la disparition progressive de la mer d`aral

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LA DISPARITION PROGRESSIVE DE LA
MER D’ARAL
Lefrançois Amandine
Chantegros Yvan
Magnan Paul
ISE 2011/2012
PLAN
I.
Présentation
A. Localisation
B. Situation initiale
C. Evolution historique
D. Causes
II.
Les conséquences de la disparition de la mer d’Aral
E. Le bilan environnemental
F. Le bilan économique et social
III.
Les solutions pour enrayer la disparition de la mer d’Aral.
I.
Présentation
A. Localisation
La mer d'Aral est un lac d'eau salé d'Asie centrale. Elle est partagée entre
le Kazakhstan au nord et l'Ouzbékistan au sud. Dans les années 1960, le lac d’Aral,
communément appelé « Mer d’Aral » était le 4e lac du monde avec une superficie
de 66 458 km². Il était alimenté par deux cours d’eau importants, le Sir Darya (Iaxarte) et
l’Amou Darya (Oxus).
Cinq pays se partagent le bassin du lac d’Aral : Kazakhstan, Tadjikistan, Kirghizistan,
Turkménistan, Ouzbékistan. Du point de vue géologique, la mer d’Aral est relativement
jeune, environ 10 000 / 20 000 ans, au confluent des deux fleuves précités. Au cours de sa
turbulente histoire, l’Amou Darya s’est jeté dans la mer Caspienne. Environ 35 millions de
personnes peuplent le bassin de cette mer et se trouvent placées sous son influence.
B. Situation initiale
En 1960, la mer d’Aral s’étendait sur une surface de 68 000 km² pour un volume de 1040 km3.
Son niveau s’élevait à 53m au dessus du niveau de la mer et sa salinité était de 10 g/l.
Alimenté par deux affluents principaux, l’Amou Daria et le Syr Daria, le bassin-versant de ce
lac d’eau salée compte 17 752 glaciers pour une superficie d’environ 1 549 000 km2
Jusqu’en 1995, il existait un canal artificiel qui permettait des échanges d’eau entre la petite
mer au nord et la grande mer au sud.
Classée, il y quelques années, 3ème plus grande surface d’eau douce sur Terre, le Syr Darya est
le plus long fleuve d’Asie Centrale (3 019 kms) ; il prend sa source au Kirghistan ; son débit
moyen est équivalent de celui de la Seine. Il parvient encore à la petite mer d’Aral mais ne
charrie plus que des eaux usées et de drainage.
L’Amou Darya, prend sa source dans le Pamir, au Tadjikistan, et n’atteint plus la mer d’Aral.
C. Évolution historique
En 1960, encore alimentée par les puissants fleuves Amou-Daria et Syr-Daria, la mer
d’aral couvrait 68 000 km2. En 2000, cette superficie était divisée par deux, puis en trois. L'un
de ces trois segments s’est asséché cette année... Cet assèchement est dû au détournement des
deux fleuves, pour irriguer les cultures de coton, est une des plus importantes catastrophes
environnementales du xxe siècle. Progressivement la mer d'Aral s'est asséchée, voyant son
niveau baisser de 20 à 60 centimètres par an.
Année
1960
1985
1989
1990
1992
1994
1995
1998
2010
Surface
(km2)
68 000
45 700
40 700
38 900
36 100
35 200
31 500
21 000
21 060
Volume (km3)
1040
468
320
282
231
248
248
181
124
Niveau de la
mer (m)
53
41
39
38.5
37.5
37
37
34.8
32.4
Salinité (g/l)
10
23
30
45
70
La séparation entre Petite mer au nord et Grande mer au sud date de 1989. L'évolution
a d'abord laissé présager la disparition totale de la seconde à l'horizon 2025, avant que des
travaux d'aménagement ne soient opérés. En 2007, on constate que le niveau de la petite mer
d'Aral (nord) remonte spectaculairement, plus vite que ne l'espéraient les experts
D. Causes
La cuvette aralienne, centre d’une immense dépression, le Touran, est au cœur d’un
phénomène essentiel en Asie centrale « l’endoréisme » : la dépression n’a aucun débouché sur
un quelconque océan, avec, pour conséquence induite, que tous les produits de l’activité
humaine, polluants ou non, ne peuvent s’échapper sur l’océan mondial, grand collecteur de
toutes les pollutions.
