vi-1 : apport de l`électrophysiologie chez l`adulte - Lodel

Œil et Physiologie de la Vision – VI-1
VI-1 : APPORT DE L’ÉLECTROPHYSIOLOGIE CHEZ
LADULTE : EXEMPLES
Florence Rigaudière
Jean-François Le Gargasson
Pour citer ce document
Florence Rigaudière et Jean-François Le Gargasson, «VI-1 : APPORT DE
L’ÉLECTROPHYSIOLOGIE CHEZ L’ADULTE : EXEMPLES», Oeil et physiologie de la vision
[En ligne], VI-Exemples cliniques chez l'adulte, mis à jour le : 21/05/2012, URL :
http://lodel.irevues.inist.fr/oeiletphysiologiedelavision/index.php?id=223
Plan
Introduction
Rappels de quelques principes
Déclencheurs des signaux
Informations apportées par le bilan électrophysiologique
Test du fonctionnement des deux systèmes
Test du fonctionnement de l'épithélium pigmentaire
Tests du fonctionnement du système des cônes
Résultats normaux de l’adulte selon les protocoles standards
Variations logiques des signaux en fonction des structures initialement atteintes
Atteinte de l’épithélium pigmentaire
Atteinte de la couche des photorécepteurs
Remarque importante pour le Light Peak de l’EOG
Atteintes des couches internes de la neurorétine
Après ces rappels…
Baisse d’acuité visuelle sans contexte évocateur
Avec signes visibles au fond d’œil
Fundus flavimaculatus
Choroïdose myopique
Altération diffuse de l'épithélium pigmentaire
Avec signes discrets au fond d’œil
Cone-rod dystrophy
Cone-dystrophy atypique
Avec signes localisés à la macula
Bestrophinopathies : maladie de Best – Pseudo-Best
Dystrophie des cônes centraux à l’origine d’une maculopathie
Sans signe au fond d’œil
Dystrophie des cônes périphériques
Baisse d’acuité visuelle dans un contexte connu… Voir Chapitre VI - deuxième
partie
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Œil et Physiologie de la Vision – VI-1
Texte intégral
Collaboration : Anne Jacob & David Le Brun
Remerciements à tous nos confrères ophtalmologistes qui nous ont témoigné leur
confiance en nous adressant leurs patients pour un bilan électrophysiologique. Au
Docteur Isabelle Meunier, Institut des Neurosciences, Cartographie Génétique,
Montpellier, pour ses précisions sur les bestrophinopathies et au Docteur Eliane
Delouvrier ophtalmo-pédiatre, Paris, pour ses fructueux commentaires.
Introduction
Le but de ce chapitre n’est pas d’établir un catalogue de pathologies visuelles qui peuvent
bénéficier de l’apport d’un bilan électrophysiologique. Il est davantage de présenter
quelques cas issus de notre pratique et de montrer comment la démarche systématisée
d’analyse et de synthèse des résultats aboutit à un bilan fonctionnel, aide au diagnostic
voire au pronostic, chez un adulte.
Les circonstances de demande d’un bilan électrophysiologique chez l’adulte sont
différentes de celles décrites chez l’enfant qui sont détaillées au chapitre VII-2 1ère et
2ième partie avec exemples à l’appui. En dehors d’un bilan dans le cadre d’une enquête
familiale à la recherche de dysfonctionnements visuels parentaux infracliniques, il s’agit
souvent d’une baisse d’acuité visuelle. Elle peut être récente, sans antécédent notable,
avec un fond d’œil typique mais jusque-là méconnu ou, au contraire, d’aspect peu
significatif.
La baisse d’acuité peut survenir dans un contexte d’atteinte hérédodégénérative de
l’enfance ou dans un cadre évocateur d’un problème vasculaire rétinien, de complications
tumorales de proximité, d’antécédents traumatiques, de prises médicamenteuses
potentiellement toxiques. Il est alors demandé pour apprécier objectivement la fonction
visuelle et/ou en suivre son évolution.
L’acuité visuelle peut aussi être normale, redevenue normale ou devenir anormale
comme au cours de pathologies systémiques associées à une atteinte visuelle. Le bilan
électrophysiologique précise alors l’état fonctionnel du système visuel.
