2015-2016 3M270 Algèbre Première partie 1. RELATIONS D’EQUIVALENCE. PASSAGE AU QUOTIENT 1.1 Relations binaires Soit E un ensemble. Une relation binaire R sur E est la donnée d’un sousensemble R de E × E. Soit x et y deux éléments de E. Si le couple (x, y) appartient à R, on dira que ”x est en relation avec y”, et on écrira ”xRy”. De façon équivalente, une relation binaire sur E est la donnée d’une application ρ : E × E → {0, 1}. L’application ρ est la fonction caractéristique de l’ensemble R et xRy ⇐⇒ ρ(x, y) = 1. Exemple : Si x et y sont des éléments de R, on définit xRy si x+y = 2. Ceci définit une relation sur R. L’ensemble R correspondant est la droite d’équation x + y = 2. Les relations binaires peuvent posséder certaines propriétés particulières : On dira que la relation R sur E est réflexive si, pour tout x ∈ E, on a xRx. On dira que la relation R sur E est symétrique si, pour tout (x, y) ∈ E ×E, xRy entraı̂ne yRx. On dira que la relation R sur E est antisymétrique si, pour tout (x, y) ∈ E × E, xRy et yRx entraı̂nent x = y. On dira que la relation R sur E est transitive si, pour tout (x, y, z) ∈ E × E × E, xRy et yRz entraı̂nent xRz. Définition : On dira qu’une relation est une ”relation d’ordre” si elle est réflexive, antisymétrique et transitive . Définition : On dira qu’une relation est une ”relation d’équivalence” si elle est réflexive, symétrique et transitive . 1 Exemples : Soit X un ensemble. L’inclusion est une relation d’ordre sur l’ensemble E = P(X) des parties de X. Sur R, la relation ”<” est transitive, mais ce n’est pas une relation d’ordre. Sur R, la relation ”≤” est une relation d’ordre (totale : deux éléments sont toujours comparables). Sur N := Z≥0 , la relation de divisibilité ” | ” : a|b ⇔ ∃n ∈ N, b = an est une relation d’ordre (partielle). Sur l’ensemble des droites du plan, la relation dRd� ⇐⇒ d est parallèle à d� est une relation d’équivalence. Dans la suite, on s’intéressera plus particulièrement aux relations d’équivalence. 1.2 Relations d’équivalence, classes, ensemble quotient. Définition : Soit E un ensemble. Une partition de E est un ensemble S ⊂ P(E) de parties de E tel que : 1) ∀A ∈ S, A �= ∅; 2) ∀A ∈ S, ∀B ∈ S, A = B ou A ∩ B = ∅; 3) ∀x ∈ E, ∃A ∈ S tel que x ∈ A. Soit E un ensemble muni d’une relation d’équivalence R. Soit x un élément de E. On appelle ” classe d’équivalence de x” l’ensemble Cl(x) = {y ∈ E/xRy} Exercice : Démontrer les propriétés suivantes : 1) Cl(x) = Cl(y) ⇐⇒ xRy ⇐⇒ Cl(x) ∩ Cl(y) �= ∅; 2) L’ensemble des classes d’équivalence forme une partition de l’ensemble E. L’ensemble des classes d’équivalence est appelé ”ensemble quotient de E par la relation R”. On le note E/R. On a une application ”canonique”, notée Cl : E → E/R qui, à chaque x ∈ E associe sa classe d’équivalence Cl(x). Cette application est évidemment surjective. Remarque La classe d’équivalence Cl(x) de x sera parfois notée [x], ou x̄. Bien que ces notations ne le signalent pas, il faut garder en tête la relation d’équivalence R qu’elles sous-entendent. Soit α ∈ E/R. Il existe au moins un élément x ∈ E tel que α = Cl(x). On dit que x est un ”représentant” de α. 2 Soit E et F deux ensembles et f : E → F une application. On peut alors définir sur E une relation Rf de la façon suivante : xRf y ⇐⇒ f (x) = f (y). La relation Rf ainsi associée à f est manifestement une relation d’équivalence. Théorème de factorisation : Soit f : E → F une application et Rf la relation d’équivalence associée. Alors il existe une application injective unique f� : E/Rf → F telle que f = f� ◦ Cl. Si de plus f est surjective, alors f� est une bijection. Démonstration : Soit α ∈ E/Rf . Supposons que α contient deux éléments x et y, de sorte que Cl(x) = Cl(y). Par conséquent xRf y ou encore f (x) = f (y). L’élément f (x) est donc indépendant du choix du représentant x de la classe α. En posant f�(α) = f (x), où x est un élément quelconque de α, on obtient une application f� bien définie de E/Rf dans F . Supposons que f�(α) = f�(β) et soit x ∈ α et y ∈ β. On a alors f (x) = f (y) d’où xRf y et α = β. L’application f� est donc injective. Enfin, f� est l’unique application ayant la propriété annoncée. Soit en effet g : E/R → F telle que f = g ◦ Cl. Soit α ∈ E/R et soit x un représentant de α: g(α) = g ◦ Cl(x) = f (x) = f�(α). Remarque : inversement, soient R une relation d’équivalence sur E, et f : E → F une application telle que ∀x, y ∈ E, xRy ⇒ f (x) = f (y). Alors, il existe une unique application (pas nécessairement injective) f¯ : E/R → F telle que f = f¯ ◦ Cl. On dit que f est compatible à R, et que f¯ est déduite de f par passage au quotient par la relation R. Exemples : 1) Soit E l’ensemble des droites du plan affine (muni d’un repère). A la droite d d’équation ax + by + c = 0, on associe � a − b si b �= 0 p(d) = ∞ si b = 0 Ceci définit une application p : E → R ∪ {∞} et on a p(d) = p(d� ) ⇐⇒ les droites d et d’ sont parallèles. Les classes d’équivalence pour la relation Rp associée à p sont les directions (non orientées). L’application p� : E/Rp → R ∪ {∞} associe à chaque direction sa pente. 