Chimie Physiqu - Université Bordeaux 1

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Licence Sciences,
Sciences Technologies et Santé (LSTS)
Mention Chimie
D1CH5001
Chimie Physique
- Structure électronique -
Année universitaire 2011-2012
20
J.-C. Soetens ([email protected]
[email protected]
– 05.4000.2242),
05.4000.2242)
C. Crespos ([email protected]
[email protected]
– 05.4000.6310),
05.4000.6310)
Y. Hannachi ([email protected]
[email protected]
– 05.4000.6405),
05.4000.6405)
A. Fritsch, R. Petuya, J.-M.
J.
Leyssale
Chapitre I
Les modèles orbitalaires de structure électronique
La description de l’état quantique du nuage électronique nous permet de remonter aux
propriétés physiques et chimiques d’un atome ou d’une molécule. Cette description qui tend à
rendre compte de la répartition des électrons dans les différents états électroniques atomiques
ou moléculaires s’appuie sur des modèles de structure électronique.
Compte tenu de la complexité des problèmes abordés, différents modèles peuvent être utilisés,
en fonction des objectifs que l’on se donne (quantitatifs ou seulement qualitatifs) et des
propriétés que l’on souhaite étudier. Dans ce chapitre, nous abordons les modèles basés sur le
concept d’orbitale, qui sont les plus répandus. Ces modèles sont divers en ceci qu’ils font
appel à des orbitales de nature variée : atomique, moléculaire, voir intermédiaire. Ils
supposent également des architectures électroniques diverses faisant appel à des fonctions
d’onde polyélectroniques de structure plus ou moins complexe.
Ce chapitre a pour but de présenter une synthèse des modèles orbitalaires les plus utilisés en
chimie quantique. Une grande part de cet exposé est consacré aux méthodes dites des
« orbitales moléculaires » bien adaptées aux problèmes spectroscopiques et aux propriétés
structurales. On aborde également les modèles dits des « liaisons de valence » qui fondent les
concepts de mésomérie très important en chimie.
I. Orbitales et fonctions d’ondes
I.1. L’équation de Schrödinger polyélectronique
On se place ici à géométrie moléculaire fixe. Les états électroniques sont en principe
obtenus en résolvant l’équation de Schrödinger électronique pour l’ensemble des électrons de
la molécule. Hors cas d’école, on ne cherche en fait que des solutions approchées. En effet,
dés N ≥2 électrons l’équation devient insoluble analytiquement en raison du couplage des
mouvements des électrons. Il s’agit du problème à n corps bien connu en physique.
Soit l’hamiltonien électronique pour un système constitué de N électrons et M noyaux (en
unités atomiques) :
1
1
௘௟ = − ∆௜ – ௣ + 2
௜௣
௜௝
ே
ெ
௜ୀଵ
௣ୀଵ
Termes
monoélectroniques
ே
ே
௜ୀଵ ௝வ௜
Termes de répulsion
polyélectroniques
Ce hamiltonien décrit l’énergie cinétique des électrons, les termes d’énergie potentielle
d’attraction électrons/noyaux, ainsi que les termes d’énergie potentielle de répulsion
௘௟ Ψ௘௟ = ௘௟ Ψ௘௟
électrons/électrons. La résolution de l’équation de Schrödinger électronique fournit les énergies électroniques ௘௟ des différents états ainsi que les fonctions d’ondes
-1-
correspondantes Ψ௘௟ . A la géométrie fixée, on obtient ainsi le « spectre électronique » de la
molécule.
I.2. Fonctions d’onde polyélectroniques : modèles orbitalaires
Si le principe de résolution de l’équation de Schrödinger est simple, sa réalisation est
en général beaucoup plus difficile en raison du fait que (dés lors que le système est composé
de plus de deux électrons) cette équation ne possède pas de solutions analytiques. On a donc
besoin de définir des solutions approchées à partir d’objets mathématiques simples et
facilement manipulables, qui portent en eux des concepts utiles au chimiste et applicables
quelle que soit la nature des atomes et molécules considérés.
On se place alors dans le cas des modèles orbitalaires pour lesquels les fonctions d’onde sont
construites à partir de fonctions à un seul électron (les orbitales).
Prenons le cas simple d’un système polyélectronique pour lequel on néglige les termes de
répulsion électrons/électrons. L’hamiltonien électronique s’écrit alors comme une somme de
termes monoélectroniques (ou hydrogénoïdes) découplés agissant sur des variables distinctes
଴ pour le distinguer
(les coordonnées de chaque électrons). On note ce hamiltonien approché de l’opérateur exact :
1
଴ = − ∆௜ – ௣ = ℎ
௜
௜௣
2
ே
ெ
ே
௜ୀଵ
௣ୀଵ
௜ୀଵ
Les fonctions propres des ℎ
௜ sont connues, ce sont les spins-orbitales hydrogénoïdes notées :
௡,௟,௠,௠௦ = జ = జ జ ()
i représente les coordonnées spatiales ou de spin de l’électron i.
జ est l’orbitale, fonction des coordonnées d’espace de l’électron i.
జ = ou est la fonction de spin.
Les spins-orbitales hydrogènoïdes constituent les « briques » qui vont permettre de
଴
construire la fonction d’onde totale des électrons de l’atome. Les fonctions propres de peuvent en effet s’écrire sous la forme d’un produit de spin-orbitales :
Ψ1,2, … , = ௜ ே
௜ୀଵ
Dans ce modèle simplifié, la fonction d’onde est alors le produit de N spin-orbitales et
l’énergie totale électronique est simplement la somme des énergies individuelles ௧௢௧ =
∑ே
௜ୀଵ ௜ (somme des énergies hydrogénoïdes).
-2-
Démonstration dans le cas de deux électrons :
Hˆ 0 = hˆ1 + hˆ2
En tirant parti du fait que hˆ1 ne porte que sur les fonctions des coordonnées de
l'électron 1 et hˆ2 sur celles de l'électron 2, il vient :
(hˆ + hˆ )χ (1) ⋅ χ (2)
1
2
i
j
=
=
=
hˆ1 χ1 (1) ⋅ χ 2 (2) + hˆ2 χ 1 (1)⋅ χ 2 (2)
χ (2) hˆ χ (1) + χ (1)hˆ χ (2)
2
1 1
1
2
2
χ 2 (2)ε1 χ1 (1) + χ 1 (1)ε 2 χ 2 (2)
= (ε1 + ε 2 )χ1 (1) ⋅ χ 2 (2)
Le produit des spin-orbitales est donc bien fonction propre de hˆ1 + hˆ2 .
Dans ce modèle simplifié, il suffit de décrire chaque électron par une spin-orbitale
pour obtenir l'énergie totale électronique qui est la somme des énergies des spinorbitales (que l'on obtient exactement comme pour les ions hydrogénoïdes).
I.3. Fonctions d’onde polyélectroniques : contraintes et propriétés
I.3.1 L’indiscernabilité
L’équation de Schrödinger ne suffit pas à déterminer des états quantiques convenables.
On doit tenir compte aussi de la propriété d’indiscernabilité des électrons (conséquence du
principe d’incertitude d’Heisenberg).
Prenons le cas de 2 électrons décrits par une fonction Ψ(1,2). L’indiscernabilité des particules
impose que la densité de probabilité de présence soit la même si on intervertit les deux
particules :
|Ψ(1,2)|ଶ = |Ψ(2,1)|ଶ
Ce qui conduit aux deux possibilités :
Ψ1,2 = Ψ2,1
ou
Ψ1,2 = −Ψ2,1
La fonction d’onde doit donc être symétrique ou antisymétrique vis-à-vis de l’échange des
deux particules. Pour les électrons qui sont des fermions (particules de spin ½ entier comme
par exemple les électrons) la fonction doit être antisymétrique. On peut généraliser aux cas de
N électrons identiques, et on obtient pour n’importe quelle paire (q,p) parmi les N particules :
Ψ1,2, … , , … , , … , = −Ψ1,2, … , , … , , … , Pour deux électrons, le produit de spin-orbitales n'est pas convenable au sens de
l'indiscernabilité (réf. Chap I.2) :
χ1 (1) ⋅ χ 2 (2) ≠ − χ1 (2) ⋅ χ 2 (1)
Pour construire cette fonction d'onde antisymétrique dans le cas de deux particules, il suffit de
retrancher au produit des deux spins-orbitales ci-dessus, le même produit dans lequel les
-3-
coordonnées des deux électrons ont été permutées. En tenant compte de la constante de
normalisation, la fonction d'onde s'écrit alors :
Ψ(1,2) = 1
Dans ce cas, on a bien :
2 (χ1 (1) ⋅ χ 2 (2) − χ1 (2) ⋅ χ 2 (1))
Ψ(1,2) = −Ψ(2,1)
Cette fonction peut s'écrire sous la forme du déterminant d'une matrice dont les lignes et les
colonnes contiennent les spin-orbitales :
Ψ(1,2) =
1 χ1 (1) χ2 (1)
2 χ 1 (2) χ2 (2)
Ce type de fonction est appelé déterminant de Slater.
Par construction, le déterminant de Slater respecte la propriété d'antisymétrie de la fonction
d'onde, à condition que toutes les spin-orbitales occupées soient différentes. Dans le cas
contraire, le déterminant s'annule.
De manière générale, pour N électrons, le déterminant représentant la fonction d'onde est
construit en plaçant les spin-orbitales par colonne et les électrons par ligne, ou inversement :
χ1 (1) ... χN (1)
1
Ψ(1,2,...,N) =
...
...
...
N!
χ1 (N) ... χN (N )
Les déterminants de Slater sont notés de manière abrégée à l'aide des seuls symboles des spinorbitales :
Ψ(1,2,..., N ) = χ1 χ 2 ...χ N
Exemple : état fondamental de He
Ψ(1, 2) = | 1sα 1sβ | = | 1s 1s | = 1s2
Le symbole de l'orbitale surligné signifie que la fonction de spin attachée à l'orbitale
est β.
Conséquence : le principe de Pauli
La propriété d'antisymétrie de la fonction d'onde impose que les spin-orbitales
occupées soient toutes différentes. Dans le cas contraire, le déterminant s'annule.
Exemple pour deux électrons :
si χ1 = χ 2 = χ ,
Ψ(1,2) = 1
2 (χ (1) ⋅ χ (2) − χ (2)⋅ χ (1)) = 0
-4-
Il s'en suit donc que dans un déterminant, deux spin-orbitales ne peuvent être égales et
doivent donc différer par au moins un nombre quantique. Une orbitale ne peut donc
être au plus que doublement occupée (avec un spin α et un spin β). Cette manifestation
de l'indiscernabilité des électrons est appelée principe de Pauli.
I.3.2 Le spin
L’équation de Schrödinger électronique que nous utilisons ne porte pas sur la variable
spin. On pourrait en déduire que la description de cette variable dans les états quantiques est
