Qu`est-ce que la pensée

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Comment l’activité du corps aide à l’apprentissage et au développement
de la pensée
par Caroline Messier
2
Mémoire 2009
Table des matières
Comment l’activité du corps aide à l’apprentissage et au développement de la pensée
1 Qu’est-ce que la pensée
3
2 Les prémisses de la pensée
4
2.1 Marcher, parler, penser
6
3. L’imitation et le jeu chez le petit enfant
7
4. L’enfant de 7 à 14 ans
9
4.1 Travaux manuels
10
4.2 Activité artistique
11
4.3 Eurythmie et éducation au mouvement
13
4.4 Partie rythmique
14
4.4.1 Idées générales et exemples pratiques
15
3
Qu’est-ce que la pensée ?
Que peut admettre aujourd’hui la science moderne en ce qui concerne la pensée ? Cela
demeure pour les scientifiques un grand mystère, car si l’on peut comprendre le rôle des
neurones et des synapses; la formation de concepts mobiles et la recherche du sens des
choses ne peuvent être expliquées par des lois et des concepts rigides. Cette difficulté
vient du fait que l’on voit l’homme essentiellement sur le plan physique. À peine
appréhende-t-on l’existence de l’âme humaine et encore moins de l’homme-esprit; celui
qui, relié au spirituel, s’accorde à l’ensemble de l’univers. On tente donc par la recherche
de trouver une réalité extérieure à nous, alors que l’essence de ce que nous sommes; nos
impulsions créatrices, nos représentations viennent de l’intérieur.
Les représentations ne sont toutefois pas encore pensées. Kranich1 affirme que nos
représentations sont des images que chacun de nous se forme à partir des phénomènes.
Elles n’ont pas un caractère universel et ne contiennent pas l’essence des choses. La
pensée, elle, lie nos représentations au spirituel. Quand nous faisons l’expérience pure
des choses, nous nous formons des représentations ; puis nous redonnons à la matière sa
spiritualité par la pensée.
Pour l’anthroposophie, la recherche d’une compréhension de la pensée va en ce sens
qu’elle considère l’homme dans sa totalité. Un homme doté d’un corps, d’une âme et
d’un esprit. De ce corps, vient la volonté de l’agir humain. L’âme vise principalement la
perception, le ressenti et l’esprit forme la pensée. C’est par le fait du penser humain que
l’humain accède à la réalité des choses. Cette réalité, Goethe et Steiners la ressentaient.
Steiners2 écrit :
« Les pensées appartiennent à la réalité de ce qui est contemplé par les sens; seulement ce qui, dans l’être
sensible, est pensée, ne se manifeste pas au dehors, dans ce sensible, mais au-dedans , dans l’homme(…)
Du fait qu’il vient dans le monde et le contemple avec ses sens, l’homme sépare de la réalité la pensée :
mais celle-ci apparaît seulement à un autre endroit : à l’intérieur de l’âme. »
1
2
Ernst-Michael Kranich, 2000.L’enfant en devenir. Édition Triades. P.32
Steinres, Rudolf.2000. Une théorie de la connaissance chez Goethe. P.148
4
Il y a donc un juste pont à faire. D’une part, une observation juste par les sens est
nécessaire pour percevoir le monde sensible; mais c’est par notre esprit que l’on en
perçoit la réalité. La pédagogie Waldorf tend vers cette façon de considérer l’homme.
Ainsi, l’observation par l’activité du corps est de mise dans la recherche du sens des
choses.
On ne cherche pas à définir mais bien à caractériser, afin de rendre la
connaissance d’une chose la plus subjective et la plus mobile possible. Outre ces faits,
une pédagogie basée sur l’observation de l’enfant tend à redonner une liberté à l’homme.
Chaque apprentissage est donc apporté au bon moment et de façon à rejoindre le plus
possible l’enfant dans son corps, ses sentiments et sa tête.
Nous verrons qu’avant
d’accéder à une pensée abstraite et personnelle l’enfant passe par un processus bien
précis. La tâche de l’éducateur est alors de comprendre le processus d’apprentissage de
l’enfant pour ne pas brusquer son développement.
