrelor (Brilinta™, Brilique™), 180 mg par sonde gastrique ; Héparine NF en perfusion: bolus de 60 UI/kg, puis perfusion (12-15 U/kg/h, 15'000 – 30'000 UI / 24 heures) pour PTT 50-70 secondes (selon possibilités chirurgicales) ; Béta-bloqueur si tachycardie > 60 batt/min : bolus et/ou perfusion d'esmolol, si la fonction ventriculaire gauche est conservée (FE > 0.35) ; Dilitiazem (0.1 mg/kg/min), efficace seulement sur les spasmes coronariens ; avantage d'être bradycardisant (ne doit pas être associé à un béta-bloqueur). En cas de surélévation du segment ST (infarctus STEMI), il faut prévenir la thrombose coronarienne et prévoir une angiograpjie et une revascularisation en urgence (PCI) dès que le patient peut être sorti de la salle d’opération (délai optimal : ≤ 90 minutes) (voir Tableau 9.5). Aspirine 500 mg iv ; Ticagrelor (Brilinta™, Brilique™), 180 mg par sonde gastrique ; Héparine NF en perfusion: bolus de 60 UI/kg, puis perfusion (12-15 U/kg/h, 15'000 – 30'000 UI / 24 heures) pour PTT 50-70 secondes (selon possibilités chirurgicales) ; Angioplastie coronarienne (PCI ± stent). En cas d’hypotension ou de choc cardiogène, on met en route : Catécholamines α et β-stimulantes, milrinone (adrénaline – Corotrop™) ; Contre-pulsion intra-aortique (CPIA). Infarctus postopératoire Dans environ 60% des cas, l’infarctus postopératoire est précédé de longs épisodes de tachycardie et de sous-décalage du segment ST [193,194] ; il est de type non-Q chez les deux tiers des patients [14,194]. La durée du sous-décalage ST est directement associée à la valeur du pic de troponine enregistré ultérieurement [288]. L’ascension des troponines est tardive, et l’accident survient en général au 3ème ou 4ème jour [195,201]. Cet infarctus est silencieux dans la majorité des cas : l'angor Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 102 n'est présent que chez 14% des patients [218]. Sa mortalité de 10-20% est trois fois plus élevée que celle de l'infarctus qui survient en dehors d'un contexte chirurgical [191]. Cet infarctus est directement lié au déséquilibre mDO2/mVO2 du à la tachycardie [192]. Le béta-blocage est une prévention efficace chez les malades à risque. Le traitement est le même que celui de tout infarctus non-STEMI (voir Tableau 9.4). Dans 40-45% des cas, c’est au contraire une rupture de plaque instable qui est à l’origine de l’infarctus [82]. Cet infarctus, de type STEMI, survient plus tôt, en général dans les 36 premières heures, mais il peut apparaître n’importe quand dans les dix jours qui suivent l’intervention [201]. Il n’est pas précédé de modifications du segment ST ; l’élévation des troponines est brusque et précoce. Cet infarctus est typique des thromboses de stent qui peuvent survenir chez les malades revascularisés par PCI. Sa mortalité est alors très élevée (25-50%) [315,316]. La seule prévention efficace est le maintien des antiplaquettaires (aspirine, clopidogrel, ticagrelor, prasugrel) et des statines [66,67,98]. Le traitement d’une occlusion coronarienne aiguë postopératoire est l’angioplastie d’urgence (PCI). La thrombolyse est exclue à cause du risque hémorragique excessif immédiatement après un acte chirurgical. La pose de stents est problématique, car le malade est dans une phase inflammatoire massive ; l’activation des thrombocytes est extrême. Le traitement anti-plaquettaire doit donc être maximal (anti-GP IIb/IIIa, clopidogrel, ticagrelor, aspirine). La revascularisation postopératoire d’urgence est une situation dangereuse, puisque la moralité de la PCI est de 20-35% dans ce contexte ; c’est toutefois la moitié de celle du traitement médical conservateur [26]. Infarctus postopératoire De manière schématique, on peut distinguer deux situations différentes: - Infarctus non-Q précédé de tachycardie et de sous-décalage ST (60% des cas); incidence maximale au 3ème jour postop; mortalité: 10%; prévention: β-blocage; - Infarctus avec onde Q et sus-décalage ST (STEMI) (40% des cas), lié à une thrombose aiguë de plaque ou stent instable; peut survenir précocément; mortalité élevée (moyenne ≥ 35%); prévention: antiplaquettaires. Un infarctus peropératoire de type STEMI est une indication à une revascularisation en urgence (délai optimal : ≤ 90 minutes). Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 103 Anesthésie pour la chirurgie de revascularisation coronarienne Après avoir été l'opération la plus pratiquée en chirurgie cardiaque jusqu’à la fin du XXème siècle, le pontage aorto-coronarien (PAC) a perdu du terrain en faveur de la dilatation percutanée (PCI) avec pose de stents. Par contre, les patients opérés sont de plus en plus âgés, sont moins fréquemment des hommes, et souffrent plus souvent de dysfonction ventriculaire, de maladie tritronculaire sévère, de diabète et de polyvasculopathie, toutes situations où la revacularisation chirurgicale donne de meilleurs résultats que la PCI. De ce fait, le profil de la population chirurgicale se modifie, puisque ce sont les patients à risque élevé qui bénéficient le plus de la chirurgie. Evaluation préopératoire La visite préopératoire est l'occasion de relever les éléments marquants de l'anamnèse et du status physique, d'évaluer les risques de l'intervention, et d'adapter la prémédication à la situation clinique (voir Chapitre 3, Evaluation préopératoire en chirurgie cardiaque). Plusieurs points particuliers sont à rechercher dans l'histoire du patient. Facteurs de risque: dysfonction ventriculaire (FE < 0.35), valvulopathie associée, diabète (glycémie > 10 mmol/L), insuffisance rénale (créatinine > 200 µmol/L), status polyvasculaire ; Infarctus anamnestique et complications éventuelles : arythmies, insuffisance congestive, angor résiduel ; Revascularisations préalables : pontages (greffon mammaire interne, prélèvements veineux), PCI (vaisseaux stentés) ; Anamnèse neurologique: accident vasculaire cérébral (AVC), amaurose, accident ischémique transitoire (AIT) ; Comorbidités : insuffisance rénale, BPCO, asthme, maladie ulcéreuse, allergie aux poissons (risque de réaction anaphylactique à la protamine) ; Médicaments en cours. Le status doit comprendre un examen des voies aériennes supérieures, l'auscultation des carotides et des souffles cardiaques, l'état des veines des membres inférieurs (prélèvement de la veine saphène), les sites possibles de ponction pour le cathéter artériel et la voie centrale en fonction de l'anatomie, de la canulation artérielle de CEC, des prélèvements de greffons et des ponctions précédentes. Evaluation du risque opératoire Lorsqu’aucun facteur de risque n’est présent, la mortalité de base est de 0.4% pour les PAC simples [296]. Dans les cas à risque modéré, elle est de 2.8% à 1 an et de 8% à 10 ans [312] ; elle s'élève à 48% chez les malades polyvasculaires et à 20% dans les cas à haut risque [244]. La moyenne est de 1.7% en Europe occidentale. Le taux d'infarctus postopératoire est de 4%, et celui de reprise pour deuxième revascularisation de 3.5%; ce dernier grimpe à 45% dans les cas à haut risque [244,312]. L'âge joue un rôle de premier plan : la mortalité des PAC passe de < 2% en dessous de 65 ans à 8% au-delà de 75 ans [210]. Hormis le coeur, trois autres organes sont particulièrement à risque. Le cerveau: l'incidence d'ictus est de 2-3% ; Les poumons: les complications pulmonaires sont la seconde cause de morbidité postopératoire ; Les reins: la mortalité croît avec le taux de créatinine préopératoire : de < 2% lorsque la créatininémie est normale, elle passe à 8% > 200 µmol/L et à 20% > 400 µmol/L. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 104 Pour mieux quantifier le risque opératoire, on a mis au point un certain nombre d'index, dont le plus utilisé est basé sur les données d’un collectif européen, l’EuroSCORE (European System for Cardiac Operative Risk Evaluation) [296] ; les 17 facteurs de risque retenus et les points de pondération qui leur sont attribués sont décrits dans le Tableau 3.1 [254]. L’EuroSCORE permet une prédiction de la mortalité à 30 jours en répartissant les patients en trois catégories de risque selon le nombre de points obtenus. Risque bas Risque intermédiaire Risque élevé EuroSCORE mortalité score 0 – 2 score 3 – 5 score 6 et plus 0.8% 3.0% 11.2% Il ressort des nombreuses analyses de risque pratiquées à ce jour que les facteurs de risque principaux pour la mortalité opératoire sont les suivants, par ordre de gravité décroissante [216] : Les situations à haut risque (état de choc, assistance ventriculaire, dialyse) ; L’intervention en urgence ; La dysfonction ventriculaire sévère (FE < 0.35 sans béta-bloqueur) ; La réopération ; Les lésions du tronc commun ; L’angor instable ; L'insuffisance rénale (créatinine > 200 mcmole/L) ; L’âge au-dessus de 65 ans ; Le diabète insulino-requérant (glycémie > 10 mmol/L) ; Le sexe féminin. Risque opératoire du pontage aorto-coronarien Mortalité: 0.4% (bas risque) à 4-8% (haut risque, vieillard); moyenne: 1.5% Taux d’infarctus postopératoire: 4% Taux d’AVC postopératoire: 2-3% Médication préopératoire Le traitement nécessaire à l’équilibre hémodynamique du patient est maintenu à la prémédication, comme expliqué en détail au Chapitre 3 (Médication préopératoire en chirurgie cardiaque). Chez les coronariens, deux classes de médicaments méritent une mention spéciale : les béta-boqueurs et les antiplaquettaires. Les béta-boqueurs sont associés à une baisse des évènements ischémiques peropératoires, de l’incidence de FA postopératoire et de la mortalité. Ils ne sont jamais interrompus, mais ajustés pour maintenir une fréquence cardiaque de 60-65 batt/min. En peropératoire, ils sont complétés à la demande par des doses répétées d'esmolol. En cas de bradycardie excessive, il est aisé d’accélérer la fréquence cardiaque avec une catécholamine ou avec le pace-maker épicardique. Ils sont préscrits de routine au moins 24 heures préopératoires et en continu dans le postopératoire, sauf en cas de dysfonction ventriculaire sévère (FE < 30%) [155]. L’aspirine est un traitement à vie qui n’est jamais interrompu, même en préopératoire. L’aspirine préet postopératoire diminue la mortalité et les récidives ischémiques après revascularisation chirurgicale Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 105 [155,217]. Toutefois, lors de chirurgie cardiaque avec CEC, il est recommandé d’arrêter l’aspirine 5 jours avant l’intervention à cause de l’héparinisation complète lors de la CEC et d’une augmentation des saignements de l’ordre de 30% [95]. L’interrompre plus tôt ne modifie pas l’incidence d’accident cardiaque postopératoire [160], mais fait courrir un risque d’accident coronarien préopératoire, puisque 2-10% des patients font un syndrome coronarien aigu à 8.5 jours après l’arrêt de l’aspirine en prévention secondaire [56]. Cette recommandation ne s’applique cependant pas aux situations suivantes, dans lesquelles l’aspirine est maintenue jusqu’à l’intervention (voir Annexe B) : Opérations à cœur battant ; Patients souffrant d’un syndrome coronarien aigu ou d’un angor instable ; Patients porteurs de stents coronariens. Un double traitement antiplaquettaire avec aspirine et clopidogrel, prasugrel ou ticagrelor est impératif après un syndrome coronarien aigu ou une revascularisation percutanée avec pose de stent. Malheureusement, la prise de clopidogrel dans les 5 jours qui précèdent des pontages aortocoronariens augmente de 2 à 4 fois le risque hémorragique, les besoins transfusionnels, les reprises chirurgicales pour hémostase et le séjour en soins intensifs, même si la mortalité des patients et leur devenir à long terme n’en sont pas affectés [28,202]. Il est donc recommandé d’interrompre le ticagrelor 3-5 jours, le clopidogrel 5 jours et le prasugrel 7 jours avant des PAC électifs en CEC, bien que le risque d’évènement coronarien soit augmenté de 1%/jour pendant la durée de l’arrêt [95,155]. Par contre, le traitement n’est pas interrompu lorsqu’il est prescrit pour un syndrome coronarien aigu ou pendant la phase de ré-endothélialisation des stents (stents passifs : 6 semaines ; stents actifs : 12 mois). Dans ces situations, il doit être continué jusqu'à l'opération. La revascularisation à coeur battant, qui nécessite une héparinisation plus faible, est particulièrement indiquée dans ces circonstances parce que moins hémorragipare. La situation est délicate dans les syndromes coronariens aigus, où l’administration d’une dose de charge de clopidogrel (600 mg), de ticagrelor (180 mg) ou de prasugrel (60 mg) est une recommandation formelle avant même de procéder à une coronarographie, donc avant de savoir si le patient est susceptible de subir une revascularisation chirurgicale en urgence ou en semi-urgence. La compétence hémostatique est rétablie dès que plus de 50% des plaquettes sont fonctionnelles. Comme il n’y a pas d’antidote aux antiplaquettaires, seuls le renouvellement spontané des thrombocytes (10%/jour) ou une transfusion de thrombocytes frais peut rétablir la coagulabilité sanguine. La demivie plasmatique du métabolite actif du clopidogrel est de 8 heures, celle du prasugrel de 4 heures. Comme le taux circulant d’une substance est négligeable après 3 demi-vies, on peut estimer que 24 heures après la dernière prise de clopidogrel ou 12 heures après celle de prasugrel, les thrombocytes transfusés ne sont pas inhibés, alors que les plaquettes du patient sont encore complètement bloquées par la liaison irréversible. Le tirofiban et l’eptifibatide ont des demi-vies brèves (2 et 2.5 heures respectivement), alors que celle de l’abciximab est de 23 heures ; les plaquettes transfusées restent donc fonctionnelles 6-8 heures après l’administration de tirofiban ou d’eptifibatide, mais seulement 72 heures après l’arrêt de la perfusion d’abciximab. Le ticagrelor est un bloqueur réversible de l’agrégation plaquettaire ; sa demi-vie est de 8-13 heures. Son taux plasmatique est donc négligeable après 39 heures. Mais à cause de sa liaison réversible avec le récepteur, le ticagrelor a la capacité de diffuser entre les plaquettes en fonction de l’équilibre de masse, de se lier aux nouvelles plaquettes mises en circulation, et de migrer sur les plaquettes fraîchement transfusées. Sa forte liaison aux plaquettes assure également un vaste réservoir de substance susceptible d’interférer avec les récepteurs disponibles. La transfusion plaquettaire perd alors de son efficacité. Bien qu’il n’augmente pas le risque hémorragique par rapport au clopidogrel, le ticagrelor altère considérablement l’efficacité d’une transfusion plaquettaire, si bien que