sans importance, mais il n’en est rien : l’équation d’indiscernabilité porte, elle, sur toutes les
variables électroniques et impose donc une contrainte sur le spin des électrons qui induit un
effet énergétique. Nous n’abordons pas dans ce cours la théorie des états convenables de spin,
mais nous pouvons cependant illustrer cette question pour dégager quelques règles sur des cas
simples.
Considérons la configuration fondamentale 1s2 de l’atome d’hélium avec 2 électrons attachés
à la même orbitale 1s. Le déterminant de Slater correspondant s’écrit :
Ψ(1,2) = 1sα 1sβ = 1
2
[α (1)β (2) − α (2)β (1)] ×1s(1)1s(2)
Dans cette fonction, l’électron 1 et l’électron 2 ont autant de chance de se trouver avec un spin
α ou β et la fonction ci-dessus rend compte de cette équivalence nécessaire. La partie de spin
de la fonction :
1 [α (1)β (2) − α (2)β (1)]
2
est caractéristique d’une paire d’électrons appariés et indiscernables en spin.
Considérons maintenant la configuration excitée 1s 2s de l’atome d’hélium. Si on veut décrire
2 électrons de spins différents, 2 déterminants de Slater sont possibles :
Ψ1 (1,2) = 1sα 2sβ et Ψ2 (1,2) = 1sβ 2sα
Ces fonctions ne sont pas individuellement convenables au sens de l’équivalence en spin. En
effet, dans la première par exemple, l’électron attaché à l’orbitale 1s est systématiquement de
spin α. Pour obtenir un état convenable on doit combiner les deux déterminants. La fonction
décrivant les 2 électrons appariés est :
Ψ(1,2) =
1
[Ψ1(1,2) − Ψ2 (1,2)]
2
En développant cette fonction, on retrouve en effet la partie de spin d’une paire d’électrons
appariés. Il faut donc 2 déterminants dans ce cas pour construire un état convenable.
-5-
Ce type d’état de spin est appelé état « singulet ». On la visualisera par 2 flèches opposées
reliées par un trait (le trait est facultatif quand les électrons sont affectés à la même orbitale).
1
2
[α (1)β (2) − α (2)β (1)]
Pour deux électrons de même spin, les parties de spin possibles et leurs symboles sont :
1
2
[α (1)β (2) + α (2)β (1)]
α (1)α (2)
β (1)β (2)
Les 3 états correspondants sont de même énergie. On dit alors qu’on a affaire à un état
« triplet », triplement dégénéré.
I.3.3 La symétrie spatiale
Considérons la configuration spatiale 1s 2p de l’hélium dans un des états triplets (αα
par exemple). On peut alors utiliser une des trois orbitales 2p pour construire une fonction
indiscernable et convenable en spin. Mais pour un atome isolé, on doit rendre compte de sa
symétrie sphérique. Un déterminant tel que Ψ1 (1,2) = 1sα 2 pxα n’est donc pas convenable
car il implique une polarisation du nuage électronique dans une direction privilégiée (l’axe x
dans ce cas). On doit donc considérer simultanément les trois fonctions :
Ψ1 (1,2) = 1sα 2 pxα
Ψ2 (1,2) = 1sα 2 pyα
Ψ3(1,2) = 1sα 2 pzα
Les états convenables pour la symétrie sphérique sont 3 combinaisons linéaires de ces 3
déterminants. Il sont triplement dégénérés dans l’atome isolé. L’état triplet convenable pour
cette configuration est donc en fait 9 (3x3) fois dégénéré, du fait du spin et de la symétrie
spatiale.
I.3.4 L’invariance orbitalaire
La forme particulière du déterminant de Slater conduit à une propriété d’invariance
caractéristique des modèles orbitalaires.
Considérons 2 orbitales orthonormées
orthonormées suivantes :
ϕ1
et
ϕ 1' = cos ω ϕ 1 + sin ω ϕ 2
ϕ 2.
On construit les deux combinaisons
ϕ 2' = − sin ω ϕ1 + cos ω ϕ 2
où est un angle quelconque. On distingue alors deux cas :
-6-
– Le cas des couches complètes.
Prenons par exemple le cas de la configuration
ϕ 12 ϕ 22 . La fonction déterminantale s’écrit :
Ψ = ϕ 1 ϕ 1 ϕ 2ϕ 2
On peut alors montrer la stricte égalité :
Ψ = ϕ 1 ϕ 1 ϕ 2ϕ 2 = ϕ 1'ϕ 1'ϕ 2'ϕ 2'
∀ω
– Le cas des couches ouvertes de haut spin.
C’est le cas de la configuration ϕ 1 ϕ 2 dans un état de spin triplet.
La fonction déterminantale s’écrit :
Ψ = ϕ 1ϕ 2
On peut alors montrer la stricte égalité :
Ψ = ϕ 1 ϕ 2 = ϕ 1'ϕ 2'
∀ω
Autrement dit, pour ces deux types de structure électronique, on peut choisir une infinité de
représentations orbitalaires qui décrivent le même état quantique. L’allure d’une orbitale
moléculaire particulière ne porte donc pas de sens physique en elle même. Seul l’ensemble
des orbitales qui interviennent dans la fonction d’onde reflète la nature du nuage électronique.
I.4. Les différents modèles orbitalaires
Les fonctions d’onde modèles ne sont pas définies de manière unique, le choix des
orbitales qui interviennent dans leur construction dépend de la nature du problème, des
propriétés que l’on souhaite reproduire et du niveau de sophistication du modèle théorique. Il
y a donc de nombreux modèles orbitalaires mais on peut les regrouper en deux grandes
familles : le modèle des orbitales moléculaires (OM) et le modèle des liaisons de valence (VB
= valence bond).
I.4.1 Les modèle d’orbitales moléculaires (OM)
On peut les considérer comme une extension pour les molécules des modèles d’orbitales
atomiques pour les atomes. Ils utilisent comme fonction modèle un déterminant de Slater ou
plusieurs si nécessaires, construits à partir d’OM. Ils obéissent à la propriété d’orthogonalité :
௜∗ ௝ = 0 ≠ Dans cette famille, le modèle le plus connu et le plus utilisé est le modèle de Hartree et Fock
(modèle HF). Il utilise une seule configuration électronique pour bâtir la fonction d’onde
modèle. Prenons l’exemple de la molécule H2, on veut décrire son état fondamental par une
configuration dans laquelle on affecte les deux électrons à une seule orbitale moléculaire. Si
-7-
on appelle les atomes A et B, on peut construire une orbitale moléculaire liante par une simple
combinaison linéaire de deux orbitales hydrogénoïdes 1s. On appelle l’orbitale moléculaire
ainsi créée, σg :
௚ = (1஺ + 1஻ ) où N est une constante de normalisation
L’état fondamental de H2 correspond à la configuration [H2] : σg2 et la fonction d’onde s’écrit
à l’aide d’un déterminant de Slater comme suit :
ைெ 1,2 = ௚ ௚ =
=
1
√2
1 ௚ 1(1) ௚ 1(1)
√2 ௚ 2(2) ௚ 2(2)
௚ 1௚ 2 12 − 2(1)
On retrouve bien une partie de spin caractéristique d’une paire d’électrons appariés et
indiscernables en spin. Cette fonction traduit bien le fait que la liaison H-H soit vue comme
l’appariement de deux électrons sur l’orbitale moléculaire liante σg.
I.4.2 Les modèle de liaison de valence (VB)
Les modèles de liaisons de valence (VB) privilégient le caractère atomique d’une liaison
chimique. Les fonctions modèles sont construites à partir de déterminants de Slater contenant
des orbitales atomiques plus ou moins modifiées (hybridées). Ces modèles n’imposent pas
l’orthogonalité des orbitales. Les fonctions modèles sont souvent plus complexes qu’un seul
déterminant de Slater (ce sont des combinaisons de plusieurs déterminants) pour respecter les
propriétés de symétrie d’espace et de spin auxquelles doivent obéir les fonctions d’ondes (réf.
Chap I.3).Pour reprendre le cas de H2, la fonctions d’onde VB la plus simple est celle dans
laquelle on affecte chacun des deux électrons à une orbitale atomique 1s distincte, en
appariant les spins. Si on appelle les atomes A et B, la configuration électronique est [H2] :
1sA 1sB. La fonction d’onde correcte pour décrire cet état fondamental est obtenue par
combinaison linéaire de deux déterminants équivalents : |1sAα 1sBβ| et |1sAβ 1sBα| car il n’y
aucune raison d’affecter le spin a à l’électron de l’orbitale atomique 1sA plutôt que le spin b,
la seule contrainte est que les spins des deux électrons soient antiparallèles (appariés).
௏஻ 1,2 = |1஺ 1஻ | − |1஺ 1஻ |
1஺ 11஻ 2 + 1஺ 21஻ 112 − 2(1)
=
√2
La fonction comporte une partie de spin antisymétrique = paire d’électrons appariées. La
forme de la partie d’espace diffère de la forme proposée par le modèle des OM. Ceci aura une
incidence sur la détermination des différents observables, encore une fois chaque modèle est
adapté à un type d’observable donné. Par exemple la forme VB est utile dès lors que l’on
souhaite étudier les propriétés de mésomérie et de réactivité chimique. En ce qui concerne les
propriétés structurales et spectroscopiques on préférera utiliser la forme OM.
-8-
II. Détermination des états quantiques : méthode des variations
II.1. Principe des variations
Considérons un problème physique défini par son opérateur hamiltonien. L'équation
de Schrödinger peut être posée, mais on n'en connaît pas les solutions analytiques. On sait
cependant qu'il existe des solutions {Ψi } d’énergies {E i }et notamment un état fondamental
Ψ0 d'énergie E 0 (inconnue). On se propose de chercher une approximation de E 0 et Ψ0 .
On se définit alors une fonction d'onde approchée Ψ qui dépend d'un certain nombre de
paramètres ajustables αi appelés paramètres variationnels. Cette fonction n'est pas
rigoureusement solution de l'équation de Schrödinger. On ne peut lui associer qu'une valeur
moyenne de l'énergie qui est la moyenne quantique du hamiltonien sur l'état Ψ :
E =
∫ Ψ * Hˆ
ΨdV
Cette énergie approchée dépend donc aussi des paramètres α i .
Le principe des variations indique alors que l'énergie approchée est toujours
supérieure ou égale à l'énergie exacte de l’état fondamental :
E ≥ E0
Démonstration
On sait que l’état approché normé peut être décomposé sur la base des états Ψi
Ψ = ∑ ci Ψi
2
∑ ci
avec
i
=1
i
L’énergie moyenne est alors aussi décomposable comme moyenne sur les
énergies exactes
E =
∫ Ψ * Hˆ
ΨdV = ∑ ci E i
2
i
Il vient alors :