Avant d’exposer des cas cliniques adressés par l’ophtalmologiste au praticien de
l’exploration fonctionnelle visuelle, nous rappelons quelques grands principes de
l’électrophysiologie : les informations apportées par le bilan électrophysiologique et les
variations logiques des signaux en fonction des structures initialement atteintes.
Rappels de quelques principes
Déclencheurs des signaux
On rappelle que le fonctionnement des photorécepteurs est au cœur du déclenchement
de tout signal électrophysiologique ; la propagation du ou des signaux issus de chaque
type de photorécepteurs se fait conjointement vers les couches internes de la neurorétine
(1) et vers l'épithélium pigmentaire (2) (figure VI-1).
Les deux systèmes de photorécepteurs ont une organisation en trois étages fonctionnels
(figure VI-2) : celui des photorécepteurs ou 1er étage, celui des cellules bipolaires ou 2ième
étage et celui des cellules ganglionnaires ou 3ième étage. L’épithélium pigmentaire est dit
préréceptoral.
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Œil et Physiologie de la Vision – VI-1
La voie des bâtonnets ou système des bâtonnets (dit scotopique) se connecte à la voie
des cônes ou systèmes des cônes (dit photopique) à la couche plexiforme interne par
l’intermédiaire des cellules amacrines AII. Les bâtonnets ont un rôle trophique majeur
pour la survie des cônes par la sécrétion du RdCVF : rod-derived cone viability factor
[Mohand-Said et al., 2001], [Sahel, 2005], [Lorentz et al., 2006], [Chalmel et al., 2007],
[Yang et al., 2009], [Leveillard, Sahel, 2010]. Cette dépendance pour la survie des cônes
vis-à-vis des bâtonnets explique, en partie, pourquoi une atteinte initiale globale ou
localisée des bâtonnets altère très souvent le fonctionnement des cônes qui les jouxtent
et qui en dépendent.
Informations apportées par le bilan électrophysiologique
Les tests utilisés permettent d’approcher le fonctionnement global des deux systèmes
rétiniens et d’isoler le fonctionnement de chacun (ERG flash). Le fonctionnement du
système photopique peut être précisé sur tout le pôle postérieur (ERG mf) ainsi qu’en
zone maculaire (P-ERG). Ces éléments étant connus, il est possible d’approcher le
fonctionnement des voies maculaires de conduction (PEV). Seul un reflet du
fonctionnement global de l’épithélium pigmentaire est possible (EOG) (figure VI-3).
Test du fonctionnement des deux systèmes
L’ERG flash (renvoi au chap IV-3) (figure VI-4) séq-2, teste le fonctionnement conjoint
des deux systèmes neurorétiniens -photopique et scotopique- avec une prédominance de
la réponse du système des bâtonnets. Selon les modes de stimulation et les séquences
de recueil des réponses, il est également possible de séparer le fonctionnement de
chacun des systèmes : celui uniquement du système des bâtonnets d’une part (séq-1 :
rod-response) et celui du système des cônes d’autre part (séq-3 à 5 : Phot-OPs, Cone-
response et Flicker-response).
Remarque importante : les séquences 1 et 2 de l’ERG flash sont souvent dénommées
ERG flash scotopique ou ERG flash scot. Elles sont effectivement et essentiellement le
reflet du fonctionnement du système scotopique.
On rappelle sur la figure VI-5 l’origine des ondes de l’ERG flash. Les réponses sont issues
de toute la surface des neurorétines et de leurs 2 premiers étages.
Test du fonctionnement de l'épithélium pigmentaire
L’EOG (figure VI-4) teste le fonctionnement de l'épithélium pigmentaire après que les
bâtonnets aient été mis en activité par un éclairement de longue durée (figure VI-6).
Pour que le Light Peak de l’EOG reflète l’état fonctionnel de la partie intra-épithéliale de
l'épithélium pigmentaire ou celui de sa membrane basale, il faut avoir vérifié que le
fonctionnement des bâtonnets est normal. C’est le cas lorsque l’onde-a de la mixed-
response de l’ERG flash (séq-2) est d’amplitude normale.
