Thermodynamique appliquée

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Thermodynamique appliquée
Bilans entropiques et exergétiques
par
André LALLEMAND
Ingénieur, docteur ès sciences
Professeur des universités à l’Institut national des sciences appliquées de Lyon
1.
2.
2.1
2.2
Évolution de l’entropie d’un système ouvert.
Bilan entropique .......................................................................................
BE 8 008 - 2
Exergie. Anergie .......................................................................................
Exergie thermomécanique d’un système fluide en écoulement .............
Étude exergétique du fonctionnement d’une machine ............................
2.2.1 Machine idéale ....................................................................................
2.2.2 Machine réelle.....................................................................................
L’exergie et le deuxième principe...............................................................
Généralisation du concept d’exergie. Bilans exergétiques......................
2.4.1 Définitions ...........................................................................................
2.4.2 Cas particulier de l’exergie thermique ..............................................
2.4.3 Échanges exergétiques. Bilan exergétique d’un système fermé....
2.4.4 Bilan exergétique d’un système ouvert thermomécanique ............
2.4.5 Production anergétique......................................................................
Application de l’analyse exergétique
au cas des échanges thermiques ...............................................................
2.5.1 Échange de chaleur entre deux sources ...........................................
2.5.2 Échange thermique entre un fluide chaud et un fluide froid.
Échangeurs de chaleur .......................................................................
—
—
—
—
—
—
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—
—
—
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2
3
4
4
5
6
8
8
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11
13
—
—
13
13
—
15
Notations et symboles ....................................................................................
—
17
Liste des indices................................................................................................
—
18
2.3
2.4
2.5
e deuxième principe de la thermodynamique nous apprend que l’entropie est
une grandeur extensive qui, d’une part accompagne tous les transferts de
chaleur, d’autre part apparaît spontanément (est créée) dans les systèmes qui
fonctionnent avec des irréversibilités dues à tous les gradients de grandeurs
intensives. Comme la dynamique de tous les systèmes est justement liée à ces
gradients, les irréversibilités sont présentes partout et sont nécessaires pour réaliser des transferts énergétiques dans des temps limités, c’est-à-dire pour mettre
en jeu des puissances non négligeables. Il apparaît alors un dilemme pour le
concepteur d’un système industriel, c’est-à-dire pour l’ingénieur. En effet, les irréversibilités, c’est-à-dire la création d’entropie, qui permettent d’avoir de la puissance, sont la cause d’une transformation spontanée (dégradation) des énergies
dites « nobles » (mécanique, électrique, etc.) en énergie thermique, ce qui
dégrade en général le rendement du système considéré. Ainsi, afin d’optimiser un
système énergétique, l’ingénieur doit pouvoir mesurer le poids des irréversibilités sur le fonctionnement du système. Pour ce faire, deux méthodes s’offrent à lui.
Les installations énergétiques industrielles et leurs composants sont quasiment toujours, pour le « système thermodynamique » considéré (un fluide en
général), des systèmes ouverts. L’analyse des irréversibilités développées dans le
système peut alors s’appuyer sur une étude des bilans entropiques, c’est-à-dire
des flux d’entropie qui traversent le système, en régime permanent ou en régime
transitoire. De tels bilans faisant apparaître les créations d’entropie ou production entropique, parmi les diverses solutions possibles celle qui, pour une même
puissance, donne la plus faible production entropique, devra être privilégiée.
L
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Madame, Monsieur
12/09/2008
BE 8 008 − 1
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE _________________________________________________________________________________________________________
Cette première méthode est remplacée de plus en plus par la méthode exergétique. Son intérêt réside principalement dans le fait que sa mise en œuvre
donne aussi bien des renseignements sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif des transferts énergétiques. Elle recouvre donc à la fois les concepts du
premier principe et ceux du deuxième principe de la thermodynamique alors
que les analyses entropiques ne prennent en compte que les aspects liés au
deuxième principe.
L’objet de cet article est de jeter les bases nécessaires à l’application de
chacune de ces deux méthodes. Cependant, l’accent sera mis sur les analyses
exergétiques.
Il est important de préciser que la compréhension de l’article est nettement
conditionné par la maîtrise des concepts établis dans l’article qui
précède [BE 8 007]. En fait, ces deux articles sont liés.
1. Évolution de l’entropie d’un
système ouvert.
Bilan entropique
Flux de
matière
L’étude des systèmes ouverts a été faite sur le plan énergétique
dans l’article [BE 8 005] au paragraphe 4.2. Il convient de considérer la particularité de ces systèmes sur le plan entropique.
δ Qj
Pour un tel système (figure 1), la variation d’entropie dS est due
à trois causes :
— l’échange thermique avec le milieu extérieur :
Σ ouvert
Tj
si dmi
dS
δQ j
∑ ---------Tj
avec T j la température du système sur la frontière de l’échange
thermique ;
— les irréversibilités internes dS ′ ;
— les apports entropiques liés au flux de matière ∑ s i dm i ;
avec s i l’entropie massique du fluide qui traverse la frontière au
niveau de la canalisation i et dm i la masse qui pénètre
dans le système durant le temps dt considéré.
On écrit :
dS =
δQ j
- + dS ′ + ∑ s i dm i
∑ ---------Tj
(1)
En régime permanent (dS = 0, puisque l’entropie est une fonction d’état et que, par définition, le système n’évolue pas) et en prenant les modules des masses, on a :
∑
s i dm i –
entrant
∑
s i dm i +
δQ j
- + dS ′ = 0
∑ ---------T (2)
˙
avec m
i
le débit massique à travers la canalisation i,
δQ̇
la puissance thermique échangée à la température T,
S˙ ′
le taux de création d’entropie ou la « production » entropique interne au système. Ce taux est nul si le système
évolue de manière réversible ; il est positif si le système
évolue de manière irréversible, c’est-à-dire dans les cas
réels.
L’équation (4) constitue le bilan entropique pour un système
ouvert en régime permanent. On peut encore noter que : le flux
d’entropie qui sort (du fait du flux thermique et du flux de matière)
est égal au flux d’entropie qui entre (causes identiques) augmenté
de la production d’entropie.
j
sortant
Si on fait l’hypothèse d’un apport thermique continu en température, le bilan entropique correspondant à une évolution pendant
un intervalle de temps ∆t s’écrit :
δQ
- + ∆S ′ = ∑ m s --------T
i
i
sortant
En divisant par la durée ∆t :
sortant
m˙ i s i entrant =
BE 8 008 − 2
Figure 1 – Schématisation d’un système ouvert
– ∑ mi si δQ̇
- + S˙ ′
--------T
(3)
entrant
(4)
2. Exergie. Anergie
L’analyse exergétique fait l’objet de l’article [BE 8 015]. On renvoie le lecteur à cet article pour avoir une vue détaillée de ce
concept. La présentation qui en est faite ici est une présentation
simplifiée, orientée vers une application en systèmes ouverts, sans
réactions chimiques et dont la frontière est indéformable. Cette
présentation est suffisante pour analyser la plupart des systèmes
énergétiques.
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Σ
Les expressions précédentes étant relatives à une évolution élémentaire du système Σ, il convient de les étendre à une évolution
finie. Choisissons comme évolution particulière celle qui fait passer
le système fluide Σ réversiblement d’un état quelconque (à l’entrée
1 de la machine) à un état d’équilibre avec le milieu ambiant (à la
sortie 2 de la machine). Dans une telle opération, le travail global
fourni par l’ensemble machine thermique-machine de Carnot est
donné par :
wg max = hta – ht – Ta (sa – s )
(9)
δwt
⬁
MT
1
2
Σ
Σ
(T )
δwg
δq
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE
où l’indice a désigne l’état du système en équilibre avec le milieu
ambiant.
δwC
Moteur de
Carnot
Ta
= 1–
δqa
T
Dans la relation (9), le travail est défini (par l’affectation de
l’indice « max ») comme étant un travail maximum récupérable
techniquement à partir du système Σ. Cela est vrai pour trois
raisons :
— les évolutions de l’ensemble sont réversibles, ce qui pour la
transformation du système assure un travail w t maximal ainsi
d’ailleurs que pour le moteur de Carnot, compte tenu du niveau de
température de ses sources ;
— la source froide du moteur de Carnot est industriellement la
plus froide possible puisqu’il s’agit du milieu ambiant (source
gratuite mise à disposition) ; or w C est d’autant plus grand que la
température de la source froide est plus basse ;
— lorsque l’équilibre existe entre le système Σ et le milieu
ambiant, le système ne peut techniquement plus évoluer : il est à
son potentiel le plus bas.