2
E − E 0 = E − ∑ ci E 0 = ∑ ci
i

i
2
(Ei − E 0 )
Dans cette somme Ei − E 0 ≥ 0 car E 0 est l’énergie de l’état fondamental. La
somme est donc positive ou nulle. Il n'y a égalité entre E et E 0 que si la fonction
d'onde approchée est la fonction exacte. En conséquence, la meilleure approximation
de l'état fondamental (le meilleur jeu de paramètres α i ) est celle qui conduit à une
énergie minimale.
L’application du principe des variations consiste alors à chercher le minimum de
l’énergie moyenne par rapport aux paramètres variationnels. On remplace alors la résolution
d’une équation différentielle par la minimisation d’une fonction intégrale.
-9-
Si on applique le principe des variations aux électrons des atomes et molécules, on
choisit le plus souvent comme fonction d'onde approchée un déterminant de Slater (ou une
combinaison de déterminants si nécessaire) :
1
Ψ(1,2,...,N) =
N!
χ1 (1)
...
...
...
χN (1)
...
χ1 (N) ... χN (N )
Les paramètres variationnels sont contenus dans les orbitales. La "qualité" de cette
fonction d'onde peut donc être notablement améliorée si l'on cherche à optimiser les
orbitales dans le déterminant, c'est-à-dire à adapter les orbitales à la nature de l'atome ou de
la molécule. Les orbitales que l’on utilise, manipule et interprète sont alors le résultat de cette
optimisation.
II.2. Méthode des variations linéaires
Considérons le cas de fonctions d’ondes moléculaires modèles qui s’expriment sous la
forme de combinaisons linéaires d’orbitales atomique (modèle LCAO « Linear Combination
of Atomic Orbitals ») et dont les coefficients variationnels sont exclusivement les coefficients
des combinaisons linéaires. Dans ce cas précis, on peut rationnaliser la démarche
variationnelle sous une forme simple.
Soit une équation aux valeurs propres insoluble de la forme :
ˆ Ψ = EΨ
H
Hˆ est un opérateur hermitique. On cherche une solution approchée Ψ sous forme de
combinaison linéaire normée de M fonctions connues Ωi :
M
Ψ = ∑ c iΩ i
i=1
Les Ωi sont normées mais non orthogonales :
∫ Ω*i Ωi dV = Sii = 1
∫ Ω*i Ω j dV = Sij ≠ 0
La norme de la fonction modèle est :
∫ Ψ * ΨdV = ∑ ci* ci Sii + ∑ ∑ ci* c j Sij = 1
On note
(1)
i≠ j
i
∫ Ω*i Hˆ Ω j dV = H ij . L’hermiticité de
H ij* = H ji
- 10 -
∀i, j
Hˆ se traduit par les égalités :
L’énergie moyenne est décomposable
E =
∫ Ψ * Hˆ
ΨdV = ∑ ci* ci H ii + ∑ ∑ ci* c j H ij
i≠ j
i
Travaillant avec une fonction qui peut varier par ses paramètres variationnels, on doit
veiller à ce qu’elle soit toujours normée. La contrainte de normalisation (équation (1))de Ψ
peut s’écrire :