À ce sujet, les neuroscience et les études actuelles en matière d’éducation tentent à
démontrer l’importance du mouvement; une activité du corps qui se révèle dans la
mobilité des membres, mais aussi dans l’importance des arts et du rythme. Michaela
Glöckler3 écrit : « Penser est la faculté qui nous permet de relier entre elles toutes les
données de notre vécu, de leur découvrir un sens et de les ordonner. » Nous verrons ici
comment l’on peut arriver à cette fin par l’activité du corps, et ce pour l’enfant de 0 à 14
ans.
Les prémisses de la pensée et le mouvement
Dès les premiers instants de vie fœtale, l’enfant aborde l’existence dans le mouvement.
L’enfant naissant est dans la perception. Il réagit par des réflexes et des mouvements
volontaires. Tous ses sens sont mis de l’avant pour entrer en relation avec ce nouvel
environnement. L’apprentissage difficile de la marche se fera en presque un an. Il est de
toutes les espèces, celle qui prendra le plus de temps à acquérir une autonomie. En contre
partie, il est par sa pensée, la seule créature terrestre capable de créer, de détruire, de
3
Glöckler Michaela. 2003. L’enfant, son développement, ses maladies. Éditions antroposophiques
Romandes. P.325
5
prier, d’écrire… Jusqu’à quel point le mouvement est-il important ? Carla Hannaford4,
neurophysiologiste mentionne que l’oreille interne et le système moteur du cervelet sont
le premier système sensoriel à atteindre la maturité chez l’être humain. Il existe un lien
entre l’esprit et le corps. Effectivement, des recherches montrent que la partie du cerveau
qui traite les données de l’activité physique est la même que celle qui traite de
l’apprentissage. En effet, le cervelet filtre et intègre de façon pointue le flot de données
de manière à permettre la prise de décisions complexes. Ceci prouve que la partie du
cerveau qui contrôle la motricité est mise à contribution dans l’apprentissage.
mouvements et l’apprentissage sont en constante interaction.5
Les
Peter Strick6 et ses
assistants ont repéré un chemin partant du cervelet et se rendant jusqu’au parties
cérébrales qui jouent un rôle dans la formation de la mémoire, de l’attention et des
perceptions spatiales. Il est étonnant de constater que la partie du cerveau qui traite les
données de l’activité physique est la même que celle qui traite de l’apprentissage. Lors
d’un congrès7, W.T.Thatch Jr. A cité près de 80 études Leurs résultats suggèrent de forts
liens entre le cervelet, la mémoire, la perception spatiale, le langage, l’attention,
l’émotion, le langage non-verbal et même la prise de décisions.
Ils font valoir
l’importance capitale de l’éducation physique, du mouvement et des jeux dans
l’amélioration et la stimulation de la cognition.
Thatch mentionne aussi que le
mouvement à un effet bénéfique direct sur le système nerveux. Les activités musculaires,
en particulier les mouvements coordonnés, semblent stimuler la production de
neurotrophine, ces substances naturelles qui stimulent la croissance des cellules
nerveuses et augmentent le nombre de connexions neurales dans le cerveau.8
4
Carla Hannaford, La gymnastique des neurones. Extrait cité par Éric Jensen dans le cerveau et
l’apprentissage
5
Note de cours, Institut Pégase
6
Peter Strick, du centre médical des vétérans de syracuse à New York. Extrait tiré de le cerveau et
l’apprentissage de Éric Jensen. P.87
7
Congrès annuel de 1995, de la Société des neuro-sciences,
8
Carla Hannaford, gymnastique des neurones, p.140
6
Marcher, parler, penser.
Plusieurs liens ont été clairement établis entre le fait de marcher, de parler et de penser.