δq = Θ δq
Milieu ambiant (Ta)
Figure 2 – Mise en évidence du concept d’exergie
2.1 Exergie thermomécanique
d’un système fluide en écoulement
On considère (figure 2) un système fluide quelconque Σ traversant une machine thermique MT qui, au cours d’une évolution
élémentaire réversible, échange, par unité de masse, de la chaleur
δq avec le milieu extérieur et une énergie mécanique δw t avec les
éléments mobiles de la machine (travail techniquement et théoriquement récupérable, voir article [BE 8 005] § 3.2). Supposons que
ce système serve de source chaude à un moteur de Carnot dont la
source froide soit constituée par le milieu ambiant. En recevant la
chaleur δq, le moteur de Carnot produit l’énergie :
Ta
δw C = δq 1 – ------T
avec T la température du système Σ à l’endroit de l’échange
thermique,
Ta la température du milieu ambiant.
Un tel ensemble produit, par unité de masse du système Σ, un
travail total :
Ta
δw g = δw t + δw C = δw t + δq 1 – ------(5)
T
Le premier principe de la thermodynamique, appliqué au système fluide Σ (article [BE 8 005] § 4.1) s’écrit :
δwt + δq = dh + dec + dep
(6)
– w g max = ex
qui est appelée exergie du système Σ. On écrit encore :
ex = h t – h ta – Ta (s – sa ) = – wg max
Or, les fonctions d’état sont définies à une constante près, cela
autorise de faire le choix de leur origine. Si on pose a priori que
l’enthalpie totale et l’entropie du système sont nulles lorsque
celui-ci est en état d’équilibre avec le milieu ambiant :
h ta = 0 et sa = 0
on a :
an = Ta (s – sa )
(12)
ou, avec l’hypothèse sa = 0 :
an = Ta s
δq
ds = --------T
les équations (5) et (6) donnent :
(7)
La quantité :
(8)
(13)
est appelée anergie du système Σ ce qui conduit à une écriture différente de l’équation (10) :
ex = h t – an
ou encore :
h t = ex + an
c2
h + -------- + gz = h t
2
étant l’enthalpie totale ([BE 8 005] § 4.1), on a :
(14)
La chute d’enthalpie totale d’un système fluide entre un état
quelconque et son état d’équilibre avec le milieu ambiant est
égale à la somme de son exergie et de son anergie.
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(11)
Dans l’expression (10), la quantité :
En notant que l’évolution de ce système est réversible :
δwg = dht – Ta ds
(10)
Notons ainsi les faits suivants.
1. L’exergie est une fonction d’état puisque son expression
ne fait intervenir que des fonctions d’état (h t et s) et une
constante Ta .
2. L’exergie du fluide correspond, au signe près, au travail
maximal que l’on peut techniquement et théoriquement retirer
de ce fluide qui évolue réversiblement entre un état quelconque
et son état d’équilibre avec le milieu ambiant.
ex = h t – Ta s
avec h l’enthalpie massique,
ec l’énergie cinétique massique,
ep l’énergie potentielle massique.
δwg = dh + dec + dep – Ta ds
Dans tout le raisonnement ci-dessus, les termes correspondent à
des travaux moteurs ; ils sont comptés négativement. Ainsi w g max
ayant une valeur négative, on lui préfère sa valeur opposée :
BE 8 008 − 3
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE _________________________________________________________________________________________________________
ht 1
ex1
ht 1
ex1
wt 12
∆ex12
( wg12 ) max réel
wt 12
∆ht 12
(wg12 ) max idéal
Θ δq
Θ δq
q12
ex2
∆an12
Ta
T
∆ex12
q12
∆ht 12
Ta
ht 2
Ta
T
ht 2
δq
Ta
b machine réelle
a machine idéale
T
ex2
∆an12
δq
δqint
δqint
T
Figure 3 – Schématisation des transferts énergétiques d’un système avec son milieu extérieur pour une évolution du système d’un état 1 à un état 2.
Cas d’une machine motrice
Lors d’une évolution entre un état 1 et un état 2 du système Σ
(figures 2 et 3), on a :
L’expression différentielle de l’anergie :
Ta
- δq
d an = T a ds = ------T
(15)
montre que cette fonction correspond à la quantité de chaleur que
le moteur de Carnot doit céder au milieu ambiant. En effet, en
recevant la chaleur δq , le moteur de Carnot reçoit également
l’entropie ds du système Σ. Comme ce moteur fonctionne de
manière cyclique et réversiblement, il doit céder :
∆h t 12 = w t 12 + q12 = ∆ex12 + ∆an12
(17)
ou :
2
w t 12 = ∆ex 12 –
1 – -------TT- δq
a
(18)
1
On voit (figure 3a ) que le travail produit par le système fluide
qui traverse une machine idéale est égal à la chute exergétique du
système fluide diminué de la quantité de chaleur (ici, négative)
cédée à l’extérieur, multipliée par le facteur de Carnot Θ :
δq
ds = ----------aTa
au milieu ambiant. On voit alors que :
d an = δqa
Ta
Θ = 1 – ------T
Ainsi, l’anergie représente la part minimale de l’énergie d’un
système qui ne pourra jamais être transformée en énergie
mécanique lorsque ce système passe d’un état quelconque à un
état d’équilibre avec le milieu ambiant.
(19)
Dans les schémas des figures 2 et 3, le terme :
Θδq
2
(20)
1
De même, et corrélativement, on peut énoncer : l’exergie est
la fraction maximale de l’énergie d’un système qui peut être
transformée en énergie mécanique.
2.2 Étude exergétique du fonctionnement
d’une machine
représente le travail récupéré par le moteur de Carnot, soit l’énergie
thermique (échangée entre le système fluide, donc la machine, et le
milieu extérieur) convertie réversiblement en énergie mécanique. Le
travail global maximal, travail technique de la machine additionné
du travail récupéré sur la machine de Carnot, correspond alors à la
variation d’exergie :
Θ δq = ∆ex
2
w g max = w t 12 +
12
(21)
1
2.2.1 Machine idéale
La partie :
L’étude précédente concernait une machine thermique à fonctionnement réversible, pour laquelle on a [équation (14)] :
d h t = d ex + d an
BE 8 008 − 4
(16)
δq
- = ∆an
T -------T
2
a
(22)
12
1
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correspond à la partie de cette énergie thermique non transformable en énergie mécanique, même par un moteur de Carnot.
● Si la transformation est isotherme avec T = Ta (facteur de
Carnot Θ = 0) :
w t 12 = ∆ex 12
q 12 = ∆an 12
aucun travail supplémentaire ne peut être retiré de la quantité de
chaleur q 12 .
●
Si la transformation est isentropique :
q 12 = 0
w t 12 = ∆ex 12
si de plus, aucun échange thermique n’a lieu :
En utilisant l’équation du premier principe ((38), § 3.2.2 article
[BE 8 005]), on a :
Ta
- δq
δw g = dh t – ------T
L’équation (25) permet alors d’écrire :
δq int
δw g = dh t – T a ds + T a -------------T
(puisque ∆an = Ta (s 2 – s 1) = 0).
On peut énoncer : l’exergie et l’anergie d’un système en
écoulement réversible adiabatique dans une canalisation sont
conservatives.
( w g max idéal ) 12 = ∆ex 12
et
( w g max réel ) 12 = ∆ex 12 + T a ∆s 12
′ (29)
Le travail technique est donné par :
w t 12 = ∆ex 12 –
2.2.2 Machine réelle
Avant de considérer les particularités de la machine réelle du
point de vue exergétique, il convient de préciser que la définition
de l’exergie est une définition intrinsèque introduite à propos du
fonctionnement d’une machine idéale, mais utilisable quel que soit
le mode d’évolution du système. Ainsi, toutes les définitions et formules du paragraphe 2.1 impliquant l’exergie et l’anergie restent
valables.
Le travail technique produit dans une machine peut être explicité
par l’équation dynamique (33) donnée dans l’article [BE 8 005]
(§ 3.2.2) :
(23)
avec δτ if le travail élémentaire des forces de frottement interne
dues à la viscosité (terme toujours positif).
Ce travail produit à l’intérieur même du système ce que l’on
appelle de la chaleur interne car son effet entropique est identique
à celui qui serait produit par un apport thermique lors d’une transformation réversible. Cette chaleur interne (notée δqint ) est par
convention égale à δτif . Elle est responsable d’une création d’entropie ds ′ telle que :
δq int
->0
ds ′ = -------------(24)
T
Alors, au cours d’une évolution élémentaire du système, la variation d’entropie massique ds s’écrit :
(25)
(qui est conforme à l’équation générale (équation (20) article
[BE 8 007]) de la variation d’entropie d’un système en évolution
quelconque).
