Une réduction de l'expression du récepteur de l'IGF-1 chez des souris augmente leur résistance au stress oxydatif et leur espérance de vie La mutation de certains gènes chez les invertébrés ou chez les rongeurs est capable d'augmenter leur espérance de vie. Souvent, mais pas toujours, ces altérations génétiques aboutissent à un retard de croissance chez ces animaux qui restent plus petits durant toute leur vie, ont une activité métabolique réduite et présentent une faible capacité reproductive. Ces modèles de longévité accrue ont longtemps conforté la théorie développée ces dernières années par Tom Kirkwood en Grande Bretagne selon laquelle un individu a le choix entre se reproduire et mourir vite dans les périodes de prospérité, ou au contraire vivre longtemps mais en limitant sa descendance durant les périodes de disette. Ce modèle avait notamment pour vertu d'expliquer le gain de longévité des animaux soumis à une restriction alimentaire par rapport à ceux qui ont libre accès à la nourriture. Deux articles récents viennent apporter un éclairage nouveau sur ces mécanismes de vieillissement. L'un paru dans le journal Science relatait les effets de l'inactivation du gène du récepteur de l'insuline au niveau des cellules du tissu adipeux chez la souris. Ces animaux vivaient en moyenne 15 à 20 % de plus que les témoins alors qu'ils consommaient la même quantité de nourriture par jour. Leur activité métabolique loin d'être diminuée par cette inactivation était même augmentée lorsqu'elle était rapportée à la masse corporelle. Dans un autre article paru dans le journal Nature, une équipe française présente des résultats qui s'inscrivent dans le même courant de pensée et qui apportent des informations de toute première importance sur l'influence des voies métaboliques dans le contrôle de la longévité. Un des effets de l'hormone de croissance libérée par l'hypophyse est de stimuler les cellules hépatiques qui ellesmêmes libèrent dans la circulation sanguine l'IGF-1, ou Insulin-like growth factor. Cette molécule va ensuite se fixer sur des récepteurs à la surface des cellules cibles et stimuler la voie des tyrosines kinases qui contrôle principalement la croissance cellulaire. L'inactivation du gène du récepteur de l'IGF-1 est fatale chez les mutants homozygotes. En revanche, les animaux mutés hétérozygotes dont le taux de récepteur de l'IGF-1 est diminué de moitié par rapport aux souris témoins se développent harmonieusement durant les trois premières semaines de vie. Au delà, et après la période de sevrage, ces hétérozygotes accusent une léger déficit de croissance voisin de 8% chez le mâle et de 6% chez la femelle qui touchent tous les organes. Lorsqu'elles sont nourries à volonté les souris hétérozygotes porteuses d'un seul allèle fonctionnel du récepteur de l'IGF-1 vivent plus longtemps que les animaux témoins. Ce gain d'espérance de vie moyen est de 33% chez les femelles et de 16% chez les mâles. Cette différence se retrouve sur la durée de vie maximale pour les femelles (32 mois contre 27 mois chez les témoins), mais pas chez les mâles (proche de 33 mois dans les deux groupes). Le métabolisme glucidique évalué à partir des concentrations sanguines de glucose et d'insuline, ainsi que d'un test de tolérance au glucose, n'était pas sensiblement altéré par l'inactivation partielle du récepteur de l'IGF-1 chez les femelles, mais l’était partiellement chez les mâles. Leur température corporelle, leur prise alimentaire, leur activité physique ainsi que leur activité métabolique rapportée au poids corporel étaient comparables chez les souris hétérozygotes et chez les témoins. La fertilité des femelles estimée à partir de l’âge de la maturité sexuelle et la taille des portées n'était pas affectée par la réduction de l'expression du récepteur de l'IGF-1. La résistance au stress oxydatif déterminée en suivant la mortalité liée à une injection de paraquat, un herbicide connu pour générer des radicaux libres, était augmentée chez les souris femelles hétérozygotes mais inchangée chez les mâles, comparativement aux animaux témoins. Ces expériences montrent que chez les souris femelles la réduction de moitié de l'expression tissulaire du récepteur de l'IGF-1 augmente la résistance au stress oxydatif ainsi que leur espérance de vie sans modifier leur métabolisme énergétique ou glucidique ainsi que leur fertilité. B. Corman Successful Aging Database mâles femelles hétérozygote +/- témoin +/+ hétérozygote +/- témoin +/+ 6 mois 95 100 100 95 12 mois 90 90 75 75 18 mois 90 60 75 60 24 mois 70 20 50 35 30 mois 20 0 20 15 Pourcentage de survivants chez des souris mâles et femelles, porteuses d'un seul ou de deux allèles fonctionnels du récepteur de l'IGF-1. Holzenberger M, Dupont J, Ducos B, Leneuve P, Géloën A, Evens P, Cervera P and Le Bouc Y. IGF-1 receptor regulates lifespan and resistance to oxidative stress in mice. Nature, 2003, 421:182-186. ©2003 Successful Aging SA Af 107-2003