La tragédie d’Aral remonte à des décennies. La mer a commencé à se retirer dans les années
60. Elle s’est transformée en une immense lagune saumâtre ou plutôt en une succession de
lacs, créant ainsi des problèmes considérables dans les pays d’Asie Centrale. On observe très
nettement une diminution de surface importante et rapide, laissant même présager un
assèchement total à relativement brève échéance. Durant les dernières 35 années, le niveau de
la mer a baissé de plus de 30 % - environ 20 mètres,
la hauteur d’une construction de 6 étages- et son
volume s’est réduit de 70 % La salinité des eaux a
considérablement augmenté pendant les années 70,
et elle n’a cessé de croître depuis ; aujourd’hui, elle
est plus élevée que dans la mer Noire. La teneur de
l'eau en minéraux a quadruplé, passant à 40
grammes par litre, rendant impossible la survie de la
plus grande partie des poissons de mer et de la faune
sauvage. On y comptait une vingtaine d’espèces
différentes, dont des esturgeons, des barbeaux, des carpes, des sandres et des poissons chats,
et seules deux espèces survivent aujourd’hui, dont des limandes.
Pendant ces dernières décennies, l’activité économique intense le long des fleuves qui
s’écoulent vers la mer d’Aral a rompu l’équilibre écologique de la mer, déjà fragile. La plus
grande partie de leurs eaux se perd, utilisées pour l’irrigation des champs de coton et de riz.
Cette eau n’atteint jamais la mer, même après irrigation ; elle contient une concentration
élevée de sels et de produits chimiques et elle ne retourne plus vers les fleuves s’accumulant
dans des trous lesquels deviennent autant de lacs salés, morts.
Le site d’Aralsk 7, légué par les Soviétiques, a été le théâtre, jusqu’à sa fermeture en 1992, de
divers essais d’armes atomiques et bactériologiques. Outre des tests à ciel ouvert sur des
spores d’anthrax, les scientifiques soviétiques ont expérimenté un cocktail d’agents
biologiques telles que la brucellose, la peste, la tularémie, la fièvre Q ou l’encéphalopathie
vénézuélienne. Certains germes peuvent survivre dans le sol pendant des années.
L’assèchement de la mer d’Aral a pour origine la
surexploitation du coton. Sa culture sur des surfaces
irriguées était traditionnelle dans cette région, mais
en 1959 les planificateurs soviétiques ont mis en
place un plan de conquête des terres vierges, faisant
passer en vingt ans la superficie irriguée de 4,5
millions d’hectares à plus de 7 millions. Les canaux
prélèvent 60 % du débit des deux fleuves, et l’apport
d’eau à la mer d’Aral de 55 millions de m3 par an en
1960 s’est réduit à 7 millions.
Au début des années 1960, les économistes soviétiques décident d’intensifier la culture du
coton en Ouzbékistan et au Kazakhstan. Les fleuves Amou-Daria et Syr-Daria sont détournés
pour irriguer les cultures (Canal du Karakoum). Ainsi en 1960 entre 20 et 60 km3 d'eau douce
sont détournés. Le manque d'apport en eau assèche alors peu à peu la mer dont le niveau
baisse de 20 à 60 cm par an. Elle a perdu 50 % de sa surface depuis 1960, 14 mètres de
profondeur et 60 % de son volume; en 2005 elle a perdu les 3 quarts de sa superficie, ce qui a
augmenté la salinité de l'eau et tué quasiment toute forme de vie.