Si, comme précédemment, pour un système fluide traversant une
machine réelle on associe l’énergie δwt et la quantité de chaleur δq
fournie à une machine de Carnot, qui permet de récupérer de l’énergie mécanique δwC , le travail global récupéré (maximal pour cet
δq
Θ δq + T -------------T
int
(30)
a
Le « manque à gagner » du point de vue du travail, égal à :
T a ∆s 12
′ >0
(31)
est dû aux irréversibilités produites par les frottements internes du
fluide. Cette quantité est encore appelée augmentation (ou création) d’anergie due à l’irréversibilité :
Ta
- δq int = dan irr > 0
T a ds′ = ------T
(32)
La variation d’anergie, pour une transformation de l’état 1 à
l’état 2, a la même valeur que les opérations soient réversibles ou
non (variation d’une fonction d’état). Elle vaut, selon que la transformation soit réversible ou non (figures 3a et b ) :
δq
δq
- + T -------------- T -------T
T
2
∆an 12 =
2
int
a
(33)
a
1
1
avec δq int = 0 pour le cas réversible.
Notons enfin que l’équation (30) donne une autre expression de
l’exergie :
∆ex 12 = w t 12 +
δq
- = ∆h
Θ δq – T -------------T
int
a
t 12
– ∆an 12
(34)
Qui traduit le fait suivant : la variation d’exergie du fluide qui
traverse une machine correspond au travail technique du fluide
augmenté (algébriquement) du travail fourni par une machine
de Carnot qui utilise la chaleur échangée entre le fluide et son
milieu extérieur, diminué de la quantité d’anergie créée par les
irréversibilités.
■ On notera les remarques suivantes.
● Dans le cas d’une machine génératrice, wg et ∆ex sont positifs
(figures 4a et b ). Ainsi :
wg max réel > wg max idéal
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(27)
Cette expression met en évidence (figures 3a et b ) que, pour
une transformation donnée (états extrêmes fixés), le travail global
maximal pour une machine réelle (négatif pour un moteur) a une
valeur plus faible en module que lors de l’utilisation d’une machine
idéale. On a en effet :
q 12 = 0 et ∆ex 12 = – ∆an 12 = 0
δq δq int
ds = --------- + -------------T
T
(26)
Compte tenu des définitions de l’exergie et de l’anergie, cette
équation devient :
δq int
( δw g ) max réel = dex + T a -------------T
(δwg )max réel = dex + Ta ds ′
(28)
Si la machine ne comporte aucun élément mobile :
w t 12 = 0
q 12 = ∆ex 12 + ∆an 12
c2
δw t = v d P + d -------- + g dz + δ τ if
2
ensemble fonctionnant globalement de manière irréversible, mais
possédant un élément de Carnot) est donné par :
δwg = δwt + δwC = δwt + Θ δq
■ On notera les remarques suivantes.
●
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE
BE 8 008 − 5
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE _________________________________________________________________________________________________________
(
( wg12 ) max réel
Θ δq
wg12 max idéal
)
q12
ex2
ht 2
wt 12
Θ δq
Ta
ex2
wt 12
q12
δqint
T
∆an12
Ta
ht 2
∆an12 = Ta
∆ex12
δq
∆ht 12
ht 1
∆ex12
T
ex1
∆ht 12
Ta
δq
T
δqint
T
ht 1
ex1
a machine idéale
b machine réelle
Figure 4 – Schématisation des transferts énergétiques d’un système avec son milieu extérieur pour une évolution du système d’un état 1
à un état 2. Cas d’une machine génératrice
● L’expression (32) a une grande importance pratique car elle met
en évidence que les frottements internes à haute température ont
une influence moindre que ceux qui ont lieu à basse température.
En effet, pour une valeur donnée des travaux des forces de frottement δτif = δq int , l’expression (32) montre que plus T est grand, plus
danirr est faible.
● Dans l’équation (30), le deuxième terme du second membre
représente le travail récupérable dans une machine de Carnot utilisant la chaleur δq cédée (négative) par le système. En pratique, cette
chaleur est cédée au milieu ambiant sans intervention d’une
machine de Carnot. Ainsi, le terme :
T
1 – -------δq < 0
T 2
a
1
représente une énergie convertible en énergie mécanique mais non
convertie. Il apparaît alors comme une dégradation de l’énergie :
c’est l’irréversibilité de transfert thermique du système avec le
milieu ambiant. Contrairement aux irréversibilités internes dont les
effets sont d’autant moins sensibles que T est grand, les irréversibilités de transfert thermique ont une influence sur wt 12 d’autant plus
grande que T est plus élevée.
● En conclusion, la relation (30), qui met en évidence le lien entre
l’énergie mécanique échangée entre un système fluide quelconque
en écoulement dans une machine et les éléments mobiles de cette
machine et la variation d’exergie du système, traduit le fait suivant.
Le travail technique wt est égal à la variation d’exergie du
système augmentée de l’irréversibilité des transferts thermiques externes et de la création d’anergie due aux irréversibilités internes.
■ Pour une machine motrice, wt étant négatif, comme ∆ex, l’addition de ces deux termes d’irréversibilité (positifs dans (30)) indique
qu’en valeur absolue :
| wt | moteur < | ∆ex |
BE 8 008 − 6
Dans le cas d’une machine génératrice pour laquelle wt > 0 et
∆ex > 0, le résultat est évidemment inversé :
| wt | générateur > |∆ex |
On peut aussi noter que l’équation (30) correspond à une écriture particulière du premier principe puisqu’il s’agit d’une relation
énergétique. La démonstration de ce fait est immédiate lorsque
l’on considère une évolution cyclique du système. L’exergie étant
une fonction d’état, sa variation au cours d’un cycle est évidemment nulle. Ainsi, on peut écrire :
δq int
T
°∫ 1 – --------T δq + T °∫ --------------δq
δq
= – δq + T
T ∫° °∫ --------T - + ---------------
( w t ) cycle = –
Ta
a
int
a
ou selon l’équation (25) :
( w t ) cycle = –
°∫ δq – T °∫ ds = – (q )
a
cycle
On retrouve bien le principe d’équivalence.
2.3 L’exergie et le deuxième principe
Le deuxième principe de la thermodynamique a été défini
comme étant le principe de la « créabilité » de l’entropie lors d’opérations irréversibles. On peut également le définir comme le principe de la destruction de l’exergie liée aux irréversibilités des
phénomènes.
En effet, considérons le cas simple de l’écoulement d’un fluide
dans une canalisation immobile. L’équation (34) dans laquelle wt 12
est évidemment nul indique que :
T
1 – -------δq – ( ∆an
T 2
∆ex 12 =
a
irr ) 12
(35)
1
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© Techniques de l’Ingénieur
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12/09/2008
________________________________________________________________________________________________________
ex1
ht 1
ht 1
ex1
∆ex12
wt 12
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE
∆ht 12
∆ex12
wt 12
∆ht 12
ex2
ht 2
Θ δq
q12
ex2
∆an12
Ta
Ta
T
δqint
T
δq
ht 2
b machine réelle
a machine idéale
Figure 5 – Évolution de l’exergie d’un système fluide en écoulement à travers un moteur pour obtenir un même travail technique
La température T étant supérieure (ou égale) à Ta, δq est
négatif (1), ce qui donne une valeur négative au premier terme du
deuxième membre, donc un second membre totalement négatif ou
nul.
Nota : Nota (1) : si T < Ta, l’échange thermique avec le milieu ambiant est alors favorable
au système, δq > 0, ce qui ne change rien au signe de l’ensemble.
Ainsi, on notera les remarques suivantes :
— si l’écoulement a lieu de manière réversible (∆an irr = 0) et
sans échange thermique avec le milieu ambiant (δq = 0) ou à une
température constante égale à Ta , ce qui correspond à un échange
thermique réversible :
∆ex 12 = 0 ;
— si l’écoulement est irréversible, ou s’il y a des échanges
thermiques alors que le système est à une température T ≠ Ta , ou
si les deux conditions ont lieu à la fois :
∆ex 12 < 0.
En conclusion, lors d’un écoulement respectant la réversibilité
totale l’exergie reste constante. Si, par contre, il existe une irréversibilité, quelle qu’elle soit, l’exergie diminue. Cet exemple montre
bien que toute irréversibilité entraîne une perte d’exergie. Quand
on sait que l’exergie correspond au maximum technique de possibilité de travail d’un système fluide en écoulement, cette
conclusion prend une importance capitale.
(figure 5a ). La différence des chutes d’exergie est liée directement
aux irréversibilités : plus les irréversibilités sont importantes, plus
l’écart est grand.