La motricité du nourrisson démarre par les premiers mouvements fœtals. Konig9 écrit : »
dès les premiers jours, les mouvements coordonnés des yeux se dégagent du chaos
moteur général de l’enfant qui gigote. Ici commence le processus moteur, qui s’achève
vers la fin de la première année par l’acquisition de la faculté de marche à la verticale. De
la sorte, l’enfant acquiert une toute première maîtrise de l’espace. » Béatrice Padovan
mentionne que les mouvements de latéralisation, tel que la marche à quatre pattes, sont
indispensables à l’émergence de l’architecture cortical. Carla Hannaford10, neurologiste,
écrit :
« Les enfants qui manquent le stade vital de la marche à quatre pattes peuvent présenter plus tard des
difficultés d’apprentissage. C’est un mouvement croisé qui stimule le développement du corps calleux et
des voies de conductions nerveuses entre les deux hémisphères du cerveau, et permet aux deux côtés du
corps : bras, jambes, yeux et oreille de collaborer. […]
La verticalité est indispensable à la parole. C’est à ce moment que la langue se détache
davantage pour aider à mieux articuler. L’enfant traite maintenant l’espace d’une façon
tout autre et transpose une grande liberté par rapport au temps.
À la naissance il n’y avait que les cris. Par l’allaitement, quatre qualités du parler se sont
formées : respiration, succion, déglution, démastication. Ceux-ci préparent la
neuromusculature de la parole. Puis, la lallation s’en suit et c’est ensuite, après un an, que
l’enfant commence à s’exprimer. Ce n’est qu’à ce moment que les mots apparaissent
vraiment. Chaque mot représentant au début un grand nombre d’expérience.11 Madame
Hannaford12 ajoute :
« La parole relève amplement des aptitudes sensori-motrice, et requiert la coordination motrice fine des
millions de muscles du visage, de la langue, des cordes vocales et des yeux, ainsi que des propriocepteurs
de la face. Parler nous permet d’organiser et d’élaborer nos pensées. Quand nous verbalisons ce que nous
avons appris, les mouvements physiques l’intériorisent et le renforcent au niveau des réseaux de
neurones. »
9
Karl Konig, Les début de l’enfance. Éditions la perle de rosée. P.7
Carla Hannaford, gymnastique des neurones p.138
11
Adaptation des écrits de Karl Konig, les début de l’enfance. P.29
12
Carla Hannaford, gymnastique des neurones p.135
10
7
Dès lors que l’enfant commence à marcher et à parler, une nouvelle dimension de sa vie
s’ouvre à lui. Il est désormais capable d’agrandir son champ de perceptions, une pensée
propre à lui-même s’acquiert alors par les mouvements, la parole. Il est capable
d’association, d’observation, de synthèse et d’évaluation. Plus les mouvements sont
effectifs, plus la liberté dans l’espace et le temps est importante13.
L’imitation et le jeu chez le petit enfant
Dès lors que l’enfant sait marcher, parler et penser, un monde nouveau s’ouvre à lui;
celui de l’imagination. Bien au contraire de l’adulte, la pensée de l’enfant naît d’abord de
sa participation, de la volonté et de l’imitation. Elisabeth Grulelius14 écrit :
« À cet âge tendre, les enfants réagissent avec une sensibilité très vive aux gestes et aux activités
de l’adulte, l’enfant apprend par une imitation subtile, directe, instinctive. »
Le jeune enfant qui s’ouvre au monde, est totalement soumis à ses impressions. Son
corps lui-même se construit de ce lien précieux avec son environnement. Notre grande
tâche est donc de lui offrir une bonté et une patience dans ce cheminement. Au contraire
de l’adulte, l’enfant assimile ses impressions d’abord par la volonté pour ensuite former
sa pensée.
Éveiller une pensée abstraire en cherchant à expliquer tout, ne rejoint
aucunement l’enfant. Ce dont il a besoin c’est de modèles, de guides sages et de jeux
simples pour expérimenter et développer son raisonnement.
Élisabeth Grunelius
développe clairement cette idée de différenciation de la pensée adulte et de celle de
l’enfant. En voici un tableau sommaire :
Adulte
13
14
Enfant
Note de cours, formation sur le déficit d’attention en relation avec les travaux de Padovan.
Élisabeth Grunelius, Les moins de sept ans. Éditions Triades. P.21
8
1- Transmission d’une information 1- Participation intérieure à l’activité,
par des notions, d’éveil à la
pensée
2- Naissance du lien personnel,
stimulation de la volonté
2-Évocation de l’activité et liaison
appel au sentiment
affective avec elle.