1 − ∫ Ψ * ΨdV = 1 − ∑ ci* ci Sii + ∑ ∑ ci* c j Sij  = 0
i≠ j
i

Pour trouver le minimum de E sous contrainte de normalisation, on utilise la
méthode des multiplicateurs de Lagrange. Le lagrangien s’écrit alors :
 

*
*
L = E + λ1 − ∑ ci ci + ∑ ∑ ci c j Sij  où λ est le multiplicateur de Lagrange
  i
i≠ j

C’est l’énergie augmentée de la contrainte qui est nulle si elle est vérifiée. On peut
alors minimiser L sans contrainte pour obtenir l’énergie minimale sous la contrainte de
normalisation de Ψ . On se contente en fait de rechercher un extremum :
∂L
=0
∂ck
∀k
et
∂L
=0
∂cl*
∀l
Dans toutes les expressions, il faut considérer que les coefficients et leurs complexes
conjugués sont des variables distinctes.
Pour M fonctions de base , on obtient donc deux ensembles de M équations de la
forme :


ck* H kk + ∑ ci* H ik − λ ck* S kk + ∑ ci* Sik  = 0 ∀k


i≠k
i≠k


c l H ll + ∑ c j H lj − λ c l Sll + ∑ c j Slj  = 0 ∀l
j≠l

j≠l

Ces deux systèmes sont conjugués l’un de l’autre car :
H ij* = H ji
∀i, j
Sij* = S ji
- 11 -
∀i, j
On obtient donc M équations, que l’on peut représenter sous la forme matricielle
suivante :
ℍℂ = λॺℂ
ℍest la matrice hamiltonienne d’éléments H ij
est la matrice de recouvrement d’éléments Sij
ℂest le vecteur des coefficients d’éléments ci
i, j ∈ [1, M ].
i, j ∈ [1, M ]
i ∈ [1, M ]
La résolution de l’équation aux valeurs propres se transforme donc en celle d’une
équation matricielle dans laquelle tous les éléments de matrice sont des intégrales. Comme les
matrices sont de dimension MxM on obtient en fait M solutions distinctes, c’est à dire M
vecteurs ℂ associés à M valeurs distinctes de λ.
Les H ij avec i ≠ j sont assimilés aux énergies d’interaction entre les fonctions Ωi et Ω j .
Les H ii sont assimilés aux énergies des fonctions Ωi .
Les vecteurs ℂ décrivent les différents états quantiques, combinaisons linéaires des fonctions
de base Ωi . A chaque vecteur solution ℂ௡ on associe son énergie λ n . Les λ n sont les
énergies des états quantiques, ce sont ces valeurs qu’il faut mettre en rapport avec les énergies
mesurables. Les H ii sont, elles, des intermédiaires de calcul ; elles ne correspondent
généralement pas à des grandeurs mesurables.
Application simple : description de l’ion H2+ dans le modèle LCAO
(modèle de type « orbitales moléculaires »)
Dans le cas, de l’ion H2+ la fonction d’onde modèle est une orbitale moléculaire. On la
choisit comme une combinaison linéaire de 2 orbitales atomiques 1s, supposées connues, des
deux hydrogènes notés A et B. On écrit alors :
Ψ = ܿ஺ 1‫ݏ‬஺ + ܿ஻ 1‫ݏ‬஻
En appliquant la méthode des variations linéaires, les états quantiques électroniques et les
niveaux d’énergies associés sont solutions du système d’équations pouvant s’écrire sous
forme matricielle :
ℍℂ = εॺℂ
ou encore,
஺஺
஻஺
1
஺஻ ஺
= ஻஻ ஻
஻஺
஺஻ ஺
1
஻
HAB est négatif, il représente une énergie de couplage entre les deux orbitales atomiques.
Compte tenu de l’équivalence entre les deux atomes d’hydrogène, HAA=HBB. De même
SAB=SBA=S intégrale de recouvrement.
- 12 -
On peut montrer (voir TD) que les deux solutions de cette équation matricielle sont de la
forme :
Ψଵ ଵ
ඥଶሺଵାୗሻ
1s୅ 1s
1 ୆
Ψଶ et
Les énergies associées à ces deux états sont : ଵ ଵ
ඥଶሺଵିୗሻ
ுಲಲ ାுಲಳ
ଵାௌ
1s୅ 1ss୆ et ଶ ுಲಲ ିு
ି ಲಳ
ଵି
ିௌ
Le fait que les coefficients soient égaux ou opposés résulte de la symétrie de la matrice
hamiltonienne qui ne fait qu’exprimer la symétrie du problème : si on intervertit A et B on ne
change pas la molécule.
Diagramme de corrélation
∆E2
∆E1
Le diagramme de corrélation n’est cependant pas symétrique, l’état Ψଶ est plus déstabilisé que
l’état Ψଵ n’est stabilisé. C’est là un effet du recouvrement des orbitales atomiques.
∆ଵ ஺஺ ஺஻
஺஻ ஺஺
஺஺ 1
1
∆ଶ ஺஺ d’où
஺஺ ஺஻ ஺஻ ஺஺
1
1
ଵାௌ
∆ଶ ଵିௌ ∆ଵ
dans le cas présent 0 1 donc ∆ଶ ∆ଵ
Si on considère un recouvrement des orbitales S non nul on note que le terme de stabilisation
de Ψଵ et plus faible que le terme de déstabilisation
déstabi
de Ψଶ .
- 13 -
- 14 -
Chapitre II
Le modèle Hartree-Fock
Le modèle Hartree-Fock (HF), est basé sur le principe des variations et permet de
déterminer les orbitales et les énergies associées d'un atome ou d'une molécule, en tenant
compte de manière moyenne des interactions électrostatiques entre les électrons. Les
méthodes numériques qui en découlent sont couramment utilisées en laboratoire dans les
programmes de modélisation quantique. Ce modèle est ainsi au "cœur" des techniques de la
chimie quantique moderne.
I. Principe du modèle Hartree-Fock
I.1. Fonction d’onde
Le modèle Hartree-Fock consiste à déterminer la meilleure fonction d’onde Ψ
décrivant l’état fondamental d’une molécule sous la forme d’un déterminant de Slater unique.
Pour un système comportant 2N électrons, on a :
Ψ=
1
(2N)!
φ1 (1)
φ1 (2)
φ 2 (1)
φ 2 (2)
...
...
...
...
...
φ 2N (1)
φ 2N (2)
...
φ1 (2N) φ 2 (2N) ... φ 2N (2N)
où les fonctions φi (ν ) sont les spin-orbitales, formées par le produit d’une fonction orbitale
ϕ i (x ν , yν , zν ) des coordonnées d’espace de l’électron ν et d’une fonction Θ(σ ν ) de la
coordonnée de spin de l’électron ν (cette dernière ne pouvant prendre que deux valeurs,
Θ(σ ν ) = α ou β ). Dans ce modèle, les orbitales sont orthogonales.
I.2. Le modèle restricted Hartree-Fock
D’après le principe des variations, la meilleure fonction
minimale l’expression de l’énergie électronique :
E=
Ψ est celle qui rend
∫ ΨHˆ Ψdv
espace
où l’intégration porte sur toutes les coordonnées des électrons.
Pour une configuration à couches complètes, les 2N électrons de la molécule peuplent
les N orbitales orthonormées de plus basse énergie, avec appariement des spins sur chaque
orbitale.
- 15 -
Dans ce cas, l’énergie Restricted Hartree-Fock (RHF), peut s’écrire sous la forme :
N
N
N
i=1
i=1 j=1
E = ∑ 2Ii + ∑ ∑ (2J ij − K ij )
avec :
Ii = ∫ ϕ i (ν )hˆ (ν )ϕ i(ν )dVν
J ij =
K ij =
∫
∫
ϕ *i (µ)ϕ i (µ)ϕ *j (ν )ϕ j (ν )
rµν
dVµ dVν =
ϕ *i (µ)ϕ i (ν )ϕ *j (ν )ϕ j (µ)
rµν
dVµ dVν =
∫ ϕ *j (ν ) Jˆi (ν )ϕ j (ν )dVν = ∫ ϕ *i (µ)Jˆ j (µ)ϕ i (µ)dVµ
∫ ϕ *j (ν )Kˆ i (ν )ϕ j (ν )dVν = ∫ ϕ *i (µ)Kˆ j (µ)ϕ i (µ)dVµ
L’intégrale monoélectronique Ii peut être interprétée comme l’énergie moyenne d’un
électron décrit par l’orbitale ϕ i dans le champ du noyau seul (énergie cinétique de l’électron +
attraction coulombienne).
L’intégrale coulombienne Jij représente l’énergie d’interaction de Coulomb entre les
2
2
densité de charge électronique ϕ i (µ) et ϕ j (ν ) .
L’intégrale d’échange Kij, n’a pas d’équivalent classique : elle provient de la
condition d’antisymétrie de la fonction d’onde. Elle mesure l’énergie due à l’échange de deux
électrons entre les orbitales ϕ i et ϕ j .
Les deux dernières relations définissent de manière intégrale les opérateurs de
Coulomb Jˆi et d’échange Kˆ i . L’action de ces opérateurs sur une orbitale ϕ j (ν ) est donnée
par :
 ϕ *(µ)ϕ (µ)

i
Jˆi (ν )ϕ j (ν ) =  ∫ i
dVµ ϕ j (ν )
rµν


*
 ϕ (µ)ϕ (µ)