Enfin, on peut encore considérer un système fluide traversant
deux machines : un moteur puis un générateur, ce dernier étant
entraîné par le premier (figure 6a ). En supposant que les rendements mécaniques de ces appareils aient une valeur unité, on peut
affirmer que :
— globalement le système n’a échangé aucune énergie mécanique
technique avec son milieu extérieur ;
— si les machines fonctionnent réversiblement (figure 6b ) et s’il
n’y a aucune irréversibilité de transferts thermiques, la variation
globale d’exergie est nulle : le système retrouve son état initial
(l’exergie est une fonction d’état) ;
— s’il y a des irréversibilités, tant internes qu’externes
(figure 6c ), on écrit, en notant par 1, 2 et 3 respectivement l’entrée
du moteur, sa sortie et la sortie du générateur :
Ce résultat reste valable dans le cas général. Pour une machine
idéale fonctionnant sans irréversibilité de transfert thermique
(adiabatique ou avec T = Ta ), le travail est égal à la variation
d’exergie. Si la machine fonctionne de manière irréversible, il faut
ajouter algébriquement un ou deux termes positifs à la variation
d’exergie. Ainsi, dans le cas d’une machine motrice (figure 5), pour
obtenir le même travail, la chute d’exergie nécessaire au système
traversant la machine réelle (figure 5b ) doit, en module, être plus
grande que celle du système moteur de la machine idéale
2
a
1
–
+ ∆ex 23
(36)
T
Θ δq + -------δq
T
3
a
2
∆ex 12 + ∆ex 23 + A = 0
int
2
(37)
avec A un paramètre positif qui ne dépend que des irréversibilités
des machines.
L’expression (37) montre que l’augmentation d’exergie entre 2 et
3 est plus faible que la chute d’exergie entre 1 et 2. Ainsi, au total,
du fait des irréversibilités :
— l’état final du fluide ne correspond pas à l’état initial ;
— on observe une chute de l’exergie, c’est-à-dire une baisse du
potentiel de travail du système. C’est une destruction d’exergie.
En conclusion, si l’entropie et l’exergie sont deux fonctions d’état
caractéristiques du deuxième principe et qui rendent compte des
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int
1
3
On a alors :
Toute irréversibilité diminue le potentiel de travail de ce système en détruisant une partie de son exergie.
T
Θ δq + -------δq
T
2
w t12 + w t 23 = 0 = ∆ex 12 –
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THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE _________________________________________________________________________________________________________
ex1
2
q
ex3 ex1
q
wt 12
wt
wt 23
3
2
wt 12
Θ δq
ex3
1
3
Moteur
Compresseur
ex2
2
wt 23
Θ δq
1
2
Ta
T
3
Ta
T
δqint
2
δqint
ex2
1
a schéma du système
b système idéal et adiabatique
c système réel avec échanges thermiques
Figure 6 – Évolution de l’exergie d’un système fluide en écoulement à travers un moteur puis un compresseur entraîné par le moteur,
sans pertes mécaniques
irréversibilités d’un système, sur le plan technique l’exergie apparaît
plus intéressante car c’est une fonction directement liée à l’énergie
mécanique que l’on peut extraire d’un système thermodynamique
quelconque. La présentation de cette fonction à travers l’étude de
l’écoulement d’un fluide dans une machine thermique quelconque,
et qui aboutit à la relation fondamentale (30) ou (34), permet de
qualifier le fonctionnement d’une machine réelle par rapport à celui
d’une machine idéale en définissant le rendement exergétique de
cette machine particulière. Ce rendement, qui sera défini pour
chaque type de machine, correspond à une mesure de la perte ou
destruction d’exergie produite par les irréversibilités rencontrées
dans la machine. Dans les exemples précédents, il est défini :
— pour un moteur, comme le rapport entre le travail technique
et la variation exergétique qui doit lui être égale lorsqu’il n’y a
aucune irréversibilité :
wt
η ex = -----------(38)
∆ex
— pour une machine génératrice, comme le rapport inverse :
∆ex
η ex = -----------wt
(39)
Notons enfin, comme cela sera précisé dans le paragraphe 2.4,
que la destruction d’exergie correspond à une création d’anergie
puisque cette dernière fonction est directement proportionnelle à la
variaton d’entropie du système.
2.4 Généralisation du concept d’exergie.
Bilans exergétiques
Ce paragraphe n’apporte qu’un point de vue différent et une généralisation par rapport aux paragraphes précédents. On y retrouve
les mêmes résultats, mais à partir d’une autre démarche.
2.4.1 Définitions
Ainsi :
— l’énergie mécanique est de l’exergie pure. Par exemple :
l’énergie mécanique communiquée à un levier permet de soulever
une charge qui, en se déplaçant, effectue un certain travail ; le travail et l’énergie mécanique mise en œuvre sont strictement identiques si on admet que l’opération a lieu sans frottement, ce qui est
le cas idéal (soit réversiblement au sens thermodynamique) ;
— l’énergie électrique est de l’exergie pure. En effet, dans le cas
d’un moteur électrique idéal (sans pertes Joule, ni pertes fer), par
exemple, l’énergie électrique absorbée peut être intégralement
transformée en énergie mécanique au moyen d’un treuil fonctionnant sans frottement. Cet exemple correspond encore à un cas
théorique idéal, donc réversible au sens thermodynamique ;
— l’énergie thermique est un mélange d’exergie et d’anergie. En
effet, le système qui permet de convertir au mieux l’énergie thermique en énergie mécanique est le moteur de Carnot (figure 7a ).
Or, lorsque celui-ci reçoit une énergie thermique δQ à la température T et que sa source froide est constituée par le milieu ambiant
à la température Ta , il ne peut convertir en énergie mécanique δW
que la fraction :
δQ = ΘδQ
1 – -------T Ta
(40)
Cette fraction de l’énergie thermique transformable idéalement
en énergie mécanique représente la part exergétique de l’énergie
thermique. On la qualifie d’exergie de l’énergie thermique.
La quantité minimale de chaleur non transformable, qui est le
complément de l’exergie à l’énergie thermique :
Ta
-------δ Q = T a dS
T
(41)
représente l’anergie associée à l’energie thermique δQ. Dans cette
relation, dS représente la variation d’entropie de la source thermique ou l’entropie dSe qui accompagne le flux de chaleur à la température T.
La définition de l’exergie a été donnée au paragraphe 2.1. On
peut en exprimer d’autres formes, plus générales. L’une d’elles est
la suivante.
Le contenu exergétique de la quantité de chaleur δQ est représenté schématiquement par la figure 7b.
En résumé, et en généralisant les exemples précédents, on peut
énoncer le fait suivant.
L’exergie est la fraction maximale d’une forme d’énergie
quelconque qui, apportée à un système, peut être convertie en
travail lorsque le système est en présence du milieu ambiant à la
température Ta .
Toutes les énergies autres que thermique sont de l’exergie
pure ; l’énergie thermique, quant à elle, est formée d’exergie et
d’anergie.
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Chaleur à
T
T
dAn = a δQ
T
δQ = T dS
T
dEx = 1 – a
T
W = Θ δQ
Moteur de
Carnot
Ta
T
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE
T
1- a
T
δQ = Ta dS
δQ
δQ
δQ
Milieu
ambiant à Ta
a moteur de Carnot
Énergie mécanique
b schématisation du contenu
exergétique et anergétique
d'une certaine quantité d'énergie
thermique
Énergie thermique
Anergie
T1 > 0
Exergie
Exergie
T1 > T2
Énergie électrique
Anergie
T2 > 0
Exergie
Exergie
Figure 8 – Contenu exergétique de diverses formes d’énergie
La figure 8 schématise le contenu exergétique des trois formes
d’énergie présentes dans de nombreux problèmes d’énergétique :
mécanique, électrique et thermique.
2.4.2 Cas particulier de l’exergie thermique
Comme l’énergie thermique considérée dans les applications
thermodynamiques correspondant à un échange de chaleur δQ
entre le système et son milieu extérieur, l’exergie correspondante
est de l’exergie d’échange dExe . On peut ainsi écrire :
δQ = ΘδQ = dEx
1 – -------T Ta
e
(42)
On peut aussi noter que l’anergie associée est de l’anergie
d’échange dAne :
Ta
-------δQ = T a dS e = dAn e
(43)
T
Figure 7 – Contenu exergétique de l’énergie
thermique
Contrairement à la chaleur échangée qui est indépendante de la
température à laquelle se trouve cette énergie, l’exergie correspondante dépend du niveau de température. Plus la température est
élevée, plus l’exergie correspondante est grande (figure 8). Par
ailleurs, comme l’échange thermique, qui peut être conventionnellement positif ou négatif, les exergie et anergie d’échange correspondantes doivent être affectées d’un signe positif ou d’un signe négatif.