3 2) Soit n ∈ N\{0}. Rappelons que, pour tout entier x ∈ Z, il existe un unique couple d’entiers (q, r) tels que x = qn + r et 0 ≤ r ≤ n − 1. Les nombres q et r sont respectivement le quotient et le reste dans la division euclidienne de x par n. On dit que deux entiers x et y sont ”congrus modulo n” s’ils ont le même reste dans la division par n. La relation de congruence modulo n est évidemment une relation d’équivalence. Il y a n classes d’équivalence (autant que de restes possibles dans la division par n) et l’ensemble quotient est habituellement noté Z/nZ (nous verrons bientôt pourquoi). Soit U = {z ∈ C/ |z| = 1} et soit f : Z → U l’application définie par f (x) = e 2ixπ n On voit que f (x) = f (y) si et seulement si x et y sont congrus modulo n. On a donc une application injective f� : Z/nZ → U telle que f = f� ◦ Cl. 4 2. GROUPES 2.1 Définitions. Généralités. Définition : Un groupe est la donnée d’un couple (G, �) où G est un ensemble et �:G×G→G est une loi de composition qui vérifie les propriétés suivantes : 1) Il existe un élément e de G tel que, pour tout x ∈ G, x�e=e�x=x (on dit que e est un élément neutre) 2) Quels que soient les éléments x, y, z de G, (x � y) � z = x � (y � z) (on dit que la loi de composition est associative) 3) Pour tout élément x de G, il existe un élément x� de G tel que x � x� = x� � x = e. (On dit que x� est un inverse pour x) On dit que deux éléments x et y de G, commutent si x � y = y � x. On dit que le groupe G est abélien (ou commutatif ) si tous les éléments de G commutent deux à deux. Remarque : Si (G, �) est un groupe, alors l’ensemble G n’est pas vide puisqu’il doit contenir un élément neutre. Proposition : Soit (G, �) un groupe. Alors : 1) L’élément neutre est unique . 2) Tout élément de G possède un unique inverse. Démonstration : 1) Soit e et ε des éléments neutres. Alors ε = e � ε = e. 2) Soit x� et x�� des inverses de x. Alors x� = x� � e = x� � (x � x�� ) = (x� � x) � x�� = e � x�� = x�� . Notations : Lorsqu’aucune ambigüité n’est possible sur la définition de la loi de composition, on se contentera en général de dire “soit G un groupe ” . Par la suite, on adoptera souvent la notation “multiplicative” c’est-à-dire que l’on notera x · y ou même simplement xy au lien de x � y. L’inverse de l’élément x sera noté x−1 . 5 Lorsqu’un groupe est abélien, on utilisera fréquemment (mais pas toujours !) la notation “additive” : la loi de composition sera notée +, l’élément neutre sera noté 0 et l’inverse de x sera noté −x et appelé “opposé de x ”. Lors que G est un ensemble fini, on dit que le groupe (G, �) est fini. Le cardinal de G est appelé l’ordre de G. On le note indifféremment |G| ou card(G) ou #G. Exemples : 1) (Z, +), (Q, +), (R, +), (C, +), (]0, +∞[, )×) sont des groupes abéliens. 2) G = {e} est un groupe abélien (parfois appelé : groupe trivial). 3) Pour tout entier naturel n ≥ 1, (Z/nZ, +) est un groupe abélien. 4) [Voir le §2.5 ci-dessous] Pour tout n ≥ 1, le groupe multiplicatif ((Z/nZ)∗ , ×) est un groupe abélien. � � a b 5) M2 (R) = { /a, b, c, d ∈ R} est un groupe abélien pour l’addition c d des matrices. � � a b 6) Gl2 (R) = { /a, b, c, d ∈ R et ad − bc �= 0} est un groupe pour la c d multiplication des matrices. (Ce groupe n’est pas abélien). 7) O2 (R) = {M ∈ M2 (R)/t M M = id} est un groupe pour la multiplication des matrices. 8) Soit X un ensemble. Notons Sym(X) l’ensemble des bijections de X sur lui-même. Alors Sym(X) est un groupe pour la composition. Il n’est pas abélien si card(X) ≥ 3. 9) Soit H = {±1, ±i, ±j, ±k}. On pose ij = k, jk = i, ki = j, i2 = j 2 = 2 k = −1. Ces relations définissent sur H une loi de groupe. H est un groupe non abélien à 8 éléments, le groupe des quaternions de Hamilton. 10) L’ensemble des isométries du plan affine est un groupe (non abélien) pour la composition. 11) L’ensemble des homographies du plan complexe est un groupe pour la composition. 12) Soit n ≥ 1 un entier naturel. Un (C) = {z ∈ C/z n = 1} est un groupe abélien pour la multiplication. 