l’hémorragie, lorsqu’elle survient, est plus difficile à juguler (voir Chapitre 8 Normalisation des plaquettes). Les statines améliorent le pronostic de la chirurgie coronarienne. Elles doivent être maintenues jusqu’à l’intervention et reprises dès que possible en postopératoire. Les cas urgents, ou les patients qui n’en recevraient pas encore, bénéficient d’une administration de statines dans les 24 heures préopératoires [155]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 106 La prophylaxie antibiotique est obligatoire. Une céphalosporine de 1ère ou 2ème génération est recommandée chez les patients non MRSA ; chez ces derniers, il est préférable d’utiliser de la vancomycine, seule ou en combinaison [155]. Médicaments préopératoires en chirurgie de revascularisation coronarienne β-bloqueurs : - Maintien et contrôle de la fréquence cardiaque à < 65 batt/min (sauf si FE < 30%) - Recommandés en pré- et postopératoire de chirurgie cardiaque Statines: - Maintien et reprise en postopératoire - Recommandées ≥ 24 heures préopératoires Inhibiteurs de l’enzyme de conversion et anti-angiotensine II : - Stop si prescrits pour hypertension artérielle - Maintien si prescrits pour insuffisance ventriculaire Anti-calciques : maintien Dérivés nitrés : maintien Anti-arythmiques : maintien Digitale : stop Diurétiques : stop Anticoagulants : remplacés par héparine non fractionnée Antidiabétiques : stop antidiabétiques oraux le jour opératoire, insuline selon besoin (en peropératoire: perfusion continue) Antiplaquettaires en chirurgie de revascularisation coronarienne Aspirine : stop 5 jours préopératoires sauf : Opérations à coeur battant Syndrome coronarien aigu ou angor instable Stents coronariens Clopidogrel : stop 5 jours si risque coronarien faible et opération élective Prasugrel: stop 7 jours préopéraoires (idem) Ticagrelor: stop 3-5 jours préopéraoires (idem) Pour les trois substances: maintien si syndrome coronarien aigu ou phase de réendothélialisation de stents (durée minimale : stents passifs 6 semaines, stents actifs 12 mois) Reprise de l’aspirine < 6 heures et du clopidogrel/prasugrel/ticagrelor < 24 heures postopératoires Technique chirurgicale Les pontages aorto-coronariens peuvent se pratiquer de plusieurs manières : sous CEC par sternotomie (technique la plus courante), sans CEC à coeur battant (OPCAB, Off-Pump coronary artery bypass), de façon minimalement invasive (minithoracotomie, système robotique, système HeartPort™), ou en procédures hybrides. Plusieurs alternatives se présentent pour la réalisation des pontages (Figure 9.26). Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 107 Pontage veineux : on prélève une longueur variable de la veine saphène interne sur une ou sur les deux jambes ; le pontage relie la face antérieure de l’aorte ascendante à la coronaire distalement à son obstruction. Les pontages veineux ont un taux d’occlusion de 20% à 1 an et de 75% à 10 ans [114]. Pontage artériel : on prélève une longueur d'artère périphérique (artère radiale ou cubitale) qui est utilisée comme pontage libre entre l’aorte et la coronaire. Pontage mammaire : une longueur maximale d’artère mammaire interne est libérée à la face interne de la paroi thoracique antérieure ; l’artère mammaire interne (AMI) gauche est anastomosée à l’IVA ; l’AMI droite est anastomosée sur la coronaire droite (voie directe) ou sur la circonflexe (voie rétro-aortique par le sinus transverse) lorsque leurs sténoses sont critiques [155]. L’AMI est la seule artère périphérique à paroi élastique de l’organisme ; sa survie à long terme est meilleure que celle des pontages artériels libres (> 90% à 10 ans) [371]. Pontage tout-artériel (total arterial Y-graft) : des éléments d’artères libres sont branchés en « Y » entre une artère mammaire et une coronaire ; chaque AMI peut ainsi être anastomosée à une coronaire et à un greffon artériel implanté sur un autre site coronarien. Pratiquée à coeur battant, cette technique évite de manipuler et de clamper l’aorte ascendante, ce qui réduit le risque d’embolie liée à l’athéromatose aortique (Figure 9.27). Pontage séquentiel : on peut réaliser plusieurs anastomoses successives avec le même greffon artériel ou veineux ; le risque est une extension du territoire ischémié en cas de thrombose de ce greffon vascularisant plusieurs vaisseaux coronariens. OPCAB : le débat sur l’opportunité de la chirurgie à cœur battant n’est toujours pas clos (voir Chapitre 10 Résultats chirurgicaux). On ne mentionnera ici que la dernière étude randomisée comparative entre OPCAB et PAC en CEC (4'752 patients) : elle n’a mis en évidence aucune différence dans la mortalité ni le taux d’infarctus, mais une diminution de l’hémorragie, des transfusions et des complications pulmonaires avec l’OPCAB ; cependant, le taux de reprise pour revascularisation secondaire est plus élevé avec la chirurgie à coeur battant, techniquement plus difficile et parfois incomplète [190]. Les recommandations actuelles vont dans le sens de pontage mammaire sur l’IVA et de pontages artériels (mammaire droit ou artère libre) sur les autres vaisseaux, si l’espérance de vie du patient est raisonnable [155,360]. Il est également recommandé de minimiser ou d’éviter les manipulations de l’aorte ascendante, et de contrôler le flux dans les pontages en fin d’intervention (Figure 9.28). En général, on réalise en premier lieu les anastomoses distales des greffons libres, puis celle de l’AMI, et enfin les anastomoses proximales sur l'aorte ; ces dernières sont exécutées pendant la phase de réchauffement, voir après le déclampage de l’aorte. Pour offrir un maximum de protection au myocarde ischémié, on peut perfuser de la cardioplégie par les pontages libres dès la réalisation de leur anastomose distale. Pour les greffons mammaires, la revascularisation a lieu dès que l’anastomose est complétée. L’état local de la coronaire nécessite parfois une thrombendarterectomie ; cette manoeuvre augmente le risque d’embolisation de matériel athéromateux et d’obstruction distale. Il est fréquent que des bulles d'air se glissent dans les pontages et dans la coronaire droite, qui émergent à la face antérieure de l'aorte ascendante ; ce phénomène provoque une ischémie transmurale transitoire caractérisée par une surélévation du segment ST (Figure 9.15). Une ponction directe des pontages à l’aiguille, une augmentation de la pression artérielle (vasoconstricteur) et une stimulation inotrope résolvent en général le problème en < 10 minutes. Toute altération électrique persistante doit faire suspecter une obstruction : coudure ou torsion d'un pontage, défaut sur une anastomose, thrombose, embolisation de matériel athéromateux. Dans ce cas, une hypokinésie sévère ou une akinésie prolongée sont visibles à l'échocardiographie transoesophagienne. Il peut aussi s'agir d’un spasme coronarien ou d'une vasoconstriction de greffon mammaire ; le traitement est une perfusion de diltiazem (Dilzem® 0.1 mg/kg/heure). Les greffons artériels libres ne sont pas sujets au spasme parce qu’ils sont dénervés. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 108 Artère sous-clavière D Art mammaire interne gauche (AMIG) Pontage veineux saphène Artère mammaire interne droite (AMID) Artère sous-clavière G Artère mammaire interne gauche (AMIG) Artère libre Artère libre CX CD CX CD IVA IVA © Chassot 2012 Figure 9.26 : Pontages aorto-coronariens. Trois types de pontages aorto-coronariens sont représentés ici : 1) un pontage veineux (veine saphène interne) entre l’aorte ascendante et la coronaire droite (CD), 2) un pontage artériel libre (artère radiale) entre l’aorte ascendante et la circonflexe (CX) ; et 3) un pontage avec l’artère mammaire interne gauche (AMIG) anastomosée à l’interventriculaire antérieure (IVA). Contrairement aux veines, les artères sont prélevées avec le pédicule vasculaire qui les entoure pour ménager leur vascularisation. © Chassot 2012 Figure 9.27 : Pontages aorto-coronariens tout-artériels. Pour éviter toute manipulation de l’aorte (clampage pour la CEC, clampage latéral pour les anastomoses sur sa face antérieure), on peut réaliser des pontages mammaires bilatéraux à cœur battant : anastomose de l’AMIG sur l’IVA et de l’AMID sur la coronaire droite (CD) ou sur la circonflexe (CX) par voie rétro-aortique. Des pontages supplémentaires sont réalisés par un greffon artériel libre anastomosé entre une mammaire et la coronaire concernée (pontage en Y), en l’occurrence entre l’AMIG et la CX. Même en CEC, la technique tout-artérielle garantit une meilleure perméabilité des greffons à long terme que des pontages veineux. Les greffons veineux ont un taux de perméabilité de 90% à 1 an et de < 40% à 10 ans [114]. Les greffons artériels restent perméables beaucoup plus longtemps : > 90% à 10 ans [91,337]. Le pontage tout-artériel utilisant les deux mammaires (AMIG sur IVA et AMID sur CD ou CX), quoique techniquement plus exigeant, offre incontestablement de meilleurs résultats à long terme que le pontage veineux conventionnel [371]. Dans les cas urgents et instables, on ne greffe en général que des veines, afin de raccourcir le temps opératoire puisqu'il s'agit d'une opération de sauvetage. Il en est de même chez les patients très âgés qui n’ont aucune chance de bénéficier de la longue survie des greffons artériels. L'administration d'aspirine (100-250 mg/j) dans les premières heures qui suivent les PAC réduit les risques d'infarctus, d'ictus, d'insuffisance rénale et d'ischémie digestive par un facteur de 50%; la mortalité est diminuée de 68% [217]. Il est recommandé de donner 75-325 mg/j d'aspirine à vie, à commencer 6 heures après l'intervention [325]. Une bi-thérapie n’est pas nécessaire. On évite les antiCOX-2 pour l’antalgie postopératoire [155]. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 109 Figure 9.28 : Enregistrement du flux dans un greffon implanté sur l'IVA. A : capteur placé autour du pontage. Les ultrasons (US) sont émis par 2 cristaux (A et B) situés d’un côté du vaisseau et réfléchis par un réflecteur (R) situé de l’autre ; le temps de transit des US est plus long lorsqu’ils se propagent à contrecourant (flèche verte) que lorsqu’ils se propagent dans le sens du flux (flèche violette) ; la différence entre le temps mis de A à B et celui mis de B à A est proportionnelle au flux et permet de le calculer. B : enregistrement d’un flux normal. Le flux doit être pulsatile et biphasique, avec deux composantes antérogrades, l'une brève en protosystole (S), et l'autre longue en diastole (D). La vélocité du flux diastolique doit être > 15 cm sec-1, et le flux moyen > 20 ml min-1. En cas de sténose, le tracé du flux est très pointu et essentiellement systolique. La pulsatilité du flux est décrite par l'index de pulsatilité (IP), que l'on obtient en divisant la différence entre le flux maximal et le flux minimal par le flux moyen : IP = (Fmax – Fmin) / Fmoy. L'IP optimal est situé entre 1 et 5. Une basse vélocité, une prédominance du flux systolique et un IP > 5 commandent une révision immédiate de l'anastomose. R A A B B Greffon sur IVA S D Flux moyen Les procédures hybrides tentent d’allier les excellents résultats à long terme du pontage mammaire sur l’IVA (> 95% perméabilité à 10 ans) avec les avantages de l’angioplastie et des stents sur les autres vaisseaux, où la perméabilité des greffons veineux est faible (35% à 10 ans). La réussite dépend évidemment de l’anatomie des vaisseaux, mais aussi de la disponibilité d’une salle d’opération hybride permettant d’effectuer la chirurgie et la PCI dans le même temps opératoire ; ceci présente l’avantage de pouvoir contrôler angiographiquement l’anastomose sur l’IVA mais impose un risque hémorragique significatif à cause de l’anticoagulation et des antiplaquettaires administrés en peropératoire [314]. L’intervention peut aussi se concevoir en deux temps, séparés par quelques heures à quelques jours [199]. Aucune étude contrôlée à long terme n’a été publiée jusqu’ici. Les réopérations sont des interventions à risque élevé. La mortalité est triplée (2-6%), et le risque d'infarctus s’élève à 10%. Risque hémorragique : une hémorragie majeure est à craindre dès l'ouverture du sternum, particulièrement si le péricarde n'a pas été refermé lors de la précédente opération. Les adhérences péricardiques laissent une zone cruentée qui est une source d'hémorragie postopératoire. Risque ischémique : si le coeur est perfusé par un greffon mammaire encore perméable, une ischémie aiguë peut s’installer dans le territoire concerné par coudure du vaisseau lorsque l'écarteur sternal rétracte la cage thoracique. D’autre part, l’ouverture du sternum peut léser des greffons veineux encore fonctionnels, puisqu’ils sont situés sur la face antérieure de l’aorte ascendante. La surveillance du segment ST doit être permanente ; en cas de surélévation soudaine, l’anesthésiste en avertit immédiatement l’opérateur pour qu’il puisse Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 110 adapter sa technique aux exigences de la perfusion myocardique. Un CT-scan multibarrette est un bon moyen de visualiser l’anatomie des pontages avant l’intervention [96]. Protection du myocarde : la persistance du flux mammaire pendant la CEC empêche une cardioplégie efficace. Il faut alors soit clamper le greffon, ce qui implique de le disséquer et de prendre le risque de le léser, soit descendre la température du sang à 20-24°C (hypothermie systémique) pour éviter le réchauffement du coeur. Une réaction majeure à la protamine est plus fréquente parce que les patients y ont été sensibilisés lors de la précédente opération ; un délai de 2 à 6 mois entre les deux interventions présente le risque maximal. Une prévention possible est l'administration de méthylprédnisolone (Solu-Médrol® 500-1000 mg) dans la CEC. Une plastie ou un remplacement valvulaire est prévu simultanément à des PAC dans les situations suivantes [155]. Sténose aortique serrée (symptomatique ou non) : remplacement valvulaire aortique (RVA). Sténose aortique modérée-à-sévère, même asymptomatique, si le degré de calcification suggère une évolution rapide : RVA. IM ischémique sévère : plastie (PVM) ou remplacement (RVM) ; le taux de reprise pour récidive est plus élevé après plastie qu’après remplacement [1]. IM ischémique modérée : la présence et la persistance d’une IM, même modérée, affecte négativement le pronostic de la revascularisation chirurgicale, alors que la plastie l’améliore significativement (HR 0.55). La plastie est recommandée si la réduction de l’IM avec la revascularisation est peu probable