Si l’anergie échangée est toujours du signe de la chaleur échangée
(équation (43)), le signe de l’exergie échangée est soit du signe de la
chaleur, soit du signe opposé, selon la valeur du facteur de Carnot. La
figure 9 illustre cette convention. On note que, pour des valeurs de la
température supérieures à la température ambiante, l’exergie est
toujours du même signe et inférieure à la quantité de chaleur échangée (positive, figure 9a, ou négative, figure 9b ). Il en est de même
pour l’anergie dont la valeur complète celle de l’exergie pour retrouver l’énergie. L’exergie tend vers l’énergie thermique pour des
valeurs infinies de la température. Pour des valeurs de température
inférieures à la température ambiante, l’exergie est du signe
contraire de celui de l’énergie. L’anergie est du signe de la chaleur
avec une valeur absolue toujours supérieure à celle de l’énergie.
L’exergie tend vers une valeur infinie pour des températures évoluant vers 0 K. Ainsi, soutirer de la chaleur (Q < 0) au voisinage de 0 K
correspond à un apport d’exergie infini. Comme l’exergie correspond, dans ce cas, à l’énergie mécanique minimale qu’il faut apporter au système, cela signifie que la recherche du zéro absolu en
température est vouée à l’échec puisqu’il faudrait, dans le meilleur
des cas, investir une énergie mécanique infinie pour y arriver.
Ce concept exergétique de la chaleur correspond à une réalité
industrielle. En effet, il serait tout à fait possible théoriquement
d’avoir un contenu exergétique de la chaleur équivalent à son
contenu énergétique. Il suffirait pour cela d’admettre que cette
chaleur soit transformée en travail dans un moteur de Carnot utilisant une source froide à 0 K. Si cela était le cas, toute l’énergie
thermique serait transformée en énergie mécanique. Or, outre le
fait qu’obtenir 0 K est une « vue de l’esprit », comme cela vient
d’être souligné, utiliser une source à quelques mK ou µK (qui permettrait encore de convertir presque intégralement la chaleur en
travail) n’est pas envisageable sur le plan industriel compte tenu
du coût d’une telle source. La seule source thermique gratuite,
donc industriellement acceptable, est le milieu ambiant. Cette
constatation justifie le choix de cette référence de température
dans le concept exergétique.
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BE 8 008 − 9
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Unités arbitraires
2
Transformation réversible
Q = +1
1
An
Q
An
Ta
Ex
0
–1
Ex
T1
T2
Exergie
Anergie
Énergie
Ex
Conservation de l'exergie
–2
a système en évolution réversible
–3
Transformation irréversible
–4
–5
0
200
400
600
800
1 000
Unités arbitraires
a quantité de chaleur positive
Exergie
Anergie
Énergie
5
Transformation d'exergie
en anergie
4
b système en évolution irréversible
3
Figure 11 – Schématisation des flux énergétiques, exergétiques
et anergétiques à travers un système fermé
2
Ex
1
Ex
An
T1
Ta
où Exe et Ane représentent les quantités d’exergie et d’anergie
accompagnant les échanges energétiques.
Ex
0
Si le système évolue de manière cyclique, la variation des fonctions d’état du système sera nulle, en particulier :
Q T2
–1
∆U = 0
Q=–1
An
–2
et :
0
200
600
400
800
1 000
Q+W =
b quantité de chaleur négative
avec
Ane
= ∆U
(46)
∑Q≠0.
∑ Ane
=
∑ Exe
= 0
(47)
Toute l’exergie qui rentre dans le système en sort et de même
pour l’anergie. Il y a conservation des entités exergétiques (exergie
et anergie). La figure 11a schématise cette conservation.
La figure 12 représente le cas d’un convertisseur fonctionnant
réversiblement. Il s’agit d’un moteur de Carnot pour lequel l’équation (47) est bien vérifiée.
L’énergie étant, en général, composée d’exergie et d’anergie,
tout échange énergétique entre un système et son milieu extérieur
donne lieu à un échange exergétique. On peut écrire (figure 10) :
∑ ( Exe + Ane )
∑ Ane
Ainsi, compte tenu de l’équation (45), pour un système en évolution cyclique réversible :
2.4.3 Échanges exergétiques.
Bilan exergétique d’un système fermé
BE 8 008 − 10
La variation d’entropie du système étant nulle, comme il n’y a pas
de création d’entropie, l’échange entropique à travers la frontière
ΣSe doit être également nul. L’échange d’anergie Ane étant lié à
l’échange entropique Se selon la relation (43), on a :
W
Figure 10 – Schématisation des échanges énergétiques, entropiques
et exergétiques entre un système quelconque et son milieu extérieur
Q+W =
(45)
2.4.3.1 Évolution cyclique réversible
Q
T a ∑ S e = T a ∑ ------- = 0 =
T
Σ
Exe
= 0
Deux cas sont alors à considérer.
Figure 9 – Courbes d’évolution de l’exergie accompagnant
les échanges thermiques positifs ou négatifs (pris arbitrairement
égaux à + 1 ou à – 1). Représentation de la valeur des exergie et
anergie pour deux valeurs de température : T1 > Ta ( > 0) ;
T2 < Ta ( < 0)
Q (Se)
∑ ( Exe + Ane )
(44)
2.4.3.2 Évolution cyclique irréversible
La variation d’entropie du système est toujours nulle. Mais du
fait de la création interne d’entropie, l’échange entropique ΣSe doit
être négatif : l’entropie créée doit être évacuée en même temps
que l’entropie qui est entrée dans le système en accompagnant la
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Q1 = T1S1
T1
W2
T1
An1 = TaS1
Ex1 = Q1 1 –
Ta
T1
Ex2' = W2
S'= 0
Q2 = T2S2 = T2S1
W1
T2
T2
Ex1' = W1
An2 = TaS2 = TaS1
T
Ex2 = Q2 1 – a
T2
T1
Ex1 = Q1 1 –
Ta
T1
comme Q1 + Q2 + W1 + W2 = 0
on vérifie que Ex1 + Ex2 + Ex1' + Ex2' = 0
Q1 = T1S1
W2
An1 = TaS1
Ex2' = W2
(
S'> 0
(
)
Q2 = T2S2 = T2 S1 + S'
W1
Ex1' = W1
An2 = TaS2 > An1
Ex2 = Q2 1 –
T2
Figure 12 – Schématisation des flux
énergétiques, exergétiques et anergétiques
d’un moteur de Carnot avec ses sources
thermiques et mécaniques
)
= S1 T1 – Ta
T2
Ta
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE
(
= S2 T2 – Ta
)
chaleur. Il en découle que l’échange d’anergie doit également être
négatif :
(48)
∑ Ane < 0
Le système doit évacuer plus d’anergie qu’il n’en a reçu. Alors,
compte tenu de l’équation (45) :
∑ Exe > 0
(49)
Le système restitue au milieu extérieur moins d’exergie qu’il n’en
a reçu de lui. Ainsi, un système fonctionnant de manière cyclique irréversible, qui de ce fait conserve une anergie et une exergie internes
constantes (2), correspond à un convertisseur d’exergie en anergie.
Nota (2) : les systèmes thermiques considérés en génie énergétique sont des fluides
pour lesquels l’exergie massique est donnée par l’équation (12) et qui, donc, est une fonction d’état.
Cette conversion exergétique constitue une perte d’exergie irréversible du point de vue de l’Univers et corrélativement une création irréversible d’anergie.
La quantité d’exergie transformée en anergie est une mesure
de la création d’entropie produite par le fonctionnement irréversible du système. L’intérêt de déterminer les quantités d’exergie
détruites ou, corrélativement, les quantités d’anergie créées (ou
produites), réside dans le fait que les irréversibilités se mesurent
alors dans la même unité que l’énergie : des joules, voire, si on
passe en puissance, des watts.
La figure 11b illustre cette conversion d’exergie en anergie pour
un système évoluant de manière irréversible.
Figure 13 – Schématisation des flux
énergétiques, exergétiques et anergétiques
d’un moteur thermique quelconque
(irréversible) avec ses sources thermiques
et mécaniques
Sur la figure 13 est donné un exemple de système cyclique fonctionnant irréversiblement. Il s’agit d’un moteur thermique quelconque
pour lequel le bilan exergétique donne une quantité d’exergie sortant
du système inférieure à celle qui entre dans le moteur et l’inverse pour
la quantité d’anergie. En effet, le bilan anergétique donne :
An 1 – An 2 = Ta (S 1 – S 2 ) = – Ta S ′ < 0
avec S ′ la création d’entropie dans le système.
