Dossier Bic n°3 vol 9QUADRI 6/10/09 15:33 Page 83 Copyright © 2016 John Libbey Eurotext. Téléchargé par UNIVERSITE DE FRANCHE COMTE BU SANTE le 27/06/2016. Dossier Éthique Éthique et place du psychologue dans le CPP Gilbert Lacanal, président de Psychologie du monde «L e respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable, sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. » (Code de déontologie des psychologues.) Les psys ? On peut avoir l’impression qu’ils sont partout, il suffit d’écouter l’actualité… Mais alors qui sontils, que font-ils dans les CPP (Comités de protection de personnes) ? Tout projet de recherche sur l’être humain nous laisse imaginer qu’il va apporter quelque chose. Est-ce parce que c’est une bonne recherche que nous devrions nous passer de la question de la place de la personne dans cette recherche ? Comité de protection des personnes, respect de la personne, voilà une entrée pour aborder le sujet, pour nous éclairer de l’engagement de professionnels dans cette tâche. La psychologie a une dimension scientifique, sociale mais aussi politique et morale. Éthique en psychologie et déontologie des psychologues peuvent se distinguer, l’un se référant aux interrogations, l’autre aux règles. La psychologie en tant que science s’occupe des relations entre les hommes, du désir humain… dont on sait qu’ils sont porteurs de valeurs, or c’est le désir qui produit la valeur (Ce n’est pas parce qu’une chose est bonne que nous la désirons c’est parce que nous la désirons qu’elle est bonne) Comme il existe différentes conceptions de l’homme en psychologie, et dans les autres sciences, que les conflits de valeurs sont réels et qu’il y a interprétation différente des mêmes valeurs, qu’est ce qui peut nous guider ? Par rapport à quoi se posent les problèmes éthiques ? Quel est l’objet d’étude de la psychologie ? Éthique en psychologie et place du psychologue dans le CPP De la notion de personne Si l’on se réfère à l’objet d’étude de la psychologie, doit-on parler de l’individu, de l’être humain, de la personne, du sujet, de la vie psychique ? Le problème vient des termes qui appartiennent à des courants idéologiques qui les connotent. Dans le code de déontologie des psychologues on trouve la notion de personne. Éthique En tant que psychologues l’éthique nous concerne, parce que nous ne saurions nous passer d’une réflexion sur nos valeurs. Bulletin Infirmier du Cancer 83 Vol.9-n°3-juillet-août-septembre 2009 Dossier Bic n°3 vol 9QUADRI 6/10/09 15:33 Page 84 Copyright © 2016 John Libbey Eurotext. Téléchargé par UNIVERSITE DE FRANCHE COMTE BU SANTE le 27/06/2016. Dossier Éthique 3) le principe de justice qui met en balance les risques de la recherche par rapport aux bénéfices qu’elle procure. Les questions auxquelles nous pouvons être alors confrontés concernent l’aptitude à consentir, la compréhension des éléments, les effets des informations fournies aux personnes Dans notre société, la personne s’apparente au sujet de droits et d’obligations qui reposent sur une volonté libre et autonome du sujet et qui font la distinction entre personne psychique et personne morale. La personne est donc un concept normatif dans l’infinité des différences individuelles et culturelles, et l’on ne peut éviter la question du commencement de la personne. Ainsi nous sommes engagés dans notre pratique et donc dans les CPP à apporter une attention particulière à tout ce qui concerne l’autonomie et la liberté de la personne dans ses choix ses décisions par l’information qu’elle reçoit, les conséquences des orientations qui lui sont proposées. La notion de responsabilité ne peut être ignorée et nous engage tous, pour les chercheurs dans l’objet et la finalité de leur recherche, dans le comité par les décisions que nous prenons, pour les personnes dans la mesure de leur implication Le normal et le pathologique C’est une question de sens fondamentale dans le travail en CPP. Il s’agit de la compréhension des personnes qui peuvent parfois ne plus maîtriser leur souffrance à un moment donné de leur vie ou deviennent insupportables pour leurs proches. Normal, pathologique, ne risquent-ils pas de réduire la personne à une somme de symptômes ? La pathologie ne risque t elle pas de se substituer à la personne ? Transformer les problèmes humains en problèmes techniques devient alors une négation de la vie psychique des personnes. Être psychologue, c’est refuser la pathologisation des problèmes humains, quels qu’ils soient. Chaque terme appartenant à un courant idéologique, revenons au code où l’on trouve la notion de personne. Est-ce une notion qui inclut une réalité et une valeur ? La personne est un concept normatif, dans l’infinité des différences, mais quand commence la personne ? La personne nous renvoie aux droits de l’homme, au sujet de droit et d’obligations et à la distinction personne psychique et personne morale. Faut-il préférer les notions d’individu, de sujet… si la personnalité désigne ce que l’homme a fait de sa vie… acte d’être, elle devient un concept enrichissant pour notre profession… L’évaluation La question est complexe et ne va pas de soi. L’évaluation est une référence sociale, une valeur accordée à la science. Les méthodes d’évaluation se sont diversifiées et sont omniprésentes. Concernant les tests, nous devons être vigilants aux interprétations trop absolues, que les personnes peuvent évoluer, que les interprétations doivent tenir compte du contexte. La validité des tests doit rester omniprésente, car ils ne mesurent que ce que pourquoi ils ont été conçus. La déontologie des psychologues précise