j
Kˆ i (ν )ϕ j (ν ) =  ∫ i
dVµ ϕ i (ν )
rµν


ˆ
Ki échange un électron entre les orbitales ϕ i et ϕ j .
I.3. Equations de Fock
Le problème consiste à chercher les meilleures orbitales moléculaires orthonormées,
c’est-à-dire celles qui minimisent l’énergie électronique E. En utilisant la méthode des
variations (minimisation d’une fonction sous contrainte), on peut montrer que les orbitales
moléculaires optimisées sont fonctions propres de l'opérateur de Fock Fˆ :
Fˆϕ k = ε kϕ k
- 16 -
avec :
N
Fˆ = hˆ + ∑ 2Jˆ j − Kˆ j
j =1
Ces équations sont appelées équations de Fock. Les valeurs propres εk sont les
énergies associées aux orbitales ϕ k . L'opérateur de Fock décrit le mouvement d'un électron
dans le champ du noyau (terme hˆ ), mais aussi dans le champ électrostatique moyen des
autres électrons (dernier terme). Ce champ moyen dû aux autres électrons joue le rôle d’écran
à l’attraction du noyau contenue dans hˆ .
L'équation de Fock n’est cependant pas une équation aux valeurs propres au sens
habituel du terme, car l’opérateur de Fock est lui-même fonction des orbitales ϕk que l'on veut
déterminer. La résolution de ce type d’équation nécessite donc un procédé itératif décrit par
les étapes ci-dessous :
-
On part d’un jeu d’orbitales d'essai ϕ i
(1)
On construit l'opérateur Fˆ .
(0)
(0)
et on calcule l'énergie totale E .
On résout les équations de Hartree-Fock pour obtenir un nouveau jeu d’orbitales ϕ i .
(2)
(1)
On calcule une nouvelle énergie totale E et un nouvel opérateur de Fock Fˆ .
(1)
Tant que l’énergie totale E ne converge pas vers une limite (condition de stationnarité)
on recommence le processus. Lorsque cette condition est satisfaite, il y a cohérence (égalité)
entre les orbitales qui ont été utilisées pour construire l’opérateur de Fock et celles que celuici a permis de déterminer. Cette méthode itérative, qui permet de déterminer l’énergie
potentielle moyenne décrivant le mieux le système étudié, est appelée méthode du champ
auto-cohérent, ou, en anglais, Self Consistent Field (SCF). Les orbitales convergées,
solutions de l’équation de Fock convergées sont appelées orbitales canoniques Hartree-Fock.
Le modèle de Hartree-Fock conduit à la résolution rigoureuse du problème
correspondant à un système hypothétique dans lequel les interactions 1/rµν sont remplacées
par les interactions électrostatiques moyennes données par les opérateurs Jˆi et Kˆ i . L’énergie
ainsi obtenue est cependant supérieure à l’énergie exacte. La différence entre ces deux
énergies est appelée énergie de corrélation.
II. Energies orbitalaires et énergie électronique
II.1. Non additivité des énergies orbitalaires
L’énergie de l’orbitale ϕ i (ν ) est à la fois une valeur propre et une valeur moyenne.
Elle est donnée par :
εi = ∫ ϕ *i (ν ) Fˆ (ν )ϕ i (ν )dVν
- 17 -
En remplaçant l’opérateur de Fock par son expression en fonction des opérateurs mono
et biélectroniques, et compte tenu de la condition de normalisation de l’orbitale ϕ i (ν ) , on
montre facilement que :
εi = Ii + ∑ (2Jij − K ij )
j
Comme dit plus haut, l’opérateur de Fock peut être considéré comme l’opérateur
hamiltonien effectif décrivant l’électron ν dans le champ électrostatique moyen des autres
électrons. La quantité εi peut donc être assimilée à l’énergie moyenne de cet électron au sein
du nuage électronique. Il est cependant important de constater que chaque terme εi tient
compte des interactions électrostatiques (termes de Coulomb et d’échange) entre l’électron i et
les autres électrons du système. Si on sommait ces énergies, on compterait 2 fois l’interaction
pour chaque paire d’électron. Par conséquent, l’énergie électronique totale n’est pas égale à la
somme des énergies orbitalaires, mais à la quantité :
E = ∑ 2εi − ∑ ∑ (2J ij − K ij )
i
i
j
II.2. Théorème de Koopmans
Si une molécule à couches complètes (comportant 2N électrons) est ionisée, elle est
caractérisée par un nouvel opérateur hamiltonien et une nouvelle fonction d’onde. En
supposant que les orbitales moléculaires de l’ion sont identiques aux orbitales de la molécule
neutre, on peut écrire la fonction d’onde approchée de l’ion sous la forme :
Ψ+ =
1
(2N −1)!
φ1 (1)
φ1 (2)
φ 2 (1)
φ 2 (2)
...
...
φ 2N −1 (1)
φ 2N −1 (2)
...
...
...
...
φ1 (2N −1) φ 2 (2N −1) ... φ 2N −1 (2N −1)
De la même manière que pour la molécule neutre, on peut montrer que l’énergie
correspondante peut s’écrire sous la forme :
N −1
N −1 N
i=1
i=1 j =1
E + = ∑ 2Ii + IN − ∑ ∑ (2J ij − K ij )
L’énergie d’ionisation (EI) de la molécule est alors :
N
EI = E + − E = −IN − ∑ (2J Nj − K Nj ) = −εN
j =1
εN peut donc être assimilée en valeur absolue à l’énergie d’ionisation mesurable de la
molécule. On peut généraliser à toutes les orbitales occupées : εi donne en valeur absolue
l’énergie d’ionisation EI (φ i ) correspondant à l’éjection d’un électron de l’orbitale φ i .
Cette association porte le nom de théorème de Koopmans. Il associe une grandeur
- 18 -
expérimentale à l’énergie des orbitales. En pratique, les énergies d’ionisation moléculaire
sont souvent évalués de cette manière. Il faut cependant bien avoir en tête qu’il ne s’agit
que d’une approximation, qui ne tient pas compte des perturbations inévitables du nuage
électronique dues au changement du nombre d’électrons lors de l’ionisation. Elle est
cependant raisonnable dans la plupart des cas. De façon générale, l’énergie d’ionisation
donnée par le théorème de Koopmans est supérieure à celle que l’on obtiendrait en
optimisant séparément les orbitales dans la molécule et le cation et en calculant la
+
différence des énergies SCF totales EISCF = E SCF
− E SCF , car l’optimisation des OM dans
+
le cation abaisse l’énergie E . Mais d’un autre coté, l’énergie d’ionisation exacte est aussi
supérieure à EISCF car l’énergie de corrélation est plus grande pour la molécule que pour
le cation (un électron de plus). C’est cette compensation d’effets qui rend l’approximation
de Koopmans efficace pour un grand nombre de molécules.
III. Développement des OM sur une base : méthode de Roothan
III.1. Développement sur une base de fonctions atomiques
Roothan a proposé en 1959 de développer les orbitales ϕ i sur une base de fonctions
χ p préalablement choisie :
M
ϕ i (ν ) = ∑ Cpi χ p (ν )
p
où M est la dimension de la base et les facteurs Cpi sont les coefficients du développement. La
détermination de ϕ i revient alors à chercher les valeurs optimales des paramètres variationnels
Cpi.
En toute rigueur, la base de fonctions χ p doit être une base complète (M = ∞) . Dans
ce cas seulement les calculs aboutissent à la fonction d'onde ψ correspondant à l'énergie totale
EHF la plus basse possible. Cette valeur limite EHF est appelée limite Hartree-Fock.
En pratique, il est bien entendu impossible de mener un calcul en utilisant une base de
dimension infinie. Cependant, on sait à l'avance que les OM ϕi ne prendront des valeurs
importantes qu'au voisinage des atomes ou sur les liaisons interatomiques. On peut donc
restreindre le nombre de fonctions de base, et utiliser une base de dimension M finie, à
condition de choisir des fonctions de base décrivant les orbitales des différents atomes de la
molécule (on notera que le nombre de fonctions de base doit être au moins égal au nombre N
d’orbitales ϕ i de manière à pouvoir accommoder tous les électrons).
III.2. Les différents types de base
L’énergie obtenue par la méthode de Roothan est toujours supérieure à la valeur limite
EHF, à moins d’utiliser une base de dimension infinie, ce qui est inconcevable en pratique. La
qualité du résultat dépend donc directement du nombre et de la nature des fonctions χ p . On
utilise principalement deux types de fonctions de base pour les calculs numériques : les
orbitales de Slater et les fonctions gaussiennes.
- 19 -
Bases de Slater
Les fonctions de Slater sont directement déduites des orbitales hydrogénoïdes (qui sont
les solutions exactes pour l'atome d'hydrogène), en remplaçant dans les expressions
hydrogénoïdes la charge Z du noyau par une charge effective α ( α < Z ) traduisant l'effet
d'écran dû à la présence de plusieurs électrons sur l'atome. Elles sont de la forme (en
coordonnées sphériques) :
χ Sp (r,θ,ϕ) = N.Ylm (θ,ϕ).r (n−1) .exp(−αr)
L'inconvénient de ce type de fonctions est que le calcul des intégrales biélectroniques
Jij et Kij est très complexe dès que les orbitales atomiques intervenant dans ces intégrales sont
centrées sur des atomes différents.
Bases de gaussiennes
Pour contourner ces difficultés calculatoires, on utilise des fonctions gaussiennes, dont
l'expression (en coordonnées sphériques) est donnée par :
χ Gp (r,θ,ϕ) = N.Ylm (θ,ϕ).r (2n− 2−l ) .exp(−αr 2 )
L'usage des fonctions gaussiennes s'est imposé dans la plupart des programmes
standards de chimie quantique, car le calcul des intégrales biélectroniques peut se faire de
manière analytique. Elles ont par contre le désavantage d'être moins bien adaptées à la
description de la forme des orbitales atomiques, notamment sur deux points :
i) au noyau (r = 0), la dérivée d’une fonction gaussienne est nulle, alors qu’une fonction de
Slater présente une discontinuité (couramment appelée « CUSP ») ;
ii) à grande distance ( r → ∞ ), une fonction gaussienne décroit plus rapidement qu’une
fonction de Slater. L’extension de la fonction d’onde est par conséquent moins bien décrite.
Pour obtenir une précision équivalente, une fonction de Slater doit être remplacée par
plusieurs fonctions gaussiennes. La dimension de la base croît donc très rapidement avec la
taille de la molécule. Afin de limiter le nombre de paramètres variationnels à déterminer, une
solution consiste à fixer préalablement les rapports entre certains coefficients Cpi, c'est-à-dire
construire une nouvelle base de fonctions, appelées contractées, de la forme :
np
χ (x,y,z) = ∑ A pq χGq (x, y,z)
CG
p
q =1
χqG (x, y,z) est appelée primitive. Les coefficients A pq sont les coefficients de
CG
G
contraction de l'orbitale χ p (x,y,z) sur la base des primitives χ q (x, y,z) , et restent constants
au cours du processus itératif. La qualité d'une base d'orbitale dépend donc :
- du nombre de fonctions utilisé (nombre de contractées et nombre de primitives par
contractée)
- du choix des paramètres intervenant dans l’expression d’une fonction contractées α et A pq
- 20 -
Il existe différents types de bases standardisées auxquelles se rattache une
nomenclature ésotérique reflétant la qualité de la base. Le choix d’une base plutôt qu’une
autre repose souvent sur les compromis à faire entre les ressources calculatoires disponibles et
la sophistication du niveau de calcul.
L’ensemble des modèles reposant sur le développement des orbitales sur des bases de
fonctions et pour lesquels les calculs sont effectués explicitement sont appelés modèles ab
initio. Ces modèles conduisent à des propriétés calculées comparables quantitativement aux
propriétés mesurées. En raison de la complexité des calculs, un bon accord quantitatif théorieexpérience n’est envisageable que pour des molécules de petite taille. Pour des systèmes plus
importants, on se contente d’un accord qualitatif et de lois de tendances correctes.
III.3. L’approximation LCAO
L’approximation LCAO consiste à écrire les OM comme des combinaisons linéaires
des orbitales atomiques des différents atomes constituant la molécule. Chaque OA est
déccrite par une fonction de Slater unique. Il s’agit donc d’un cas particulier du formalisme
de Roothan. Le développement sur une base de M orbitales atomiques donne M orbitales
moléculaires :
M
ϕ i (ν ) = ∑ Cpi χ p (ν )
p
III.4. Equations de Roothan
En tenant compte du développement des orbitales moléculaires sur la base des
fonctions χ p , le système d’équations de Fock résultant de l’application des variations linéaires
comporte M équations (M=dimension de la base). Il peut s’écrire sous forme matricielle :
FC = εSC
Cette équation matricielle doit être résolue à chaque itération, jusqu’à convergence. La
matrice F est représentative de l’opérateur de Fock dans la base des fonctions χ p et contient
les intégrales de Fock :
Fpq =
∫χ
*
p
(ν ) Fˆ (ν ) χ q (ν )dVν
S est la matrice des recouvrements, avec pour éléments : S pq =
C contient les coefficients Cpi.
∫χ
*
p
(ν ) χ q (ν )dVν .
Ce système d’équations admet des solutions non triviales si :
det F − εS = 0
Cette équation de compatibilité est un polynôme en ε de degré M dont les M racines
sont réelles par suite de l’hermiticité de l’opérateur de Fock. Pour chacune des racines ε, on
- 21 -
peut déterminer les coefficients Cpi correspondant en s’aidant des relations de normalisation
des orbitales ϕ i . On obtient ainsi M orbitales orthonormées (propriété également due à
l’hermiticité de l’opérateur de Fock). Il est important de noter que si M > N (nombre
d’électrons = 2N), seules N de ces orbitales, correspondant aux N plus petites valeurs de ε,
seront utilisées pour former le déterminant de Slater. Il s’agit des orbitales occupées. Les M-N
autres orbitales sont un sous-produit du calcul sans sens physique immédiat. On les appelle
orbitales « virtuelles ». Elles sont utilisées entre autres dans les modèles dits « multiconfigurationnels » qui permettent d’affiner la fonction d’onde en l’écrivant sous la forme
d’une combinaison linéaire de déterminants de Slater.
OM virtuelles
BV
HO
Couches complètes
Spectre énergétique des OM : les orbitales doublement occupées forment
les couches complètes, les orbitales vides sont dites virtuelles. L’OM la plus
Haute Occupée est appelée HO ; la plus Basse Vacante est la BV.
IV. La densité électronique
La méthode Hartree-Fock-Roothan permet d'accéder aisément à la densité électronique
globale ρ du nuage électronique de la molécule, définie comme la densité de probabilité de
présence d'un électron quelconque, quelle que soit la position des autres. Cette densité
électronique est mesurable par exemple à l'aide de techniques rayons X. Elle s’écrit comme la
somme des densités orbitalaires :
r M
r
r
ρ(r ) = ∑ ni ϕ *i (r )ϕ i (r )
i=1
où ni est le nombre d'électrons (0, 1 ou 2) sur l'OM ϕi . En intégrant la densité sur tout
l’espace, on retrouve le nombre d’électrons :
M
M
∫ ρ(r )dv = ∑ ni ∫ ϕ *i (r )ϕ i (r ) = ∑ ni = N
r
espace
r
i=1
espace
- 22 -
r
i=1
IV.1. La matrice densité de premier ordre
Si on remplace les orbitales par leurs développements sur la base des fonctions
on obtient une somme de contributions de paires :
M
ρ=∑
M M
χ p,
M M
ni
C *pi C qi
i=1
p=1q=1
∑∑
χ p χ q = ∑ ∑ D pq χ *p χ q
*
p=1q=1
où les termes D pq sont les éléments de la matrice densité de premier ordre dans la base des
fonctions
χp :
M
D pq = ∑ ni C *pi C qi
i =1
Cette décomposition de la densité électronique en contributions de paires exprime les
multiples effets d’interférences entre fonctions atomiques qui conduisent à l’établissement du
nuage électronique de la molécule.
IV.2. Analyse de population de Mulliken
En intégrant la densité, on peut faire apparaître un découpage du nombre d’électrons
disponibles entre toutes les paires χ p et χ q .
M M
M M
p=1q=1
p=1q=1
∫ ρ(r )dv = ∑ ∑ D pq ∫ χ *p χ q dv = ∑ ∑ D pq S pq = N
r
espace
Le produit D pq S pq donne la contribution du recouvrement entre les fonctions
χ p et
χ q à la densité électronique. Si les fonctions sont centrées sur le même atome, la contribution
est dite atomique. Si les fonctions χ p et χ q appartiennent à deux atomes différents, D pq S pq
est une contribution de liaison. On peut réorganiser la double somme pour faire apparaître une
somme des contributions de chaque fonction χ p .