13) Voir le §2.5 pour d’autres types de groupes. Exercice : On munit R\{1} de la loi � définie par x � y = x + y − xy. Montrer que c’est un groupe abélien. Produit de groupes : Soit (G1 , �1 ) et (G2 , �2 ) deux groupes. Ou peut munir le produit cartésien G1 × G2 de l’opération naturelle (x1 , x2 ) � (y1 , y2 ) = (x1 �1 y1 , x2 �2 y2 ). Il est facile de vérifier que, pour cette nouvelle opération, G1 × G2 est un groupe dont l’élément neutre est (eG1 , eG2 ). 6 Le procédé se généralise évidemment à un nombre quelconque de groupes. 2.2 Sous-groupes : Définition : Soit (G, �) un groupe et H un sous-ensemble de G. On dit que H est un sous-groupe de G si : 1) e ∈ H. 2) ∀x ∈ H, ∀y ∈ H, x � y ∈ H. 3) ∀x ∈ H, x−1 ∈ H. Remarques : Il est clair que tout sous-groupe de (G, �) est lui-même un groupe. Tout sous-groupe d’un groupe abélien est abélien. Attention : R∗ n’est pas un sous-groupe de R (pourquoi ? ) Proposition : Soit (G, �) un groupe et (Hi )i∈I une famille (éventuellement infinie) de sousgroupes de G. Alors ∩i∈I Hi est un sous-groupe de G. Démonstration : exercice. Proposition : Soit G un groupe et H ⊂ G un sous-ensemble non vide de G. Alors H est un sous-groupe de G si et seulement si ∀x ∈ H, ∀y ∈ H, xy −1 ∈ H. Démonstration : La condition est évidemment nécessaire. Réciproquement, soit H une partie non vide de G possédant la propriété de l’énoncé. Comme H n’est pas vide, il contient au moins un élément x et donc e = xx−1 appartient à H. Maintenant, pour tout y ∈ H, ey −1 = y −1 ∈ H. Soit enfin x et y deux éléments de H, alors y −1 ∈ H et donc xy = x(y −1 )−1 ∈ H. Les trois conditions de la définition sont ainsi vérifiées. QED. Exemples : 1) Pour tout entier n, l’ensemble nZ = {nz/z ∈ Z} est un sous-groupe de Z. 2) Pour tout nombre réel � � a, aZ = {az/z ∈ Z} est un sous-groupe de R. a b 3) Sl2 (R) = { /a, b, c, d ∈ R et ad − bc = 1} est un sous-groupe de c d Gl2 (R). 7 Exercice : i) Soit H un sous-groupe du groupe additif Z. Montrer qu’il existe un entier n tel que H = nZ. ii) Soient a et b deux entiers non tous deux nuls, m leur ppcm et d leur pgcd. Montrer que aZ∩bZ = mZ, et que aZ+bZ = dZ. En particulier, il existe des entiers u, v tels que d = au + bv (relation de Bézout). Remarque : La réunion de deux sous-groupes n’est pas en général un sous-groupe. Exercice : Enoncer une condition nécessaire et suffisante pour que la réunion de deux sous-groupes soit un sous-groupe. Définition : Soit G un groupe et X ⊂ G un sous-ensemble non vide. On note < X > l’intersection de tous les sous-groupes de G qui contiennent X. On l’appelle sous-groupe de G engendré par la partie X . Remarque : < X > est bien un sous-groupe de G d’après ce qui précède. C’est le plus petit sous-groupe de G qui contient X au sens suivant : si H est un sous-groupe de G qui contient X, alors < X >⊂ H. Proposition : Soit G un groupe et X une partie de G. Alors < X > est l’ensemble des produits x1 ...xn , où n ∈ N et, pour tout i ∈ {1, ..., n}, xi ∈ X ou x−1 ∈ X. i Démonstration : Soit H = {x1 ...xn /xi ∈ X ou x−1 ∈ X}.Il est clair que H est un sous-groupe i de G. Par conséquent, < X >⊂ H. D’autre part, soit K un sous-groupe de G qui contient X. Alors K contient tous les produits x1 ...xn tels que xi ∈ X ou x−1 ∈ X, c’est-à-dire que K contient i H. QED. 2.3. Groupes cycliques. Ordre d’un élément. (Voir aussi le §3.3.) Définition : Soit G un groupe. On dit que G est cyclique (ou monogène ) s’il existe x ∈ G tel que G =< {x} >. Dans ce cas, on dit que x est un générateur de G. Notation : Par abus de langage, on note < x > au lieu de < {x} >. Exemples : 1) Z =< 1 > est un groupe cyclique. 8 2) Si n ∈ N, Z/nZ =<Cl(1) > est un groupe cyclique. 3) Soit X = {1, 2, 3}, alors G = Sym(X) n’est pas cyclique. 4) U6 = {z ∈ C/z 6 = 1} =< eiπ/3 >=< e5π/6 > est cyclique et possède deux générateurs. Définition : Soient (G, �) un groupe et x un élément de G. Pour tout k ∈ Z on définit l’élément xk par récurrence de la façon suivante. Si k = 0, alors xk = eG . Si k ≥ 1, alors xk = xk−1 � x. Si k < 0, alors xk = (x−1 )−k . S’il existe un entier naturel non nul k tel que xk = eG , on dit que x est d’ordre fini. Dans ce cas, on appelle ordre de x le plus petit entier naturel non nul o(x) tel que xo(x) = eG . Si x n’est pas d’ordre fini, on dit (par abus de langage) qu’il est d’ordre infini . Proposition : Soient G un groupe et x ∈ G un élément d’ordre fini n. i) Soit s ∈ Z tel que xs = e. Alors s est un multiple de n; ii) L’ordre | < x > | du sous-groupe engendré par x est égal à n. Démonstration : i) On effectue la division euclidienne de s par n : il existe des entiers q et r tels que s = qn + r et 0 ≤ r < n. Alors e = xs = xqn+r = (xn )q xr = xr . Comme n est le plus petit entier naturel non nul tel que xn = e et que 0 ≤ r < n, on a nécessairement r = 0. QED. ii) Comme x−1 = xn−1 , les éléments de < x > sont tous de la forme xi , i ∈ Z≥0 . En effectuant la division euclidienne de i par n, on voit qu’ils sont tous de la forme xi , 0 ≤ i ≤ n − 1. On déduit de (i) que ces n éléments sont tous distincts (xi = xj ⇒ xj−i = e ⇒ n|(j − i) ⇒ j − i = 0, car |j − i| ≤ n − 1). Donc < x > admet n éléments. (NB : si x est d’ordre infini, < x > est aussi d’ordre infini.) 