Le bilan exergétique est :
Ex 1 – Ex 2 + Ex 1′ – Ex 2′ = S 1 ( T 1 – T a ) – S 2 ( T 2 – T a ) + W 1 – W 2
= S 1 T 1 – S 2 T 2 + S′T a – ( Q 1 – Q 2 )
∑ Exe
= S′T a > 0
2.4.4 Bilan exergétique d’un système ouvert
thermomécanique
La variation d’exergie dEx d’un système ouvert thermomécanique
Σ (figure 14) pendant le temps dt provient :
— des échanges exergétiques accompagnant les échanges énergétiques, soit :
Ta
δW t + δQ 1 – -------T
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BE 8 008 − 11
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE _________________________________________________________________________________________________________
on a :
δW t + δQ + ∑ ex i dm i + T a ∑ s i dm i = 0
δW t
(53)
En introduisant le bilan enthalpique (relation (45) article
[BE 8 005]), on obtient une autre forme de l’équation générale du
bilan exergétique :
–Ta dS'
Σ
∑ hti dmi
dEx
=
∑ exi dmi + Ta ∑ si dmi
(54)
L’application de ces relations au cas d’un système ayant une
seule entrée 1 et une seule sortie 2 (figure 15) donne :
Θ δQ
δWt + δQ = | dm |[ex 2 – ex 1 + Ta (s 2 – s 1)] = (h t 2 – ht 1)|dm |
exi dmi
Cela s’écrit encore, en considérant le flux d’une unité de masse
de fluide :
∆ht 12 = wt 12 + q 12 = ∆ex 12 + Ta ∆s 12
(55)
Figure 14 – Représentation des flux exergétiques d’un système
ouvert quelconque (irréversible)
(équation analogue à (11)).
Le bilan anergétique pour le système Σ donne :
— des échanges exergétiques accompagnant les flux de matière
dmi dans chaque canalisation i (comptés positivement si le fluide
entre dans le système) :
dA n =
∑ exi dmi
avec exi l’exergie contenue dans l’unité de masse de fluide pénétrant ou sortant du système par la canalisation i. Cette exergie correspond à la définition donnée au paragraphe 2.1 et dont la valeur
est fournie par la relation (10) ;
— de la perte d’exergie due aux irréversibilités internes (voir le
paragraphe 2.2.2) :
δQ int
T a dS′ = T a -------------T
Ta
∑ ani dmi – Ta ∑ si dmi
(50)
=0
(51)
⬁
c1
1
T
z1
δQ
δwt
δwa
2
δQ
1
ExQ = Q 1 –
2
c2
z2
Ainsi, l’équation (55) s’écrit :
(60)
(équation analogue à (17) et (34)).
∆S12' > 0, création
'
+ ∆S12
T
Σ
Ta
T
T
dEx = δWt + δQ 1 - a +
T
2
∆ex12 = wt12 +
1–
1
Ta
T
∆ex12 = ∆ht12 - Ta ∆s12
BE 8 008 − 12
(58)
(équation analogue à (13)).
(52)
∆S12 =
(57)
(59)
∆ht 12 = wt 12 + q 12 = ∆ex 12 + ∆an 12
δQ int
δQ
---------- + --------------- + ∑ s i dm i = 0
T
T
ex2 = ht2 - Ta S2
= 0
∆an 12 = Ta ∆s 12
En considérant l’équation (2) du bilan entropique qui s’écrit ici :
ex1 = ht1 - Ta S1
= 0
Si le système compte une entrée et une sortie :
Pour un système en régime permanent, l’équation (50) s’écrit :
Ta
+ δQ int -------∑ ani dmi + δQ -------T
T
ce qui, compte tenu de l’équation (52), donne :
δQ int
Ta
dEx = δW t + δQ 1 – -------+ ∑ ex i dm i – T a --------------T
T
δW t + δQ + ∑ ex i dm i – T a
(56)
Pour un système en régime permanent, l’équation (56) devient :
Ainsi, le bilan exergétique d’un tel système s’écrit :
δQ int
δQ
--------------- + ---------T
T
Ta
Dans cette relation, les deux premiers termes sont dus aux flux
anergétiques accompagnant les flux de matière (ani est donné par
la relation (13)) et les flux de chaleur. Le dernier terme, identique au
signe près au dernier terme de l’équation (50), correspond à l’exergie transformée en anergie par les irréversibilités internes du
système.
i
Ta
+ δQ int -------∑ ani dmi + δQ -------T
T
δQint
exi dmi - Ta
2
δq -
1
Ta
T
δqint
T
Figure 15 – Résumé des concepts du deuxième
principe dans le cas de l’application
à une machine simple fonctionnant en régime
permanent
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Un raisonnement identique fait à partir de l’équation (51) sur un
système fonctionnant en régime permanent et traversé par un
fluide avec une seule entrée et une seule sortie redonne directement l’équation (30) :
2
w t12 = ∆ex 12 –
1
2
Ta
1 – -------δq + T a
T
1
δq int
-------------T
(61)
δq
δq
- + T -------------- T -------T
T
2
int
(62)
a
1
1
qui n’est autre que l’équation (33).
Ainsi, les équations (51) et (57) apparaissent comme la généralisation des équations (30) et (33) présentées dans le cas particulier
d’un système fluide s’écoulant au travers d’une machine fonctionnant en régime permanent. Les équations (50) et (56) sont une généralisation au cas de systèmes en fonctionnement quelconque.
La figure 15 résume les divers concepts liés au deuxième principe de la thermodynamique dans leur application au cas d’une
machine simple.
2.4.5 Production anergétique
Les équations générales (50) et (56) sont relatives à une évolution au cours d’un intervalle de temps dt . Dans de nombreuses
applications pratiques, il est intéressant de se référer à l’unité de
temps. Les équations ont alors la dimension d’une puissance. On
peut écrire :
δQ˙ int
Ta
˙ + δQ̇ 1 – -------E˙ x = W
+ ∑ ex i m˙ i – T a --------------(63)
t
T
T
A˙ n =
˙
∑ ani mi +
T
δQ̇ -------+ δQ˙
T
a
int
Ta
-------T
(64)
Dans ces relations, les intégrales sont à prendre en compte pour
les échanges thermiques et les irréversibilités internes, du fait de
l’association nécessaire entre les chaleurs et la température correspondante.
Pour des opérations ayant lieu en régime permanent, ces équations deviennent :
˙ +
W
t
δQ˙
T
δQ̇ 1 – -------
+ ∑ ex m˙ – T ---------------- = 0
T
T
a
i
˙
∑ ani mi +
i
int
(65)
Ta
-------= 0
T
(66)
a
T
δQ̇ -------+ δQ˙
T
a
int
La production anergétique d’un système correspond à la destruction de l’exergie due au fonctionnement de ce système dans l’unité
de temps. En toute rigueur, elle provient des irréversibilités internes
du système. On peut alors écrire :
A˙ n p =
δQ˙
T
˙ + δQ̇ 1 – -------- = W
T -------------- + ∑ ex m˙
T
T
T
= – ∑ an m˙ + δQ̇ -------- T
int
a
t
a
i
i
i
˙ +
˙
A˙ n p globale = W
t ∑ ex i m i =
δQ˙
T
- – δQ̇ 1 – -------- T -------------T
T
a
int
a
2
a
milieu ambiant). Ce terme vient augmenter la perte exergétique produite par le fonctionnement d’un tel système. La production anergétique, qualifiée de globale, a comme expression :
= – ∑ an i m˙ i + Q˙
De même, dans ces conditions, l’équation (57) devient :
∆an 12 =
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE
i
(67)
a
Dans de nombreuses applications, les puissances thermiques
échangées sont négatives (ou nulles), la température T est supérieure à Ta et les puissances thermiques sont en fait transférées in
fine au milieu ambiant. L’exergie représentée par le deuxième terme
du troisième membre de l’équation (67) se transforme en anergie
par transfert thermique externe irréversible (entre le système et le
La comparaison entre la production anergétique du système
et la puissance utile mise en œuvre dans ou par ce système (par
exemple, la puissance mécanique dans un système moteur ou
générateur) donne une excellente indication de la qualité du
fonctionnement de ce système énergétique.
Cette comparaison complète l’information donnée par le rendement exergétique défini par les relations (38) et (39). En effet, alors
que le rendement exergétique donne une valeur bornée entre 0 et
1, la production anergétique fournit la puissance, fonction de la
taille de la machine ou du système, dégradée irréversiblement en
chaleur.
Une application complète des études exergétiques pour le cas
des compressions et détentes des gaz ou des vapeurs est donnée
dans l’article [BE 8 013] § 5.