3- Invite à l’action, stimulation de 3- Éveil de l’intérêt, naissance de
la volonté
représentations et de notions
Outre ces faits, Le jeu est un espace idéal pour expérimenter avec tous ses sens, mettre en
mouvement tout son corps, être actif dans les mains et les pieds. Par le jeu, il devient
possible de maîtriser les mouvements du corps, l’équilibre, la sensibilité au toucher et la
ferme préhension. Le jeu constitue la base de la compréhension ultérieure du monde et
permet de développer la grande qualité de l’imagination. Dans une étude faite au U.S.A
Sara Smilansky15 a constaté que le jeu soutient les aptitudes cognitives en cours. Les
enfants qui étaient « bons »dans le jeu faisaient preuve d’une volonté d’apprendre, d’une
exubérance et d’aptitudes sociales. L’imagination développée par des jeux simples et des
structures inachevées sont une base importante au développement de la pensée créatrice.
En ce qui concerne l’imitation, l’entourage exerce une forte influence sur tout ce
processus. Prenant appui sur ces modèles, il saisit en lui l’impulsion de toujours dépasser
ce à quoi il est déjà parvenu. Kranich16 démontre ainsi que l’imitation est la force motrice
intérieure du développement du petit enfant.
Ce sont ces mouvements répétés qui
forment peu à peu la logique de l’enfant, sa capacité à faire des associations, la cohérence
dans ses idées, son langage… De plus, on pose les bases même de la moralité par ce que
nous sommes et nous donnons. Hildegard Gerbert17 écrit :
Quiconque étudie la situation psychologique du petit enfant se rend bientôt compte de tout ce que l’enfant
reçoit de son entourage au moyen de cette force immense qu’est l’imitation; il imite aussi les gestes des
adultes et à travers ces gestes leur état d’âmes, leur confiance dans la vie, l’ordre qu’ils ont su mettre dans
leur vie intérieure ou bien, inversement, leur nervosité, le dérèglement de leur vie profonde. Aussi notre
premier devoir est-il de donner à l’enfant des modèles, un entourage qu’il pourra imiter, un ordre de choses
que sa volonté pourra accepter, une direction qui ne s’appuie pas seulement sur le commandement. La
15
Extrait tiré d’un document remit intitulé : « le jeu est le travail le plus sérieux de l’enfant »
Ernst-Michael Kranich, l’enfant en devenir.p.64
17
Hildegard Gerbert, extrait tiré d’un document intitulé : « éducation de la volonté », notes de cours.
16
9
régularité, le rythme dans l’existence quotidienne, l’ordre dans le foyer, voilà en quoi consiste l’éducation
des touts petits.
L’enfant de 7 à 14 ans
Alors que le jeune enfant agissait davantage par réflexe conditionné et imitation, l’enfant
d’âge scolaire commence à former ses propres représentations 18. L’enfant qui a encore
besoin d’un intermédiaire développe ici de grandes forces créatrices.
Il a besoin
d’images vivantes, de contes, de rythmes…, de tout ce qui sera éveiller des émotions
dans ce qu’il fait.
Gervais Sirois19 mentionnent plusieurs principes clé de
l’apprentissage dont le fait que :
1- Les émotions mènent notre cerveau. Nous ne croyons quelque chose et ne lui
donnons du sens que lorsque nous éprouvons des émotions fortes à son sujet.
2- Nous apprenons en des styles diversifiés et simultanés. Ce sont les styles visuels,
auditifs, kinesthésiques, conscients, inconscients… Nous sommes moins efficaces
lorsque nous fragmentons l’apprentissage en faits mathématiques linéaires et
séquentiels.
3- Les cycles et les rythmes. Notre cerveau est fait pour les alternances, des hauts et
des bas, et non pas pour une attention constante.
Eric Jensen20 mentionne comme facteurs qui influencent l’apprentissage; l’engagement,
le degré d’attention et la motivation intrinsèque les émotions, le dynamisme et les
mouvements.
À l’inverse, le fait d’amener des éléments loin de la réalité, peu
d’interventions, de la théorie didactique, une position assise et des vidéos augmente
l’apathie et le ressentiment.
Quel lien pouvons-nous faire entre les émotions et le mouvement ?
