Peur de la récidive du cancer

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Une manifestation anxieuse
spécifique à l’oncologie:
La peur de la récidive du cancer
Sébastien Simard, M.Ps., Ph.D.
Psycho-oncologue et chercheur associé à l’ IUCPQ
Professeur associé à la Faculté des Sciences infirmières et chargé de cours à l’École de psychologie
de l’Université Laval
© Sébastien Simard (18 février 2011) dans le cadre de l’activité “Mise à jour 2011 – Oncologie thoracique”. IUCPQ, Québec, Qc.
Objectifs
1.
Reconnaître l’importance et la complexité des
manifestations anxieuses en oncologie.
2.
Mieux identifier et comprendre l’un des
problèmes le plus fréquemment rapporté par les
patients: la peur de la récidive du cancer.
L’anxiété, un des signes vitaux
Stratégie canadienne pour le contrôle du cancer
¾
Signes vitaux:
1) température
2) respiration
3) rythme cardiaque
4) pression sanguine
5) douleur
6) détresse psychologique
¾
Manifestation les plus communes:
¾ Dépression
¾ Anxiété…
_________________________________________
Bultz & Carlson, 2005; Holland & Bultz, 2007
L’anxiété une réaction adaptative
Trouble psychique causé par le sentiment de l’imminence d’un
évènement fâcheux ou dangereux s’accompagnant de
phénomènes physiques (palpitation) comportementaux
(agitation), cognitifs (discours interne) et émotionnels (peur).
Réponse fréquence face à une menace qui peut être
adaptative ou devenir pathologique à certain niveau ou
dans certaine circonstance.
¾
Le cancer (incertain et dangereux) est un terrain fertile à
l’éclosion de l’anxiété sous plusieurs.
Quand l’anxiété devient problématique
1.
Disproportionnée comparativement à la menace
¾
2.
Persiste et se détériore sans intervention
¾
3.
En oncologie, la menace est réelle et varie selon la trajectoire de la
maladie. Comment évaluer la menace? Selon quelle perspective? Estil normal d’avoir peur?
En oncologie, la maladie est labile et fluctue dans le temps. Quels
sont les meilleurs prédicteurs?
Cause une perturbation significative (i.e., détresse importante ou
perturbation du fonctionnement)
L’anxiété clinique en oncologie
Prévalence:
10% - 30% > population générale
Cancer poumon: 23% - 47% > autres types cancer
Comorbidité:
Trouble de l’humeur (66% troubles anxio-dépressifs)
Développement:
31% = 6 mois avant le diagnostic
38% = 6 mois avant et 6 mois après le diagnostic
31% = 6 mois après le diagnostic
Difficile d’identifier la nature et la sévérité de l’anxiété, de
même que sa relation avec le cancer. Surtout, lorsqu’elle
prend naissance dans la trajectoire de la maladie.
_________________________________________
Atesci et al., 2004; ; Brintzenhofe-Szoc et al., 2009; Deimling et al., 2006; Härter et al., 2001; Kissane et al., 2004; Levin &
Alici, 2010; Mehnert et al., 2007; Okamura et al., 2007; Scheier et al., 1994; Singer et al., 2005; Stark et al., 2002; Van’t Spijker
et al., 1997; Wilson et al., 2007
L’anxiété clinique sous toutes ses formes
¾
Troubles d’adaptation (humeur anxieuse ou mixte)
¾
Trouble panique avec agoraphobie (symptômes respiratoires)
¾
Phobie simple (procédure médicale)
¾
Anxiété généralisée (anxiété vs la santé)
¾
Trouble de stress post-traumatique (choc du diagnostic)
¾
Troubles anxieux dû à une condition médicale ou induit par
une substance (hyperthyroïdie, métastase cérébrale, corticoïde)
¾
Troubles anxieux non spécifiés (ne correspond à aucun diagnostic)
¾
Facteurs psychologiques influençant une condition médicale
(ex.: agoraphobie, perfectionnisme, croyances, tabagisme)
Les embûches à un bon diagnostic
1)
Préjugé et gros bon sens
2)
Système de classification (DSM)
3)
Choix des instruments (entrevues vs questionnaires)
4)
Période de référence pour évaluer la présence d’un trouble
(étiologie, quand, intensité, durée)
5)
Chevauchement entre les symptômes somatiques de la
maladie ou des traitements
6)
Chevauchement avec les troubles psychiatriques
Réflexions
¾
La nature de l’anxiété observée en oncologie estelle spécifique à la présence d’une maladie
chronique?