2.4 Ensemble quotient d’un groupe par un sous-groupe. Soit G un groupe et H un sous-groupe de G. Si g ∈ G ,on note gH l’ensemble {gh/h ∈ H} et on définit sur G la relation gRg � ⇐⇒ gH = g � H, Exercice : Montrer que gRg � ⇐⇒ g ∈ g � H ⇐⇒ g � ∈ gH ⇐⇒ g �−1 g ∈ H ⇐⇒ g −1 g � ∈ H. On vérifie immédiatement que R est une relation d’équivalence. Les classes d’équivalence sont appelées classes à gauche modulo H . Elles forment une 9 partition de G. L’ensemble G/R des classes d’équivalence est habituellement noté G/H . On peut de même définir les classes à droite à l’aide des ensembles Hg = {hg/h ∈ H}. L’ensemble des classes à droite est noté H\G. Exemple : Si G est le groupe (Z, +) et H = nZ, xRy ⇐⇒ x − y ∈ nZ ⇐⇒ x ≡ y (mod n). Proposition : Soit G un groupe fini et H un sous-groupe de G. Alors les classes à gauche (respectivement les classes à droite) ont toutes le même cardinal, qui est le cardinal de H. Démonstration : Soit g ∈ G ,alors l’application ϕ : H → gH définie par ϕ(h) = gh est une bijection de H sur gH. La bijection réciproque est l’application ψ : gH → H définie par ψ(k) = g −1 k. Les deux ensembles H et gH ont donc le même cardinal . QED. Corollaire (théorème de Lagrange ) : Si G est un groupe fini et H un sous-groupe de G, alors l’ordre de H divise l’ordre de G. Démonstration : |G| = |H| · card(G/H). QED. Définition : Le nombre card(G/H) s’appelle l’indice de H dans G. On le note [G : H]. Remarque : Pour tout x ∈ G, on a x ∈ gH ⇐⇒ x−1 ∈ Hg. Pour chaque g ∈ G, l’application x �−→ x−1 établit donc une bijection entre gH et Hg. En particulier, card(G/H) = card(H\G). Corollaire : Dans un groupe fini, l’ordre de tout élément divise l’ordre du groupe. Démonstration : Soit g ∈ G. Il suffit d’appliquer le théorème de Lagrange au sous-groupe H =< g >. QED. 10 2.5 Groupe des éléments inversibles d’un anneau. Corps finis. Anneaux Un anneau est un ensemble A muni de deux lois de composition notées + et ×, satisfaisant les axiomes suivants : - A est un groupe commutatif pour la loi +. On note 0 son élément neutre. - la loi × est associative : ∀a, b, c ∈ A, (a × b) × c = a × (b × c). - (distributivité) : ∀a, b, c ∈ A, a×(b+c) = a×b+a×c, (b+c)×a = b×a+c×a. On laisse au lecteur le soin de définir les notions de sous-anneau, de produit d’anneaux et d’homomorphismes d’anneaux en s’inspirant de leurs analogues en théorie des groupes. On dit que A est un anneau commutatif si la loi × est commutative. On dit que A est un anneau unitaire s’il existe un élément neutre (noté 1) pour la multiplication. Nous supposerons désormais que A est unitaire. On dit que l’anneau (unitaire) A est un corps si A \ {0} est un groupe pour la multiplication. Plus généralement, un élément a de A est dit inversible s’il existe b ∈ A tel que ab = ba = 1. L’ensemble des éléments inversibles de A est noté A∗ . Ainsi, un corps est un anneau tel que A∗ = A \ {0}. Mais en général, A∗ est beaucoup plus petit que A \ {0}; voir les exemples ci-dessous. Par définition, la loi × munit A∗ d’une structure de groupe, appelé groupe (multiplicatif ) des éléments inversibles de l’anneau A. Exemples 1) Si A est l’anneau Z, Z∗ = {1, −1} est un groupe d’ordre 2. 2) Si A est l’anneau Mn (R) des matrices réelles carrées d’ordre n, le groupe A∗ s’identifie au groupe Gln (R) = {M ∈ Mn (R), det(M ) ∈ R∗ }. Pour n > 1, cet anneau et ce groupe ne sont pas commutatifs. 3) Soit K un corps commutatif, et A = K[X] l’anneau des polynômes en une variable à coefficients dans K. Montrer que P (X) ∈ A∗ si et seulement si P est un polynôme non nul de degré 0 (c-à-d. constant). Exercice i) Montrer que l’ensemble A = Mn (Z) des matrices carrées d’ordre n à coefficients dans Z est un sous-anneau (unitaire) de l’anneau unitaire Mn (R). ii) Soit M ∈ A = Mn (Z). Montrer que M est inversible dans A si et seulement si det(M ) = ±1. On rappelle que la comatrice M � de M (calculée à l’aide des cofacteurs de M ) vérifie M � M = M M � = det(M )In . Ainsi GLn (Z) := (Mn (Z))∗ = {M ∈ Mn (Z), det(M ) ∈ Z∗ }. Anneaux quotients Soit A un anneau commutatif. Un idéal de A est un sous-groupe I de A tel que ∀x ∈ A, x.I ⊂ I. Le groupe quotient A/I est alors naturellement muni d’une structure d’anneau, (bien) définie par la loi (a + I) × (b + I) = (a × b) + I, qu’on écrit : Cl(a)Cl(b) := Cl(ab). 