M M
M
p =1q =1
p =1
∫ ρ(r )dv = ∑ ∑ D pq S pq = ∑  D pp +
r
espace

D
S
∑ pq pq  =
q≠ p

M
M
∑ (Q p )= N
p =1
Q p est la population électronique de Mulliken associée à la fonction χ p . Cette
quantité est associée à la population moyenne de
les orbitales ϕ i
- 23 -
χ p dans un nuage électronique décrit par
IV.3. Charge atomique nette
La somme des populations de Mulliken des fonctions χ p centrées sur un même atome
A permet d’obtenir la population électronique moyenne de l’atome :
nA =
∑Qp
p ∈A
La charge partielle ou charge nette de l'atome A dans la molécule est alors (en nombre
d'électrons) :
δA = ZA − n A
Si δA < 0 , A se charge négativement. C'est le signe que le nuage électronique de la
molécule est déformé vers A. La méthode Hartree-Fock permet ainsi de prévoir l'existence
d'un déplacement de charge et donc d'un moment dipolaire. L'existence de ce moment
dipolaire reflète la différence d'électronégativité des deux atomes, qui est intimement liée à la
nature et à l'énergie relative des fonctions atomiques.
IV.4. Cas particulier : on néglige le recouvrement entre OA
χ p sont négligés, les expressions
ci-dessus se simplifient. La population moyenne d’une fonction χ p s’écrit alors comme la
Dans le cas où les recouvrements Spq entre fonctions
somme des modules au carré des coefficients Cpi, pondérés par les occupations d’OM :
M
M
Qp = Dpp = ∑ n iC C pi = ∑ n i C pi
*
pi
i=1
2
i=1
V. Analyse des couplages entre fonctions atomiques
V.1. Nature liante, non liante ou anti-liante d’un couplage
La répartition électronique optimale dans la molécule rend compte de l’apparition des
liaisons chimiques. Si on considère une liaison particulière, on dit que le nuage a un effet liant
si les effets d’interférence sont globalement constructifs sur cette liaison. En analysant les
effets d’interférence sur chaque paire de fonction χ p et χ q , on dit alors que :
•
le couplage entre les deux fonctions
χ p et χ q est liant si l’effet d’interférence est
constructif, c’est à dire le signe du produit D pq S pq est positif
•
le couplage entre les deux fonctions est antiliant si l’effet d’interférence est destructif,
c’est à dire le signe du produit D pq S pq est négatif
- 24 -
•
le couplage entre les deux fonctions est non liant si l’effet d’interférence est nul, c’est
à dire le signe du produit D pq S pq est nul
En général, une liaison chimique met en jeu plusieurs paires de fonctions atomiques.
at
Il
peut donc y avoir compétition entre effets liants et antiliants sur une même liaison chimique
conduisant à un caractère non liant par compensation.
Signe conventionnel de Spq
On considère deux fonctions atomiques centrées sur deux noyaux différents
différents A et B. A est
à gauche de B.
Une fonction 1s étant positive, l’intégrale de recouvrement Spq entre deux OA 1s est donc
toujours positive :
Spq > 0
Une orbitale 2pi est orientée selon l’axe i,, du lobe négatif vers le lobe positif dans le sens
de l’axe.
Le signe du recouvrement Spq entre une OA 1s et une orbitale 2p dépend donc de leur
position relative.
Dans le cas d’un recouvrement axial :
Si l’OA 1s est à droite de l’OA 2p, le recouvrement
recouvr
Spq est positif.
Si l’OA 1s est à gauche de l’OA 2p, le recouvrement Spq est négatif.
Spq > 0
Spq < 0
Dans le cas d’un recouvrement latéral :
Il y a exacte compensation entre les contributions positives et négatives : l’intégrale Spq
est nulle.
Spq = 0
Le recouvrement axial ou latéral entre deux fonctions 2p est négatif :
- 25 -
Spq < 0
Spq > 0
Exemples de couplages
On considère le couplage entre deux fonctions atomiques centrées sur deux noyaux
différents A et B. A est à gauche de B. Les deux noyaux sont le long de l’axe x.
1sA + 1sB ; Spq > 0 ; Dpq > 0 caractère LIANT
1sA – 1sB ; Spq > 0 ; Dpq < 0 caractère ANTI-LIANT
1sA + 2pxB ; Spq < 0 ; Dpq > 0 caractère ANTI-LIANT
1sA – 2pxB ; Spq < 0 ; Dpq < 0 caractère LIANT
2pyA ± 1sB ; Spq = 0 ; Dpq > 0 ou < 0 caractère NON LIANT
ou
2pyA + 2pyB ; Spq > 0 ; Dpq > 0 caractère LIANT
- 26 -
2pyA – 2pyB ; Spq > 0 ; Dpq < 0 caractère ANTI-LIANT
V.2. Nature liante ou antiliante d’une OM
Cette notion n'a pas rigoureusement de sens puisque c'est l'état multiélectronique qui
est liant ou antiliant au vu de sa courbe d'énergie potentielle. Mais il n'en demeure pas moins
que plus seront peuplées des OM dans lesquelles les couplages liants sont
sont forts, plus l'état sera
liant.
Pour évaluer la nature liante ou anti-liante
anti liante d'une OM on procède comme suit :
– On associe à chaque couplage d'OA le produit des coefficients LCAO cpi cqi
correspondant (p appartient à l'atome A, q à B). On fait alors la somme de ces contributions
pour les couplages liants et antiliants. Si c'est la contribution liante qui l'emporte, on dit que
l'OM est globalement liante ; dans le cas contraire elle est globalement anti-liante.
anti
Si tous les
couplages sont liants, l'OM
M est totalement liante (inversement totalement anti-liante).
anti
Cette
façon de procéder reste cependant très qualitative et peut se révéler inexacte si l'importance
des recouvrements change fortement avec la nature des orbitales atomiques mises en jeu.
– on peut ainsi classer les orbitales suivant leur symétrie et leur caractère liant.
Nomenclature :
σ et π pour les OM liantes
σ* et π* pour les anti-liantes
liantes
et on rajoute l'indice g ou u pour les molécules homonucléaires.
V.3. Diagramme de corrélation
Les diagrammes de corrélation portent l'énergie des OM et les relient aux niveaux
d'énergie des OA qui les composent.
En règle générale les OM liantes ont une énergie plus basse que celles des OA qui les
composent et inversement les anti-liantes
anti liantes ont une énergie plus haute; ceci est dû à l'effet
d'écran respectivement stabilisant et déstabilisant. C'est systématiquement vrai
vr de la première
OM qui est toujours totalement liante (et de symétrie σ)) et de la dernière totalement antianti
liante (σ ). Les prédictions sont cependant plus délicates quand le caractère n'est que
partiellement liant ou anti-liant.
liant.
La configuration de l'état
'état fondamental est obtenue en remplissant les niveaux dans
l'ordre croissant d'énergie en respectant le principe de Pauli. La règle de Hund s'applique aussi
car les OM sont orthogonales ; elle permet ainsi de prévoir l'état de spin de la molécule.
- 27 -
On distingue alors les molécules diamagnétiques pour lesquelles tous les spins sont
appariés, et les molécules paramagnétiques pour lesquelles certaines OM sont simplement
occupées. L'action d'un champ magnétique permet de distinguer entre ces deux types.
V.4. Intensité des couplages entre OA
Considérons deux OA χA et χB d'énergies E A et E B ( E A < E B ) ; elles forment deux
OM ϕ et ϕ * d'énergies E et E* ( E < E* ), avec E < E B et E * > E B . La résolution de
l’équation matricielle de Fock montre que le couplage entre χ A et χ B est d'autant plus
important que leurs énergies sont proches. Si E A – E B est grand, le couplage est peu intense.
L'OM liante est alors peu stabilisée et l'OM antiliante peu déstabilisée. Le mélange des OA
est faible, et les OM sont alors essentiellement les OA originelles. Dans le cas contraire où
les OA ont des énergies voisines, les OM sont très différentes des OA de base.
j, E*
j, E*
cB, EB
cB, EB
cA, EA
cA, EA
j, E
j, E
Couplage faible
Couplage intense
ϕ = A(χ A + εχ B ) avec ε << 1
ϕ = A1 χ A + A2 χ B avec A1 > A2
ϕ * = A(εχ A + χ B )
ϕ * = B1 χA + B2 χ B avec B1 < B2
ϕ ressemble plus à χA qu'à χB .
ϕ * ressemble plus à χB qu'à χA .
V.5. Analyse simple des effets de transfert de charge
On raisonne en général sur des problèmes à deux fragments A et B qui se combinent
pour former une nouvelle molécule. En toute rigueur, il faut regarder comment s'est déformée
la densité électronique dans AB par rapport à la somme des densités dans A et dans B. On
peut cependant raisonner qualitativement en ne considérant que la forme générale des
orbitales que l'on crée. On utilise une orbitale par fragment ainsi que les deux OM liante et
antiliante formées par ces deux orbitales de fragment. L'effet de transfert de charge (effet
inductif) dépend alors de la position relative en énergie des orbitales des fragments ainsi que
du nombre d'électrons mis en jeu (1, 2 ou 3).
- 28 -
Considérons le schéma suivant, caractéristique d'un couplage faible :
j2
ϕ1 = A1 χ A + A2 χB avec A1 < A2
cA
ϕ2 = B1 χ A + B2 χ B avec B1 > B2
ϕ1 ressemble plus à χB qu'à χA .
ϕ2 ressemble plus à χA qu'à χB .
cB
j1
Problème à 1 électron :
A
AB
B
A
AB
B
Dans le premier cas, l'électron à l'origine sur B se délocalise partiellement sur A en
passant sur l'orbitale moléculaire ϕ : il y a un léger transfert de charge de B vers A.
Dans le second cas, l'électron à l'origine sur A se délocalise fortement sur B en passant
sur l'orbitale moléculaire ϕ : il y a fort transfert de charge de A vers B.
Problème à 2 électrons :
A
ϕ
AB
B
A
AB
B
A
AB
B
Dans le premier cas, les deux électrons à l'origine répartis sur A et B se retrouvent sur
, où ils sont en moyenne plus souvent sur B : il y a transfert de charge de A vers B.
Dans le second cas, les deux électrons sur ϕ sont en moyenne plus souvent sur B : il
y a fort transfert de charge de A vers B.
Dans le troisième cas, les deux électrons sur ϕ sont partiellement délocalisés sur A :
il y a faible transfert de charge de B vers A.
- 29 -
Problème à 3 électrons :
A
AB
B
A
AB
B
Dans le premier cas, les deux électrons sur ϕ (que l'on peut considérer comme venant
de B) sont partiellement délocalisés sur A ; l'électron sur ϕ2 (que l'on peut considérer comme
venant de A) est partiellement délocalisé sur B : le transfert de charge résultant se fait de B
vers A. Dans le second cas, il y a transfert de charge de A vers B.
La méthode des OM permet ainsi de prévoir l'existence d'un déplacement de charge
et donc d'un moment dipolaire. L'existence de ce moment dipolaire reflète la différence
d'électronégativité des deux atomes, qui est intimement liée à la nature et à l'énergie relative
des orbitales atomiques.
V. La séparation « cœur-valence»
V.1. Orbitales de cœur
Les fonctions atomiques 1s des atomes lourds (au delà de la première ligne de la
classification), très basses en énergie, ne se couplent pas aux orbitales de valence. On peut
alors considérer en bonne approximation que les cœurs atomiques ne sont pas affectés par
la liaison chimique.
Les orbitales de cœur ne se mélangent pas entre elles non plus. Le cas typique est
celui du couplage entre deux OA 1s doublement occupées. Le diagramme de corrélation
prend formellement l’allure suivante :
On obtient 2 orbitales « moléculaires » doublement occupées, combinaisons des deux
orbitales atomiques de cœur. La propriété d’invariance orbitalaire permet dans ce cas de
remplacer ces deux OM par les deux OA. On peut généraliser au delà de la diatomique et
- 30 -
considérer en bonne approximation que les OM de plus basse énergie sont en fait les OA de
cœur des différents atomes.
Remarque : dans une liaison entre deux atomes lourds, les OA 1s de cœur sont extrêmement
compactes. En conséquence, elles interagissent très peu entre elles. Le couplage montré cidessus est très exagéré sur la figure.
V.2. La partition cœur-valence : décomposition de l’énergie totale
Il est possible de décomposer l’énergie totale Hartree-Fock d’une molécule à couches
complètes de façon à faire intervenir explicitement les termes impliquant orbitales de cœur et
les autres orbitales que l’on appelle orbitales de valence :
E=
n coeur
n coeur n coeur
n valence n valence
n valence
n valence n coeur
∑ 2Ii + ∑ ∑ (2Jij − K ij ) + ∑2Ii + ∑ ∑(2Jij − K ij ) + ∑ ∑(2Jij − K ij )
i=1
i=1
j=1
i=1
i=1
1
444i=1
42j=144443 1
4444
2j=1
44443 1
44
42444
3
Energie des orbitales de coeur
Energie des orbitales de valence
Energie d'interaction coeur/valence
Les orbitales de cœur n’étant pas (ou très peu) affectées par une modification du nuage
électronique de valence, l’énergie de cœur peut être considérée comme constante additive
pour une molécule donnée, quelle que soit sa conformation. De plus, en posant :
I i′ = I i +
n coeur
∑ (2J
ij
− K ij )
j=1
l’énergie totale s’écrit :
E=E
coeur
+
n valence
∑
2I ′ +
n valence n valence
i
i=1
∑ ∑ (2J
i=1
ij
− K ij )
j=1
coeur
On obtient ainsi, à une constante additive E
près, une expression similaire à
l’énergie totale Hartree-Fock, mais dont les sommes portent uniquement sur les orbitales de
valence. Dans cette expression, les intégrales I ′ sont « monoélectroniques », (elles sont
i
relatives à un électron occupant l’orbitale i), mais intègrent les termes d’interaction moyenne
entre cet électron et les électrons de coeur. Les termes I ′ peuvent ainsi être interprétés comme
i
l’énergie moyenne d’un électron dans le champ électrostatique des noyaux et des électrons de