La population locale a également augmenté rapidement, passant de 14 millions à
quelque 27 millions durant la même période, tandis que les prélèvements totaux en eau ont
presque doublé, s'établissant à 120 km3, dont plus de 90 % consacrés à l'agriculture. Le
schéma d’aménagement soviétique était basé sur la construction d’une série de barrages sur
les deux fleuves afin de créer des réservoirs à partir desquels étaient alimentés 40 000 kms de
canaux. Les champs ont fleuri mais dans de telles aires de monocultures, les fermiers ont dû
utiliser des quantités massives de pesticides. Avec l’irrigation, sur tout le territoire de l’Asie
Centrale, le sel est remonté en surface où il s’est accumulé. Lorsque le barrage de Tahaitash a
été construit, accompagné de la construction de barrages au Kazakhstan, il ne resta plus d’eau
dans le lit du fleuve. A ce moment, le niveau de la mer a commencé à baisser. Cela s'est soldé
par ce que les experts des ressources en eau qualifient de "rupture de l'équilibre hydrique
établi" dans le bassin d'Aral. De nombreux affluents mineurs ont été tellement surexploités
qu'ils ont cessé de contribuer directement au débit de l'Amou-Darya et du Syr Daria. La faible
efficacité de l'irrigation - imputable au non-revêtement des canaux et à un mauvais réseau de
drainage - a conduit à l'engorgement et à la salinisation des sols sur environ 40% des terres
irriguées. L'emploi excessif de pesticides et d'engrais a pollué les eaux de surface et les eaux
souterraines, tandis que les écosystèmes du delta ont tout simplement péri : en 1990, plus de
95 % des marais et terres humides avaient été remplacés par des déserts de sable et plus de 50
lacs du delta, couvrant 60 000 ha, s'étaient desséchés.
II. Les conséquences de la disparition de la
mer d’Aral
La situation hydraulique de la Mer d’Aral, exposée précédemment, a évidemment de
graves conséquences sur son environnement. En effet, l’action de l’Homme est à l’origine
d’une évolution beaucoup trop rapide au regard de l’évolution naturelle des eaux de la
planète. Ce qui perturbe les écosystèmes liés à cette mer : ils ne peuvent pas co-évoluer
normalement avec celle-ci puisque sa disparition est trop brusque par rapport à l’échelle de
temps de l’évolution naturelle de la planète.
La modification et l’assèchement des fleuves Amou-Daria et Syr-Daria ont donc
redessiné les contours de la mer d’Aral, mais aussi complètement chamboulé son équilibre
écologique. Ceci implique des changements notoires de la vie sous-marine à l’intérieur de la
mer, mais également de la vie terrestre aux alentours de celle-ci. Ainsi, on a constaté la
disparition de plusieurs espèces végétales ou animales et l’adaptation forcée de certaines pour
survivre. Par ailleurs, l’Homme fait partie des espèces directement touchées par la disparition
des eaux. De nombreuses populations ont vu leur environnement changer en quelques années
et ont dû modifier leur mode de vie pour s’adapter à la nouvelle situation de la Mer d’Aral.
Ce sont ces deux aspects que nous allons maintenant traiter. Nous nous intéresserons
d’abord aux bouleversements écologiques, puis au cas particuliers de l’Homme et aux
conséquences économiques et sociales de la disparition de la Mer d’Aral.
A. Le bilan écologique
On peut ici parler de véritable catastrophe naturelle. En 30 ans, la Mer d’Aral a perdue
environ 70% de sa surface et 90% de son volume. Le retrait des eaux et l’évaporation laissent
derrière eux des étendus désertiques où le sol est recouvert de sel et de quantités gigantesques
de pesticides et d’insecticides qui étaient autrefois charriés par les fleuves après avoir été
utilisé dans les plantations de coton. Ainsi, les eaux sont polluées et possèdent un taux de
salinité beaucoup trop élevé et les terres alentours sont stériles. On observe donc que le niveau
décroissant de l'eau et sa détérioration ont entraîné une dégradation des sols, mais également
des changements climatiques.
En effet, on estime aujourd'hui que près de 40 000 km² de la Mer d'Aral ont disparu.
La disparition de cette énorme quantité d'eau entraîne un changement climatique. On passe
d’un climat tempéré de bord de mer à un climat continental. Par le passé, cette mer était
considérée comme un régulateur des vents froids venant de Sibérie. Désormais les étés sont
secs et courts et les hivers sont plus froids. L'amplitude thermique s'est accru : de -25°C en
hiver et +35°C en été, on est passé à -50°C en hiver et +50°C en été. Les vents forts de la
région atteignent des vitesses de près de 90km/h et provoquent des tempêtes de sable plus de
90 jours par an. Les pluies aussi sont en perpétuel changement. Par exemple, la teneur en sel
est passée de 1 tonne par km² en 1956 à 45 tonnes par km² entre 1962 et 1967 et ne cesse
d'augmenter aujourd'hui. Par ailleurs les pluies acides se sont intensifiées, notamment de par
la présence de pesticides dans l'air dus aux rejets de poussières par les usines traitant le coton.