2.5 Application de l’analyse exergétique
au cas des échanges thermiques
Dans ce paragraphe, on étudie les relations entre les transferts
énergétiques et exergétiques lors des échanges de chaleur entre
deux sources à des températures différentes, puis entre deux fluides
évoluant dans un échangeur de chaleur.
2.5.1 Échange de chaleur entre deux sources
Lorsque deux sources échangent une certaine quantité de chaleur
Q, elles échangent en même temps de l’entropie, de l’exergie et de
l’anergie. Les exergie et anergie sont liées à l’énergie thermique par
les relations (42) et (43) respectivement. Selon le deuxième principe
de la thermodynamique, la chaleur passe toujours naturellement de
la source à haute température vers la source à basse température
(haute et basse ayant une valeur relative, par exemple – 120 oC est
une haute température par rapport à – 130 oC). Par ailleurs, selon
le premier principe de la thermodynamique, le flux thermique est
conservé : la chaleur qui quitte la source chaude est transférée intégralement à la source froide. Pour les flux exergétiques, la situation
est plus complexe. On sait que les irréversibilités détruisent l’exergie au profit de l’anergie et que, de ce fait lors d’un échange
thermique irréversible, puisque les deux sources sont à des températures différentes, l’exergie de transfert ne sera pas conservée.
De plus, il convient de noter que le signe du flux d’exergie dépend
du signe du facteur de Carnot, donc du niveau de température de
chaque source par rapport à la température ambiante. Les
figures 16, 17 et 18 illustrent ces divers transferts.
Sur la figure 16, on note que la chaleur Q passe de la source
chaude (T 2 ) à la source froide (T 1 < T 2 ). Ces deux sources sont à
des températures supérieures à la température ambiante. Avec la
chaleur, la source 2 perd une certaine quantité d’exergie, soit une
potentialité à faire de l’énergie mécanique, alors que la source 1
reçoit une quantité d’exergie plus faible. La différence d’exergie
entre 1 et 2 a été transformée en anergie. On note en effet que la
quantité d’anergie reçue par la source 1 est plus grande que celle
qui a été cédée par la source 2. Il y a création d’anergie et destruction corrélative d’exergie. Ce phénomène est dû au transfert
thermique irréversible entre deux sources à des températures
différentes. Sur cette même figure, on a représenté un échange
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(68)
BE 8 008 − 13
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE _________________________________________________________________________________________________________
T2
Ex
T
Exe = 1 – a Q = ΘQ
T
Source 2
Ane =
An
Ta
T
Q = Ta Se
Q
T1
Source 1
T1
Source 1
Ex
An
Q
Ta
Milieu ambiant
Ta
Milieu ambiant
Ta
Milieu ambiant
Ta
Milieu ambiant
Figure 16 – Flux thermiques et exergétiques
entre deux sources à température supérieure
à la température ambiante
An
Q
Ex
T1
Source 1
An
Ex
T2
T1
Source 1
Q
Source 2
T
Exe = 1 – a Q = ΘQ
T
Ane =
Ta
T
thermique entre la source 1 et le milieu ambiant. Si la source 1
perd de l’exergie en même temps que de la chaleur, le milieu
ambiant ne reçoit plus que de l’anergie. Toute l’exergie a été
détruite ; de la chaleur à température ambiante ne peut plus être
convertie en énergie mécanique (au moins avec un point de vue
industriel de rentabilité).
La figure 17 est relative à des échanges entre sources à températures inférieures à la température ambiante. Comme T 1 > T 2 , c’est
la source chaude 1 qui cède de la chaleur Q à la source froide 2.
Mais, en cédant cette chaleur, la source 1 reçoit de l’exergie (3) et
perd une quantité d’anergie supérieure à l’énergie thermique
perdue. La source 2 qui reçoit la chaleur cède de l’exergie et reçoit
de l’anergie.
Nota (3) : Le fait d’enlever de la chaleur à un milieu froid permet d’envisager de lui restituer cette chaleur à partir du fonctionnement d’un moteur de Carnot entre le milieu ambiant
et le niveau thermique de ce milieu froid, ce qui fournirait de l’énergie mécanique. Ainsi, en
lui enlevant de la chaleur, on lui fournit une potentialité à faire un travail, donc de l’exergie.
BE 8 008 − 14
Q = T a Se
Figure 17 – Flux thermiques et exergétiques
entre deux sources à température inférieure
à la température ambiante
On note encore sur la figure 17 que, du fait du transfert thermique
irréversible entre deux sources à températures différentes, une
certaine quantité d’exergie est détruite au bénéfice de l’anergie, ce
qui signifie que ce transfert détruit irrémédiablement de la potentialité à faire de l’énergie noble (mécanique en particulier). L’échange
avec le milieu ambiant montre encore que l’exergie cédée par la
source s’annule lors de son arrivée dans le milieu ambiant.
La figure 18 permet de rendre compte des transferts entre une
source chaude à température supérieure à la température ambiante
et une source froide à température inférieure. On retrouve le fait que
le signe des échanges d’exergie est celui de l’échange thermique
pour les températures supérieures et le signe contraire pour les
températures inférieures avec annulation de l’exergie au passage à
la température ambiante.
Il convient de noter que les valeurs relatives énergie thermique/exergie/anergie se retrouvent sur la figure 9.
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________________________________________________________________________________________________________
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE
T
T1
Source chaude 1
Fluide chaud
Ex
Tce
An
Q
Exergie
Énergie
thermique
Anergie
Anergie
Milieu ambiant
Ta
Tfs
An
T2
Fluide froid
Q
Ex
Ta
Source froide 2
Figure 20 – Flux énergétiques (enthalpiques), exergétiques
et anergétiques dus aux échanges et au transport par les fluides
dans un échangeur de chaleur adiabatique à contre-courants
Figure 18 – Flux thermiques et exergétiques entre deux sources
à température située de part et d’autre de la température ambiante
Tcs
Fluide chaud
Tce
•
Qcf
•
Qcf
En général, on considère l’échange thermique avec l’extérieur
comme négligeable :
Q˙ = 0
Comme, par ailleurs, ces systèmes ne mettent en jeu aucune
puissance mécanique technique, pour leur fonctionnement en
régime permanent, les équations (65) et (66) deviennent :
Tfe
∑ exi m˙ i =
Fluide froid
Tfs
δQ˙
T --------------T
∑ ani m˙ i = –
•
Q=0
Figure 19 – Représentation schématique d’un échangeur de chaleur
à contre-courants, adiabatique
2.5.2 Échange thermique entre un fluide chaud
et un fluide froid. Échangeurs de chaleur
Les échangeurs de chaleur sont des systèmes thermiques très
répandus dans l’industrie. Ils permettent d’échanger de la chaleur
entre deux fluides à températures différentes (voir les articles
consacrés aux « échangeurs de chaleur » dans notre collection).
Contrairement aux échanges entre sources, lors des échanges thermiques et en l’absence de changement de phase, la température de
chacun des deux fluides évolue. Le flux thermique échangé entre le
fluide chaud et le fluide froid est tel que (figure 19) :
(69)
Q˙ f = m˙ f c Pf ( T fs – T fe ) > 0
(70)
Q˙ f = – Q˙ c = Q˙ cf
(71)
Dans ces relations, les indices c et f désignent respectivement le
fluide chaud et le fluide froid, les indices e et s, l’entrée et la sortie
de chacun des fluides par rapport à l’échangeur, cP est la capacité
thermique massique sous pression constante.
δQ˙
int
Ta
------T
(73)
La production d’anergie d’un échangeur de chaleur, qui correspond à la destruction d’exergie dont est responsable l’échangeur
dans l’unité de temps, est donnée par l’équation (67) :
δ Q˙
˙ - = ∑ ex m˙ = – ∑ an m˙ = – ∆Ex
T -----------T
a
int
i
i
˙ = m˙ ∆ex ˙
où ∆Ex
es
es avec m
i
i
c es
˙ (74)
+ ∆Ex
f es
le débit massique du fluide
considéré.
La représentation de la figure 21 permet de visualiser cette production anergétique ou destruction exergétique. Elle donne l’évolution du facteur de Carnot Θ de chaque fluide en fonction de la
puissance reçue par le fluide froid ou la puissance thermique cédée
par le fluide chaud, en prenant soin d’associer les zones qui échangent entre elles (l’entrée du fluide froid avec la sortie du fluide chaud
et la sortie du fluide froid avec l’entrée du fluide chaud pour un échan-
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(72)
L’équation (72) montre que l’exergie qui entre est plus importante
que l’exergie qui sort de l’échangeur ou, ce qui revient au même,
que l’exergie que reçoit le fluide froid (différence entre son exergie
à l’entrée et son exergie à la sortie) est plus faible que l’exergie
cédée par le fluide chaud (figure 20). L’exergie détruite a été transformée en anergie. La cause de cette transformation d’exergie en
anergie est, pour l’essentiel, due à la différence de température lors
de l’échange thermique (l’autre cause, mais nettement moins
importante, est due aux pertes de charge dans les écoulements,
cf. article [BE 8 161]).