Rappel. Toute altération du fonctionnement des bâtonnets (attention il s’agit bien du photorécepteur, donc du
fonctionnement du 1er étage de la neurorétine) modifie l’amplitude du Light Peak de l’EOG. Cette diminution
d’amplitude du Light Peak n’est donc pas nécessairement le reflet d’un dysfonctionnement de l'épithélium
pigmentaire, mais peut être celui du dysfonctionnement des bâtonnets si l'épithélium pigmentaire est normal…
ou représenter une déficience combinée des bâtonnets et de l'épithélium pigmentaire. La part entre le
dysfonctionnement des bâtonnets et celui éventuellement coexistant ou préexistant de l'épithélium pigmentaire
est parfois délicate à faire.
L’interprétation de l’EOG doit donc toujours être associée à celle de l’ERG flash ; elle
demande une bonne connaissance de la clinique, de la physiologie et de la réflexion pour
aboutir à une conclusion étayée.
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Œil et Physiologie de la Vision – VI-1
Tests du fonctionnement du système des cônes
Cinq tests à disposition
Si les cônes sont beaucoup moins nombreux que les bâtonnets, leur rôle est fondamental
pour la qualité de la vision. Cinq tests électrophysiologiques permettent d’approcher le
fonctionnement du système photopique (ERG flash (séq-3 à 5), ERG ON-OFF, ERG
multifocal, P-ERG, PEV) alors que seul l’ERG flash (séq-1 et 2) permet le contrôle du
fonctionnement global du système scotopique.
Quatre localisations concentriques
Le fonctionnement des cônes et du système des cônes -d’une part les cônes L et M avec
leurs deux voies ON et OFF et d’autre part les cônes S avec leur voie ON spécifique-
peuvent être testés de façon concentrique, englobant toute la surface de la neurorétine
jusqu’au cœur de l’aire maculaire (figure VI-3).
Toute la surface rétinienne : ERG flash phot
L’ERG flash au cours de ses 3 séquences photopiques (séq-3 à 5) dit aussi ERG flash
phot, teste la réponse du système des cônes issue de toute la surface rétinienne sur les 2
premiers étages rétiniens (figure VI-3).
Rappel : particularités des potentiels oscillatoires enregistrés en ambiance photopique. On enregistre
normalement trois potentiels oscillatoires dit Phot-OP2, Phot-OP3 et Phot-OP4. Les deux premiers sont sous la
dépendance de la voie ON des cônes, le dernier sous celle de la voie OFF des cônes. De plus, ils sont issus de
secteurs rétiniens : Phot-OP2 de la zone fovéolaire, Phot-OP3 de la zone périfovéolaire et Phot-OP4 plutôt de la
zone extra-maculaire ou proche périphérie.
Toute la surface rétinienne et ses deux voies ON et OFF : ERG ON-OFF
Le système des cônes L et M possèdent deux voies, l’une ON et l’autre OFF : le système
des cônes S possède une voie ON distincte de celle du système des cônes L et M (revoir
chapitre III-1). Le fonctionnement d’une part de la voie ON et d’autre part de la voie OFF
peut être différencié sur toute la surface rétinienne par le recueil de l’ERG ON-OFF (figure
VI-7) ou bien lors de l’émergence des potentiels oscillatoires : Phot-OP2 et Phot-OP3,
sous la dépendance de la voie ON et Phot-OP4, sous celle de la voie OFF. L’une ou l’autre
de ces voies peut être atteinte de façon spécifique comme au cours de l’héméralopie
congénitale essentielle ou de rétinopathies n’ayant pas encore fait l’objet de classification
clinique spécifique (voir un exemple à la deuxième partie).
Quarante degrés centraux : le pôle postérieur : ERG mf
L’ERG multifocal ou ERG mf, privilégie la réponse de petites zones de neurorétines
contiguës mais distinctes, disposées sur tout le pôle postérieur, vu sous un angle de 40
degrés environ ; chaque réponse n’est issue que des 2 premiers étages rétiniens (figure
VI-8).
