
Les revenus des taxes douanières restent une rentrée fiscale importante pour les Etats d’Afrique
centrale. Dans le reste du monde, ce type de profil des recettes publiques est exceptionnel. Une
évolution vers un profil plus standard semble probable, ce qui donne toute sa pertinence à la
réflexion de l’article de Krugman et Elizondo.
La situation initiale de ces Etats douaniers dépend de caractéristiques technologiques et
démographiques. Comparons les phénomènes d’agglomération, par exemple, entre le Rwanda et
le Gabon. L’aire urbaine majeure est d’une taille comparable, Kigali et Libreville sont des
capitales politiques d’environ 600000/700000 habitants. Les distributions des principales villes
diffèrent : le coefficient de la loi Rang Taille est de 0,612 pour le Gabon et de 0, 88 pour le
Rwanda. Le Gabon concentre la moitié de sa population dans les deux villes principales,
Libreville et Port Gentil. Le Rwanda est souvent cité comme l’exemple d’un ensemble
« égalitaire ». La taille de la ville principale n’est pas très grande vis-à-vis de l’ensemble de la
population et beaucoup plus de petites agglomérations existent. En fait, la densité très hétérogène
caractérise la situation urbaine du Gabon : elle est généralement inférieure à 10 habitants au km²,
sauf dans les deux aires urbaines principales où elle atteint 1800 habitants au km². Le Rwanda est
un pays beaucoup plus dense.
De ce fait, il est possible d’y parler de migrations alternées quotidiennes entre deux centres
urbains : peu de distance sépare les agglomérations, par conséquent, les bassins d’emplois tracés
à partir des trajets domicile-travail peuvent avoir des contours flous et recouper plusieurs aires
urbaines. La situation au Gabon est toute différente : toute aire urbaine y est bassin d’emplois,
c’est-à-dire qu’il n’est pas matériellement possible de résider dans une aire urbaine différente de
celle où l’on travaille. Cette situation limite la disponibilité locale de la main d’œuvre dans le cas
du Gabon. Le poids relatif des deux aires urbaines principales, Port Gentil et Libreville, par
rapport à la population totale du Gabon est passé de 10% à 52% entre 1960 et 2010. Cette
dynamique de concentration urbaine a été la plus importante au moment des taux élevés de
croissance de la population qu’a connu le Gabon entre 1970 et 1990.