ou absente (ETO post-CEC) et si la mortalité opératoire de l’intervention combinée est < 5% [287]. IM sur pathologie valvulaire mitrale : selon indications propres. Monitorage Le point principal est la surveillance de l'adéquation entre l'apport et la demande d'O2 du myocarde, et le diagnostic précoce de l'ischémie myocardique. Cette surveillance repose essentiellement sur trois méthodes : L’évolution de la pression artérielle (PAM) et de la fréquence cardiaque (FC) ; Les modifications de l’ECG : segment ST, bloc de branche, arythmie (voir Figure 9.7 et Figure 6.2) ; Les changements visibles à l’ETO : altérations de la cinétique segmentaire des parois ventriculaires, dilatation ventriculaire, insuffisance mitrale (voir Chapitre 27, Ischémie myocardique). Aucune d'entre elles n'a une spécificité ni une sensibilité suffisante pour devenir le critère de référence, qui, par défaut, est attribué à l'ECG (voir Tableau 6.6). L’ECG L'ECG est très spécifique, mais sa sensibilité est diminuée en chirurgie cardiaque pour plusieurs raisons. Son efficacité est plus élevée pour la détection des lésions sous-endocardiques que des lésions transmurales ; L'ouverture du sternum, les manipulations du coeur et l’hypothermie modifient le tracé ; La survenue de troubles de la conduction ou la nécessité d'un entraînement électrosystolique limitent les renseignements fournis par l'analyse du segment ST. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 111 Ces phénomènes expliquent en grande partie l'incidence élevée d'akinésies segmentaires périopératoires en l'absence de tout signe électrocardiographique. L’échocardiographie transoesophagienne Contrairement à la chirurgie générale où l’ischémie est en général sous-endocardique sans traduction échocardiographique, la chirurgie de revascularisation coronarienne est caractérisée par des lésions tronculaires qui se traduisent à l’ETO par des altérations de la cinétique segmentaire (ACS : diminution de la contraction pariétale et de l’épaississement systolique) dès que le flux coronarien est diminué de > 50% dans le territoire concerné. L’ETO a donc une meilleure valeur prédictive pour les complications cardiaques postopératoires que l’ECG [204]. Dans 24% des cas, la survenue d’ACS en cours d’opération justifie à elle seule la mise en route d’un traitement médical (21%) ou d’une reprise chirurgicale de pontage (3%) [30,106]. Plus le risque des patients est élevé (dysfonction ventriculaire, valvulopathie associée), plus l’impact de l’ETO est significatif. L'ETO a une valeur additionnelle par sa capacité à mettre en évidence la cause de décompensations hémodynamiques liées à l'ischémie : dysfonction ventriculaire gauche, sidération, hibernation, dysfonction droite, insuffisance mitrale. Toutefois, l’échocardiographie peropératoire souffre de deux handicaps majeurs : Le diagnostic d’ACS est difficile et demande un entraînement considérable ; l’anesthésisteéchocardiographeur doit avoir la formation adéquate ; La surveillance de la cinétique segmentaire n’est pas continue et demande une attention que l’anesthésiste ne peut pas porter en permanence sur l’écran de l’ETO. L’ETO est essentielle pour le diagnostic étiologique des instabilités hémodynamiques majeures et pour la chirurgie valvulaire lorsqu’elle est associée aux PAC ; elle est très utile pour l’évaluation de la cinétique segmentaire, de la fonction ventriculaire et de la volémie dans tous les cas [155]. Le cathéter artériel pulmonaire de Swan-Ganz Le rôle du cathéter pulmonaire est très limité dans la surveillance de l’ischémie. Il faut que le territoire touché représente > 30% de la masse myocardique pour que les modifications de compliance et de fonction systolique secondaires à l'ischémie se traduisent par des modifications apparaissant sur la PAPO: onde "a" > 15 mm Hg, onde "v" > 20 mm Hg, augmentation de plus de 15 mm Hg de la PAP diastolique. La sensibilité de cet élément pour l’ischémie et sa valeur prédictive d’infarctus se sont révélées décevantes, car seuls 13% de toutes les mesures de PAPO et 21% de tous les évènements ischémiques sont associés à des altérations morphologiques de la courbe de pression bloquée [209,350]. Comparées à la sécrétion de lactate dans le sinus coronaire, seule mesure "objective" de l’ischémie myocardique globale du VG, les modifications de la PAPO ne présentent pas de corrélation fiable avec les épisodes d’ischémie [157]. La Swan-Ganz peut déceler le retentissement hémodynamique secondaire à la souffrance ventriculaire, mais ne surveille pas l’apparition de l’ischémie. De fait, le cathéter pulmonaire ne se justifie pas à cause de l'ischémie, même aiguë et instable, mais à cause des problèmes hémodynamiques ou des comorbidités du patient. Globalement, il existe quatre catégories de patients dont la prise en charge bénéficie certainement des données du cathéter pulmonaire (voir Tableau 6.3). Les patients qui présentent des altérations majeures de la circulation pulmonaire et des fonctions respiratoires : hypertension pulmonaire (PAPsyst > 50 mmHg), dysfonction VD, BPCO ou asthme sévère. Les patients hypervolémiques, présentant une surcharge vasculaire pulmonaire ou des altérations de la perméabilité capillaire : insuffisance rénale, insuffisance ventriculaire gauche congestive, valvulopathie mitrale, syndrome inflammatoire, sepsis. L’administration Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 112 liquidienne ne peut être gérée qu’en suivant les valeurs de la PAPO et de la Pcap, puisque celles-ci commandent l’extravasation liquidienne interstitielle. Les patients qui présentent une dysfonction ventriculaire gauche majeure (FE < 0.3, dilatation du VG) ou chez qui le risque de complications organiques est secondaire à l’instabilité hémodynamique peropératoire : résection d'anévrisme, chirurgie mitrale, CIV, multi-pontages à coeur battant. La possibilité de juger de l'adéquation du débit cardiaque par rapport aux besoins de l'organisme par la mesure de la SvO2. En anesthésie cardiaque, toutefois, les variations de température corporelles modifient l'interprétation de cette donnée. Le cathéter pulmonaire n'est d’aucun bénéfice chez les patients à risque faible ou modéré [155]. L’angor instable n’est pas en soi une indication à la Swan-Ganz. Monitorage pour les PAC SpO2 , PetCO2 ECG (D2 et V5) avec surveillance du segment ST Cathéter artériel ETO Voie veineuse centrale Cathéter artériel pulmonaire: selon conditions hémodynamiques et pulmonaires; l’angor instable n’est pas en soi une indication à la Swan-Ganz Technique d’anesthésie La technique d’anesthésie pour la revascularisation coronarienne est dominée par quatre considérations générales [155]. Les connaissances actuelles sur la protection contre l'ischémie par le pré- et le postconditionnement incitent à recommander le sevoflurane ou l'isoflurane plutôt que les agents intraveineux avant, pendant et après la CEC, ou pendant toute la durée des pontages à coeur battant [87,125,155,168,196,268]. La prise en charge hémodynamique vise à diminuer la mVO2, à augmenter le DO2 et à maintenir la pression de perfusion coronarienne. Le taux d'infarctus postopératoire est davantage lié aux épisodes ischémiques survenant après la CEC qu’avant celle-ci, parce que le malade que l'on induit et celui que l'on sort de salle d'opération après la revascularisation n'est pas le même individu d’un point de vue physiopathologique. La gestion de l’anesthésie vise une extubation rapide, sauf dans les cas à haut risque ou les longues CEC. Phase pré-revascularisation Avant la revascularisation, l'anesthésie est dominée par la nécessité de maintenir la perfusion coronarienne, qui est précaire, et d'économiser la dépense en oxygène du myocarde. L’incidence d’ischémie coronarienne est de l'ordre de 20-30%. Même si l’ischémie myocardique est parfois sans relation avec l’hémodynamique, on veille constamment à maintenir les conditions les plus favorables. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 113 Fréquence cardiaque basse (50-65 batt/minute) ; l'anesthésie doit être assez profonde pour éviter toute tachycardie lors de l'intubation, de l'incision, de la sternotomie, et de la manipulation de l'aorte ascendante, qui sont les moments les plus stimulants ; au besoin, bolus répétés d'esmolol (10 mg). Pression de perfusion normale (PAM 75-80 mmHg), maintenue si nécessaire avec des bolus de phényléphrine (Néosynéphrine, max 1 mg) ou une perfusion de noradrénaline ; dans le contexte de l’ischémie myocardique, l'hypotension est plus dangereuse que l'hypertension. La PAM doit être très briévement abaissée pendant la canulation aortique. Précharge normale ; l'administration de 500 mL de cristalloïde est largement suffisante pour maintenir la normovolémie ; un excès de volume augmente la tension de paroi télédiastolique, cause d'une augmentation de la mVO2. D'autre part, la CEC est une source d'hypervolémie importante, qui justifie une attitude restrictive dans l’administration liquidienne. On préférera donc gérer l’hypotension par un vascoconstricteur plutôt que par du volume de perfusion. Transport d'O2 élevé ; on évite l'anémie (Hb ≥ 100 gm/L) et l'hypoxie (FiO2 0.5 – 0.8). Consommation d'O2 basse ; on évite toute administration de catécholamine β, sauf en cas de défaillance ventriculaire ou de bradycardie extrême (fréquence < 40 batt/min), car une diastole trop longue dilate le ventricule. Un débit cardiaque abaissé (1.5 – 2-2 l/min/m2) est toléré tant que la SvO2 est normale (> 55%) et le taux de lactate acceptable (< 2 mmol/L). Compte tenu de ces exigences, le choix de la technique d'anesthésie relève du jugement clinique de l'anesthésiste. Il est basé sur quatre points. Le risque ischémique (tronc commun, angor instable, infarctus menaçant, etc) ; Le risque hémodynamique (dysfonction ventriculaire, valvulopathie, etc) ; Les contraintes non-cardiaques (comorbidités médicales, âge, difficulté d'intubation, etc) ; La possibilité d’un réveil rapide ou la probabilité d’un suivi postopératoire complexe. La technique choisie doit assurer l'anesthésie, l'analgésie, les échanges gazeux et l'équilibre hémodynamique. Bien que tous les intermédiaires soient possibles, le très large éventail des situations pathologiques peut être réparti en deux catégories. Cas lourds (ASA IV) : patient âgé (≥ 75 ans), dysfonction ventriculaire gauche (FE < 0.35 sans béta-blocage) ou dilatation ventriculaire gauche (diamètre télédiastolique > 4.0 cm/m2), dysfonction ventriculaire droite, hypertension pulmonaire, pathologie valvulaire sévère, angor instable, affection médicale grave (insuffisance rénale dialysée, BPCO sévère, etc), anévrysme ventriculaire important, CEC longue ou sous hypothermie profonde (< 25°C), intervention en urgence sur un patient en choc cardiogène. Cas simples (ASA II-III) : patients de moins de 65 ans en bon état général, sans comorbidité ni hypertension pulmonaire, FE > 0.5 (ou > 0.4 en cas de béta-blocage), angor stable, nombre de PAC < 4, temps de CEC < 90 minutes, clampage aortique < 80 minutes, température maintenue > 32° C en CEC, intervention élective. Dans les cas lourds, la priorité est à la stabilité hémodynamique. Plus le patient est compromis, plus le contrôle hémodynamique doit être serré. Le choix se porte sur une technique basée sur de hautes doses d’opiacés. Induction avec étomidate (0.3 mg/kg) ; l’adjonction d’une dose de fentanyl (250-500 mcg) ou de sufentanil (50 mcg) amortit les à-coups hémodynamiques de l’intubation ; Fentanyl 75 – 100 mcg /kg ou sufentanil 15-25 mcg/kg (dose totale) ; Isoflurane ou sevoflurane (≥ 1 MAC) pendant toute la durée de l’anesthésie et de la CEC ; assure le sommeil et le préconditionnement, limite les risques d’éveil et de mémorisation sous opiacés (anesthésie insuffisante) ; Appoint : midazolam 5-15 mg ; Monitorage spécial : cathéter artériel pulmonaire. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 114 Dans les cas simples, on opte de préférence pour des doses faibles d’opiacés et un réveil rapide ; cette technique de fast-track permet d’extuber précocement (< 2 heures), de diminuer les complications respiratoires, de simplifier les soins postopératoires et d’économiser sur la durée de séjour en soins intensifs. Induction avec étomidate ou propofol ; éviter le midazolam pour permettre un réveil rapide ; Fentanyl ≤ 25 mcg/kg, sufentanil 5-10 mcg/kg (dose totale) ; Isoflurane ou sevoflurane (≥ 1 MAC) pendant toute la durée de l’anesthésie et de la CEC ; assure le sommeil et le préconditionnement, limite les risques d’éveil et de mémorisation, et permet une extubation rapide ; Réchauffement optimal et contrôle strict de la température post-CEC (T° vésicale et/ou rectale > 35°C) ; Pour les interventions courtes chez les patients stables, possibilité d’alfentanil (2-3 mcg/kg/min avec dose de charge à l’induction) ou de rémifentanil (0.2 – 0.5 mcg/kg/min sans dose de charge) ; L’anesthésie combinée avec une péridurale cervico-thoracique ou une rachianesthésie est discutée au Chapitre 4, Anesthésie loco-régionale. Ses bénéfices sont très incertains [155]. Pour bénéficier au maximum de la cardioprotection, l'isoflurane ou le sevoflurane sont administrés en continu à 1 MAC pendant toute l'intervention, y compris pendant la CEC [87]. Autant que possible, cette concentration est maintenue constante, éventuellement augmentée pendant les phases très stimulantes (incision, sternotomie, ouverture de l'écarteur sternal, refroidissement, relâchement de l'écarteur, mise en place des fils métalliques). Comme il est un stimulant sympathique et augmente les résistances vasculaires pulmonaires, le desflurane n’est pas indiqué pour l'anesthésie des PAC. Phase post-revascularisation Après la CEC, le malade est revascularisé, donc théoriquement à l'abri d'une ischémie myocardique liée au déséquilibre de la balance DO2/VO2. Cependant, l'hémodynamique est perturbée et nécessite en général des catécholamines α et β pour maintenir sa stabilité (voir Chapitre 4, Insuffisance ventriculaire post-CEC). On tolère une fréquence cardiaque jusqu’à 80 batt/min. Si la revascularisation est complète et qu’il n’existe pas de signe d’ischémie, le seuil de transfusion est fixé à ≤ 80 gm/L Hb. Les épisodes ischémiques que l'on rencontre dans cette période sont liés à plusieurs phénomènes. Embolisation d'air dans les pontages et dans la coronaire droite ; Embolisation de particules athéromateuses lors des anastomoses ou lors d'une thrombendartérectomie ; Coudure, tension excessive ou obstruction d'un pontage, obstruction d'une anastomose ; Thrombose aiguë et infarcissement ; Sidération (stunning) ; Revascularisation incomplète (territoire ayant pâti de l’arrêt cardiaque, de l’hypothermie et de la cardioplégie sans avoir le bénéfice de la revascularisation) ; Hypotension systémique sévère (PAM < 60 mmHg pendant > 10 minutes). Les altérations de la cinétique segmentaire qui signent une ischémie tronculaire transmurale ont une valeur pronostique pour l'incidence d'infarctus postopératoire lorsqu'ils persistent malgré la correction des éléments déclenchants [203,240]. La phase de reperfusion myocardique peut parfois déclencher des arythmies malignes (TV, fibrillation ventriculaire itérative) extrêmement résistantes au traitement pharmacologique et nécessitant des défibrillations à répétition (jusqu’à 50 épisodes en 6 heures). La tenacité de l’anesthésiste et du chirurgien est capitale pour la survie du patient, car ces arythmies ne durent que quelques heures ; si l’on réussit à passer ce cap, le devenir postopératoire du malade est normal. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 115 La mise en route d’une perfusion de propofol en fin d’intervention (5-10 mg/kg/heure) permet le transport et l’installation aux soins intensifs ou en salle de surveillance aiguë. Si les respirateurs de soins postopératoires le permettent, on continue l’halogéné. L'anesthésie pour les pontages à coeur battant (OPCAB) est décrite au Chapitre 10 ; le Tableau 10.2 résume la technique de prise en charge. L’extubation est précoce (< 2 heures) pour autant que la situation le permette (voir Chapitre 4 Critères d’extubation). L’aspirine est reprise dans les 6 heures postopératoires [155]. Principes lors d’anesthésie pour les PAC Optimaliser le rapport mDO2/mVO2. Préconditionnement par halogéné (sevoflurane ou isoflurane, 1 MAC) avant, pendant et après la CEC. Phase pré-CEC: le patient souffre d’ischémie myocardique active. - Favoriser le DO2: PAM > 80 mmHg, Hb ≥ 90 gm, FiO2 ≥ 0.5; - Abaisser la mVO2: FC 50-65 batt/min, éviter les amines béta; - Maintenir le rapport PAM / FC > 1. Phase post-CEC: myocarde revascularisé, mais risques particuliers. - Dysfonction ventriculaire post-CEC; - Ischémie sur problèmes chirurgicaux (anastomose, coudure, embolie); - Revascularisation incomplète; - Sidération myocardique, arythmies de reperfusion; - Hémorragie, tamponnade; - Arythmies de reperfusion. Extubation rapide et confort postopératoire optimal Causes et traitement de l’ischémie peropératoire Avant la CEC, le nombre et la durée des épisodes d’ischémie ont une valeur pronostique sur l’incidence d’infarctus postopératoire [163]. L’ischémie peut être déclenchée par différents phénomènes. Stimulation sympathique intense : intubation, douleur (incision, sternotomie), dissection du sympathique péri-aortique lors des manipulations de l’aorte ascendante, démarrage de la CEC (perfusat hypothermique) ; l’anesthésie doit être suffisamment profonde dans ces moments pour bloquer la stimulation sympathique. Episodes de tachycardie et d’hypotension ; béta-bloqueurs et vasopresseurs maintiennent les valeurs hémodynamiques dans les normes (fréquence 50-65 batt/min, PAM 75-80 mmHg). Spasme coronarien lors des stimulations intenses ou des manipulations du cœur. Rupture de plaque instable et thrombose coronarienne. Hibernation : les territoires chroniquement ischémiés sont sévèrement hypokinétiques ou akinétiques mais viables lorsqu’ils sont reperfusés. Après la CEC, on peut rencontrer plusieurs origines à une élévation persistante du segment ST sur l’ECG ou à la présence de nouvelles ACS (akinésie) à l’ETO [163]. Complications chirurgicales : microembolies athéromateuses (notamment en cas de thrombendartérectomie), problèmes techniques sur une anastomose, coudure, torsion ou longueur inadéquate d’un pontage. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 116 Embolisation d’air, essentiellement dans la CD et les pontages veineux (implantations à la face antérieure de l’aorte) ; l’effet s’estompe en une dizaine de minutes. Traitement : ponction des bulles à l’aiguille fine, augmentation de la pression de perfusion et de la puissance contractile (catécholamines α et β). Revascularisation incomplète ; le territoire non-revascularisé n’a pas bénéficié de l’opération mais subit le contre-coup de la CEC, de l’arrêt cardiaque et de la cardioplégie. Faible débit de pontages greffés sur des vaisseaux dont le débit périphérique est insuffisant (micro-angiopathie diabétique). Rapport DO2/VO2 défavorable : stress, douleur, hypotension, tachycardie, dosage excessif de catécholamines β. Tension excessive sur un greffon mammaire dû à une hyperinflation pulmonaire (PEEP excessive). Spasme coronarien ou spasme de greffons mammaires. Thrombose d’un vaisseau ou d’une anastomose (hyperagrégabilité plaquettaire, protamine, perfusion excessive de plaquettes ou de plasma frais décongelé). Sidération : malgré un flux coronaire redevenu normal, la dysfonction myocardique persiste ; elle mettra plusieurs heures ou plusieurs jours à se rétablir. La présence d’un anévrysme du VG cause une élévation fixe du segment ST. Le traitement d’une ischémie aiguë dans un territoire particulier porte sur plusieurs points. Maintien de la pression de perfusion coronarienne : vasopresseur α. Perfusion de nitroglycérine (5-20 mcg/kg/min) ; perfusion de diltiazem (0.1 mg/kg/min) en cas de spasme artériel (éviter l’utilisation simultanée de diltiazem et de béta-bloqueur à cause du risque de bradycardie rebelle). Frein à la tachycardie : dosage minimal d’amines β, béta-bloqueur (esmolol). Support inotrope en cas de bas débit cardiaque et d’élévation de la Ptd ventriculaire (la baisse de la pression aortique et l’augmentation de la PtdVG diminuent la pression de perfusion coronarienne) ; toutefois, l’utilisation indiscriminée de catécholamines conduit à une demande excessive en O2. Correction de l’anémie (Hb > 80 gm/L) et de l’hypoxie (FiO2 0.8-1.0). Electro-entraînement auriculo-ventriculaire (fréquence 60-70 batt/min) en cas de rythme jonctionnel ou d’arythmie. Mise en place d’une contre-pulsion intra-aortique (augmentation de la perfusion coronarienne et baisse de la postcharge du VG). Même si la CPIA n’est utile que pendant quelques heures, son indication doit être généreuse, car elle diminue la postcharge du VG et augmente la pression de perfusion coronaire (augmentation de la PAdiast) sans augmenter la mVO2 comme le font les catécholamines. Correction du problème chirurgical, réfection d’anastomose, retour en CEC. La question cruciale est évidemment l’adéquation du flux dans les pontages. Bien que le 70% des chirurgiens se contente de la palpation, plusieurs techniques permettent de vérifier la perméabilité des greffons et de mesurer le débit sanguin local après revascularisation [78]. Angiographie mobile peropératoire : compliqué et encombrant, peu utilisé. Angiographie thermique : mesure la différence de température entre les pontages et le ventricule après injection de cardioplégie chaude ou froide ; la caméra est manipulée par l’opérateur au dessus du champ opératoire. Fluorescence : injection de vert d’indocyanine (1 mL) dans l’aorte ou la PVC et mesure de la luminosité par une caméra laser infra-rouge ; ne permet pas la mesure quantitative du flux et manque de