Steiners 21
mentionnait l’importance d’un enseignement en trois étapes. Faire (expérience activant
18
Les phases de l’enfance p. 154
Gervais Sirois, note de cours
20
Jensen, Éric. 2001. Le cerveau et l’apprentissage. Édition la Cenelière
19
21
Steiners, Rudolf. Pédagogie et connaissance de l’homme. (p.154-157)
10
la volonté et le corps entier), sentiments (souvenirs faisant appelle à la mémoire) et la
pensée. Tout mouvement du corps et expérience personnelle active d’abord la volonté.
W.T.Hatch mentionne que le cervelet, qui est directement relié au mouvement, est
également mis à contribution dans les comportements émotionnels complexes.22 L’enfant
de 7 à 14 ans à cependant besoin que les images données vivent aussi au niveau des
sentiments pour que l’apprentissage soit mieux assimilés. Pearse23mentionne que le cœur
a un réseau nerveux en relation avec la partie limbique. Donner des images qui feront
vibrer au niveau du sentiment n’est pas une question de matière mais de façon de
l’apporter. Ainsi la pensée doit d’abord passer par le cœur.
La pédagogie Waldorf vise à développer ces trois parties de l’homme et à incorporer le
plus possible des mouvements et des émotions dans l’apprentissage. Ainsi, les arts,
l’eurythmie, les travaux manuels font parties des enseignements proposés à chaque
niveau et à chaque semaine. De plus, le rythme que l’on associe souvent au mouvement
prend toute son importance dans ces écoles, alors que l’on veille à accorder des moments
de « respirations, de relâchements» dans un cours ou dans les transitions. Kranich24
ajoute que dans tous les processus qui relèvent du système nerveux, et en particulier dans
l’élaboration de concepts, doit encore venir s’impliquer ce qui vit dans la respiration.
Travaux manuels
Lorraine Blain25, explique comment le travail manuel aide à développer la dextérité, la
volonté, la persévérance, la concentration, et l’amour du travail bien fait. Il appartient au
monde de l’utile et du beau, de l’émerveillement et de la patience, de la création et de la
transformation et au monde de l’imagination et de l’ingéniosité.
Eugene Scwartz26
explique que des recherches récentes en neurophysiologie confirment que la mobilité et la
dextérité fine des muscles moteurs, spécialement de la main, peuvent stimuler le
22
W.T.Watch, congrès annuel de la société des neuro-sciences 1995. Tiré de le cerveau et l’apprentissage
de Éric Jensen. P.88
23
Joseph Chilton Pearse, note de cours sur le développement humain, Institut Pégase
24
Ernst-Michael Kranich, L’enfant en devenir, édition Triades. P.193
25
Lorraine Blain, enseignante en travaux maunels et conteuse à l’école Waldorf L’Eau Vive, Victoriaville
26
Article de Eugene Schwartz:” Handwork and intellectual development” tire du livre Millenial Child,
éd.Anthroposophic Press, 1999. Texte tire de l’article de Lorraine Blain.
11
développement cellulaire du cerveau et ainsi donc, renforcer l’instrument physiologique
de la pensée. Que se passe-t-il, par exemple, lorsque l’on tricote ? Les broches sont
tenues dans les deux mains et chacune des mains a un travail respectif à faire : la
latéralité est immédiatement installée en même temps que le contrôle des yeux et des
mains. La capacité de concentration est stimulée. En fait, aucune tâche ne demande
autant d’attention pour les 6-7 ans. Cet entraînement de la concentration aura un effet
jusqu’à la vie adulte en fortifiant la capacité de résolutions de problèmes. De plus, cette
tâche exerce le calcul mathématique en demandant de suivre des patrons bien précis.
Franc Wilson27, neurologue renommé, confirme comment la main possède un statut
privilégié dans le processus d’apprentissage, non seulement comme catalyseur, mais aussi
comme lien expérientiel essentiel dans le monde perceptuel, moteur et créatif du jeune
enfant.
Activité artistique
Quelle place doit prendre l’art dans notre enseignement ? Architecture, sculpture et
modelage, dessin et peinture, musique, poésie et art dramatique, danse et eurythmie, art
social sont tous développés en pédagogie Waldorf. Je m’attarderai ici à en tracer des
grandes lignes mais aussi à reconnaître l’importance de chacun pour le développement de
la pensée.