Quinze degrés centraux : l’aire maculaire : P-ERG
L’ERG pattern ou P-ERG est la réponse du système photopique situé sur les 15 degrés
centraux, sensiblement la zone maculaire ; une grande partie des corps des cellules
ganglionnaires (naines et diffuses) y est concentrée.
L’onde P50 reflète le fonctionnement des 2 premiers étages de cette zone maculaire et
l’onde N95, celui des corps des cellules ganglionnaires situés au 3ième étage de la
neurorétine. Le signal généré par les corps des cellules ganglionnaires est propagé le
long de leurs axones qui sont à l’origine des voies visuelles de conduction (figure VI-9).
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Œil et Physiologie de la Vision – VI-1
Dix degrés centraux et conduction le long des voies visuelles
Le fonctionnement du système des cônes et de leurs voies, contenus dans la zone
maculaire (10° centraux) est approché par les PEV (figure VI-10) avec une information
possible des différents secteurs maculaires par l’utilisation de stimulations structurées
dont les détails vont décroissants (figure V-5-2).
Les PEV correspondent aux réponses initialement issues du système des cônes contenus dans les 10° centraux,
conduites et amplifiées le long des voies visuelles de conduction jusqu’aux aires visuelles primaires. Ils
combinent donc la réponse maculaire et les modalités de conduction de ce signal maculaire, le long des voies
de conduction.
Toute altération de la zone maculaire modifie les réponses évoquées visuelles (PEV). De même, une macula
normale peut être à l’origine de PEV anormaux si les voies de conduction présentent un dysfonctionnement.
Avant d’interpréter les PEV, il est donc indispensable de connaître le fonctionnement maculaire ; ceci est
possible grâce au P-ERG. Comme il a déjà été dit, les PEV ne sinterprètent jamais sans leur couplage à un P-
ERG et à un ERG flash…
Quelques degrés centraux : la fovéola
Le fonctionnement de la zone fovéolaire est reflété, d’une part, par l’amplitude du
premier potentiel oscillatoire Phot-OP2, par le pic fovéolaire de l’ERG multifocal et,
d’autre part, par les PEV damier évoqués par de petites cases dont la luminance alterne,
mais aussi par la vision des couleurs qui doit être systématiquement testée en
complément des bilans électrophysiologiques (tests 15 HUE désaturé et saturé). Le
lecteur intéressé peut se reporter avec fruit à l’excellent opuscule publié par les
Laboratoires BIOPHARMA [Leid, 2008].
Résultats normaux de l’adulte selon les protocoles
standards
Ils sont obtenus chez un adulte normal, selon les protocoles internationaux [Marmor et
al., 2009], [Marmor et al., 2010], [Hood et al., 2011], [Holder et al., 2007], [Odom et
al., 2009] et sont rappelés sur les différentes figures de VI-4 à VI-10.
Figure VI-4 : ERG flash et EOG ; figure VI-5 : Origine des ondes de l’ERG flash ; figure
VI-6 : origine du Light Peak de l’EOG ; figure VI-7 : ERG ON-OFF et origine de ses
ondes ; figure VI-8 : ERG multifocal ou ERG mf et origine des réponses ; figure VI-9 :
ERG pattern ou P-ERG, origine des ondes P50 et N95 ; figure VI-10 : PEV flash et
damier : origine des réponses.
Variations logiques des signaux en fonction des
structures initialement atteintes
Toute exploration de la fonction visuelle est mise en œuvre après que les résultats du
bilan clinique soient connus ; les photos des fonds d’yeux en couleur et en
autofluorescence, les résultats de l’OCT (figure VI-11) et des champs visuels Goldmann
ou automatisés centraux sont une aide précieuse pour orienter les procédures.
Une question doit toujours être posée : que souhaite préciser l’ophtalmologiste à l’aide
du bilan électrophysiologique ; quelle(s) pathologie(s) est (sont) suspectée(s) ou que
doit-on rechercher ?
Plusieurs structures peuvent être initialement atteintes. Quelques variations de réponses
sont présentées ci-dessous et synthétisées dans les figures VI-12 à 17. Elles ne
constituent pas un type de « système expert », mais sont seulement une orientation
logique des résultats en fonction de dysfonctionnements initiaux possibles ou probables.
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