Guide relatif à l’usage de démarche carbone au
sein des marchés et des politiques publiques
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2. Changement climatique et gaz à effet de serre
2.1. Les enjeux du changement climatique
Les données scientifiques et techniques disponibles sur le changement climatique et les
ressources en combustibles fossiles permettent d’affirmer, sans prendre trop de risques, que
nous sommes face à une contrainte climatique qui va trouver une place croissante dans
toute activité humaine, économique ou non. Quelques éléments, certains connus seulement
depuis une époque récente, et d’autres plus anciens, illustrent cette conclusion de manière
particulièrement forte :
- Au plus fort de la dernière ère glaciaire, il y a 20.000 ans, la température planétaire n’avait
baissé que de 5°C par rapport à l’époque actuelle. La déglaciation a pourtant conduit, en
France, au remplacement d’un paysage de type Nord-sibérien par celui que nous
connaissons aujourd’hui, et cette transition a mis environ 10.000 ans à se produire. Une
hausse de quelques degrés de la moyenne planétaire en un siècle se traduirait très
certainement par un bouleversement de l’environnement d’une brutalité sans précédent pour
notre espèce (et peut-être même sans précédent pour la biosphère),
- Pour parvenir à une stabilisation de la quantité de CO
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dans l’atmosphère planétaire,
préalable indispensable à une stabilisation des températures « plus tard », il est nécessaire
de diviser par deux au moins les émissions humaines de ce gaz, et le plus tôt sera le mieux,
- La consommation d’énergie fossile de l’humanité
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, et partant ses émissions de CO
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, est de
toute façon inéluctablement appelée à passer par un maximum et à tendre vers zéro ensuite,
dès lors que la ressource de départ est disponible en quantité finie. En conséquence, cette
division par deux des émissions mondiales de CO
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finira inéluctablement par survenir « un
jour », seule la date et les modalités de survenance de cet événement pouvant faire l’objet
d’un débat, débat qui n’est en rien secondaire il est vrai,
- A partir des estimations publiées par les opérateurs pétroliers et charbonniers sur les
ressources fossiles (et qui sont à peu près stables depuis 30 ans), une conclusion
raisonnable est de situer le pic pétrolier en 2020/2030 au plus tard, le pic gazier en 2040 au
plus tard, et le pic tous fossiles (même en tenant compte du charbon) pas très loin derrière
2050/2060 au plus tard. Le desserrement de la contrainte pesant sur le seul pétrole en se
reportant sur le gaz et le charbon ne permet donc pas de gagner quelques siècles de
croissance de la consommation, mais plutôt quelques décennies, au prix d’un accroissement
de la dette climatique qui risque d’être très difficilement gérable pour ceux qui auront à la
supporter.
Au vu de ce contexte, de mieux en mieux connu des « décideurs », même si l’information
diffuse lentement, il ne semble pas déraisonnable d’envisager que les émissions de CO
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en
particulier, et de gaz à effet de serre en général, soient de plus en plus pénalisées pour les
acteurs économiques, qu’il s’agisse d’individus ou d’entreprises. Cette pénalisation pourrait
survenir de deux manières au moins, qui sont équivalentes sur le plan microéconomique
(mais assurément pas sur le plan macroéconomique).
Une première possibilité est que la puissance publique (au sens large : états ou échelons
administratifs sub-étatiques, organisation internationales, communauté européenne, etc.)
décide d’agir plus fortement qu’aujourd’hui, par le biais de taxes, ou par le biais de mesures
réglementaires (quotas ou limitations de toute nature, droits de douane, interdictions, etc.)
qui dans les faits aboutissent de manière identique à renchérir le coût d'usage de ce qui
engendre des émissions.
Une deuxième possibilité est que les combustibles fossiles, dont l’usage n’aura pas été
restreint suffisamment rapidement par des contraintes volontaires, fassent l’objet d’un
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On appelle « énergie fossile » l’ensemble charbon-pétrole-gaz