11 On dit que I est principal s’il existe a ∈ A tel que I = a.A, et que A est un anneau principal si tous ses idéaux sont principaux. Un sous-groupe du groupe additif Z est automatiquement un idéal de l’anneau Z. De la description de ses sous-groupes, on déduit donc que Z est un anneau principal. De même, la division euclidienne dans l’anneau des polynômes K[X] montre que K[X] est un anneau principal. Pour tout entier n ≥ 2, on peut ainsi parler de l’anneau A = Z/nZ, et donc du groupe (Z/nZ)∗ de ses éléments inversibles Théorème : soient n un entier ≥ 2, et x̄ = x + nZ un élément de Z/nZ. Les propriétés suivantes sont équivalentes. i) x̄ ∈ (Z/nZ)∗ ; ii) x̄ est un générateur du groupe additif Z/nZ iii) x et n sont premiers entre eux; iv) L’application fx̄ : Z/nZ → Z/nZ : ȳ �→ x̄ȳ est un automorphisme du groupe additif Z/nZ. Démonstration : exercice (traduire (iii) par une relation de Bezout). Pour (iv), noter que pour tout x̄, fx̄ est un endomorphisme du groupe additif Z/nZ (voir le §3 pour les définitions). Il s’agit donc seulement de voir que (i) ⇔ fx̄ est bijective. Exercice Après avoir lu les définitions du §3, montrer que l’application f : x̄ �→ fx̄ définit un isomorphisme du groupe multiplicatif (Z/nZ)∗ sur le groupe Aut(Z/nZ) des automorphismes du groupe additif Z/nZ. Fonction indicatrice d’Euler : c’est la fonction φ qui associe à tout entier n ≥ 2 l’ordre φ(n) du groupe multiplicatif (Z/nZ)∗ (prolongée par la convention φ(1) = 1). C’est donc aussi le nombre d’entiers x compris entre 1 et n et premiers à n. Ainsi, si n est un nombre premier p, φ(p) = p − 1. Si n est une puissance pk de p, φ(pk ) = (p − 1)pk−1 . Pour aller plus loin, on invoque le théorème (ou lemme) chinois (voir le §3.1, dont nous utilisons les notations), dans la version “anneaux” suivante. Lemme chinois Soient a et b deux entiers ≥ 2 premiers entre eux. L’application f : Z → (Z/aZ) × (Z/bZ) : u �→ (Cla (u), Clb (u)) est un homomorphisme d’anneaux surjectif, de noyau abZ. Par conséquent, f définit par passage au quotient un isomorphisme d’anneaux f˜ : Z/abZ � (Z/aZ) × (Z/bZ). Mais alors, f˜ induit un isomorphisme de groupes entre les groupes des éléments inversibles de ces anneaux. Ainsi, (a, b) = 1 ⇒ (Z/abZ)∗ � (Z/aZ)∗ × (Z/bZ)∗ . Les ordres de ces groupes sont donc égaux : (a, b) = 1 ⇒ φ(ab) = φ(a)φ(b). 12 Exemples : (Z/2Z)∗ est le groupe trivial, d’ordre φ(2) = 1 ; (Z/3Z)∗ = {1̄, 2̄} et (Z/4Z)∗ = {1̄, 3̄} sont tous deux d’ordre 2 = φ(3) = φ(4) ; φ(5) = 4; (Z/12Z)∗ �(Z/4Z)∗ ×(Z/3Z)∗ est d’ordre φ(12) = 4, etc. Plus généralement, montrer que φ(n) = nΠp|n (1− p1 ), où p parcourt l’ensemble des nombres premiers divisant n. Les corps Fp = Z/pZ Lorsque n = p est un nombre premier, le théorème précédent montre que tous les éléments non nuls de l’anneau Z/pZ sont inversibles. Donc Z/pZ est un corps commutatif, noté Fp , à p éléments, dont le groupe multiplicatif F∗p = Fp \0 est d’ordre p − 1. (Remarque : pour k > 1, l’anneau Z/pk Z n’est pas un corps. On montre néanmoins qu’il existe un corps commutatif, noté Fpk , admettant pk éléments, et que tous les corps finis sont de ce type.) Theorème Soit K un corps (commutatif ) fini. Alors, le groupe multiplicatif K ∗ de K est cyclique. Démonstration : On verra au §5 que si x, y sont deux éléments d’un groupe commutatif G d’ordres respectifs n, m, alors G admet un élément d’ordre égal au ppcm r de n et m. Soit alors N l’ordre du groupe (fini) G := K ∗ , et n le plus grand des ordres des éléments de G. Pour tout élément x de G, d’ordre disons m, il existe donc un élément de G d’ordre le ppcm r de n et m. Par définition de n, on a r ≤ n, ce qui force r = n. Par conséquent, m divise n : l’ordre de tout élément de G divise n. En particulier, l’équation X n − 1 = 0 admet dans le corps K au moins |G| = N racines. Comme elle en a au plus n = deg(X n − 1), on a N ≤ n, d’où n = N puisque n|N . Ainsi, G admet un élément d’ordre n = |G|, et est bien un groupe cyclique. Application Soit p un nombre premier. D’après le théorème, le groupe multiplicatif (Z/pZ)∗ est cyclique, d’ordre p−1, donc isomorphe au groupe additif Z/(p−1)Z (voir le §3.3). Il a donc φ(p − 1) générateurs. Par exemple, 2̄ et 3̄ = 2̄−1 sont les générateur de (Z/5Z)∗ puisque 4 est le plus petit entier n > 0 tel que 2n ≡ 1 (mod 5). En revanche, 4̄, d’ordre 2 (42 ≡ 1 (mod 5)) n’engendre pas (Z/5Z)∗ . En exercice, on cherchera les φ(7 − 1) = 2 générateurs du groupe multiplicatif (Z/7Z)∗ . Pour de grandes valeurs de p, il n’est pas facile de trouver un générateur du groupe cyclique (Z/pZ)∗ . 