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Olivier Durrigol
lui rendre le rôle dominant qu’elle semblait avoir cédé
à
la Grande-
Bretagne. Suivant ses pas, Heinrich Hertz réalisa plusieurs expé-
riences en vue de comparer différentes théories électrodynamiques et
établit ainsi la supériorité de la théorie de James Clerk Maxwell. Dans
les années
1860,
la plupart des physiciens allemands abandonnèrent la
vieille électrodynamique de Weber et Neumann et adoptèrent la
version épurée du système de Maxwell que proposait Hertz. Comme
Ludwig Boltzmann le nota, cet épisode rappelait aux physiciens qu’il
était indispensable de garder une certaine souplesse d’esprit’.
La thermodynamique fondée par Rudolf Clausius et William
Thomson eut d’autres défis
à
relever. Développant la théorie cinétique
des phénomènes thermiques, Maxwell et Boltzmann militèrent pour
une conception statistique de l’irréversibilité, dans laquelle le second
principe de la thermodynamique n’était plus absolument vrai. Cette
théorie permettait une explication unifiée des phénomènes de
transport et des déterminations concourantes des paramètres molé-
culaires. La plupart des physiciens allemands la négligèrent
néanmoins et lui préférèrent une application macroscopique directe
des deux principes de la thermodynamique. Helmholtz lui-même
recommandait de ne pas formuler plus d’hypothèses physiques que
n’en nécessitait le problème
à
traiter
;
et l’on se souvient que Kirchhoff
enjoignait les physiciens
à
limiter leurs ambitions
à
la simple
description des phénomènes’.
1.- Helmholtz
à
Beseler,
28
mai 1868, cité dans Leo Koenigsberger,
Hermann von Helmholtz,
3
vol.,
Braunschweig, igoz-1903, vol.
2,115
;
Boltzmann,
“On
statistical mechanics”, 1904. in
Theoretical pbsics and
philosophicalproblems,
Dordrecht, i974,i59-i7z,
p.
162. Cf. C. Jungnickel et
R.
McCormmach,
intellectual
mastery
of
nature: Theoretical physicsfrom Ohm to Einstein,
vol.
I
:
The torch
of
mathematics,
1800-1870,
vol.
z
:
The
now
mighty theoretical physics,
1870-1925, Chicago, 1986
;
O.
Darrigol,
Eiectrodynamicsfrom
Ampère to Einstein,
Oxford,
zooo.
2.-
Helmholtz,
<<
Über Bewegungsstrome am polarisierten Platina
»,
1880,
in
Wissenschafliche Abhandlungen,
3
vol.,
Leipzig, 1882-95, vol.
I,
899-921,
p.
910;
G.
Kirchhoff,
Vorlesungen über mathematische Physik.
Mechanik,
Leipzig, 1876, préface. Cf.
S.
Brush,
The kind ofmotion we call heat: A history ofthe kinetic theory
of
gases in the 19th century,
2
vol., Amsterdam, 1976.
J.
Renn,
M
Einstein’s controversy with Drude and the
origin of statistical mechanics
:
A
new glimpse from the “love letters”
N
Archivefor the history ofexact
sciences,
51,1997,315-354.