L’art touche directement le mouvement ; le mouvement du corps et de la volonté, mais
aussi la mobilité de l’esprit. Rudolf Steiners28 mentionnait : « Pourquoi l’élément
artistique agit-il sur la formation de la volonté? Parce que l’exercice d’un art repose sur
la répétition; pour la raison aussi que l’élément dont l’homme s’empare ainsi lui procure
une joie toujours nouvelle. L’art procure un plaisir toujours renouvelé, pas seulement la
première fois. Il a en lui le pouvoir de stimuler l’être humain, et non pas une seule fois,
mais toujours encore. Ainsi l’art est-il à nos yeux l’idéal même de ce que nous cherchons
à réaliser dans notre enseignement. »
27
Franc Wilson, neurologue ayant publié en 1998:The hand: How it shapes the brain, language and culture.
P.295. Extrait cite par Lorraine Blain
28
Extrait de Rudolf Steiner, note de cours.
12
Éric Jensen29 écrit : « Les connaissances biologiques actuelles nous révèlent que les arts
constituent les fondements de la réussite scolaire et même de celle de la carrière future.
Une solide éducation en arts contribue à développer la créativité, la concentration, la
capacité de résolution de problèmes, l’autoefficacité et la coordination. De plus, elle
favorise l’attention et la discipline personnelle. James Hanshumacher30 conclut par ses
études que l’enseignement des arts facilite le développement du langage, augmente la
créativité, accentue la prédisposition à la lecture, aide le développement social et
l’accomplissement intellectuel général, et encourage les attitudes positives à l’école.
D’autres études31confirme que les arts aident au développement cognitif parce qu’ils
permettent de percevoir des liens, de porter attention aux nuances, de trouver de multiples
solutions à des problèmes, de changer d’objectif en cours de route, de prendre des
décisions en l’absence de règles.
Ils donnent des ressources pour développer
l’imagination, permettent de fonctionner dans des contraintes précises et apportent une
perspective esthétique du monde.
Concernant la musique, Justine Sergent32affirme que lire de la musique suscite
l’engagement des deux hémisphères du cerveau. Lorsqu’une personne apprend à lire, à
composer ou à jouer de la musique, son hémisphère gauche est très actif. Il faut penser à
la musique comme un outils à trois fins : pour la stimulation, comme véhicule des mots et
en tant qu’allumeur du cerveau. La musique éveille des impressions et des sentiments.
Le fait de jouer demande aussi une grande concentration et parallèlement, une
coordination entre l’œil et le geste.
Le dessin et la peinture touche directement la créativité de l’enfant. L’étude des dessins
d’enfants permet de faire de nombreux liens avec les perceptions de l’enfant et sa
maturité neurologique.
29
Marie Chartrand33ajoute que l’aquarelle touche la capacité
Le cerveau et l’apprentissage, par Éric Jensen. P.38-41
Extrait tire de Éric Jensen; le cerveau et l’apprentissage
31
Note de cours, Université de Sherbrooke
32
Justine Sergent, neuropsychologue à l’Institue neurologique de Montréal. Extrait de le Cerveau et
l’apprentissage. P.38
33
Marie Chartrand, enseignante en aquarelle à l’Institut Pégase
30
13
respiratoire de l’enfant, aide à détendre et agit auprès d’enfant en difficulté. La richesse
des nuances et des couleurs permet à l’aquarelle plus qu’à tout autre forme de médium de
toucher cette qualité « respiratoire »
L’art dramatique se veut aussi un moyen d’expression puissant. On l’utilise dès la petite
enfance en mimant une histoire entendue. On y développe donc la pensée logique
puisque dans un court laps de temps, les enfants vivent plusieurs évènements de façon
chronologique et séquentielle. On y établit d’emblée l’ordre dans les idées; ce qui aidera
notamment l’écriture et la lecture. Plus tard, le théâtre se verra un moyen de développer
la pensée verbale en structurant l’expression, la clarté de la parole et la bonne élocution.