13 3. HOMOMORPHISMES. GROUPES QUOTIENTS. 3.1 Homomorphismes de groupes. Définition : Soit (G, �) et (H, ⊗) deux groupes. Soit f : G → H une application. On dit que f est un homomorphisme (ou un morphisme) de groupes si ∀g ∈ G, ∀g � ∈ G, f (g � g � ) = f (g) ⊗ f (g � ). On note Hom(G, H) l’ensemble des homomorphismes de G dans H. Si G = H, on dit que f est un endomorphisme de G. Si f ∈ Hom(G, H) est bijective, on dit que c’est un isomorphisme; si de plus G = H, on dit que c’est un automorphisme. On note Aut(G) l’ensemble des automorphismes de G. Proposition : Soit G et H deux groupes et f ∈ Hom(G, H). Alors : 1) f (eG ) = eH . 2) ∀g ∈ G, f (g −1 ) = f (g)−1 . 3) f (G) est un sous-groupe de H. Démonstration : 1) f (eG ) = f (eG eG ) = f (eG )f (eG ), d’où f (eG ) = eH . 2) ∀g ∈ G, f (g)f (g −1 ) = f (gg −1 ) = f (eG ) = eH . De même, f (g −1 )f (g) = −1 f (g g) = f (eG ) = eH . Par conséquent, f (g −1 ) est l’inverse de f (g). 3) eH ∈ f (G) qui n’est donc pas vide. D’autre part, si h = f (g) et h� = f (g � ), alors hh� = f (gg � ) ∈ f (G). Enfin, si h = f (g), alors h−1 = f (g −1 ) ∈ f (G). QED Définition : Soit G et H deux groupes et f ∈ Hom(G, H). On appelle noyau de f l’ensemble Ker(f ) = {g ∈ G/f (g) = eH }. Exemples : 1) L’application Cln : Z → Z/nZ, qui associe à tout entier sa classe de congruence modulo n, est un homomorphisme de noyau nZ. 2) Si a et b sont deux entiers naturels supérieurs ou égaux à 2, l’application Z u → �−→ Z/aZ × Z/bZ (Cla (u), Clb (u)) est un homomorphisme de groupes de noyau µZ, où µ est le ppcm de a et b. Il est surjectif si et seulement si a et b sont premiers entre eux (théorème chinois; voir aussi le §2.5). 14 3) Soit G un groupe et g ∈ G. Soit σg l’application de G dans G définie par ∀h ∈ G, σg (h) = ghg −1 . Les σg sont des automorphismes de G, appelés les ”automorphismes intérieurs”. L’élément ghg −1 est appelé le conjugué de h par g. Exercice : On note Int(G) l’ensemble des homomorphismes intérieurs de G. Montrer que c’est un groupe pour la composition, et que l’application g �−→ σg est un homomorphisme de G dans Int(G). Définition : Soit G un groupe et K un sous-groupe de G. On dit que K est distingué dans G si : ∀g ∈ G, ∀h ∈ K, ghg −1 ∈ K. Notations : Au lieu de l’expression ”∀g ∈ G, ∀h ∈ K, ghg −1 ∈ K”, on écrit plus simplement ”gKg −1 ⊂ K”. Si K est distingué dans G, on écrit K � G. Remarque : Si K est distingué dans G, alors ∀g ∈ G, gKg −1 = K. En effet, ∀h ∈ K, h = −1 g(g hg)g −1 ∈ gKg −1 . Exemples : 1) Soit G un groupe. Alors {eG } � G et G � G. 2) Si G est abélien, alors tous ses sous-groupes sont distingués. 3) Soit G un groupe et H < G. Soit NG (H) = {g ∈ G/gHg −1 = H}. Alors NG (H) � G. C’est le plus grand sous-groupe de G dans lequel H est distingué. Attention : Le fait pour un sous-groupe d’être distingué est une notion relative. Si G est un groupe, H un sous-groupe de G et K un sous-groupe de H, alors il est possible que K soit distingué dans H mais ne soit pas distingué dans G. Exercice : donner des exemples. Proposition : Soit G et H deux groupes et f ∈ Hom(G, H). Alors Ker(f ) est un sousgroupe distingué de G. Démonstration : La démonstration est laissée en exercice. 15 Exemple : Soit G un groupe. On appelle centre de G l’ensemble Z(G) = {g ∈ G/∀h ∈ G, gh = hg} C’est le noyau de l’homomorphisme g �−→ σg de G dans Int(G). En particulier, Z(G) � G. Proposition : Soit G et H deux groupes et f ∈ Hom(G, H). Alors f est injectif si et seulement si Ker(f ) = {eG }. Démonstration : La démonstration est laissée en exercice. Exercice : Soit G et H deux groupes et f ∈ Hom(G, H). Soit K un sous-groupe de G. Monter que f (K) est un sous-groupe de H. Définition : Soit G un groupe et K un sous-groupe de G. On dit que K est caractéristique dans G si : ∀f ∈ Aut ∈ (G), f (g) ∈ K. Exemple : Soit G un groupe, g et h des éléments de G. On appelle commutateur de g et h l’élément [g, h] = ghg −1 h−1 . Le sous-groupe de G engendré par les commutateurs est appelé groupe dérivé de G et noté D(G). Montrer que c’est un sous-groupe caractéristique. Composition des homomorphismes : Soit G, H, K trois groupes, f ∈ Hom(G, H), g ∈ Hom(H, K). On voit immédiatement que g ◦ f est un homomorphisme de G dans K. Proposition : Soit G et H deux groupes et f ∈ Hom(G, H). Si f est bijectif, alors son application réciproque f −1 est un homomorphisme. En particulier, Aut(G) est un groupe pour la composition des automorphismes. Démonstration : Soit y1 et y2 deux éléments de H. Il existe des éléments x1 et x2 de G tels que y1 = f (x1 ) et y2 = f (x2 ). f −1 (y1 y2 ) = f −1 [f (x1 )f (x2 )] = f −1 [f (x1 x2 )] = x1 x2 = f −1 (y1 )f −1 (y2 ). QED 16 Exercice i) Soit G un groupe. Montrer que le groupe Int(G) des automorphismes intérieurs de G est un sous-groupe distingué du groupe Aut(G). ii) On suppose que G = Fp ⊕ Fp . Montrer que Aut(G) s’identifie au groupe multiplicatif Gl2 (Fp ) des matrices carrées M d’ordre 2 à coefficients dans le corps Fp telles que det(M ) �= 0. 