¾
Devons-nous explorer d’autres formes d’anxiété?
Peur de la récidive du cancer (PRC)
« Une personne n’est jamais réellement sortie du
cancer; elle a comme une épée de Damoclès qui
continue de planer sur elle et sa famille le reste de
sa vie. »
Définition:
La peur ou l’inquiétude que le cancer puisse
revenir ou progresser dans le même organe ou
dans une autre partie du corps. (Vickberg, 2003)
Contexte
ƒ
1er ou 2e problème en importance
ƒ
Suscitant le plus de détresse psychologique
ƒ
Besoin d’une aide professionnelle
ƒ
Influence le suivi médical
ƒ
Résistant et difficile à traiter
¾
Peu d’études spécifiquement sur cette
problématique
___________________________________________________________
Baker et al., 2005; Herschbach, 2004; Kornblith, 2007; Muzzin et al. 1994
Modèle conceptuel
Indices internes
Sensations physiques
Émotionnelles
Indices externes
Anxiété, tristesse
Professionnels de la
santé, médias, famille
Cognitions
Antécédents
Histoire de cancer,
connaissances de base
Interprétations,
croyances,
perception risque
Comportementales
Palpations, consultations
Caractéristiques
Physiologiques
Prédisposition,
stratégies d’adaptation
Palpitations, sueurs
_____________________________________
Lee-Jones et al., (1997)
Mesures
¾
Items généraux: « Avez-vous peur d’une récidive de cancer ? »
¾
Courtes échelles reliées au construit
(Lasry & Margolese, 1992, Easterling & Leventhal, 1989; Greenberg et al., 1997; Gotay & Pagano, 2007)
¾
Questionnaires de la PRC
(Herschbach, 2005; Northouse, 1981; Vickberg, 2003)
Limites:
ƒ
ƒ
ƒ
Quelques dimensions considérées
Processus de validation incomplet
Absence de seuil clinique
_____________________________________
Thewes, Butow, Zachariae, Christensen, Simard & Gotay (en révision). Psychooncology.
Étude 1
Élaboration du questionnaire
1. Formation d’un comité d’experts en psycho-oncologie
ƒ
Établir des lignes directrices dans l’élaboration du questionnaire
2. Ébauche de l’IPRC
ƒ
Recommandations du comité
ƒ
Instruments disponibles
ƒ
Littérature sur la PRC et les troubles anxieux
3. Version préliminaire (75 items)
4. Pré-test auprès de 10 patients (différents types et stades de cancer)
Méthode
¾
Banque de patients éligibles constituée à partir des données de la Régie
d’assurance maladie du Québec (RAMQ)
¾
Sélection aléatoire
¾
Sollicitation par la poste
Critères d’inclusion
9
Consultation en oncologie à L’HDQ
9
Diagnostic de cancer du sein, de la prostate, du poumon ou
colorectal au cours des 10 dernières années
9
Âgés entre 18 et 80 ans
Participants (n = 600)
Taux d’acceptation: 35 %
Analyse factorielle- axes principaux avec rotation oblique
Dimensions
Nbre
items
8
Étendue
Saturation
Variance
0-32
.42-.87
12,2 %
F2- Sévérité
9
0-36
.45-.84
11,7 %
F3- Détresse psychologique
4
0-16
.43-.79
10,9 %
F4- Stratégies d’adaptation
9
0-36
.48-.87
8,7 %
F5- Perturbation du fonctionnement
6
0-24
.66-.83
8,4 %
F6- Autocritique
3
0-12
.68-.81
6,9 %
F7- Réassurance
3
0-12
.44-.81
4,7 %
Inventaire total
42
0-168
F1- Éléments déclencheurs
63,5 %
Fidélité
Validité
Validité - suite
Conclusion
¾ Questionnaire reflétant une conceptualisation multidimensionnelle de la
PRC (42 items)
¾ Bonnes qualités psychométriques initiales
¾ Sous-échelle Sévérité (évaluation brève – dépistage)
¾ Utiliser par plus de 20 équipes de recherche dans le monde et traduit en
6 langues.
Étude 2
Évaluer la capacité de la sous-échelle Sévérité de l’IPRC à dépister la
présence d’un niveau clinique de PRC.