Eurythmie et éducation au mouvement
L’exercice physique n’a plus la cote d’autrefois. Et pourtant de nombreuses recherches
soutiennent l’importance accordée à ces périodes. Éric Jensen écrit :
« De même que l’exercice fortifie la musculature, le cœur, les poumons et les os, il renforce les ganglions
de la base, le cervelet et le corps calleux, ainsi que toutes les autres aires cérébrales. Nous savons que
l’exercice alimente le cerveau en oxygène, mais aussi en neurotrophines (protéines); celles-ci favorisent la
croissance et le nombre de connexions entre les neurones.
De plus, aujourd’hui, l’oxygénation est
également reconnue pour favoriser la mémoire. […] Les études indiquent que l’exercice peut réduire le
stress, un autre avantage non négligeable puisque le stress fait en sorte que des substances sont libérées et
ont pour effet de tuer des neurones dans l’aire cérébrale liée à la formation de la mémoire à long terme,
l’hippocampe.
Rudolf Steiners à développé un art du mouvement spécifique tirant sa source du langage;
l’eurythmie. Helga Daniel écrit34 : « La parole et la musique sont des facultés qui sont
profondément propres à l’être humain.
Dans l’eurythmie elles sont la base du
mouvement. L’eurythmie travaille à la faculté de concentration et la volonté d’apprendre
de l’élève, et soutient par l’activité artistique la faculté d’apprendre pour toutes les autres
matières.
Elle ajoute :
34
Helga Daniel, Ulrike Wendt,. Pourquoi l’eurythmie? Texte tiré de : La santé par l’éducation. P.165
14
« Au-delà de l’apprentissage de formes spatiales et du déroulement des mouvements, l’eurythmie éduque
des compétences humaines générales chez les enfants et les jeunes, et leur donne ainsi des capacités dont ils
ont besoin dans toutes les autres matières, et aussi plus tard dans la vie : concentration, apprentissage de
l’écoute, perception exacte, volonté d’apprendre, capacité d’apprendre, sentiment du style, sentiment de
vérité, compassion, coordination des jambes et des bras, présence d’esprit, rapidité d’action, vision
d’ensemble de vastes contextes, compétences sociales. Toutes ces compétences dans les domaines cognitif,
émotionnel et de la capacité à agir, sont interpellées également par le mouvement, et donc stimulées et
éduquées. »
Pascal Jouneau35mentionne comment la tripartition est ici présente. L’enfant est donc
stimulé par des mouvements volontaires : croisement, spiral, « huit », qui active son côté
volontaire et travaille sur l’espace, la latéralisation des hémisphères, etc. L’eurythmie
vise aussi à développer l’imagination et les sentiments en incorporant des rythmes, des
images vivantes. Finalement elle touche aussi la pensée puisqu’elle de créer des liens
avec des contenus tel que les formes géométriques, les voyelles et les consonnes.
L’eurythmie est souvent vue comme une méditation en mouvement; elle abaisse le stress
et permet une meilleure coordination entre les cellules nerveuses.
Partie rythmique
La partie rythmique est largement utilisée en pédagogie Waldorf. Pratiquer tous les
matins, c’est un moment de rencontre entre les enfants et un moment où l’on crée des
liens avec la matière à enseigner. La ronde qui est pratiquée dès le petit jardin d’enfants
amène une relation de la parole et du geste et développe la mémoire par sa répétition.
Hélène Besnard36 mentionne que la ronde est un moment privilégié pour apprendre à
bouger et pour affiner l’équilibre dans l’espace. Elle affine le langage en présentant des
chansons et des comptines en alternance avec des mouvements rythmés.
Michel St-Pierre37mentionne l’importance de la beauté des mots, des rythmes et des
rimes. La création d’une belle partie rythmique repose surtout sur la passion et l’amour
de l’enseignant. Sa richesse tient à sa diversité. Tous enseignants a donc avantage à
35
Enseignant en eurythmie au Québec.
Notes de cours : Rythme, comptines et chansons par Hélène Besnard
37
Michel St-Pierre, enseignant à l’école Les enfants de la terre, entrevue
36
15
rechercher une façon qui lui est propre pour présenter ses chansons, rythmes et
comptines.
La partie rythmique progresse avec l’âge des enfants. Au début elle ressemble souvent à
une histoire où se joint de petites comptines et chansons rythmées. Puis elle se
complexifie pour devenir exercices de paroles, de rythmes, d’élocution, jeux de balles
avec calcul mental …
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