3.2 Quotient d’ un groupe par un sous-groupe distingué. Soit G un groupe et H < G un sous-groupe de G. On s’intéresse à la question suivante : est-il possible de munir le quotient G/H d’une structure naturelle de groupe ? Commençons par examiner un exemple : Prenons G = Z et H = nZ. On a vu qu’alors G/H = Z/nZ est le quotient de G par la relation d’équivalence : xRx� ⇐⇒ x − x� ∈ nZ. Les classes d’équivalence sont les ensembles Cl(k) = k + nZ. Soit x, x� , y, y � des entiers et supposons que xRx� et yRy � . On vérifie alors aisément que (x + y)R(x� + y � ). On peut donc définir sans ambiguité la somme de Cl(x) et Cl(y) ∈ Z/nZ par la formule : Cl(x) ⊕ Cl(y) := Cl(x + y). La loi ⊕ munit Z/nZ d’une structure de groupe, pour laquelle l’application Cl : Z → Z/nZ est un homomorphisme de groupes. On peut généraliser cette situation de la façon suivante. Définition : Soit G un groupe muni d’une relation d’équivalence R. On dit que R est compatible avec la loi de G si xRx� et yRy � entraı̂nent (xy)R(x� y � ). On a alors le théorème suivant : Théorème : Soit G un groupe et H < G un sous-groupe. Il y a équivalence entre les quatre propositions suivantes : i) H � G. ii) ∀g ∈ G, gH = Hg. iii) La relation gRg � ⇐⇒ gH = g � H est compatible avec la loi de G. iv) L’ensemble G/H possède une structure naturelle de groupe, de sorte que l’application Cl : G → G/H g �−→ gH est un homomorphisme de groupes. Démonstration : 17 i)=⇒ii) H � G ⇐⇒ ∀g ∈ G, gHg −1 = H ⇐⇒ ∀g ∈ G, gH = Hg. ii)=⇒iii) Supposons que gRg � et que kRk � . Alors gH = g � H et kH = k � H d’où (gk)H = g(kH) = g(k � H) = g(Hk � ) = (gH)k � = (g � H)k � = g � (Hk � ) = g � (k � H) = (g � k � )H. Donc (gk)R(g � k � ). iii)=⇒iv) Supposons qu’il existe une opération � sur G/H telle que l’application Cl soit un homomorphisme. Nécessairement, pour tous g, k ∈ G, Cl(gk) = Cl(g) � Cl(k), ou encore (gH)�(kH) = (gk)H. Cette opération est bien définie puisque, par hypothèse, si gH = g � H et kH = k � H, alors (gk)H = (g � k � )H. Cette opération définit bien une structure de groupe. L’élément neutre est H et l’inverse de gH est g −1 H. iv)=⇒i) H est le noyau de l’homomorphisme Cl : G → G/H. Il est donc distingué dans G. QED Un contre-exemple : On considère le groupe D6 des isométries d’un triangle équilatéral ABC. Notons r la rotation d’angle 2π/3 dont le centre est le centre du triangle. Notons sA (respectivement sB , respectivement sC ) la symétrie orthogonale dont l’axe est la hauteur passant par A (respectivement par B, respectivement par C). Alors D6 = {id, r, r2 , sA , sB , sC } avec la table de composition ◦ id r r2 sA sB sC id id r r2 sA sB sC r r r2 id sB sC sA r2 r2 id r sC sA sB sA sA sC sB id r2 r sB sB sA sC r id r2 sC sC sB sA r2 r id Soit H = {id, sA }. C’est un sous-groupe de D6 .et le quotient D6 /H comporte trois éléments : H = sB H = sC H = sA H = {id, sA } {sB , r2 } = r2 H {sC , r2 } = rH Si D6 /H possèdait une loi de groupe � telle que l’application Cl : D6 → D6 /H soit un homomorphisme, alors on aurait : sB H � sC H = (sB ◦ sC )H = rH. Comme sB H = r2 H, on aurait aussi : sB H � sC H = r2 H � sC H = (r2 ◦ sC )H = sA H = H. 18 C’est bien sûr impossible puisque H �= rH. On vérifie facilement que H n’est pas distingué dans D6 . Théorème de factorisation : Soit G un groupe et H � G un sous-groupe distingué. Pour tout groupe L et pour tout ϕ ∈ Hom(G, L) tel que ϕ(H) = {eL }, il existe un unique homomorphisme ϕ̃ ∈ Hom(G/H, L) tel que ϕ̃ ◦ Cl = ϕ. Démonstration : Soit x ∈ G/H. Il existe a ∈ G tel que x = Cl(a). Si b ∈ G est un autre représentant de x, alors ab−1 ∈ H et ϕ(a) = ϕ(b). Si on pose ϕ̃(x) = ϕ(a), on obtient donc une application lui définie de G/H dans L. Soit y = Cl(c). Alors ϕ̃(xy) = ϕ̃(Cl(a)Cl(c)) = ϕ̃(Cl(ac)) = ϕ(ac) = ϕ(a)ϕ(c) = ϕ̃(x)ϕ̃(y). L’application ϕ̃ est donc un homomorphisme. Supposons qu’il existe ψ ∈ Hom(G/H, L) tel que ψ ◦ Cl = ϕ̃ ◦ Cl. Alors, pour tout x = Cl(a), ϕ̃(x) = .