Critères de sélection
9
9
9
9
Diagnostic de cancer > 6 mois < 4 ans
Habiter la région immédiate de la ville de Québec
PRC élevée ou faible
Pas de traitement actuel ou de diagnostic de métastases
Procédure
Entrevue d’évaluation effectuée par un psychologue
¾
Entrevue semi-structurée de la PRC
ƒ
Critères spécifiques de sévérité (jugement clinique)
ƒ
Entente inter-juges (35 % des entrevues, kappa = .80)
¾ SCID DSM-IV (Spitzer et al., 1997)
Seuil clinique
_________________________________
Score
Sensibilité
Spécificité
_________________________________
7
100.0
36.1
8
87.5
47.2
9
87.5
50.0
10
87.5
63.9
11
87.5
69.4
12
87.5
72.2
13
87.5
75.0
14
83.3
80.6
15
75.0
86.1
16
66.7
97.2
17
54.2
97.2
18
50.0
97.2
_________________________________
Niveau clinique de PRC (n = 1986)
Score ≥ 13
ƒ
Total
49.8 %
(CI 95 %: 47.6-52.0 %)
ƒ
Prostate
34.3 %
(CI 95 %: 30.3-38.2 %)
ƒ
Colorectal
52.1 %
(CI 95 %: 47.8-56.5 %)
ƒ
Sein
56.5 %
(CI 95 %: 53.0-60.1 %)
ƒ
Poumon
66.4 %
(CI 95 %: 59.1-73.8 %)
Note : Les scores sont pondérés selon les statistiques Canadiennes d’incidence
du cancer (2005)
Conclusion
¾
Un score de 13 ou plus à la sous-échelle Sévérité représente le seuil
optimal pour détecter un niveau clinique de PRC (rapide et efficace)
¾
Près de 50% des patients présentent des niveau clinique de PRC
ƒ
Est-ce que cette manifestation est uniforme?
ƒ
De quelle nature est-elle?
Étude 3
Participants (n = 1984)
Taux d’acceptation: 40 %
Mesures
ƒ
Inventaire de la peur de récidive du cancer (IPRC,
Simard & Savard, 2009)
ƒ
Questionnaire des intrusions cognitives (QIC; Freeston
et al., 1992)
ƒ
Questionnaire sociodémographique et médical
Profils spécifiques de PRC
Faible PRC - Faible coping
Faible PRC- Coping
PRC modérée - Coping
PRC élevée - Coping
75
70
65
Score T
60
55
50
45
40
35
30
urs
e
h
nc
cl e
é
D
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vér
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S
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D
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ch
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d
Ré
s
gi e
é
t
a
Str
S
et
cor
l
ota
Analyse de regroupement R2= 56,6 %
Nature des pensées intrusives
¾ Deux principales formes
Inquiétude
- Éléments déclencheurs identifiables
- Égosyntone
- Sous forme verbale
- Discours interne volontaire
- Fréquente et longue
Obsession
- Difficilement identifiable
- Égodystone
- Sous forme d’image
- Image ou pensée involontaire
- Flash
_________________________________________
Clark & Rhyno, 2005; Langlois et al., 2000; Langlois et al., 2004; Lee et al., 2007; Walker et al., 1996
Nature des pensées intrusives associées à la PRC
Pourcentage de patients qui cotent entre
[2] « assez » ou « parfois » et
[4] « énormément » ou « tout le temps »
Nature des pensées intrusives associées à la PRC
Conclusion
¾
Différentes manifestations de PRC qui varient en fonction de la
sévérité de la PRC et des stratégies d’adaptations utilisées
¾
La nature des pensées intrusives associées à la PRC
ƒ
ƒ
présente plus de similitude avec les inquiétudes
ƒ
varie en fonction de la sévérité de la PRC
ƒ
se déplace graduellement sur le continuum pour s’approcher des
obsessions à mesure que la sévérité augmente
Pistes d’intervention:
ƒ
Niveau faible : Psychoéducation
ƒ
Niveau modéré: Stratégies inspirées du TAG (intolérance inquiétude)
ƒ
Niveau élevé: Stratégies inspirées du TOC (exposition au scénario,
limiter la réassurance, psychopharmacologie)
En somme
¾
Anxiété fréquente et complexe en oncologie
¾
Nécessité d’explorer des manifestations spécifiques: PRC
¾
Conceptualisation multidimensionnelle de la PRC
¾
Diversité du phénomène (normal – pathologique)
¾
Pistes d’intervention ?