précision. Fluxmètre Doppler péri-vasculaire par mesure du temps de transit des ultrasons entre deux cristaux émetteurs situés d’un côté du vaisseau et un réflecteur situé de l’autre (Figure 9.27). C’est la technique la plus utilisée. Le flux doit être pulsatile et biphasique, avec deux composantes antérogrades, l'une brève en protosystole (S), et l'autre longue en diastole (D). La Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 117 vélocité du flux diastolique doit être d'au moins 15 cm sec-1, et le flux moyen de plus de 20 mL min-1. En cas de sténose anastomotique, le tracé du flux est très pointu et essentiellement systolique ; on peut voir un épisode de reflux. Les valeurs absolues du flux sont moins importantes que sa pulsatilité, décrite par l'index de pulsatilité (IP), que l'on obtient en divisant la différence entre le flux maximal et le flux minimal par le flux moyen : IP = (Fmax – Fmin) / Fmoy. L'IP optimal est situé entre 1 et 5. Une basse vélocité, un flux moyen < 15 mL/min et un IP > 5 ont une haute valeur pronostique pour l'occlusion ultérieure du greffon, et doivent conduire à une révision immédiate de l'anastomose [341]. Appliquées de routine, ces différentes techniques montrent que 3-5% des pontages ne fonctionnent pas dès leur déclampage [78,341]. Si de l’air est resté pris dans les trabéculations du VG, une embolisation coronarienne massive peut se produire lors d’un changement de position du corps, notamment lors de la mise au lit, et provoquer un état de choc cardiogène soudain. Dans les heures qui suivent la revascularisation, les enzymes cardiaques renseignent sur la gravité de l’ischémie postopératoire et sur le pronostic du malade. La mortalité croît linéairement avec le taux d’enzymes postopératoires, aussi bien pour les CK-MB que pour les troponines. Le risque relatif de mortalité passe de 3% (CK-MB 5-10 fois la norme) à 8.7% (20-30 fois la norme) et à 27% (> 40 fois la norme). Pour les troponines, le risque de mortalité est de 2% lorsqu’elles sont augmentée de 20 fois, de 3.6% lorsqu’elles sont augmentées de 40 à 90 fois et de 11% au-delà de 100 fois [94]. Par contre, une élévation de < 5 fois (CK-MB) à < 10 fois (troponines) la valeur de base se traduit par une modification non-significative de la mortalité. Ischémie en cours de PAC Avant la CEC, le patient souffre d’ischémie myocardique active. Risques d'ischémie: - Stimulation sympathique - Hypotension - Tachycardie - Hibernation Après la CEC, la perfusion coronaire est en principe rétablie. Causes d'ischémie: - Problème chirurgical (coudure, anastomose) - Problème hémodynamique (hypotension, bas débit, anémie aiguë) - Embolie (air, athérome) - Revascularisatioon incomplète - Spasme artériel, tension, coudure sur la mammaire - Thrombose (hypercoagulabilité) - Sidération Contrôle des pontages par débitmétrie Doppler. Troponines significatives si augmentées > 5 fois. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 118 Conclusions L'anesthésie du patient coronarien est dominée par la nécessité d'offrir le meilleur équilibre possible entre l'apport et la demande en oxygène du myocarde, donc à maintenir la fréquence cardiaque basse, la pression artérielle moyenne entre 75 et 80 mmHg, la précharge normale et la contractilité basse ("lent – mou – normotendu"). Cette attitude a pour but de prévenir l'ischémie par demande excessive, qui est caractéristique des sténoses coronariennes stables (sténoses > 70%); celles-ci occasionnent des sous-décalages du segment ST et des infarctus le plus souvent non-Q. Les plaques instables, en général moins serrées (sténoses < 60%), sont déséquilibrées par le stress sympathique (hypertension, catécholamines, activateurs tissulaires) et le syndrome inflammatoire peropératoire. Leur rupture entraîne une thrombose locale, favorisée par l'hypercoagulabilité périopératoire ; elles sont responsables d'infarctus transmuraux (STEMI) avec onde Q. Après tout évènement coronarien (infarctus, dilatation ou pontages), et en l'absence de complications, il existe une période dangereuse de 6 semaines pendant laquelle toute opération autre qu'une urgence vitale est contre-indiquée. Entre 6 et 12 semaines, le risque opératoire est intermédiaire; des opérations de nature impérative sont justifiées, à la condition de préparer les malades avec des béta-bloqueurs et de poursuivre le traitement antiplaquettaire (aspirine et clopidogrel/prasugrel/ticagrelor) s'il est prescrit. La période dite sûre débute au-delà de trois mois après des stents passifs ou des PAC, mais au-delà de 12 mois après un syndrome coronarien aigu ou des stents actifs. La moitié des infarctus postopératoires est liée à la thrombose aiguë de plaques instables, et n'est en relation ni avec l'importance de la sténose coronarienne décelée à la coronarographie, ni avec la localisation des altérations cinétiques à l'écho de stress. De ce fait, la préparation des patients avec des béta-bloqueurs, des antiplaquettaires et des statines a plus d'impact sur leur devenir que les examens préopatoires réalisés. L'indication à la coronarographie et à la revascularisation est la même qu'endehors du contexte chirurgical (angor instable ou réfractaire). La dilatation percutanée avec pose de stent transforme une sténose serrée mais stable en sténose instable à flux amélioré, et cela pendant toute la période de réendothélialisation du stent, qui dure de 6 semaines avec les stents métalliques simples (stents passifs) jusqu'à 12 mois avec les stents à élution (stents actifs ou drug-eluting stents). La période de l'opération n'est pas la plus dangereuse, pour autant que le contrôle hémodynamique soit rigoureux, parce que l'ischémie myocardique survient essentiellement pendant les deux premiers jours postopératoires ; c'est cette dernière qui peut conduire à l'infarctus. L'hémodynamique doit être étroitement surveillée (PA invasive avec un cathéter artériel) ; toute déviation de la pression et de la fréquence doit être corrigée immédiatement ("tolérance zéro"!). Une modification électrocardiographique (altération du segment ST, nouveau bloc de conduction, arythmie ventriculaire) est toujours significative dans ce contexte, et doit rapidement motiver la mise en route d'un traitement de l'ischémie aiguë. Le type d'anesthésie a très peu d'influence sur l'incidence d'infarctus et sur le devenir des patients ; en particulier, l'anesthésie loco-régionale rachidienne n'offre pas de protection évidente en peropératoire ; par contre, l'analgésie péridurale peut protéger efficacement dans la période postopératoire précoce. L’effet de préconditionnement des halogénés (≥ 1 MAC pendant toute la durée de l’intervention) offre une protection myocardique significative lors de revascularisation coronarienne ; par analogie, il paraît judicieux d’utiliser des halogénés en chirurgie non-cardiaque. La nécessité de maintenir les antiplaquettaires en périopératoire est prioritaire par rapport au risque hémorragique et aux bénéfices de la loco-régionale en cas de lésion instable. Précis d’Anesthésie cardiaque 2011 – 09 Ischémie coronarienne 119 Bibliographie Lectures conseillées ARMSTRONG EJ, RUTLEDGE JC, ROGERS JH. Coronary artery revascularization in patients with diabetes mellitus. 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