ψ ◦ Cl(a) = ψ(x). D’où l’unicité. QED ϕ. Corollaire : Soit ϕ ∈ Hom(G, L). Alors 1) il existe un unique homomorphisme ϕ̃ ∈ G/Ker(ϕ) → L tel que ϕ̃ ◦ Cl = 2) ϕ̃ est injectif. 3) Si de plus ϕ est surjectif, ϕ̃ aussi. Démonstration : 1) Résulte du théorème. 2)Supposons que ϕ̃(x) = ϕ̃(y). Si x = .. et y = Cl(b) alors ab−1 ∈ Ker(ϕ) d’où Cl(a) = Cl(b), c’est-à-dire x = y. 3)Soit z ∈ L. Il existe a∈ G tel que z = ϕ(a). D’où ϕ̃ ◦ Cl(a) = z. QED 3.3. Sous-groupes d’un groupe quotient. Cas des groupes cycliques Théorème : Soit G un groupe et H � G un sous-groupe distingué. 1) Il existe une bijection entre l’ensemble des sous-groupes de G/H et l’ensemble des sous-groupes de G qui contiennent H. 2) Il existe une bijection entre l’ensemble des sous-groupes distingués de G/H et l’ensemble des sous-groupes distingués de G qui contiennent H. Démonstration : Soit K un sous-groupe de G/H. Soit L = {g ∈ G/gH ∈ K}. C’est un sous-groupe de G. En effet, comme K est un sous-groupe de G/H, il contient 19 l’élément neutre H = eH de G/H, donc e ∈ L. De plus, si gH ∈ K et g � H ∈ K, alors (gH)(g � H) = gg � H ∈ K, donc gg � ∈ L. Enfin, si gH ∈ K , alors (gH)−1 = g −1 H ∈ K, et donc g −1 ∈ L. Supposons de plus que K est distingué dans G/H. Soit gH ∈ K et xH ∈ G/H. Alors(xH)(gH)(xH)−1 ∈ K. Or (xH)(gH)(xH)−1 = (xH)(gH)(x−1 H) = (xgx−1 )H, d’où xgx−1 ∈ L . Réciproquement, soit Q un sous-groupe de G contenant H. Comme H est distingué dans G, a fortiori il est distingué dans Q. Soit alors S = Q/H = {gH/g ∈ Q}. Alors S est un sous-groupe de G/H. En effet, c’est l’image de Q par l’homomorphisme Cl : G → G/H. Supposons de plus que Q est distingué dans G. Soit gH ∈ S et xH ∈ G/H. Alors xgx−1 ∈ Q, d’où (xH)(gH)(x−1 H) ∈ S. Par conséquent, S � G/H. Les applications K �−→L et Q �−→ Q/H sont clairement inverses l’une de l’autre. QED Exemple : Les sous-groupes de Z/nZ sont en bijection avec les sous-groupes de Z qui contiennent nZ. Soit H un sous-groupe de Z. Il existe m ∈ N tel que H = mZ et nZ ⊂mZ si et seulement si m divise n. On en déduit que les sous-groupes de Z/nZ sont de la forme mZ/nZ, où m est un diviseur de n. Ainsi, les sous-groupes de Z/6Z sont Z/6Z, {0}, {0, 3} et {0, 2, 4}. Groupes cycliques. Rappel : Un groupe G est dit cyclique s’il existe un élément a ∈ G tel que G =< {a} >= {an /n ∈ Z}. (On note alors G =< a > an lieu de G =< {a} >). Exemples : Z = < 1 >=< −1 >. Z/nZ =< Cl(1) >=< Cl(n − 1) > (=< Cl(µ) > si p gcd(n, µ) = 1). Un = {z ∈ C/z n = 1}. Terminologie : Les groupes cycliques infinis sont souvent appelés monogènes, l’appellation groupes cycliques étant alors réservée à ceux qui sont finis. Remarque : il est évident que tout groupe cyclique est abélien. Théorème : Tout groupe cyclique est isomorphe, soit à Z, soit à Z/nZ pour un n ∈ N \ {0}. 20 Démonstration : Soit G =< a > un groupe cyclique. On considère l’application ϕ:Z→G définie par, ∀n ∈ Z, ϕ(n) = an . C’est un homomorphisme de groupes qui est surjectif. Si ϕ est injectif, alors c’est un isomorphisme. Sinon, le noyau de ϕ est un sous-groupe de Z non réduit à {0} : il est donc égal à nZnpour un entier naturel n �= 0. Dans ce cas, d’après le théorème de factorisation, G est isomorphe à Z/nZ. QED Théorème 1) Tout sous-groupe d’un groupe cyclique est cyclique. 2) Si G =< a > est un groupe cyclique infini, les sous-groupes de G distincts de {eG } sont infinis, donc isomorphes à Z. 3) Si G =< a > est un groupe cyclique fini d’ordre s alors, pour tout diviseur t de s, il existe exactement un sous-groupe de G d’ordre t. Démonstration : Soit G un groupe. Si G est isomorphe à Z, ses sous-groupes sont de la forme nZ =< n >, donc cycliques. Si G est isomorphe à Z/sZ alors, d’après l’exemple plus haut,ses sous-groupes sont isomorphes à mZ/sZ, où m est un diviseur de s. De tels groupes sont cycliques. En fait, l’application mZ/sZ → Z/( s )Z m définie par f (mu + sZ) = u + m s Z est un isomorphisme de groupes. s Si G =< a > est d’ordre s et t est un diviseur de s, alors < a t > est un sousgroupe d’ordre t. Réciproquement, soit H un sous-groupe d’ordre t de G. Soit p le plus petit entier naturel non nul tel que ap ∈ H. Alors H =< ap >. En effet, si x ∈ H, il existe m ∈ Z tel que x = am . Il existe q ∈ Z et r ∈ Z tels que m = pq+r et 0 ≤ r < p, d’où am = (ap )q ar et ar = am (ap )−q ∈ H. La minimalité de p entraı̂ne alors que r = 0, d’où x ∈< ap >= {e, ap , a2p , ..., a(q−1)p }. On a donc s q = t, tp = s et H =< a t >. s Ainsi, l’application t �−→< a t > est une bijection entre l’ensemble des diviseurs de s et l’ensemble des sous-groupes de G. QED 21