Pourquoi étudier le judaïsme
Jésus nous donne la réponse quand il dit à la samaritaine: ’Le salut vient des juifs ‘(Jn 4, 22).
Jésus pense probablement à la prophétie d’Isaïe (Is 2, 1 -3) qui par sa venue est en
train de s’accomplir: <Il arrivera dans la fin des temps que la montagne de la Maison du Seigneur sera
établie en tête des montagnes...Alors toutes les nations afflueront vers elle, alors viendront des peuples
nombreux qui diront :’Venez, montons à la montagne du Seigneur, à la Maison du Dieu de Jacob, qu’il
nous enseigne ses voies et que nous suivions ses sentiers’. Car de Sion vient la Loi (la Torah) et de
Jérusalem la Parole du Seigneur>. Il ressort du verset q ue la Torah est la Parole du Seigneur. Cette Torah
a été reçue par Moïse au Sinaï et transmise par lui à une succession de disciples (Mishnah Abot 1,1). C’est
Jérusalem-Sion qui¨, à partir de David, prendra le relais du Sinaï, qui sera le lieu de la Maison du Seigneur
et de la dynastie de David (2 Sa 6 -7). C’est de cette dynastie que sortira le Messie. La Sagesse dont
l’Ecclésiastique fait l’éloge n’est autre que la Torah promulguée par Moïse (Si 24, 23); elle dit d’elle -
même :<en Sion je me suis établie> (Si 24, 10), formule qui est devenue la devise des Congrégations de
Notre Dame de Sion.
Oui, ‘le salut vient des juifs’. Cette parole étonne certains chrétiens. Elle exprime cependant la
pensée de Jésus et l’Église catholique est fidèle à son Seigneur qu and elle enseigne, depuis le concile
Vatican II, que l’Ancienne Alliance n’a pas été révoquée et quand elle demande qu’on étudie le judaïsme.
Mais qu’est-ce que le judaïsme ?
Le judaïsme, c’est la religion de ‘tous les juifs’ (Mc 7, 3) qui suivent aujou rd’hui encore la
‘Tradition des Anciens’ reçue et transmise par les maîtres pharisiens et leurs successeurs les rabbins. C’est
de ce judaïsme que parle l’Église quand elle recommande son étude..
Il y a encore, entre catholiques et protestants, des différe nces dans la manière de comprendre et
d’apprécier la ‘Tradition des Anciens’. Pour l’Église catholique il est certain que cette Tradition des
Anciens est Parole de Dieu, tout autant que l’Écriture, quand elle est discutée, contrôlée et adoptée par
l’ensemble des chrétiens en conformité avec l’enseignement du Magistère. La valorisation de la Tradition
comme Parole de Dieu est l’élément fondamental du ‘Patrimoine commun’ aux juifs et aux chrétiens, dont
l’Église, depuis Vatican II, recommande de faire l’inven taire. (Nostra Aetate n° 4). C’est en effet sur le
fond du judaïsme pharisien-rabbinique que Saint Paul reçoit et transmet comme Parole de Dieu l’Évangile
primitif. Cet Évangile, prêché, oral. annonce la Résurrection de Jésus -Christ (1 Co 15). L’oralité de la
Torah et la résurrection des morts sont enseignées par les pharisiens avant la venue de Jésus -Christ. Elle
sont niées par les sadducéens avant la venue du Christ et dans le débat qu’ils ont avec lui selon les
Évangiles synoptiques ( Mt 22, 23 ; Mc 12, 18 ; Lc 20, 27).
Ce ‘Patrimoine commun’, dont nous venons de reconnaître le fondement, est très vaste.
Avant d’en indiquer quelques grandes composantes, il est bon d’en établir la base juive en
écoutant quelques maîtres juifs: Simon le Juste, Hillel l’An cien, notre Maître Jésus lui -même et Hanania
ben Aqashia.
Simon le Juste, qui pourrait être le Grand Prêtre dont parle l’Ecclésiastique (Si 50), disait : ‘Le
monde repose sur trois choses : La Torah, le Service (le culte), l’échange d’actions inspirées p ar l’amour’
(Mishnah Abot 1, 2).
‘La Torah’ c’est la Parole de Dieu, c’est l’Enseignement qui touche son but comme la pluie (Yoreh)
frappe la terre et la féconde. Cette Torah vient de Dieu. Moïse l’a reçue au Sinaï et l’a transmise après lui
(Mishnah Ab ot 1,1). La ‘Torah de Moïse’ est la ‘Torah du Seigneur’ (Esd 7, 6.10 ; Lc 2, 22 -23). Israël
reçoit cette Torah pour en vivre et pour en témoigner dans le monde.
‘Le Service (Abodah)’, c’est le culte rendu à Dieu dans le Temple de Jérusalem, ‘culte de l’au tel’
qui comporte l’offrande de sacrifices. C’est aussi, plus largement, la Prière (Tefillah) qui aujourd’hui,
après la destruction du Temple et la suspension des sacrifices, tient lieu de sacrifices. Le Service pourrait
être aussi, selon certains maîtres, le Talmud Torah, c’est -à-dire l’Etude-Enseignement de la Torah dont
nous reparlerons plus loin.
‘L’échange d’actions inspirées par l’amour (Gemilut hasadim)’, c’est l’amour du prochain qui
résume ‘toute la Torah’, selon Hillel l’Ancien (T.B. Shabbat 30 b-31a), ou ‘la Loi (Torah) et les Prophètes’
selon Jésus se ramène à l’amour du prochain ( Mt 7, 12) ; Mc 12, 31).