Tous ces éléments ont donc contribué à l’altération de la faune et de la flore de la mer
d’Aral. Grâce à sa grande limpidité et à ses faibles profondeurs, la Mer d'Aral était un
réservoir original de biodiversité par rapport aux écosystèmes des autres mers. Mais les
différents facteurs décrits ci-dessus sont venus bouleverser profondément l’équilibre de ces
écosystèmes. Ainsi, la flore de cette mer a subi des dommages importants. Avant la
surexploitation des fleuves, on estimait à 700 le nombre d’espèces végétales dans la Mer
d’Aral. Mais la diminution du volume des eaux a engendré l’augmentation de la salinité.
L’eau est passé du statut « d’eau saumâtre » au
statut « d’eau de mer », c'est-à-dire qu’elle
contenait plus de 30 g/L de sel. Aujourd’hui, les
eaux de cette mer sont dites « eaux salées », leur
salinité est supérieure à 50 g/L. De plus, les fonds
marins sont contaminés par les produits chimiques
(pesticides et insecticides) utilisés pour la culture
du coton. On a donc assisté à la disparition de
nombreuses espèces végétales. Au début des
années 80, la plupart des espèces d'algues
planctoniques des eaux saumâtres avait disparu de
la Mer d'Aral puis, la salinité de la mer ayant
considérablement augmenté, ce fut au tour d'espèces d'algues marines. De nos jours, 160
espèces d'algues et 170 espèces de plancton ont été recensées, soit deux fois moins que par le
passé. La salinité est tellement forte, que même des espèces habituées à vivre dans des eaux
de mer ne survivent pas en Mer d’Aral.
Dans le bassin de cette dernière, la flore régionale est normalement impressionnante :
elle est constituée de 1200 espèces de plantes à fleurs. En effet, la flore des côtes de la Mer
d'Aral possède plus de 400 types de végétaux. En revanche, les milieux asséchés du bassin ne
possèdent pas autant de biodiversité. A cause du retrait des eaux et de la stérilité des sols, on
ne trouve plus que 30 espèces fourragères et 31 espèces de mauvaises herbes... La sécheresse
a donc causé la perte d'un grand nombre d'espèces et a en plus entraîné une diminution de la
période de végétation.
La nouvelle composition hostile des eaux a bien
évidemment aussi eu un impact important sur la faune du
bassin d’Aral. Avant les années 30, on dénombrait 24 espèces
endémiques dans les eaux de cette mer, comme l’esturgeon de
Kaufmann (présenté ci-contre). Puis l'homme y a introduit une
certaine quantité de poissons et d'invertébrés comme des
crabes ou des crevettes. Elles se sont plus ou moins bien
adaptées, certaines éradiquant même les anciennes espèces.
Ainsi la Mer d'Aral a compté jusqu'à une trentaine d'espèces
différentes. Cependant les conditions déjà décrites
précédemment ont presque tué tous les animaux d'eau douce et
d'eau saumâtre. En 1998, on ne comptait plus que cinq espèces
de poissons dans la grande Aral et un peu plus dans la petite
Aral qui présente un taux de sel un peu moins important, étant
alimentée par le Syr-Daria. Mais l'accroissement des
populations de poissons très limité en raison de la disparition de leur nourriture et
l’augmentation continue de la salinité ont eu raison de la quasi-totalité des espèces.
Aujourd’hui, les 24 espèces endémiques de la mer d’Aral ont disparu. Seules deux espèces
introduites subsistent : une espèce de raie importée et sélectionnée pour survivre face à de tels
taux de salinité, dont la survie à long terme n’est même pas assurée, et une crevette du nom de
Artemia (présentée ci-contre). Il s’agit d’une crevette qui vit en eau salée et qui est la seule
espèce animale certaine de survivre même si la salinité augmente encore. Elle représente
également un enjeu commercial, puisque ces œufs sont utilisés pour les élevages de crevettes
et de poissons.
