R. Kaaks
Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2003 - vol.27 - n°1 11
de façon plus nuancée- que la nutri-
tion à l’age adulte peut jouer un rôle
important.
Les études qui suivent vont essayer
de faire le lien entre l’alimentation,
l’état nutritionnel et le métabolisme
hormonal comme mécanisme de
transmission du facteur de risque de
cancer du sein.
Dernièrement, on a aussi reconnu
comme facteur de risque l’utilisation
d’hormones substitutives après la
ménopause, soit oestrogènes seuls,
soit association oestrogènes et
progestogènes. L’article de F. Clavel
étudie le lien entre l’utilisation de ces
hormones stéroïdiennes exogènes et
le métabolisme de l’IGF-1 qui peut
être impliqué dans le développement
du cancer du sein.
L’EXCÈS PONDÉRAL ET
L'ACTIVITÉ PHYSIQUE
ðEn ce qui concerne l’effet de l’ali-
mentation : on a, tout d’abord, dans
les différents pays, corrélé le risque
au pourcentage de l’énergie prove-
nant des graisses. On ne sait pas si ce
sont vraiment les graisses qui comp-
tent ou le changement de composi-
tion alimentaire en terme de macro-
nutriments, associé au développe-
ment économique. Les seules sour-
ces d’énergie de notre alimentation,
à part la faible contribution de l’al-
cool, se trouvent dans les glucides,
les lipides et les protides.
Les changements associés au déve-
loppement économique se trouvent
dans la composition alimentaire. On
voit sur les graphiques anciens qui
donnent la composition en macro-
nutriments en fonction du Produit
National Brut que, en pourcentage
d’énergie, les protides restent plus ou
moins constants, avec toutefois une
diminution des protides végétaux et
une augmentation des protides d’ori-
gine animale.
On note une augmentation de l’éner-
gie provenant des graisses animales
et des graisses séparées (margarine,
huiles…), mais une diminution des
graisses liées à des aliments d’origine
végétale.
En ce qui concerne les glucides, on
observe une réduction du pourcen-
tage d’énergie provenant globalement
des glucides mais une augmentation
des sucres. Il y a donc augmentation
des glucides rapidement digérés, ab-
sorbés par le sang avec des effets sur
la glycémie très différents de ceux
qui sont dus aux amidons, digérés
plus lentement.
Il y a donc un énorme changement
dans le type de glucides consommés.
Rien n’est encore prouvé sur la cause
alimentaire du risque de cancer du
sein mais le débat reste ouvert et per-
sonnellement, je crois que l’augmen-
tation de la protéine animale et, peut-
être, de l’indice glycémique des glu-
cides jouent un rôle important.
Des études déjà anciennes (Tannen-
baum, 1945), confirmées par d’autres
auteurs en 1982, montrent chez l’ani-
mal, une nette influence de la dispo-
nibilité de l’énergie alimentaire sur
le nombre de tumeurs développées.
Chez l’humain, on ne peut pas faire
ce genre d’expérimentation. Par con-
tre, on peut rechercher les indices
d’un effet de l’excès d’énergie ali-
mentaire sur le risque. De nombreu-
ses études démontrent une augmen-
tation très significative du cancer du
sein chez les femmes ménopausées
présentant un excès pondéral. Sur une
bonne centaine d’études, la compa-
raison de groupes de femmes méno-
pausées ayant un Index de Masse
Corporelle (Body Mass Index ou BMI)
supérieur à 27-28 kg/m2 ou inférieur
à 22 kg/m2 a mis en évidence une
augmentation du risque chez la
femme ménopausée jusqu’à un ni-
veau de BMI de l’ordre de 28 kg/m2
dans les pays développés.
On a également constaté que le gain
de poids entre la fin de l’adolescence
(18-20 ans) et différents points de
l’age adulte, permet de prédire l’aug-
mentation du risque chez la femme
ménopausée.
Plusieurs études ont établi une ré-
duction du risque chez les femmes
ayant une activité physique impor-
tante ou chez les femmes classées
comme plus actives par rapport à des
femmes moins actives. Malgré l’hété-
rogénéité de ces études, il est bien
admis qu’une activité physique sou-
tenue réduit le risque de cancer du
sein.
Au CIRC de Lyon Centre Internatio-
nal de Recherche sur le Cancer ), une
réunion d’experts a donné lieu en
2002 à la publication d’un ouvrage
portant sur "weight control and
physical activity" qui consigne tous
les résultats précédents (http://
HORMONES STÉROÏDIENNES
ðComme le souligne dans ce vo-
lume T. Key, un des mécanismes pos-
sibles par lequel l’obésité augmente
le risque de cancer du sein, est la
transformation dans le tissu adipeux,
d’androgènes en oestrogènes chez
les femmes ménopausées. Ainsi, les
femmes plus obèses ont plus d’oes-
trogènes dans le sang et probable-
ment une plus grande formation
d’oestrogènes dans les glandes mam-
maires elles-mêmes. Lorsque la con-
centration sanguine d’oestradiol to-
tal augmente en fonction du BMI, pa-
rallèlement la protéine de transport
qui lie les oestrogènes (SBP ou Sex
steroïd Binding Protein) diminue et
donc la fraction libre d’oestradiol
augmente. La figure 2figure 2
figure 2figure 2
figure 2 montre que les
taux d’oestradiol total et libre, ainsi
que des autres oestrogènes sont di-
rectement associés au risque de can-
cer du sein. Les taux d’androgènes
sont eux aussi associés avec le can-
cer du sein.
C’est vraisemblablement l’hormone
stéroïdienne qui a l’influence la plus
directe sur la prolifération cellulaire.
Le risque de développement de la
tumeur est donc en relation avec une
activité accrue au niveau des ovaires
et des glandes surrénales. Nous avons
déjà vu que les androgènes sont trans-
formés en oestrogènes dans le tissu
adipeux et représentent une source
importante d’oestrogènes. Sur le plan