cœur de la molécule. Ils tiennent donc compte de l’effet d’écran des électrons de cœur.
Si on tient compte de cet effet d’écran des cœurs atomiques, il n’est donc pas
nécessaire de traiter explicitement des électrons de cœur pour décrire une liaison
chimique. On peut alors utiliser le modèle des OM en ne considérant que les électrons de
valence de la molécule, et en ne considérant que les OM formées à partir de fonctions
atomiques de valence.
Cette approximation est implicite dans les modèles simples tels que celui développé
par Lewis, dans lequel le décompte et l’organisation des seuls électrons de valence permet
d’obtenir une vision qualitative du nuage électronique d’une molécule.
- 31 -
VI. Le modèle HF : limites et extensions
VI.1. Dissociation de H2
L'énergie potentielle de la molécule H2 obtenue dans l'approximation LCAO est
calculable analytiquement. Elle est tracée ci-dessous en comparaison du résultat exact issu
d'un modèle plus sophistiqué.
-22,00
-23,00
-24,00
OM-LCAO
Energie (eV)
-25,00
-26,00
2E(H)
-27,00
-28,00
IC
-29,00
-30,00
-31,00
-32,00
-33,00
0,00 0,50 1,00 1,50 2,00 2,50 3,00 3,50 4,00
R (Å)
Le modèle HF prédit bien l'existence d'un puits d'énergie potentielle et donc la stabilité
de la molécule. La distance d'équilibre dans l'approximation LCAO simple est de 1,6 Bohr,
soit 0,84 Angström. La profondeur du puits relative à deux atomes d'hydrogène séparés à
l'infini l'un de l'autre vaut 2,65 eV. Les valeurs expérimentales sont 0,74 Angström et 4,75 eV
respectivement. Le modèle doit donc être amélioré pour reproduire les valeurs
expérimentales. Pour un accord plus quantitatif avec les données expérimentales, il faut
notamment utiliser un développement des OM utilisant des fonctions atomiques
supplémentaires.
L'asymptote horizontale aux grandes distances internucléaires ne correspond pas à la
somme des énergies de deux atomes d'hydrogène. Le modèle ne prédit pas correctement la
rupture homolytique de la liaison covalente. C'est un défaut intrinsèque au modèle : la forme
de la fonction d'onde est inadaptée pour décrire deux atomes d'hydrogène éloignés.
Le modèle des orbitales moléculaire permet donc de traduire la stabilité de la
liaison covalente mais n'est pas adapté à la description de sa rupture et de sa formation.
La limitation de la méthode de Hartree-Fock provient du fait que la fonction d’onde ne
contient aucune information sur la corrélation électronique autre que celle introduite par le
principe d'antisymétrie (principe d’exclusion de Pauli). La fonction d’onde
monoconfigurationnelle décrite par un déterminant de Slater unique correspond à une
configuration électronique figée, dans laquelle les électrons sont affectés une fois pour toute à
un jeu d’orbitales.
Ce manque de flexibilité de la fonction d’onde, interdisant tout mouvement
électronique d’une orbitale à l’autre, est à l’origine de l’échec du modèle Hartree-Fock lorsque
- 32 -
l’on cherche à décrire des effets électroniques fins intervenant par exemple dans la
formation/rupture de liaisons covalentes ou la description de liaisons intermoléculaires faibles.
Les modèles multi-configurationnels, dans lesquels la fonction d’onde s’écrit non pas
comme un déterminant de Slater unique mais comme une combinaison de plusieurs
déterminants, chacun correspondant à une configuration électronique, permettent de pallier ce
défaut en offrant la possibilité aux électrons de se déplacer sur les différentes orbitales.
Ainsi, dans le modèle des Interactions de Configurations (IC) , la fonction d’onde
est une superposition de différents déterminants de Slater correspondant aux différentes
occupations possibles des orbitales. Dans ce modèle, les orbitales ne dépendent pas de la
configuration électronique dans laquelle elles interviennent : on utilise les orbitales issues du
calcul Hartree-Fock.
Mais ceci reste une approximation. En effet, on conçoit que les orbitales peuvent
s’adapter aux variations d’occupation électronique. Un raffinement supplémentaire consiste
donc à optimiser non seulement les coefficients de mélange des déterminants, mais aussi les
différentes orbitales, simultanément. On parle alors de modèle MC-SCF (Multi
Configurational Self Consistent Field). Dans cette approche, la forme des OM est alors
influencée par la corrélation des mouvements électronique.
VI.2. L’interaction de configurations
La méthode d’IC consiste à déterminer, pour décrire l'état fondamental électronique
d’un système, la meilleure fonction d'onde approchée Ψ à N électrons sous la forme d'une
combinaison linéaire de déterminants de Slater correspondant à toutes les occupations
possibles des orbitales déterminées par la méthode Hartree-Fock. On écrit alors :
Ψ = a0 Ψ0 + ∑ a1( n )Ψ1( n ) + ∑ a(2m )Ψ2( m ) + ...
n
m
où Ψ0 correspond au déterminant de référence de la méthode HF, Ψ1(n) est un déterminant
caractérisant une monoexcitation (obtenu par promotion d'un électron d’une orbitale occupée
vers une orbitale virtuelle), Ψ2(m ) est un déterminant caractérisant une diexcitation, et ainsi de
suite… On parle d’IC totale lorsque la fonction d'onde s’écrit comme le mélange de tous les
déterminants possibles. Les coefficients ai(p ) du mélange sont appelés coefficients d’IC, et
constituent les paramètres à optimiser lors du traitement post Hartree-Fock.
Dans la méthode d’IC, les coefficients Cpi des orbitales moléculaires sont fixes, et
seuls les coefficients ai(p ) sont determinés variationnellement. On utilise donc la méthode des
variations linéaire, et on obtient alors non seulement l’état électronique fondamental mais
aussi un certain nombre d’états électroniques excités. Cette méthode est adaptée à la
description des propriétés spectroscopiques électroniques (UV/Visible)
Un calcul combinatoire montre cependant que le nombre d’excitations possibles croît
très vite en fonction du ratio nombre d’électron (N) / dimension de la base (M.). En pratique, il
est généralement impossible d’effectuer un calcul d’IC total. On procède alors à une sélection
- 33 -
du type d’excitation que l’on désire prendre en compte (on se limite très souvent aux simples
et doubles excitations responsables à elles seules d’une grande partie de l’énergie de
corrélation) et/ou à une sélection des orbitales moléculaires intervenant dans l’IC (on élimine
généralement les OM de cœur, les OM de valence occupées profondes et les OM vacantes
externes de haute énergie). La plage des OM utilisées dans l’IC est appelée espace actif.
VI.3. La méthode MCSCF
La méthode MCSCF (Multi Configurational Self Consistent Field) propose une
correction à la méthode d’IC en optimisant simultanément les coefficients ai(p ) et la forme des
orbitales moléculaires. La fonction d’onde MCSCF s’écrit donc de la même façon la même
que la fonction d’onde d’IC, mais cette fois les coefficients ai(p ) ainsi que les coefficients Cpi
des orbitales moléculaires sont déterminés variationnellement et simultanément.
Si on prend en compte les mêmes excitations et le même espace actif, cette méthode
permet de rendre compte d’une plus grande partie de l’énergie de corrélation que ne le permet
la méthode d’IC.
Parmi les méthodes de type MC-SCF existantes, une des plus utilisées est la méthode
CAS-SCF (Complete Active Space SCF). La fonction d’onde CAS-SCF est développée sur
l’ensemble complet des configurations correspondant à toutes les excitations possibles
(simples, doubles, triples…) dans l’ensemble des OM actives. Dans ce cas, l’interaction de
configuration est limitée seulement par la taille de l’espace actif, et non pas par le type des
excitations retenues.
- 34 -
Chapitre III
Modèles semi-empiriques de valence
Dans ce chapitre, on aborde les méthodes de calcul simplifiées pour bâtir des représentations
en orbitales moléculaires des états électroniques des molécules. Ces méthodes permettent de
dépasser les limites des techniques ab initio qui requièrent d’énormes capacités calculatoires
pour traiter de molécules et d’assemblages supramoléculaires que l’on souhaite les plus variés
et de taille toujours croissante, car la chimie crée, organise, observe et manipule des objets
toujours plus complexes.
Les limites des simulations ab initio sont cependant vite atteintes. Prenons par
exemple le cas d’une molécule comportant 100 atomes lourds (C, N, O, …). Un traitement ab
initio fin du nuage électronique conduit à retenir une vingtaine de fonctions atomiques par
atome, soit au moins 2000 fonctions pour construire la matrice de Fock (2000x2000) dont il
faut trouver les vecteurs propres itérativement. On atteint là les limites des algorithmes
numériques de traitement des équations matricielles. Pire encore, ces 2000 fonctions
atomiques conduisent au calcul de 20004 intégrales biélectroniques, nécessaires pour
construire les éléments de la matrice de Fock. On voit ainsi poindre une autre limitation : le
volume de données à manipuler.
Une autre raison toute aussi importante pour se tourner vers des modélisations plus
simples et plus qualitatives tient à un besoin de rationaliser les comportements physicochimiques à l’aide du plus petit nombre possible d’objets théoriques. On ne peut
raisonnablement et efficacement envisager de décrire simplement des lois de comportements à
partir de fonctions développées sur des bases gigantesques, comportant une multitude de
paramètres. Il faut rechercher la simplicité qui par exemple préside à l’interprétation des
propriétés des éléments dans la classification périodique, au travers des configurations
électroniques atomiques, de valence et de cœur.
On aborde donc dans ce chapitre une version simplifiée du modèle des orbitales
moléculaires. L’objectif est de relier les propriétés du nuage électronique à sa constitution à
partir des orbitales de valence des atomes constituant la molécule.
I. Les modèles semi-empiriques de valence
Les modèles semi-empiriques de valence ne portent que sur les électrons de valence,
Ils supposent que ces électrons sont soumis à un écran connu et constant des électrons de
cœur. Ils se fondent aussi sur un espace actif minimal : l’espace de valence. Il n’y a pas
d’espace de cœur ni d’espace externe.
Le développement des orbitales se limite alors à une base minimale de valence
comportant autant de fonctions atomiques que d’orbitales atomiques de valence des atomes
constituant la molécule. Par abus de langage, on appelle ces fonctions atomiques les orbitales
atomiques (OA), bien qu’a priori, on puisse considérer que ces fonctions atomiques soient
différentes de celles obtenues pour un atome isolé.
- 35 -
I.1. L’approximation LCAO de valence
Les orbitales de la molécule sont développées en combinaisons linéaires des orbitales
atomiques (OA) de valence :
M
ϕ i (ν ) = ∑ Cpi χ p (ν )
p
où les ϕ i sont les orbitales de valence, et les χ p les OA de valence.
Les intégrales énergétiques nécessaires pour évaluer les matrices hamiltoniennes et de
recouvrement sont de type monoélectronique :
∫ χ (ν )hˆ (ν )χ (ν )dVν (interaction monoélectronique entre OA)
= ∫ χ (ν )hˆ (ν )χ (ν )dVν (énergie monoélectronique d’une OA)
= ∫ χ (ν )χ (ν )dVν (recouvrement entre OA)
I pq =
p
q
I pp
p
p
S pq
p
p
où hˆ représente l’énergie cinétique d’un électron et son attraction par les cœurs atomiques
(noyaux + électrons de cœur) de la molécule,
ou biélectronique :
(pq rs) = ∫
χ p (µ) χ q (µ) χ r (ν ) χ s (ν )
rµν
dVµ dVν (interactions à 2 électrons)
Les différentes approximations sur le modèle de structure électronique, sur
l’évaluation de ces intégrales et le choix d’une technique de résolution des équations
conduisent à différentes « méthodes » de calcul implémentées dans des programmes de
simulation numérique, disponibles commercialement ou en licence libre. On aborde dans ce
chapitre les deux plus répandues.
I.2. Modèles semi-empiriques de type NDDO
Ces modèles décrivent explicitement les interactions à 2 électrons, quoique sous une
forme simplifiée et paramétrée. On se limite ici à la présentation des méthodes couramment
utilisées, basées sur l’approximation NDDO (Neglect of Diatomic Differential Overlap).
Cette approximation consiste à négliger toutes les intégrales biélectroniques
(pqrs)
contenant un produit du type χ (µ).χ (µ) dans lequel les OA χ et χ sont centrées sur
deux atomes différents A et B. On considère donc uniquement des intégrales de Coulomb et
d'échange centrées sur seul un atome (intégrales monocentriques) ou sur deux atomes
(intégrales bicentriques). Toutes les autres interactions à 3 et 4 atomes sont négligées.
A
p
A
p
B
q
Les intégrales de recouvrement entre OA distinctes S pq =
B
q
∫χ
p
(µ) χ q (µ)dVµ sont
espace
également négligées lors de la résolution des équations matricielles. Ainsi, dans le cas d’une
résolution de type Hartree-Fock, l’équation matricielle à résoudre itérativement devient :
- 36 -
 F11

