Dossier Santé MATÉRIELS Le traitement du cancer fait leurs affaires Le suédois Elekta et l’américain Varian en tête, les spécialistes de la radiothérapie veulent équiper l’Afrique en technologies de pointe. Un marché prometteur. B ien que leurs hôpitaux soient rarement équipés d’appareils permettant des diagnostics précis, la plupart des pays africains sont aujourd’hui capables de diagnostiquer les cancers. Mais très peu disposent des moyens pour les traiter. « Seuls le Maroc, l’Égypte et l’Afrique du Sud peuvent actuellement s’équiper en matériel de radiothérapie de pointe », estime Van Phuc Le, directeur commercial pour l’Afrique subsaharienne du fabricant suédois Elekta, leader sur le continent. Pourtant, depuis deux ans, les fabricants mondiaux d’appareils de radiothérapie et de radiochirurgie (comme Elekta ou les américains Varian et Accuray) s’intéressent aux marchés africains. Leur discours est simple : le cancer tue en Afrique plus de personnes que le sida, le paludisme et la tuberculose, et le nombre de nouveaux cas détectés atteindra 1,6 million à l’horizon 2020, d’après les estimations de l’OMS. Or peu de pays sont en mesure d’utiliser la radiothérapie parmi les différents traitements contre le cancer. Sur le continent, on a plus souvent recours à la chirurgie et à la chimiothérapie. Certains continuent même d’utiliser le cobalt, un procédé ancien jugé dangereux mais parfois considéré comme un moindre mal. Pour les fabricants, les pays africains doivent directement passer à l’utilisation de matériel de pointe. En mai, Elekta a ainsi annoncé s’être engagé à livrer des appareils à une douzaine de pays, en lien avec leurs ministères de la Santé. Parmi ceux-ci figurent l’Angola, le Kenya, l’Ouganda, le Sénégal et le N O 2853 t DU 13 AU 19 SEPTEMBRE 2015 © ELEKTA 2 S En mai, Elekta a signé Bénin, à raison de deux machines des contrats en moyenne chacun (soit une capaavec une cité de traitement de 1 000 patients douzaine par an), dont le prix varie de 700 000 de pays du continent. à 3 millions d’euros. Pour un coût d’environ 5 millions d’euros, et avec la collaboration d’experts français, le Bénin « va passer directement à la VMAT [volumetric modulated arc therapy], une technologie qui protège mieux les organes sains, explique Van Phuc Le. Le président béninois a compris que l’on pourrait soigner près de 1 500 personnes pour un montant équivalent à milliards d’euros celui dépensé pour envoyer 600 fonctionnaires se faire C’est la valeur du marché mondial des appareils de soigner à l’étranger ». six centres de lutte contre le cancer. Signe de l’intérêt porté aux nouveaux marchés africains, Dow Wilson, le PDG de Varian, a été nommé en novembre 2014, aux côtés de quatorze autres patrons, au sein du conseil présidentiel sur le commerce en Afrique mis en place par l’administration Obama. Le manque d’argent n’est pas la seule explication au retard pris par le continent, selon le docteur Adama Ly, fondateur du réseau Afrocancer. « Le manque de volonté politique est criant, affirme-til. Ce sont des programmes de santé publique que nos gouvernements doivent mettre radiothérapie en 2014, selon en place, avec une formale cabinet BCC Research. FORMATION. L’Algérie, tion de spécialistes à tous les Varian, Elekta et Accuray qui malgré ses pétrodollars niveaux. » Les fabricants en sont détiennent 90 % a longtemps tardé à mettre en conscients, qui investissent dans de ce marché. œuvre son plan cancer, semble ce secteur. Elekta a ainsi mis en être aussi passée à la vitesse supéplace un centre de formation au rieure. Le pays a annoncé des Cap, en Afrique du Sud, tandis que accords aussi bien avec Elekta, Varian développe son programme qui doit équiper en accélérateurs « Access to Care ». « Des initiatives linéaires sept centres de radiothébienvenues si elles concernent la rapie, qu’avec Varian, le numéro formation sur les équipements des un mondial. Ce dernier, qui s’est fabricants, estime Adama Ly. Mais installé cette année à Alger dans il faut veiller à ce que ces entrele cadre d’une co-entreprise, a prises ne rendent pas les États signé en 2014 un contrat de plus partenaires dépendants de leurs de 40 millions d’euros pour équiper technologies. » SAÏD AÏT-HATRIT 4,8 JEUNE AFRIQUE