que toute contribution doit être orientée a des décisions plus objectives concernant les personnes et nous met en garde contre les méthodes non scientifiques, et aussi la nécessité de rendre les décisions transparentes, d’informer la personne sur la signification et le but de l’examen, les critères, les conséquences… Place dans les CPP Professionnellement, c’est s’engager à se former une conscience en énonçant les valeurs que l’on choisit de respecter. Le choix est celui des droits de l’homme, des droits psychiques de la personne mais qui particulièrement dans les CPP nous confronte à ces mêmes valeurs par rapport à des personnes en état de dépendance, d’épreuves ou d’exclusion. Recherche et éthique en psychologie Trois principes fondamentaux doivent être retenus : 1) le principe du respect des personnes de leur dignité et de leur autonomie (cf. consentement éclairé) ; 2) le principe de bienfaisance, i.e. l’évaluation des risques (abstention de nuire) ; Bulletin Infirmier du Cancer 84 Vol.9-n°3-juillet-août-septembre 2009 Dossier Bic n°3 vol 9 5/10/09 15:11 Page 85 Copyright © 2016 John Libbey Eurotext. Téléchargé par UNIVERSITE DE FRANCHE COMTE BU SANTE le 27/06/2016. Dossier Éthique La liste des droits est longue, respect de la vie, de la mort, de valeurs culturelles, abstention de violences, liberté de parler ou se taire… nul n’étant tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. Ces valeurs supposent de la compétence ce qui évite de faire passer pour éthique des problèmes techniques. L’éthique doit nous guider quand il n’y a plus de règles ni de repères pour donner une direction à nos pensées et à nos actes. Les examens, expérimentations, expertises sont des situations à risques car elles offrent une possibilité de pouvoir sur autrui. Nous avons celle aussi de pouvoir qu’une recherche puisse se faire ou pas. Si nous ne donnons pas un sens à nos pratiques, si nous ne posons pas de cadre, nous ne serons plus des psychologues mais de simples techniciens, ou autre chose. Nous sommes dépendants de positions éthiques, celles de notre société (liberté, solidarité, souffrance, vie, mort…). Nous sommes aussi responsables de nos actes, cette responsabilité constitue notre cadre et notre fonction, nous pouvons dénoncer, refuser… et interroger, nous en tenir aux questions que le CPP doit aborder. anciens CCPPRB. À cette fin, les CPP sont constitués à parité par deux collèges principaux : 7 membres appartenant au monde médical, médecins qualifiés en matière de recherche (4, dont un méthodologiste au moins), médecin généraliste (1), Pharmacien (1) et infirmier(e)s (1) ; 7 membres appartenant à la société civile, dont un qualifié en matière d’éthique, un qualifié dans le domaine social, un psychologue, deux juristes et deux représentants d’associations agréées de malades ou d’usagers du système de santé. Divers textes réglementaires définissent le mode de fonctionnement, les bases de jugement et les obligations (en particulier en termes de délai de réponse) des CPP dont le financement est assuré par une partie de la taxe dont doit s’acquitter tout promoteur d’un projet de recherche biomédicale (200 à 4 000 euros selon la nature du promoteur, privé ou institutionnel et la nature du projet). Il faut enfin préciser que le seul avis favorable d’un CPP est insuffisant pour mettre en œuvre une recherche biomédicale. Le promoteur de cette recherche doit également solliciter l’avis d’une autorité compétente qui est soit l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), soit la Direction générale de la santé (DGS) selon la nature du projet. Le psychologue Rappels 1985 : texte de loi créant le titre de psychologue dont nous devons retenir que la volonté du législateur est de protéger les usagers des mésusages de la psychologie. Pour rappel, nous allons exposer ce qu’ils sont et ce qu’ils ne sont pas. Les psychologues ont une formation universitaire supérieure, licence, master1, master 2 ou DEA plus stage qui leur donne le titre de psychologue, titre qui leur donne un numéro d’exercice (numéro Adeli). Ils se donnent des formations complémentaires postuniversitaires (DU, thèses…) ou des formations spécialisées. Ils respectent leur code de déontologie, ont une autonomie technique au cours de leurs missions et exercent dans tous les champs de la société. Ils ne sont pas médecins, donc pas psychiatres, ils ne prescrivent ni des médicaments ni une hospitalisation. Ils ne travaillent pas sur prescription, ne sont pas inscrits dans le code de la santé et n’ont pas de fonction hiérarchique. Le CPP Les comités de protection des personnes ou CPP sont, en France, l’équivalent des ethical research comittee ou « comités d’éthique de la recherche » présents dans les pays anglo-saxons et les autres pays européens. Leur fonction : s’assurer que tout projet de recherche sur l’être humain mené en France respecte l’ensemble des exigences (médicales, méthodologiques, éthiques, juridiques…) visant à assurer la protection des personnes qui participeront à cette recherche. Il est obligatoirement saisi pour qu’un projet de recherche puisse commencer, et délivre un avis favorable ou défavorable. Cet avis est conforme, c’est-à-dire que les auteurs du projet de recherche ne peuvent ni s’en dispenser ni passer outre. Un avis défavorable peut cependant faire l’objet d’une procédure d’appel auprès d’un autre CPP. Les CPP comportent 14 membres titulaires et 14 suppléants. Le législateur a souhaité maintenir, voire renforcer, le pluralisme des membres déjà présent dans les Bulletin Infirmier du Cancer 85 Vol.9-n°3-juillet-août-septembre 2009