 F21
 F31

 ...
F12
F13
F22
F32
F23
F33
...
...
 C1i 
... C1i 
 
 
... C2i 
C2i
= εi  
 C3i 
... C3i 
 
 
... ... 
 ... 
où Fpq =
∫χ
p
(µ)Fˆ χ q (µ)dVµ
espace
)
Les Fpq dépendent des I pq , des intégrales (pqrs et des éléments de la matrice densité.
La paramétrisation des intégrales I pq est similaire à celle employée dans la méthode EHT. Les
intégrales biélectroniques non nulles sont également paramétrées. En outre, l’énergie de
répulsion entre les cœurs atomiques est aussi paramétrée. On peut alors obtenir une énergie
potentielle moléculaire - somme de l’énergie électronique de valence et de la répulsion des
cœurs – qui traite explicitement et de façon équilibrée les interactions coulombiennes
(électron/électron, électron/cœur, cœur/cœur). Pour cette raison, les méthodes basées sur
l’approximation NDDO sont beaucoup plus efficaces pour la prédiction des géométries
moléculaires et des chemins réactionnels.
Il existe différents types de paramétrisation NDDO (MNDO, AM1, PM3…) qui diffèrent
par la valeur des paramètres utilisés et le traitement de certaines interactions, et donnent des
résultats plus ou moins proches de l’expérience selon l’observable étudiée. Ces
paramétrisations sont obtenues par ajustement de propriétés calculées sur les propriétés
expérimentales d’un ensemble de molécules de référence.
Le modèle MNDO (Modified Neglect of Diatomic Overlap) date de 1977. Il n’est plus
guère utilisé que dans sa version comportant des orbitales d (MNDOd), permettant de traiter
de certains composés organométalliques. Il est utilisé au niveau Hartree-Fock (méthodes
SCF/MNDO ou SCF/MNDOd), parfois au niveau Interaction de Configuration.
Le modèle AM1 (Austin Model 1), date de 1985. Il est adapté à la détermination des
géométries, des répartitions de charges, des chaleurs de formation. Sa paramétrisation rend
compte des liaisons hydrogène. Il est utilisé au niveau Hartree-Fock et Interaction de
Configurations (méthodes SCF/AM1 et CI/AM1), plus rarement en Liaisons de Valence.
Le modèle PM3 (Parametrized Model 3) date de 1989. C’est une variante du modèle
AM1 dont la fiabilité est cependant l’objet de controverses.
D’autre paramétrisations peuvent être utilisées dans des problèmes spécifiques. On citera
par exemple la paramétrisation ZINDO (Zerner’s Intermediate Neglect of Diatomic Overlap)
pour simuler les spectres d’absorption UV. Des paramétrisations plus récentes tentent de
reproduire plus fidèlement les propriétés de composés organométalliques (orbitales d) et de
s’adapter à des niveaux de calcul post Hartree-Fock. Elles sont cependant trop récentes pour
pouvoir prouver leur bien fondé.
Dans tous les cas, le niveau de calcul retenu, l’échantillonnage et la procédure
d’ajustement sont des facteurs importants dans l’obtention de paramètres fiables pour des
molécules ne faisant pas partie de l’échantillon de référence. Une méthode semi-empirique
peut alors conduire à des résultats aberrants dans certains cas de figure, non considérés lors de
l’échantillonnage. Il faut donc manier ces méthodes semi-empiriques avec circonspection. Il
est en général conseillé de valider les résultats en utilisant différentes paramétrisations et par
comparaison avec des traitements plus sophistiqués de type ab initio.
- 37 -
I.3. Calcul des populations électroniques
L’approximation NDDO entraîne des simplifications lors du calcul des populations
orbitalaires. Dans les modèles semi-empiriques de valence, la population moyenne Qp d'une
OA χ p est directement identifiable à l’élément diagonal correspondant de la matrice densité
du premier ordre :
Q p = Dpp = ∑ n i (C pi )
2
i
Comme dans le modèle RHF ab initio, le nombre moyen d'électrons de l'atome A est
la somme des populations moyennes des ses OA :
nA =
( )
∑ Qp =
∑ ∑ ni C pi
p∈A
p∈A
i
2
et la charge partielle de l'atome A dans la molécule est alors (en nombre d'électrons) :
δA = ZA − n A
II. Les modèles réduits
Au-delà des modèles de valence, on peut être amené à des simplifications encore plus
radicales, pour décrire des systèmes chimiques dans lesquels les propriétés que l’on souhaite
modéliser ne font pas appel à l’ensemble du nuage électronique de valence. Pour ce faire, on
procède de manière similaire, en considérant que certaines OM de valence ne sont pas
affectées par la propriété que l’on étudie. Elles sont alors incluses dans un cœur étendu. Il
reste à ne décrire explicitement que les interactions entre les électrons actifs.
II.1. Séparation σ−π : modèle de Pariser-Parr-Pople et modèle de Hückel
Cette séparation est couramment utilisée pour les systèmes conjugués plans, les
systèmes graphitiques, voire même les nanotubes et fullerènes. Dans ces systèmes, on peut en
effet identifier des OM occupées dites σ, dans lesquelles les recouvrements d’OA sont
essentiellement axiaux. Ces OM sont composées d’OA 2s et d’OA 2p dont les axes sont dans
le plan moléculaire. Elles sont doublement occupées et d’énergie relativement basse par
rapport aux OM formées d’OA 2p perpendiculaires au plan moléculaire. Ces OM sont
appelées OM π, les OA qui les composent sont appelées les OA 2pπ. Dans le cas des
nanotubes et fullerènes, les OM σ sont tangentielles, les OM π sont radiales, c’est à dire
formées essentiellement d’OA 2pπ dont l’axe est radial par rapport à la courbure de la surface
moléculaire.
- 38 -
Orbitales radiales
Orbitales tangentielles
On réduit le problème à celui des électrons portés par ces OM π. Comme pour les
modèles de valence, les interactions entre OA 2pπ ainsi que l’interaction avec le cœur étendu
sont paramétrées de manière empirique.
Les deux modèles importants pour les électrons π sont ceux de Hückel (1930) et de
Pariser-Parr-Pople (PPP - 1953).
Dans le modèle de Hückel, les interactions monoélectroniques ne sont considérées
qu’entre OA voisines et paramétrées empiriquement. On néglige les recouvrements.
I pq = ∫ χ p (ν ) hˆ (ν ) χ q (ν )dVν =β pq β pq est appelée intégrale de résonance ou de transfert
entre OA voisines
I pp = ∫ χ p (ν ) hˆ (ν )χ p (ν )dVν = α p α p est appelée intégrale de Coulomb de l’OA χ p
S pq =
∫ χ p (ν )χ p (ν )dVν = δ pq
On néglige l’interaction coulombienne biélectronique. C’est un modèle purement
monoélectronique d’électrons indépendants.
Dans le modèle PPP, on tient compte de l’interaction coulombienne biélectronique :
(pp qq) = ∫
χ p (µ) χ p (µ) χ q (ν ) χ q (ν )
dVµ dVν = Γpq
rµν
Pariser et Parr ont proposé de paramétrer l’interaction monocentrique comme la
différence entre l’énergie d’ionisation et l’affinité électronique :
Γ pp = EI( χ p ) − AE ( χ p )
- 39 -
L’interaction coulombienne bicentrique est paramétrée en fonction de la distance R
entre les atomes. La paramétrisation de Mataga – Nishimoto (1957) est la plus couramment
utilisée :
Γpq (R) =
Γpp + Γqq
2 + R(Γpp + Γqq )
II.2. Les OM frontières
Nous avons jusqu’ici abordé les modèles simplifiés permettant de réduire la
complexité du problème électronique moléculaire au plus petit nombre possible d’électrons
actifs fournis par les atomes constituant la molécule. Cette simplification se justifie par le fait
que la répartition électronique moléculaire est essentiellement le fait d’un nombre réduit
d’électrons. Les électrons de cœur ont ainsi été éliminés, puis dans les systèmes conjugués, on
s’est limité aux électrons π responsables des effets mésomères.
Dépassant la problématique des effets électroniques dans les molécules, on peut
s’intéresser aussi au problème de la répartition électronique entre plusieurs molécules en
interaction, comme par exemple dans les métaux ou supraconducteurs organiques, et plus
généralement dans tout assemblage supramoléculaire dans lequel se pose la question de savoir
s’il possède des propriétés de transport électronique. On aborde là le domaine des
nanosciences, des propriétés de conduction électronique et optique dans les matériaux, de
transport d’énergie et de charge dans les systèmes biochimiques. Dans la mesure où ces
phénomènes n’affectent pas véritablement l’intégrité structurale de ces systèmes, on peut
raisonnablement avancer que la majeure partie des électrons « ne servent qu’à assurer » les
liens chimiques sans contribuer au phénomène de transport. Il est alors légitime d’essayer
d’isoler les quelques électrons/orbitales responsables pour obtenir un modèle simple
permettant de reproduire au moins qualitativement les propriétés observées. C’est en fait la
même démarche que celle suivie dans la séparation σ-π, poussée plus loin encore. Elle
conduit alors à ne retenir qu’un espace actif limité à une ou deux OM par molécule composant
l’édifice supramoléculaire. On retient alors en général les OM les plus susceptibles de voir
leur population varier : la plus haute occupée (HO) et la plus basse vacante (BV). Ce sont les
orbitales frontières.
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Réduction de la complexité pour l’étude du
transport électronique dans l’ADN :
Pour l’étude du transport d’une lacune
électronique, on passe de la considération de
tous les électrons de l’enchaînement des
nucléosides à un modèle à une seule orbitale de
site par nucléoside (la HO est représentée de
façon symbolique).
On procède alors comme pour les molécules, mais à l’échelle supramoléculaire : Pour
l’agrégat de molécules, le cristal ou le brin d’ADN, les OM frontières jouent le rôle des OA
de valence ou des OA π dans une molécule. Tout se passe comme si on réduisait chaque
fragment moléculaire à un « site élémentaire décrit par 2 orbitales au plus.
II.3. Les modèles de la physique et de la chimie du solide
La philosophie simplificatrice exposée ci-dessus est couramment utilisée dans l’étude
des propriétés électroniques des phases condensées.
Ainsi l’approximation des OM frontières est commune pour traiter des cristaux
organiques. Par exemple, considérons les sels de Bechgaard. Ce sont des sels moléculaires de
formule M2X, où M est une molécule organique plane et X est un anion. Les molécules M
s’empilent en colonnes dans le réseau cristallin. La stœchiométrie impose que le groupe M2
est chargé +. Cette charge + est itinérante et rend ce composé conducteur sous certaines
conditions de pression et température. La molécule M est à couches complètes (OM
doublement occupées), le cation M+ possède un seul électron sur sa HO. Il dispose donc
d’une lacune électronique qui peut être comblée par un électron de la HO de la molécule M
voisine. Le recouvrement des HO de molécules voisines permet ce transfert électronique qui
revient à transférer la charge le long de l’empilement moléculaire. Cette charge + est donc
potentiellement mobile. Suivant les conditions de pression et température, ces composé
peuvent devenir semi-conducteur, métallique et supraconducteur. En réduisant le problème à
la considération des électrons des HO, on définit alors un modèle de « cellule quantique »
minimale à une orbitale par site moléculaire, permettant d’interpréter les propriétés de
transport électronique.
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+
+
+
+
Réduction de la complexité pour l’étude du transport électronique
dans un sel de Bechgaard de formule M2X :
On ne conserve qu’une orbitale de site par molécule. Deux orbitales de site portent 3
électrons. La lacune électronique est mobile par transfert d’électrons d’un site à l’autre.
Le modèle simplifié courant pour ce type de problème est le modèle de Hubbard. Il
peut être considéré comme une variante du modèle PPP. L’interaction coulombienne
biélectronique se réduit à la répulsion entre 2 électrons sur la même orbitale de site :
(pp pp) = ∫
χ p (µ) χ p (µ) χ p (ν ) χ p (ν )
rµν
dVµ dVν = U p
U p est appelée la répulsion intrasite du site p. Les notations pour les intégrales
monoélectroniques sont typique de la physique du solide :
I pq = ∫ χ p (ν ) hˆ (ν ) χ q (ν )dVν =t pq
sites p et q
I pp = ∫ χ p (ν ) hˆ (ν ) χ p (ν )dVν = ε p
S pq =
t pq est appelée intégrale de transfert entre les
ε p est appelée énergie du site p
∫ χ p (ν )χ p (ν )dVν = δ pq
On donne des valeurs empiriques à toutes ces intégrales.
Le modèle de Hubbard étendu décrit en plus la répulsion entre sites voisins :
(pp qq) = ∫
χ p (µ) χ p (µ) χ q (ν ) χ q (ν )
rµν
dVµ dVν = V pq
V pq est la répulsion intersite. En général, on ne considère que la répulsion entre sites
premiers ou second voisins. On donne ici encore des valeurs empiriques à ces intégrales.
Dans le domaine des matériaux inorganiques et par exemple des oxydes de métaux de
transition, la cellule quantique est un peu plus riche : on y admet les OA d des métaux et les
OA p de l’oxygène. Dans la mesure ou on traite plusieurs orbitales sur un même atome, il
faut tenir compte des interactions biélectroniques entre celle-ci. Ainsi, pour les OA d des
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éléments de transition, on adopte souvent le modèle de Kanamori-Brandow : on rajoute les
interactions biélectroniques de Coulomb et d’échange entre les électrons d. Ces grandeurs
ne sont pas non plus calculées à partir d’expressions mathématiques des orbitales mais
paramétrées empiriquement.
(pp qq) = ∫
χ p (µ) χ p (µ) χ q (ν ) χ q (ν )
dVµ dVν = Vpq
rµν
χ (µ) χ p (µ) χ p (ν ) χ p (ν )
dVµ dVν = U p
(pp pp) = ∫ p
rµν
χ (µ) χ q (µ) χ q (ν ) χ p (ν )
dVµ dVν = K pq
(pq qp) = ∫ p
rµν
répulsion entre 2 OA d
répulsion sur une OA d
échange entre 2 OA d
Remarque : dans ce genre de modèle, la paramétrisation empirique des interactions fait que
la nature mathématique de l’orbitale de site n’intervient nulle part dans la résolution des
équations. Cette orbitale n’est plus en fait qu’un auxiliaire conceptuel sans que l’on puisse en
extraire autre chose que les interactions qu’elle développe et, après résolution, sa
contribution aux niveaux d’énergie et à l’analyse de population.
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