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observée et s’est maintenue pendant la semaine 14. Ces résultats
préliminaires démontrent que l’infliximab à 5 et 10 mg/kg n’a
aucun effet sur le score clinique composé et la dose la plus élevée
est associée à des résultats cliniques défavorables, malgré ses
effets bénéfiques apparents sur le profil des marqueurs sériques
de l’inflammation.
Comme avec l’étanercept, les raisons pour lesquelles
l’infliximab n’offre pas d’avantages chez les patients atteints
d’insuffisance cardiaque sont obscures, étant donné qu’il n’existe
pas d’études précliniques publiées sur l’utilisation de l’infliximab
dans l’insuffisance cardiaque chronique. Les mécanismes potent-
iels spécifiques à l’infliximab comprennent la capacité de
l’infliximab (contrairement à l’étanercept) à se lier au TNF
soluble ainsi que transmembranaire. Cette dernière liaison peut
entraîner une cytotoxicité induite par le complément15 qui
pourrait expliquer l’effet néfaste du médicament. D’autres
explications qui s’appliquent autant à l’étanercept qu’à l’inflixi-
mab comprennent le concept que le TNF-αcause une hyper-
trophie cardiaque et retarde l’apoptose16. Par conséquent, il peut
jouer un rôle protecteur à un certain stade de la maladie17. Quel
que soit le mécanisme, jusqu’à présent, les résultats des études
cliniques indiquent que le ciblage spécifique du TNF-αn’est
probablement pas l’approche appropriée dans le traitement de
l’insuffisance cardiaque.
Approche élargie dans
le traitement anti-inflammatoire
Il existe plusieurs raisons potentielles expliquant l’échec de
l’approche ciblée adoptée dans le traitement anti-inflammatoire
(p. ex. l’utilisation de l’étanercept et de l’infliximab) pour
améliorer les résultats cliniques chez les patients atteints
d’insuffisance cardiaque au stade avancé. Tout d’abord, un
traitement ciblé (bloquer l’action du TNF-αuniquement) peut
être trop sélectif, étant donné qu’il ne résout pas le problème de
la redondance des agents inflammatoires dans le système
immunitaire. D’autres cytokines inflammatoires dont le nombre
augmente et qui jouent probablement un rôle tout aussi
important dans la pathogenèse de l’insuffisance cardiaque ne
sont pour la plupart pas inhibées. Deuxièmement, l’approche
ciblée n’entraîne pas une augmentation des médiateurs anti-
inflammatoires modulateurs potentiellement importants, tels
que l’IL-10. Par conséquent, une approche élargie pour
améliorer la réponse anti-inflammatoire naturelle ne restreignant
pas le ciblage des médiateurs potentiels peut être plus
souhaitable. Actuellement, il existe trois approches dans le
traitement anti-inflammatoire à large spectre en cours
d’investigation :
• Gammaglobuline intraveineuse (GGIV)
• Immunoadsorption
• Modulation du système immunitaire
GGIV
Les résultats de l’utilisation de la GGIV chez des patients
atteints d’insuffisance cardiaque ont été jusqu’à présent mitigés,
et l’on n’a pas noté d’effets bénéfiques chez ceux présentant une
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à base d’IgG1chez la souris/l’être humain contre le TNF-αqui a
une demi-vie d’environ 10 jours14. Dans une étude pilote récente
(ATTACH), 150 patients présentant une insuffisance cardiaque
des classes III et IV de la NYHA et une fraction d’éjection du VG
< 35 % ont été assignés au hasard à :
• un placebo (n = 49)
• l’infliximab à 5 mg/kg (n = 50)
• l’infliximab à 10 mg/kg (n = 51)
Ces doses ont été administrées en perfusion intraveineuse de
2 heures pendant les semaines 0, 2 et 6. Les évaluations ont été
effectuées pendant les semaines 14 et 28. Le paramètre primaire
était le score clinique composé lors de la semaine 14. Les
paramètres secondaires comprenaient la modification de la
fraction d’éjection pendant les semaines 14 et 28, et la mortalité
et l’hospitalisation pour insuffisance cardiaque combinées.
L’étude a été terminée prématurément en raison des craintes
émises concernant la nocivité du médicament. Les résultats
préliminaires non publiés en ce qui concerne le paramètre
primaire et les paramètres secondaires sont résumés dans le
tableau 2. Aucune des doses d’infliximab n’a eu d’impact sur le
score clinique composé, le paramètre primaire. La fraction
d’éjection du VG a augmenté significativement comparativement
avec le placebo pendant la semaine 14 avec l’infliximab à 5
mg/kg, mais pas avec la dose de 10 mg/kg. Pendant la semaine
28, aucun effet bénéfique sur la fraction d’éjection n’a été
observé à l’une ou l’autre des doses d’infliximab, mais l’absence
d’effet bénéfique était la plus notable à la dose la plus élevée.
Pendant la semaine 28, le risque de mortalité et d’hospitalisation
pour insuffisance cardiaque était significativement plus élevé
chez les patients traités avec la dose élevée que chez ceux traités
avec le placebo (risque relatif 2,84, IC à 95 %, 1,01-7,97,
p=0,043). Une diminution dépendante de la dose des taux
sériques de protéine C réactive et d’IL-6 a été néanmoins
Tableau 2 : Étude ATTACH – Principaux résultats
Infliximab Infliximab
Placebo 5 mg/kg 10 mg/kg
(n = 49) (n = 50) (n = 51)
Score clinique
Amélioré Semaine 0-14 33 % 38 % 39 %
Semaine 14-28 43 % 35 % 37 %
Inchangé Semaine 0-14 59 % 52 % 39 %
Semaine 14-28 43 % 48 % 31 %
Moins bon Semaine 0-14 8 % 10% 22 %
Semaine 14-28 14 % 18 % 31 %
Modification de Semaine 0-14 0,8±6 3,5±5,6† 2,1±6
la FE (absolue) Semaine 14-28 3,4±8,1 4,2±7,1 1,3±6,9
Mortalité/ Semaine 0-14 2 (4 %) 2 (4 %) 8 (16 %)
hospitalisation Semaine 14-28 5 (10 %) 4 (8 %) 13 (25 %)*
* p = 0,048
† p = 0,013 comparativement au placebo
FE = fraction d’éjection du ventricule gauche