La vie sous-marine de la Mer d’Aral a donc subit d’importants dégâts puisqu’environ
50% de sa flore a disparu et que sur 30 espèces animales, seulement deux vivent encore. Aux
alentours, sur les terres asséchées, on ne trouve que des espèces fourragères et de la mauvaise
herbe, ce qui ne favorise pas le développement de la vie animale. On peut alors qualifier ce
milieu de stérile et d’hostile. Ces terres favorisent les vents et les tempêtes de sables qui
transportent le sel et les poussières chimiques jusque dans les villes et les exploitations
agricoles des populations implantées dans le bassin d’Aral. Ce qui nous amène à nous
intéresser aux conséquences de la disparition de la mer sur l’Homme.
B. Le bilan économique et social
Nous avons déjà souligné qu’en plus de la salinité présente sur plus des 3/4 des sols
irrigués, les pratiques agricoles, dépendantes des pesticides et appliquées durant plusieurs
années de culture ont entraîné de hautes teneurs en pesticides et fertilisants dans les eaux, l'air,
les sols. Tout le milieu est donc contaminé et par conséquent les chaînes trophiques.
L’Homme du bassin d’Aral vit donc dans un environnement où l’eau est toxique, où les sols
et l’air contiennent du sel et des poussières chimiques dangereuses pour la santé, et où même
la nourriture est contaminée.
De ce fait, un très grand nombre de problèmes de santé ont été relevés chez la
population de la zone de la Mer d'Aral : des maladies rénales, la tuberculose, des anémies, la
typhoïde, des problèmes respiratoires aigus, des cancers, des maladies diarrhéales sont les
principaux problèmes de santé endurés par la population de la région.
Hôpital de Mouniak, port de la mer d’Aral.
Les malades sont atteints de tuberculose.
Par exemple au Kazakhstan, qui est la deuxième plus grande région de l'ancienne
URSS, avec seulement 18 millions d'habitants, la situation est particulièrement alarmante. Les
statistiques montrent que dans cette zone l'espérance de vie décline alors que les différences
entre hommes et femmes s'accentuent. D'après les statistiques officielles de 1993, l'espérance
de vie pour les hommes était de 63,2ans, de 72,7 ans pour les femmes. La fréquence et la
répartition de la tuberculose, des tumeurs malignes, des maladies psychiatriques et de
l'alcoolisme ont été signalées comme étant en augmentation. Le nombre de grossesses est
constant dans la région mais elles se terminent en fausses couches ou bien le bébé est mort-né
ou handicapé. Le taux de mortalité infantile est évalué à plus de 110 pour 1000, soit un des
plus élevé du monde. Et la grande majorité des femmes souffre d'affections génitales.
Outre les problèmes de santé, c’est toute la vie des populations vivant dans cette
région qui a été modifiée. Le changement brutal de l’environnement a évidemment touché de
plein fouet les habitants du bassin d’Aral. Toute l’organisation sociale et économique a été
bouleversée. La pêche et l’agriculture autours desquelles s’organisait la société n’ont plus le
même visage.
La pêche avait un rôle marginal à l’échelle de l’URSS, néanmoins en 1964, elle
fournissait 10 % du caviar soviétique. La mer comptait alors une vingtaine d’espèces de
poissons et la pêche industrielle et ses activités dérivées (conserveries) faisaient vivre une part
importante de la population. Ces
activités ont pratiquement cessé en
1982, en raison de la salinité des
eaux qui a conduit à l’extinction de
la plupart des espèces. De plusieurs
centaines de milliers de tonnes dans
les années cinquante, les prises dans
la partie sud de la mer avoisinent ces
dernières années 4 000 tonnes. La
communauté des pêcheurs qui
comptait environ 60 000 personnes
s’est dispersée et les villages ont été abandonnés. Mouniak, au Karakalpakstan, jadis port de
pêche de 40 000 habitants se retrouve aujourd’hui au milieu des terres à plus de 180 km de la
mer et a perdu les trois quarts de sa population.
En ce qui concerne l’agriculture, la diminution de la mer d’Aral qui a eu une incidence
sur le climat, devenu plus continental et le manque d’eau ont complètement modifié le travail
des agriculteurs. La période de végétation ne
dure plus en moyenne que 170 jours par an.