˙ =
An
p
Q˙ c = m˙ c c Pc ( T cs – T ce ) < 0
int
a
BE 8 008 − 15
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE _________________________________________________________________________________________________________
Θ
Ainsi, la différence des aires sous-tendues par chacune des courbes d’évolution des fluides représente la différence entre la puissance exergétique cédée par le fluide chaud et la puissance
exergétique reçue par le fluide froid. Elle est donc une mesure de
la destruction d’exergie, donc de la production anergétique de
l’échangeur. On peut voir qu’elle est fonction de plusieurs
facteurs :
Σ
•
Anp =
•
•
•
mi exi = – ∆Exc es + ∆Exf es
Θce
Fluide chaud
Θfs
Θcs
•
Θfe
∆Exc
Fluide froid
Pincement
•
∆Ex f
•
ΘδQc
e
s
es =
s
es =
— le pincement qui représente, dans un échangeur de chaleur,
la différence minimale de température observée entre les deux fluides (en quelqu’endroit que ce soit) ;
— la différence relative des débits des capacités thermiques de
chacun des fluides m˙ c P qui influent sur la pente des courbes correspondantes.
•
Dans de tels systèmes, la production anergétique devra toujours
être comparée à la puissance thermique transmise qui est le but
recherché dans la mise en œuvre d’un échangeur. La production
anergétique donne une mesure de la dégradation de l’énergie,
puisqu’elle correspond à une puissance qui ne pourra plus jamais
être transformée en énergie mécanique. Sa valeur relative à la
puissance thermique échangée fournit une information extrêmement intéressante sur la qualité de l’échangeur.
ΘδQ f
e
•
Q cf
Figure 21 – Représentation des variations de puissance exergétique
des fluides dans un échangeur à contre-courants et mise en évidence
de la production anergétique
Remarquons que, contrairement à ce qui est fait sur la figure 21,
les courbes d’évolution pour des fluides sans changement de
phase à c p constant, ne sont pas des droites. En effet, pour le fluide
froid par exemple, en fonction de l’abscisse x de l’écoulement
depuis l’entrée de l’échangeur, on a :
geur à contre-courants). Dans cette représentation, l’aire sous-tendue
par chacune des courbes donne une mesure de la variation d’exergie
du fluide correspondante entre son entrée et sa sortie de l’échangeur.
En effet, pour chacun des deux fluides, l’équation (65) donne :
δQ˙
- = 0
δQ̇ 1 – -------TT- + ∑ex m˙ – T --------------T
int
a
i
i
a
Ta
Q˙ f ( x ) = m˙ f c Pf ----------------------- – T fe
1 – Θ(x)
À titre comparatif, la figure 22 donne une représentation du cas
d’un échangeur de chaleur adiabatique à cocourants. On note que,
pour une même puissance thermique échangée et un même pincement, ce type d’échangeur conduit à une production anergétique
supérieure à celle de l’échangeur à contre-courants. Il est donc
moins intéressant puisqu’il dégrade davantage l’énergie.
En admettant que les irréversibilités liées à l’écoulement du
fluide (pertes de charge) soient négligeables, l’équation (75)
devient :
˙
∆Ex
es =
e
Ta
δQ̇ 1 – ------T
(77)
Cependant, dans beaucoup d’applications, l’assimilation de la
courbe à une droite est acceptable en première approximation.
(75)
avec δQ̇ l’échange thermique entre le fluide considéré et son
milieu extérieur, c’est-à-dire entre ce fluide et l’autre fluide.
s
Dans le cas où l’un des fluides présente un changement de
phase en cours d’évolution, sa courbe est modifiée par le fait que
la puissance nécessaire au changement de phase est mise en
œuvre à température constante, si le fluide est un fluide pur
(76)
Θ
Σm• i exi = – ∆Exc es + ∆Exf es •
•
Anp =
•
Θce
Fluide chaud
Fluide chaud
Tcs
Tce
Θcs
Θfs
Pincement
Tfs
Tfe
Fluide froid
Θfe
Fluide froid
•
Q=0
•
∆Ex f
es =
s
e
•
Θ δQ f
•
Q cf
Figure 22 – Échangeur adiabatique à cocourants. Puissance exergétique des fluides et production anergétique
BE 8 008 − 16
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________________________________________________________________________________________________________
Pincement
Θ
Σ
•
Anp =
Θce
•
mi exi = –
•
•
∆Exc es + ∆Exf es
Fluide chaud
Θfs
Notations et symboles
Symbole
Unité
An
J
Anergie
an
˙
An
˙
An
kg–1
Anergie massique
W
Puissance anergétique
W
Production anergétique
J·
p
Vapeur
Θcs
Θfe
Liquide
Fluide froid
•
∆Ex f
s
e
•
Q cf
Figure 23 – Échangeur adiabatique à contre-courants
avec changement de phase liqude-vapeur pour le fluide froid (fluide
pur). Puissance exergétique des fluides et production anergétique
Pincement
Θ
Σ
•
Anp =
Θce
•
•
•
mi exi = – ∆Exc es + ∆Exf es
Fluide chaud
Θfs
Vapeur
Θcs
Liquide
Glissement de
température
Fluide froid
Θfe
•
∆Ex f
es =
s
Définition
c
m · s–1
Vitesse
cP
kg–1
Capacité thermique massique sous
pression constante
J·
·
K–1
d
•
Θ δQ f
es =
•
Θ δQ f
•
Q cf
Figure 24 – Échangeur adiabatique à contre-courants
avec changement de phase liquide-vapeur pour le fluide froid
(mélange). Puissance exergétique des fluides et production
anergétique
(figure 23). Dans le cas d’un mélange, on assiste à un certain glissement de la température au cours du changement de phase
(figure 24). Pour un même pincement, ce cas peut être plus intéressant que le cas d’un fluide pur puisqu’il peut conduire à une
production anergétique inférieure. Le minimum est obtenu lorsque
l’évolution pour le changement de phase est parallèle à celle du
fluide chaud.
L’analyse des pertes exergétiques ou des productions anergétiques
est à la base de certaines méthodes d’optimisation thermodynamique, notamment dans le cas où, sur un site industriel, on dispose d’un
certain nombre de fluides chauds (à refroidir) et de fluides froids (à
réchauffer). Ces fluides et les échangeurs correspondants devront être
disposés de telle sorte que la production totale d’anergie soit minimale. L’une de ces méthodes est la méthode du pincement.
Différentielle totale exacte
ec
J · kg–1
Énergie cinétique massique
ep
J · kg–1
Énergie potentielle gravifique
massique
Ex
J
Éxergie
ex
˙
Ex
J·
kg–1
Exergie massique
W
Puissance exergétique
g
m · s–2
Accélération de la pesanteur
h
J · kg–1
Enthalpie massique
ht
kg–1
Enthalpie totale massique
kg
Masse
J·
m
m˙
kg · s–1
P
Pa
Q
J
Quantité de chaleur ou énergie
thermique échangée
Q˙
W
Puissance thermique
q
J · kg–1
Quantité de chaleur échangée
par unité de masse
S
J · K–1
Entropie
s
J · kg–1 · K–1
S′
e
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE
J·
kg–1
Débit massique
Pression
Entropie massique
Entropie créée
s′
J · kg–1 · K–1
t
s
Temps
T
K
Température
Entropie massique créée
U
J
Énergie interne
W
J
Énergie mécanique échangée
v
m3/kg
Volume massique
kg–1
Énergie mécanique massique
W
Puissance technique
w
˙
W
t
J·
wt
J · kg–1
x
m
Coordonnée
z
m
Altitude
Travail technique massique
∆
Différence
Θ
Facteur de Carnot (1 – Ta /T )
δ
Différentielle quelconque
η
τ if
Rendement
J · kg–1
Énergie massique dissipée
par les frottements
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BE 8 008 − 17
THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE _________________________________________________________________________________________________________
Liste des indices
1
État initial, entrée
2
État final, sortie
a
Relatif au milieu ambiant
C
Relatif à une machine de Carnot
c
Chaud
e
Échange, entrée
ex
Exergétique
f
Froid
g
Global
i
Référence à une situation quelconque,
numéro de la canalisation
int
Intérieur ou interne
irr
Irréversible
max
Maximum
s
BE 8 008 − 18
Sortie
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