Psychopharmacologique:
¾
Benzodiazepines et autres anxiolytique
¾
¾
Antidépresseurs (ISRS, ISRN, Tricyclique)
¾
¾
Xanax, Rivotril, Ativan, Sérax, Restoril, Halcion
Celexa, Zoloft, Effexor, Elavil
Antipsychotiques
¾
Haldol, Stemetil, Zyprexa, Seroquel, Risperdal
Psychologiques
¾
Psychoéducation
¾
Résolution de problème
¾
Thérapie cognitive
¾
Interventions comportementales
ƒ Distraction
ƒ Désensibilisation, exposition
ƒ Relaxation, hypnose
Traitements combinés
Aide mémoire
Services psychologiques offert à l’IUCPQ
ƒ Oncologie pulmonaire
ƒ Patient et ses proches
ƒ Diagnostic jusqu’au suivi de deuil
ƒ 418-656-4615
Si vous souhaitez utiliser certaines de ces diapositives ou
encore l’Inventaire de la peur de la récidive du cancer, vous
devez demander l’autorisation de l’auteur :
[email protected]
Remerciements
9
L’Initiative Canadienne de la recherche sur le cancer de la
prostate
9
L’Alliance Canadienne de la recherche sur le cancer du sein
9
Les Instituts de recherche en santé du Canada
9
Groupe de recherche en psycho-oncologie (GREPO) du Centre
de recherche et de L’Hôtel-Dieu de Québec dirigée par la Dre
Josée Savard
9
Les nombreux participants
La plupart des personnes qui ont reçu un diagnostic de cancer sont inquiets, à différents degrés, de la
possibilité d’une récidive du cancer. Par récidive du cancer, nous référons à la possibilité que
le cancer revienne ou progresse au même endroit ou dans une autre partie de votre
corps. Ce questionnaire vise à mieux comprendre comment se manifeste ces inquiétudes. Veuillez
lire chacun des énoncés et indiquer dans quelle mesure ceux-ci s’appliquent à vous AU COURS DU
DERNIER MOIS en encerclant le chiffre approprié.
0
Jamais
1
Rarement
2
Parfois
3
La plupart du temps
4
Tout le temps
Les situations suivantes me font penser à une récidive du cancer :
1.
Des émissions de télévision ou des articles de journaux sur le cancer ou les maladies ………
0
1
2
3
4
2.
Un rendez-vous chez mon médecin ou un autre professionnel de la santé …………………...
0
1
2
3
4
3.
Des examens physiques (ex. : contrôle annuel, prise de sang, radiographie) ……...………………
0
1
2
3
4
4.
Des conversations au sujet du cancer ou de la maladie en général ………………...………....
0
1
2
3
4
5.
Voir quelqu’un malade ou entendre parler d’une personne malade …………...……………..
0
1
2
3
4
6.
Assister à des funérailles ou lire la rubrique nécrologique …………………...……………....
0
1
2
3
4
7.
Lorsque je me sens moins bien physiquement ou que je suis malade ………………………..
8.
En général, j’évite les situations ou les choses qui me font penser à une récidive du cancer ...
0
0
1
1
2
2
3
3
4
4
0
Pas du tout
9.
1
Un peu
2
Assez
3
Beaucoup
4
Énormément
La possibilité d’une récidive du cancer me préoccupe ou m’inquiète …………….……...…..
0
1
2
3
4
10. J’ai peur d’une récidive du cancer ………………………….………………………………...
0
1
2
3
4
11. Je crois qu’il est normal d’être préoccupé(e) ou de m’inquiéter à ce sujet ….………………..
0
1
2
3
4
12. Lorsque je pense à une récidive du cancer, cette pensée déclenche d’autres pensées ou images
désagréables (ex. : la mort, la souffrance, les conséquences pour ma famille) …………..…
0
1
2
3
4
13. Je crois que je suis guéri(e) et que le cancer ne reviendra pas ……….……..…………..……
0
1
2
3
4
14. Selon vous, quel risque avez-vous d’avoir une récidive du cancer? ………………………….
0
1
2
3
4
15. À quelle fréquence pensez-vous à une récidive du cancer?
0
Jamais
1
Quelques fois
par mois
2
Quelques fois
par semaine
3
Quelques fois
par jour
4
Plusieurs fois
par jour
3
Quelques heures
4
Plusieurs heures
3
Quelques années
4
Plusieurs années
16. Combien de temps par jour pensez-vous à une récidive du cancer ?
0
Je n’y pense pas
1
Quelques secondes
2
Quelques minutes
17. Depuis quand pensez-vous à la possibilité d’une récidive du cancer?
0
Je n’y pense pas
1
Quelques semaines
2
Quelques mois
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