La salinité des sols et la poussière ont
contribué à réduire la faune sauvage, mais
également l’élevage car les aires de
pâturages ont diminué de 80 % et la
production de fourrage de moitié. Le déficit
en eau et la salinisation des sols, résultat
d’un drainage insuffisant et de techniques
d’irrigation par inondation qui provoquent
l’évaporation de l’eau en surplus et la
précipitation du sel en surface (technique
des marais salants) ont conduit à une très
forte diminution des surfaces ensemencées
et des rendements. Ainsi au Karakalpakstan, celui du maïs fourrager est quatre fois moins
important qu’il y a vingt ans et près de huit fois moins dans la région de Mouniak.
Aujourd’hui, les kolkhozes sont à l’abandon, 80 % de la population active est au chômage et
vit des maigres subsides du gouvernement.
L’exemple de la situation de Moussa Achimbaev :
Moussa Achimbaev est né dans le hameau de Biltau au nord de Tokhtokoupir il y a soixantehuit ans. Il y a passé toute sa vie et élevé ses huit enfants. A l’époque, les rivages de la mer
d’Aral se situaient à quelques kilomètres. Aujourd’hui l’eau a reculé de 150 km en direction
du nord-ouest. Les anciens champs de culture ne sont plus que de vastes étendues recouvertes
de sable et de plaques de sel.
Sur les vingt-huit maisons du hameau, seules sept ou huit sont encore habitées. Tous les
habitants sont partis au Kazakhstan. Il n’est pas sûr qu’ils y aient trouvé de meilleures
conditions de vie, mais comme le souligne Moussa Achimbaev : ”Ici il n’y a plus rien à faire.
Les machines [agricoles] encore utilisables ont été vendues par le directeur du kolkhoze, qui
s’en est mis plein les poches. A l’époque soviétique, il aurait été exécuté, mais de nos jours
tout est permis”.
Moussa Achimbaev devant sa ferme. Le changement de
climat a provoqué une réduction des précipitations et donc
un manque crucial d’eau empêchant les cultures : les
machines agricoles rouillent.
Il perçoit environ 26 euros par mois du gouvernement. Sa fille enseigne à l’école du
village voisin mais n’a pas été payée depuis six mois. Les traitements et les médicaments se
font attendre. L’assèchement de la mer d’Aral a provoqué un désastre humanitaire après un
effondrement économique. La tuberculose est devenue la maladie des pauvres. Le très bon
système de santé de l’ancien régime a disparu avec l’Union Soviétique.
III. Solutions pour enrayer la disparition de
la Mer d’Aral.
Dès 1982 déjà, le gouvernement de l’URSS a tenté d'élaborer un plan directeur pour les
ressources en eau pour les bassins fluviaux du Syr Darya et de l'Amou Darya et il a fixé des
limites strictes pour les prélèvements en eau.
A la fin de la période soviétique, les cinq nouveaux Etats indépendants d'Asie Centrale ont
mis sur pied une commission mixte pour la coordination de l'eau afin de réglementer la
distribution d'eau dans le bassin et de consolider l'adoption d'une stratégie régionale,
progressivement mise en place.
Face à la gravité du problème de la mer d’Aral et à la nécessité de mettre en œuvre des
mesures immédiates pour sa réhabilitation, les gouvernements des républiques d’Asie
centrale, les scientifiques et les spécialistes de la région et les organisations internationales ont
adopté le 20 septembre 1995 dans la ville de Noukouss, la déclaration des Etats de l’Asie
Centrale et des Organisations Internationales sur les problèmes du développement stable du
bassin de la mer d’Aral. Cette déclaration prévoit la mise en œuvre d’un système plus
équilibré et plus scientifique d’agriculture et de sylviculture ainsi qu’une irrigation plus
efficiente grâce à des méthodes plus économiques pour l’utilisation des ressources en eaux et
la mise en pratique de technologies perfectionnées en ce qui concerne l’arrosage et la
protection de l’environnement.
Afin d'entreprendre des mesures urgentes, la Fondation Internationale pour la Protection de la
mer d’Aral a élaboré un projet global sur la gestion des ressources en eaux en Asie Centrale,
de l'environnement et sur la réalisation des programmes sur le bassin de la mer d'Aral, géré
par l'Agence GEF, partie intégrante de la Fondation, portant sur :
-
la gestion des ressources nationales et régionales en eaux et en sels.
la formation de l'opinion publique.
la garantie de sécurité des digues.
la surveillance des eaux transfrontalières.
la restitution des zones humides.
Mais la lenteur et les multiples retards des étrangers ou de leurs gouvernements à intervenir
ont eu un effet positif. Excédée par des années de promesses non tenues, la population du
Kazakhstan a réuni, à la surprise générale, 2,5 millions de dollars pour construire elle-même
un barrage de sable, de 14 kms de long et de 30 mètres de large, qui a transformé en lac la mer
d’Aral du Nord, près de la ville d’Aralsk.
Pour empêcher que la petite Aral ne se vide complètement, le maire de la ville d'Aralsk,
Alachibaï Baïmirzaev a fait construire en 1995 une digue de vingt-deux km de long en sable
et roseaux. Achevée en 1996, elle permit immédiatement d'éviter que les eaux du fleuve ne se
perdent dans le delta entre Petite et Grande mer et de faire remonter le niveau de la Petite mer.
Un semblant de vie renaquit autour de la mer, qui avança de plusieurs kilomètres : roseaux,
oiseaux, rongeurs et renards, et même quelques poissons. Une tempête a détruit cette digue en
1999, et le niveau de la mer a reperdu partiellement ce qui avait été gagné.
Les Kazakhs, expliquent leurs dirigeants, se sont aussi efforcés de puiser moins d’eau que par
le passé dans le fleuve Sir Darya dont le débit a ainsi augmenté dans la petite mer d’Aral du
Nord. Résultat : son niveau est remonté de 3 mètres pour la première fois en trente ans,
ramenant verdure et oiseaux dans la zone désertifiée. L’afflux d’eau douce y a réduit la
salinité de la mer rouvrant ainsi des perspectives pour la pêche et rendant l’espoir à la
population.
Une autre solution consisterait à laisser davantage d’eau dans l’Amou Darya, ce qui
menacerait l’agriculture existante, notamment en Ouzbékistan, où se situe l’essentiel de son
cours. Cette solution risque de se heurter à une résistance acharnée des paysans de cet Etat. Il
est tout à fait improbable que l’Ouzbékistan, second exportateur mondial de coton accepte de
se désengager d’une culture qui est sa première source de devises.
Au sommet récent du CIE, les experts ont suggéré de dérouter des fleuves se jetant dans la
mer Caspienne ou quelques fleuves de Sibérie – des hydrologues soviétiques avaient déjà rêvé
de détourner, par le sillon de la dépression de Tourgaï, des fleuves sibériens, au profit de la
mise en valeur des déserts du sud - vers l’Asie Centrale de manière à sauver la mer d’Aral.
Les auteurs du projet veulent faire d’une pierre deux coups, irriguer les plantations de coton et
arrêter l’assèchement de la mer. Cependant, ce projet peut n’être jamais mis en œuvre en
raison de l’équilibre écologique, déjà très fragile dans la région. Au nombre des propositions
figure également le transfert d'eau de la mer Caspienne dans la mer d'Aral.
Chacun des projets pourrait coûter plusieurs millions de dollars ; les pays d’Asie Centrale
n’ont pas cet argent et aucune décision n’a été arrêtée. Ces options et solutions ont toutes été
étudiées dans le cadre de la stratégie régionale relative aux eaux qui, toutefois, n'intéresse que
les pays de l'ex-Union soviétique. A un stade plus avancé, l'Afghanistan, qui occupe environ
12 % du bassin de la mer d'Aral, prendrait part aux accords afin de garantir une gestion
durable des ressources en eau.
Sur le plan des réalisations concrètes, des progrès sont progressivement enregistrés. On tente,
avec déjà quelques bons résultats, d'utiliser de plus grandes quantités d'eaux de drainage et
d'eaux usées agricoles et d'introduire des plantes tolérant mieux le sel. Environ 6 km3 par an
d'eaux de drainage ou d'eaux usées agricoles sont directement réutilisés pour l'irrigation, et
environ 37 km3 par an retournent dans les dépressions naturelles ou des fleuves où,
mélangées avec les eaux douces, elles peuvent être réutilisées pour l'irrigation ou à d'autres
fins.
Bien que ces améliorations aient permis de poursuivre le développement de l'irrigation, elles
sont considérées comme non durables. Les cinq républiques d'Asie Centrale ont décidé de se
concentrer maintenant sur la gestion de la demande, visant à réduire les prélèvements en eau
par hectare en renforçant l'efficacité globale de l'irrigation : cela comporte la remise en état et
le revêtement des canaux, ce qui réduira les pertes, et une réglementation pour un meilleur
plan d'irrigation.
Plusieurs pays ont introduit des droits sur l'eau, infligeant des amendes à ceux qui utilisent des
quantités d'eau dépassant les seuils fixés pour les exploitations agricoles et contrôlant les
plantes mises en culture sur les périmètres d'irrigation. En conséquence, les plantes cultivées
qui ont de gros besoins en eau - le riz dans le Kazakhstan et le coton au Turkménistan et en
Ouzbékistan - ont été partiellement remplacées par d'autres cultures exigeant moins d'eau.
Barrage de Kok-Aral
La Banque mondiale a décidé de financer la construction du barrage en béton de Kok-Aral
ainsi qu’une série de digues en vue d’éliminer l’excès de sel par des déversoirs et de faire
remonter le niveau de l’eau. Ce projet controversé dont les travaux ont débuté en 2003 devrait
permettre à terme à la Petite mer de regagner environ 500 km2, mais il risque également de
condamner la Grande mer à un assèchement encore plus rapide, même si une vanne située audessus du barrage prévoit de reverser le trop-plein d’eau dans la Grande Aral, située pour une
bonne part en Ouzbékistan
Au Kazakhstan, un espoir renaît avec les projets du président Noursoultan Nazarbaïev. Il est
en effet question de rehausser le niveau de la petite mer de 6 m, ce qui permettrait à l'industrie
de la pêche de renaître. Ce projet estimé à 120 millions de dollars serait financé
principalement par les revenus du pétrole du Kazakhstan. Ce projet prévoit également le
creusement d’un canal de jonction entre les deux bassins et la construction de nouvelles
structures pour exploiter l’énergie hydroélectrique.
Depuis le début des travaux, la profondeur moyenne de la Petite Aral est passée de moins de
30 m à 38 m, le niveau de viabilité étant estimé à 42 m. Alors que les spécialistes de la
Banque mondiale avaient prévu que l’eau ne remonterait pas avant trois ans – d’autres
hydrologues ayant même décrété que la mer d’Aral était irrémédiablement perdue –, la petite
mer a déjà regagné 30 % de sa superficie, ce qui représente plus de 10 milliards de mètres
cubes d’eau. Cependant, pour certains responsables kazakhs, il ne faut pas se réjouir trop tôt
car il faudra probablement des décennies pour résoudre les problèmes.
Pour lutter contre la désertification du bassin de l'Aral, la Banque mondiale et le
gouvernement kazakh projettent de restaurer les forêts de saxauls, un arbuste dont les fins
rameaux verts puisent l'eau à une dizaine de mètres de profondeur.
La Petite Mer d'Aral sera sauvée. Mais la Grande Mer est condamnée, au mieux réduite à son
bassin occidental, un lac saturé de sel. Dépendantes du même réseau hydraulique, les cinq
républiques d'Asie centrale ont mis en place une politique commune de gestion de l'eau. Sans
grand résultat jusqu'ici. Seul le Kazakhstan, grâce à sa manne pétrolière, se préoccupe de son
milieu naturel. Mais pour les États plus pauvres de la région, la protection de l'environnement
n'est toujours pas à l'ordre du jour. En Ouzbékistan notamment, principal pays concerné, le
coton demeure une source de revenus à l'exportation (24 % du PIB) à laquelle le
gouvernement ouzbek ne peut ni ne veut renoncer. Qui plus est, les relations entre Tachkent et
Astana sont exécrables. Plus en amont, le Kirghizstan souhaite développer ses capacités
hydroélectriques, aux dépens de l'irrigation en aval. Outre les risques qu'ils font peser sur
l'écosystème, ces désaccords sur le partage de l'eau constituent des sources de conflits
potentiels.
Un des plans de sauvetage de la mer d’Aral.
BIBLIOGRAPHIE :
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http://fr.wikipedia.org/wiki/Mer_d%27Aral
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http://www.vincentrobinot.fr/Aral-galerie/
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http://www.canapa-info.ch/info/fr/Ecologie-Le-desastre-ecologique-de.html
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http://www.partagedeseaux.info/article102.html
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